Comptes rendus

Hélène Belleau et Delphine Lobet, L’amour et l’argent, Guide de survie en 60 questions, Montréal, Les éditions du remue-ménage, 2017, 225 p.[Record]

  • Ruth Rose

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  • Ruth Rose
    Université du Québec à Montréal

Parler de l’argent, c’est plus tabou que le sexe. Les gens considèrent souvent que l’argent « sème la bisbille et apporte la querelle ». L’ouvrage d’Hélène Belleau et de Delphine Lobet veut amener les couples à aborder les difficiles questions liées à l’argent, au partage des ressources et des dépenses (p. 17) : Les auteures s’appuient sur dix années de recherche en sociologie concernant la façon dont les couples gèrent ensemble leurs finances. Quatre enquêtes qualitatives ont été menées auprès de 160 femmes et hommes, âgés de 22 à 62 ans, vivant dans un couple hétérosexuel et représentant différents types de régions du Québec et divers niveaux de scolarité (comme mesure du statut socioéconomique). La moitié était légalement mariée et l’autre vivait en union libre depuis au moins trois ans ou avait eu un ou une enfant ensemble. Certains couples avaient des enfants; d’autres non. Dans environ le tiers des cas, l’autre membre d’un même couple a aussi répondu à l’enquête. Une enquête quantitative auprès d’un échantillon de 3 246 répondants et répondantes, tirés d’un panel représentatif de la population québécoise, a permis d’établir un portrait d’ensemble. Toutefois, les auteures soulignent que les résultats ne s’appliquent pas nécessairement aux personnes récemment arrivées au Québec et appartenant à des cultures différentes. Comme le dit le sous-titre, l’ouvrage est organisé autour de 60 questions, regroupées en quatre parties : les deux premières portent sur l’argent; la troisième, sur l’amour; et la quatrième, sur le droit. Afin de susciter l’intérêt des lectrices et des lecteurs, les auteures leur demandent d’emblée d’indiquer parmi une liste de 19 points « les éléments indispensables pour ne pas courir à la catastrophe » en ce qui concerne la bonne gestion en couple. Cet exercice permet de comprendre qu’il existe autant de façons de gérer l’argent qu’il y a de couples. Toutefois, les auteures constatent la présence de deux logiques principales au sein de leur échantillon : la mise en commun des revenus (totale ou partielle), méthode utilisée par 54 % des couples québécois, et le partage des dépenses communes, généralement en deux parts égales ou proportionnellement aux revenus, méthode privilégiée par 37 % des couples. Dans 9 % des couples, le ou la partenaire ayant l’essentiel des revenus donne une allocation domestique à l’autre. Ces proportions sont à peu près les mêmes dans le cas des couples hétérosexuels ou homosexuels (femmes et hommes). Ce sont plutôt la présence d’enfants et une relation de longue durée qui amènent les couples à mettre leur argent en commun. Chacune de ces méthodes a ses avantages et ses désavantages. Les couples choisissent l’une ou l’autre, en fonction de critères tels la simplicité administrative, le souci de chacun de maintenir son indépendance et de contrôler les dépenses communes. Le partage des dépenses, même au prorata des revenus, peut avoir pour effet d’appauvrir le ou la partenaire ayant les plus faibles revenus lorsque son conjoint ou sa conjointe l’entraîne dans des dépenses trop élevées pour ses moyens. De façon déconcertante, la majeure partie du livre est écrite sans référence explicite au genre. Dans les exemples, on parle ainsi de deux personnes, souvent des couples de même sexe, ou encore des couples où la femme reçoit les plus gros revenus. On occulte ainsi la réalité du modèle dominant où les hommes ont les revenus les plus importants et les femmes sont davantage nombreuses à prendre congé ou à réduire leurs heures de travail afin de prendre soin d’un ou d’une enfant. Ce n’est qu’à la question 23 que les auteures révèlent que les femmes s’occupent plus souvent des dépenses « liquides » liées au …

Appendices