Comptes rendus

Isabelle Brouard-Arends et Marie-Emmanuelle Plagnol-Diéval (dir.) Femmes éducatrices au Siècle des lumières., Collection « Interférences », Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007, 377 p.[Record]

  • Micheline Dumont

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  • Micheline Dumont
    Université de Sherbrooke

Résultat d’un colloque tenu à l’Université de Rennes en juin 2006, l’ouvrage sous la direction de Brouard-Arends et de Plagnol-Diéval fait suite à une autre initiative du même comité éditorial, tenue en 2002, « Lectrices d’Ancien Régime, pratiques, représentations et enjeux », dont les actes ont été publiés chez le même éditeur en 2003. Les 26 articles retenus dans le présent ouvrage proviennent de sept pays mais très majoritairement de France. Cette publication s’inscrit dans un vaste mouvement de recherches en France, où se multiplient, depuis une décennie, les colloques, les séminaires, les activités du groupe « Femmes et histoire » au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), dans une volonté de rendre visibles des gestes, des paroles, des écrits, des préoccupations qui ont échappé aux enquêtes de l’histoire traditionnelle. Cet ouvrage ne propose donc qu’un fragment de toutes les recherches qui ont présentement lieu en France. Il se situe également en dehors d’une perspective plutôt traditionnelle, celle qui accorde aux femmes une place reconnue dans l’histoire de la littérature française, et ce, par leur rôle de salonnière, d’épistolière et de femme de lettres. Dans un espace étroit de liberté, à l’écart de la cour, le salon, les femmes auraient inventé un art de vivre; elles auraient dicté les conversations et contribué à la création de nouvelles formes littéraires, à la définition du goût. L’ouvrage de la chercheuse italienne Benedetta Craveri, L’âge de la conversation, résume bien les différents moments de ce jeu mondain qui se déroulait au sein de l’aristocratie durant l’Ancien Régime. Les intentions de l’ouvrage Femmes éducatrices au Siècle des lumières sont différentes et plus instructives. À l’intersection de l’histoire de l’éducation, de l’histoire de la famille et de l’histoire politique, se pose la question du rôle des femmes dans la transmission des savoirs et de la culture. Si les théoriciens et théoriciennes de la Révolution française ont manifesté tellement de préoccupations éducatives, cette préoccupation n’est cependant pas apparue par génération spontanée. L’éducation/instruction est une question privilégiée par tous les auteurs et auteures associés aux Lumières. Or, pendant plus d’un siècle, les femmes considérées a priori comme des éducatrices naturelles ont proposé elles-mêmes un ensemble d’idées nouvelles sur les objectifs de l’instruction/éducation. C’est l’objectif de cet ouvrage de documenter cette problématique. Au XVIIIe siècle, « s’agitent les consciences féminines, se déploient des prises de parole pour mettre en place une éducation pour tous et pour toutes » (p. 16). Voici quelques questions auxquelles ce livre tente de répondre : « [Ces éducatrices] ont-elles toujours intégré la variable sexe dans leurs pratiques et leurs discours? […] Se sont-elles contentées d’être des relais d’une parole masculine? […] Ont-elles voulu infléchir les grandes orientations pédagogiques de leur temps [p. 17]? » Les réponses, on s’en doute, ne seront pas univoques. La première partie réfléchit sur les partenaires éducatifs à l’époque où ne se pose pas encore en termes politiques l’objectif de l’éducation des filles. Parmi les questions présentées, on note : le débat autour du recours aux gouvernantes pour l’éducation des filles (Bérenguier); le rôle de la séparation d’avec la mère joué par le recours au couvent pour l’éducation des filles (Goodman); les idées de quelques femmes qui ont publié des traités d’éducation (Dousset, Charrad); les projets sur l’éducation des filles qui ont été formulés durant les premières années de la Révolution française (Liris). Un auteur s’inscrit en faux contre Knibiliehler, Badinter, Hufton et Sonnet qui affirment que les mères ne sont pas engagées personnellement dans l’éducation de leurs fils, sur la foi d’un exemple qu’il a documenté dans les archives d’un collège de Lille (Marchand). Il …

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