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Introduction

En Ontario, la réussite scolaire de tous les élèves est la priorité des institutions éducatives. Toutefois, pour réussir, certains élèves ont des besoins particuliers qui exigent un soutien supplémentaire en plus de l’aide ordinairement fournie à l’école (Ministère de l'Éducation de l'Ontario, 2007). Si les interventions et les stratégies utilisées pour y arriver peuvent différer d’un établissement à un autre, l'inclusion scolaire reste cependant privilégiée pour ces élèves, conformément aux principes mis de l’avant lors de la Conférence mondiale de Salamanque (UNESCO, 2003). Dans ce contexte, le soutien aux enseignants pour répondre au double défi de l’inclusion scolaire et de la réussite des élèves en difficulté se présente comme une intéressante piste à suivre. En effet, pour favoriser la réussite scolaire de ces élèves en contexte d'inclusion, il faut non seulement adapter les stratégies d'intervention, mais également tenir compte des besoins de formation du personnel enseignant en terme de formation individualisée, ponctuelle et continue.

En amont, la présence d’une politique administrative qui soutient la mise en oeuvre de l’inclusion auprès des enseignants est incontournable pour en permettre la réalisation (Bunch et Persaud, 2003). Ces dernières années, les conseils scolaires de l’Ontario ont déployé nombre d’efforts pour améliorer les niveaux de rendement et combler les écarts des élèves aux prises avec différents problèmes qui entravent leur réussite scolaire. L’école ne pouvant répondre seule aux besoins multidimensionnels de certains de ces élèves (Cooper, 1999; Deslandes et Bertrand, 2001; Dryfoos, 1994; Greenberg, 2004; Ministère de l'Éducation du Québec, 2005; Paavola, 1995; Riddle et Tett, 2001; The Learning Partnership, 2004), la collaboration avec les différents partenaires de sa communauté devient un élément incontournable pour la réussite de ces jeunes à risque d’échec scolaire. La population d’élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme s’inscrit parmi ces jeunes à risque d’échec scolaire. D’après Statistique Canada, le nombre de « personnes atteintes d’autisme ou de tout autre trouble du développement » s’élevait à un peu plus de 69 000 en 2003, soit environ un Canadien sur 450 (Statistique Canada, 2003). Le taux semble beaucoup plus élevé dans le milieu scolaire, c’est-à-dire qu’approximativement 1 élève sur 150 est diagnostiqué comme ayant un trouble du spectre de l’autisme (Amaral et Dawson, 2011). Ces dernières années, les pressions exercées par les parents d’enfants qui présentent un trouble du spectre de l’autisme en Ontario ont donné lieu à la mise sur pied d’un programme de soutien en milieu scolaire inclusif pour ces élèves. Dans ce programme, tous les agents d’éducations sont importants ; il peut s’agir des enseignants comme d’employés d’agences de la communauté relevant des domaines de la santé et des services sociaux et qui offrent des services directs aux élèves. Dans cette perspective d’intégration de services, tous sont responsables et dépendent les uns des autres, pour permettre à l’élève de se développer de manière optimale (Kuzbik, 2004). Toutefois, faute d’un modèle organisationnel et structurel clair, ces intervenants n’arrivent pas à collaborer activement avec ceux de l’école et les parents de ces élèves. Le défi consiste alors à organiser cette nouvelle offre de services de manière à ce que tous les partenaires, incluant les parents, s’unissent et se coordonnent pour travailler ensemble pour répondre aux besoins des élèves et offrir les conditions d’apprentissage qui leur seront favorables. Cette offre de services intégrés constitue une piste de solution pour répondre aux nombreux et pressants besoins des élèves à risque d’échec scolaire (Blank et Berg, 2006; Cooper, 1999; Deslandes et Bertrand, 2001; Mawhinney, 1995; The Learning Partnership, 2004), dont font partie les élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme. Bien qu’une offre de services intégrés soit rendue possible par diverses ententes entre des partenaires de la communauté, l’implication et la coordination du personnel de l’école et de la famille de l’élève ne se font pas d’elles-mêmes.

Des modèles d’offre de services intégrés sont présentés dans les écrits. Cependant, peu d’entre eux tiennent compte du contexte d’inclusion scolaire dans lequel évoluent les élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme et aucun ne se rapporte au contexte éducationnel ontarien. Le cadre de référence que nous retenons présente un modèle d’équipe de soutien à l’enseignant comme une composante clé pour intégrer les services à l’école pour tout élève en difficulté en contexte inclusif (Trépanier et Paré, 2009). Nous avons ainsi opérationnalisé ce modèle d’équipe de soutien à l’enseignant par une recherche-action combinée à une méthodologie de recherche plus traditionnelle au Conseil scolaire Viamonde[1] en 2009-2011, pour répondre aux besoins éducatifs et sociaux des élèves en difficulté, dont ceux qui présentent un trouble du spectre de l’autisme. Au cours de la réalisation du projet, de la maternelle à la 12e année, 20 élèves sur les 50 élèves ciblés par le modèle de service présentaient trouble du spectre de l'autisme. De façon spécifique, nous présentons un exemple d’application de ce modèle de service auprès d’un élève du primaire présentant de l’autisme, suivi des résultats de l'évaluation de sa mise en oeuvre auprès d'une vingtaine d'équipes.

Un modèle d’intégration de services à l’école

Dans la littérature scientifique, peu de cadres théoriques d’intégration de services tiennent compte du double défi de l’inclusion scolaire et d’une offre de services coordonnées et harmonisées pour répondre aux besoins des élèves en difficulté. Notre recension des écrits a permis d’identifier différents cadres théoriques tels celui d’Adelman et Taylor (Adelman et Taylor, 1996) et celui de Frattura et Caper (Frattura et Capper, 2007). Ces modèles accordent une importance à la réussite de l’élève. Ils négligent toutefois certaines composantes pourtant essentielles au cadre scolaire telles que l’inclusion en classe ordinaire d'élèves en difficulté ou ne considèrent que très sommairement l’appui à l’enseignant pour assurer la réussite des élèves. Notre choix s’est arrêté sur le cadre proposé par Trépanier et Paré (2009), car en plus de considérer le défi de l’inclusion scolaire à celui d’une offre de services intégrés à l’école, il est issu de la fusion de deux modèles synthèses réalisés sur le concept d’école communautaire et sur les applications du modèle d’équipe de soutien à l’enseignant. En d’autres mots, ce cadre théorique représentait notre point de départ pour illustrer une offre possible de services intégrés à l’école, en tenant compte des services éducatifs et des autres types de services qui peuvent être proposés dans une école qui favorise l’inclusion. De façon plus spécifique à notre étude, l’équipe de soutien à l’enseignant constitue une clé permettant de lier l’offre de services aux élèves en difficulté en contexte d’inclusion. Dans cette équipe, on doit retrouver un coordonnateur de services pour assurer que l’ensemble des services nécessaires pour l’élève soit offert. Pour l’élève qui présente un trouble du spectre de l’autisme, il peut s’agir de services scolaires, de services de santé et de services sociaux. C’est ce qui est illustré par la Figure 1.

Figure 1

Processus d’une équipe de soutien à l’enseignant avec les organismes de la communauté

Processus d’une équipe de soutien à l’enseignant avec les organismes de la communauté
Labonté et Trépanier, 2011

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L’équipe de soutien à l’enseignant

L’équipe de soutien à l’enseignant représente une forme d’appui donnée à l’enseignant qui doit oeuvrer auprès d’un élève ou plusieurs élèves en difficulté dans sa classe. Pour être mise sur pied, l’équipe de soutien à l’enseignant implique une démarche de résolution de problèmes axée sur la recherche de solutions conjointement avec l’enseignant sur des problèmes qu’il rencontre en classe dans l’exercice de ses fonctions.

Pour actualiser le modèle proposé par Trépanier et Paré (2009), nous nous sommes inspirées des différentes étapes du processus de résolution de problèmes utilisées par Bergan (1977) : a) l’identification du problème ; b) l’analyse du problème ; c) l’élaboration et la mise en oeuvre du plan d’action; d) l’évaluation du plan d’action (Bergan in Bergan et Kratochwill, 1990; Statistique Canada, 2003).

À ces étapes, nous avons ajouté la rencontre initiale et les suivis bimensuels, pour apporter un appui au personnel enseignant par des rencontres régulières et permettre la discussion sur la mise en oeuvre des différentes stratégies utilisées avec le ou les élèves identifiés.

La mise en oeuvre du modèle d’intégration de services

L’opérationnalisation du cadre théorique proposé par Trépanier et Paré (2009) a été réalisée en six étapes illustrées dans la Figure 2. Il s’agit de : a) l’identification d’un problème ; b) l’équipe-école ; c) l’équipe de soutien à l’enseignant ; d) la mise en oeuvre et le suivi du plan d’action ; e) le suivi bimensuel ; et f) l’évaluation du plan. Nous illustrerons également la mise en oeuvre du modèle, par le cas d'un élève ayant un trouble du spectre de l’autisme ayant bénéficié de cette structure d’offre de services au cours des années 2009-2011.

Figure 2

Étapes d’application d’un modèle d’équipe de soutien à l’enseignant pour intégrer les services à l’école

Étapes d’application d’un modèle d’équipe de soutien à l’enseignant pour intégrer les services à l’école
Labonté, 2011; Labonté et Trépanier, 2011

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Étapes 1 et 2

La première étape se caractérise avec l’identification, par l’enseignant titulaire de classe, d’un problème persistant pour un de ses élèves, malgré les aménagements, la structure et le climat de classe proposés. La direction de l’école lance alors un appel à l’équipe-école qui se compose de la direction de l’école, de l’enseignant titulaire de la classe, d’un enseignant-ressource et d’un autre enseignant. Les parents ou les tuteurs de l’élève peuvent être conviés à cette rencontre d’une heure qui se tiendra avant ou après les heures de classe. À ce stade, la présence de l’élève n’est pas particulièrement encouragée, puisque le but de la rencontre est de conseiller l’enseignant sur les pistes d’intervention à privilégier auprès de l’élève ciblé. Ce travail de consultation en équipe permet de générer collectivement un ensemble de solutions qui seront par la suite mises en oeuvre par l’enseignant dans sa classe. Un échéancier de deux ou trois semaines est fixé au terme duquel on évalue la progression de l’élève. Toutes les informations sont consignées au dossier de l’élève. Si les difficultés de l’élève persistent, la direction de l’école fait alors appel à l’équipe de soutien à l’enseignant, en contactant la direction des services aux élèves du conseil scolaire (étape 3). Cette équipe regroupe les parents ou tuteurs de l’élève, l’enseignant titulaire de classe et tout intervenant qui connait bien l’élève et l’équipe centrale du conseil scolaire qui se compose de la direction des services éducatifs du conseil scolaire, d’un travailleur social ou d’un orthopédagogue et parfois de conseillers pédagogiques ou des spécialistes provenant d’agences de santé ou de services sociaux, selon la nature des difficultés de l’élève. Dans le cas des élèves ayant un trouble du spectre de l’autisme, l’expertise d’un ou de plusieurs spécialistes s’est avérée utile. Selon l’âge et la nature de ses difficultés, l’élève est également convié à participer à cette rencontre.

Étape 3 : La rencontre initiale

Cette troisième étape nécessite au moins deux rencontres d’une durée variant d’une heure à une heure trente. La première a pour but d’identifier les priorités d’intervention auprès de l’élève, la seconde servira à élaborer son plan d’action. La direction des services éducatifs anime ces rencontres. Lors de la rencontre initiale, l’animatrice amène les participants à dresser un portrait des intérêts, des forces et des moments où l’élève fonctionne bien en classe (moments d’exception, DeShazer in Desbiens, 2009). L’équipe échange ensuite sur les défis que l’élève rencontre dans son parcours scolaire, familial et social et s’entend sur ce qui entrave sa progression scolaire. De manière consensuelle, trois priorités de services et d’intervention seront dégagées par l’équipe. La personne qui assumera la coordination de l’équipe sera présentée à ce moment. En plus de la coordination des services relevant de l’école et des organismes externes, le coordonnateur renforcera la concertation des efforts de chacun et le suivi des interventions. Il encouragera la communication et la bonne entente entre les intervenants et les partenaires, il préconisera la continuité du plan d’action, il organisera la formation continue et effectuera un suivi auprès de l’enseignant. L’exemple suivant illustre la situation d’une élève identifiée comme ayant un trouble du spectre de l’autisme ainsi que son plan d’action réalisé selon les priorités déterminées lors de la rencontre initiale.

Le cas de Dominique

Dominique est une élève de 4e année du primaire, diagnostiquée Asperger, intégrée dans une classe ordinaire. Au mois d’avril 2009, elle participe à la rencontre initiale avec sa mère. Les personnes présentes sont la direction du Services aux élèves du Conseil, les intervenants de l’école (l’enseignante titulaire de classe, la direction de l’école et l’enseignante-ressource), l’intervenante du Programme de soutien en milieu scolaire, l’orthopédagogue, la travailleuse sociale et la conseillère en enfance en difficulté. Les priorités ciblées lors de cette rencontre sont énumérées dans le Tableau 1. Elles révèlent des manifestations d’anxiété de l’élève, de ses habiletés sociales avec ses pairs et de son fonctionnement dans l’environnement scolaire. L’enseignante titulaire de la classe de Dominique en est à sa première année d’enseignement et affirme ne pas posséder les connaissances de base sur les troubles du spectre de l’autisme. N’arrivant pas à répondre aux besoins de cette élève, elle a demandé l’appui de l’équipe de soutien en février 2009.

Tableau 1

Exemples tirés du plan d'action de Dominique

Exemples tirés du plan d'action de Dominique

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Pour chacune des étapes d’application de l’équipe de soutien, nous avons identifié des indicateurs pour en évaluer la mise en oeuvre. Ainsi, 103 intervenants des écoles (enseignants titulaires des classes où évoluent les élèves ciblés, enseignants-ressources, éducateurs spécialisés, aides-enseignants et directions d'école), et 22 intervenants de la communauté ou des Services aux élèves du Conseil scolaire (orthopédagogues, travailleurs sociaux, psychomètres, conseillers pédagogiques, etc.) ont été invités à répondre à un questionnaire indiquant leurs perceptions sur les services offerts, le soutien reçu et les résultats obtenus. Un taux de réponse de 70% a été obtenu pour les intervenants scolaires et de 100% pour les autres intervenants. Par la suite, 12 entrevues ont été réalisées auprès d'enseignants, d'enseignants-ressources, de directions d'école, d'aides-enseignants et de deux éducateurs spécialisés, afin d'approfondir l'information recueillie à l'aide des questionnaires, pour permettre de trianguler une partie des données. Par ailleurs, les informations obtenues auprès des parents l'ont été de façon plus informelle lors des suivis du plan d'action de leur enfant.

Étape 4 : Mise en oeuvre du plan d’action

Une fois la formation nécessaire reçue, les agents d’éducation (enseignant, orthopédagogue, parents et autres intervenants) amorcent la mise en oeuvre du plan d’action, en mettant en place les stratégies discutées lors de l’étape de planification. Ils prennent des notes et sont invités à consigner leurs observations pour indiquer, comment l’élève répond aux stratégies privilégiées dans le plan d’action. Le coordonnateur reste disponible pour offrir un soutien ou répondre à des questions ou une difficulté particulière se manifeste pour mettre en place une intervention ou une stratégie. Au besoin, il est possible de rappeler l’équipe de soutien, soit pour faire le point, soit pour élaborer davantage le plan d’action. À cette étape, il est possible d’ajouter de la formation et des ressources matérielles, selon les besoins.

Étape 5 : Le suivi bimensuel

Lors de la planification initiale de la mise en oeuvre du modèle de service, nous souhaitions communiquer avec l’école toutes les deux semaines, pour éviter l’isolement de l’enseignant. Toutefois, ce laps de temps ne donnait pas suffisamment de temps à l’école pour mettre en place et évaluer les stratégies du plan d’action. Des ajustements ont alors été apportés pour que le coordonnateur communique avec l’école au moins une fois par mois. Si une rencontre de groupe s’avérait nécessaire, l’enseignant pouvait en tout temps demander au coordonnateur d’organiser une rencontre avec tous les intervenants pour discuter à nouveau des problèmes rencontrés en classe et en arriver à trouver des solutions collectivement. L’équipe s’est rencontrée sur une base mensuelle, pour assurer le suivi et ajuster le plan d’action. Le suivi de ces rencontres a été déposé au dossier de l’élève.

Exemple d’un suivi pour Dominique

L’équipe de soutien se réunit à l’école le mois suivant la mise en oeuvre du plan d’action par l’enseignante, dans la mesure où cette dernière n’a pas demandé de rencontre entre temps. L’équipe revoit alors les stratégies d’intervention proposées et discute des réactions de l’élève, lors de l’application du plan. L’équipe pose des questions sur la faisabilité des stratégies suggérées et sur la réussite ou l’insuccès de leur mise en oeuvre. Ainsi, pour réduire l’anxiété de Dominique, le plan d’action vise notamment l’expression de ses émotions de façon spontanée. Parmi les stratégies proposées par l’équipe de soutien se trouve l’utilisation d’un code de couleurs correspondant à celui des feux de circulation pour identifier une émotion : le vert signifie qu’elle se sent bien, le rouge signifie qu’elle vit une émotion forte telle qu’être en colère suite à une situation particulière, et le jaune signifie qu’elle n’arrive pas encore à identifier une émotion clairement. Lors de cette rencontre, les membres de l’équipe de soutien s'interrogent sur l’utilité de cette stratégie. Selon les commentaires de l’enseignante, des autres intervenants scolaires et du parent, l’équipe décide de maintenir l’utilisation de cette stratégie auprès de Dominique tout en passant à une étape suivante. Dans cette foulée, pour continuer le travail amorcé avec Dominique, de nouvelles ressources matérielles sont offertes pour planifier les transitions d’un cours à un autre, d’une activité à une autre.

Pour l’enseignante, la planification des transitions est un concept nouveau. Les autres membres de l’équipe lui expliquent alors le concept, en l’aidant à préciser des moments de transition et en à comprendre la nécessité de préparer l’élève présentant de l’autisme aux transitions. Pour soutenir l’enseignante dans l’utilisation de nouvelles stratégies d’intervention, un modelage a été réalisé par certains intervenants, en plus de lui offrir du matériel ou de le construire avec elle. L’enseignante a également pu choisir parmi les différentes stratégies celles qui lui semblaient pertinentes selon ses activités d’enseignement telles que l’utilisation d’un horaire visuel, la préparation verbale et l’utilisation du renforcement positif ou de renforçateurs verbaux, lorsque Dominique fait ce qui est demandé. Lors de ces rencontres, la mère de l’élève apporte des suggestions, puisqu’elle utilise les mêmes stratégies à la maison avec son enfant. Par exemple, elle a proposé de prendre le temps d’écouter Dominique pour la sécuriser, lorsqu’elle est dans un état anxieux. Au cours de l’année, sept rencontres de suivi de l’équipe de soutien ont ainsi été réalisées.

Étape 6 : L’évaluation du plan

La rencontre d’évaluation du plan d’action se déroule habituellement vers la fin de l’année scolaire. Elle peut cependant être réalisée lorsqu’un enseignant informe l’équipe de soutien qu’il n’a plus besoin de ses services, parce que l’élève fonctionne désormais bien dans la classe. Dans tous les cas, le coordonnateur convoque l’équipe de soutien. Les intervenants sont alors appelés à rendre compte de ce qui a bien fonctionné et des défis rencontrés dans ce processus. Ces observations sont consignées au bureau de la direction des Services aux élèves pour en discuter ultérieurement avec les équipes des autres services dont les membres ont participé aux équipes de soutien (Services aux élèves, Services pédagogiques et intervenants des organismes de la communauté). Par ailleurs, si aucun progrès n’est remarqué par l’enseignant titulaire, une rencontre de l'équipe de soutien est alors fixée pour apporter des modifications au plan d’action et mieux répondre aux besoins de l’élève. C’est le retour à l’étape 3, deuxième rencontre.

Évaluation du plan de Dominique

Pour Dominique, certains défis ont été notés lors d’une rencontre d’évaluation. Par exemple, lorsqu’elle revenait de la récréation très frustrée, l’équipe a dû trouver rapidement des solutions pour qu’elle se calme. Dans l’ensemble, le plan d’action de Dominique a bien fonctionné. Pour la mère de Dominique, l’équipe de soutien a représenté un forum permettant de discuter des besoins de sa fille et de ses propres inquiétudes sur le fonctionnement éventuel de Dominique dans la société. Elle a apprécié la communication ouverte de l’équipe et surtout l’expert de l’agence de la communauté qui offrait des réponses et lui a fait connaitre d’autres stratégies pour aider sa fille à bien fonctionner. Pour la mère et la direction de l’école, l’équipe de soutien a aidé le personnel enseignant à mieux comprendre les troubles du spectre de l’autisme et les réactions particulières de Dominique à certaines situations. L’équipe de soutien a appuyé et accompagné l’enseignante tout au long du processus en lui faisant profiter de connaissances sur les troubles du spectre de l’autisme, en plus de lui permettre d’apprivoiser de nouvelles stratégies spécifiquement adaptées pour cette élève et d'autres élèves qui présenteraient des caractéristiques similaires. L’enseignante en est donc arrivée à adapter ses interventions pour Dominique, en favorisant ainsi sa réussite scolaire.

Les différentes étapes de la mise en oeuvre du modèle d'équipe de soutien à l'enseignant précisent les actions devant être entreprises par les membres de l'équipe pour aider l'enseignant dans la résolution d'un problème rencontré par un élève de son groupe classe. Dans ce contexte, nous privilégions l'utilisation du terme «plan d'action», plutôt que celui de «plan d'intervention», car ce dernier peut très souvent correspondre à une démarche destinée à la mise en place d'interventions par un spécialiste ou encore à une démarche prescrite légalement pour répondre aux besoins d'élèves correspondant à certains types de difficultés déjà identifiées. Par exemple, au Québec, tout élève ayant reçu un diagnostic correspondant à un trouble du spectre de l'autisme se voit attribuer un code rendant quasi incontournable la mise en oeuvre d'un plan d'intervention (Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, 2004; 2007). Si l'aménagement ou le réaménagement de l'offre de services pour ces élèves dépendent des politiques élaborées par chaque commission scolaire (Loi sur l'instruction publique, Art. 96.14), le plan d'intervention réalisé en milieu scolaire pour cet élève pourra s'inscrire dans le volet «école» de son plan de services, dans la mesure où il reçoit également des services relevant des milieux de la santé et des services sociaux. Également, lorsque cet élève est scolarisé dans une classe spécialisée, un plan d'intervention est mis systématiquement en place, alors que le plan d'action du modèle présenté ici origine de la demande de l'enseignante titulaire de classe, particulièrement en milieu intégré, et qu'il ne peut être imposé à l'enseignant.

En d'autres mots, bien que le «plan d'intervention individualisé» puisse s'inscrire dans notre démarche, la démarche de plan d'action proposée ici s'applique à tous les élèves pour lesquels un enseignant rencontre des défis dans son intervention. Elle peut de plus inclure une planification des services à l'élève (et, le cas échéant, à leur famille) et de leurs modalités de mise en oeuvre. Dans le cas de Dominique, son enseignante a fait une demande de soutien, car elle trouvait ses actions d'intervention limitées auprès de l'élève et cela, malgré un travail amorcé en équipe école pour adapter ses interventions en classe. L'expérience d'intégration de la jeune fille démontre que le modèle d'équipe de soutien à l'enseignant n'a plus été nécessaire suite aux actions mises en oeuvre par l'équipe. Pendant 18 mois, l'équipe de soutien à l'enseignant aura permis à l'élève de développer les habiletés nécessaires à son adaptation en classe et dans son milieu d'accueil l'année suivante. Après avoir présenté la démarche élaborée pour soutenir les enseignants d'élèves en difficulté et illustré la situation d'un élève qui présente un trouble du spectre de l'autisme dans ce contexte, la section suivante précise la méthodologie utilisée pour l'évaluation de la mise en oeuvre de ce modèle de service.

Méthodologie

À la fois recherche-action et recherche qualitative, la mise en oeuvre du processus d’équipe de soutien à l’enseignant réalisée pour intégrer les services à l’école a été évaluée dans son ensemble (Labonté, 2011). Afin d’identifier les perceptions et l’appréciation des différentes étapes du modèle d’équipe de soutien à l’enseignant, nous avons utilisé une méthodologie mixte impliquant l'utilisation d'un questionnaire suivi d’entrevues. Également, l'approche d'évaluation continue privilégiée dans le processus de mise en oeuvre des équipes de soutien a permis de colliger les notes des rencontres de mises au point (évaluation continue) auxquelles s'est conjuguée l'analyse des rapports des plans d'action complétés par les coordonnateurs d'équipes. Dans un premier temps, les effets du modèle de service sur les intervenants scolaires ont été évalués de même que leur perception quant à la formation et aux ressources matérielles reçues. Par la suite, les effets du modèle de service mis en oeuvre sur les enfants impliqués ont été évalués ainsi que leur maintien en classe. Enfin, la perception des parents a été considérée

Lors de l’étude initiale, 50 élèves de la maternelle à la 11e année ont été ciblés par leur enseignant titulaire, puis par l’équipe-école. Ces élèves démontraient des manifestations d’inadaptation au fonctionnement de la classe. Parmi eux, 20 présentaient un trouble du spectre de l’autisme (diagnostics d’Asperger, d’autisme ou de trouble envahissant du développement). Au total, 48 intervenants scolaires (18 enseignants titulaires de classe ordinaire, 10 enseignants-ressources, 10 directions d’école ou directions adjointes, huit aides-enseignants et deux éducateurs spécialisés) ont été impliqués dans des équipes de soutien à l’enseignant concernant des élèves identifiés comme ayant un trouble du spectre de l’autisme.

Toutes ces personnes ont été interrogées par écrit. Une douzaine a participé à des entrevues semi-structurées dont une partie comprenait des échelles de Lickert en 5 points. Les données d’entrevues et les réponses écrites aux questionnaires ont été analysées à l’aide du logiciel NVivo8®. Également, les données des plans d’action des élèves ciblés ont été analysées. Enfin, quatre parents ont été interrogés à la fin du processus.

Principaux résultats

Les principaux résultats que nous présentons portent sur les vingt (20) équipes de soutien qui ont impliqué des élèves présentant un trouble du spectre de l’autisme. Dans un premier temps, nous avons évalué les effets de l’équipe de soutien sur les 48 intervenants scolaires impliqués. Puis, nous en avons évalué les effets sur les 20 élèves ciblés tels que perçus par les intervenants et leurs parents. Également, le maintien des élèves dans la classe ordinaire a été évalué de même que la perception des intervenants scolaires sur la formation reçue et le matériel utilisé.

Effets de l’équipe de soutien sur les intervenants scolaires

Sur 48 intervenants scolaires ayant travaillé avec les élèves qui présentent un trouble du spectre de l’autisme, 45, soit 93% des intervenants scolaires, estiment que l’équipe de soutien à l’enseignant leur a effectivement fourni un appui. Dans cette optique, une enseignante titulaire de classe indique que l’équipe de soutien «permet de cibler les priorités et de travailler plus spécifiquement en fonction des forces et des défis de l’élève». Une enseignante-ressource ajoute que l’équipe de soutien représente une «occasion de discuter des défis de l’élève dans toutes les activités de sa journée scolaire». Trente-huit intervenants scolaires (79%) affirment que l’équipe de soutien offre un appui continu, alors que 44 (91%) affirment qu’elle augmente la confiance de l’enseignant titulaire de classe à travailler avec l’élève en difficulté. Une enseignante-ressource a ainsi précisé que l’équipe de soutien «apporte un appui indispensable aux intervenants scolaires et aux parents qui ont à coeur l’éducation de leurs élèves». Enfin, 42 intervenants (88%) disent que l’équipe de soutien aide les intervenants scolaires à faire le suivi des stratégies proposées en classe. À ce sujet, une enseignante-ressource indique que l’équipe de soutien permet à l’élève de progresser plus rapidement parce qu’il reçoit un «message uniforme» et que les interventions sont concertées entre l’école et la maison. L’ensemble de ces données est illustré dans le Tableau 2.

Tableau 2

Effets de l'équipe de soutien à l'enseignant sur les intervenants scolaires, selon les intervenants scolaires

Effets de l'équipe de soutien à l'enseignant sur les intervenants scolaires, selon les intervenants scolaires

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Un autre élément qui ressort des commentaires émis par les intervenants scolaires est que le travail d’équipe permet de savoir qui consulter pour obtenir une réponse à une question ou pour partager une observation. En d’autres mots, une communication continue entre les intervenants a pu être instaurée, à partir de l’équipe de soutien. Dans cette optique, une enseignante-ressource affirme apprécier l’équipe de soutien, car elle permet «une économie de temps, grâce à l’appui et la communication établie entre les parties».

Formation et ressources matérielles

Les intervenants scolaires ont grandement apprécié la formation, le support ou le mentorat reçus. Il semble que la consultation sous la forme d’une aide individuelle ou de mentorat par un professionnel, la modélisation des stratégies proposées et la formation offerte à un groupe ou sous-groupe d’intervenants à l’école seraient celles qui répondent le mieux à leurs besoins pour intervenir efficacement. À ce sujet, une enseignante indique que, pour elle, «la modélisation des stratégies proposées est ce qui est le plus efficace, puisque l’on peut faire le transfert des apprentissages et mieux prévoir les pépins et les questions qui surviennent devant un groupe». Pour une autre enseignante, «la façon la plus efficace d’offrir du support, c’est d’offrir de l’aide individuelle en classe, soit en intervenant directement auprès de l’élève ou en montrant comment intervenir au besoin».

Effets de l’équipe de soutien sur les élèves

Pour les intervenants scolaires interrogés, les interventions amorcées à partir des équipes de soutien ont permis de noter des améliorations chez les élèves ciblés soit concernant leurs comportements, leurs habiletés sociales, leur engagement à la tâche et leurs apprentissages (Tableau 3). De façon plus spécifique, une éducatrice spécialisée parle d’un élève qui arrive maintenant à «respecter les routines de la classe» et qui «ne déchire plus ses travaux». Une enseignante-ressource parle d’un élève pour qui «les stratégies discutées pour diminuer l’anxiété se sont avérées bénéfiques» et qu’il arrive maintenant à «gérer les transitions».

Tableau 3

Effets de l'équipe de soutien sur les élèves présentant un trouble du spectre de l'autisme, tels qu'identifiés par les intervenants scolaires

Effets de l'équipe de soutien sur les élèves présentant un trouble du spectre de l'autisme, tels qu'identifiés par les intervenants scolaires

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Effets de l’équipe de soutien sur le maintien des élèves en classe

En répondant aux besoins des élèves en difficulté en classe ordinaire par une équipe de soutien à l’enseignant, la presque totalité des enseignants de notre étude se sentent confiants, soutenus et mieux outillés pour répondre aux besoins des élèves qui présentent un trouble du spectre de l’autisme. Ainsi, 81% des répondants, soit 38 intervenants scolaires sur 47, affirment que l’équipe de soutien permet de maintenir l’élève en classe ordinaire, sept intervenants (15 %) ne savent pas, alors que deux (2) intervenants considèrent que l’équipe de soutien ne contribue pas à maintenir l’élève en classe ordinaire.

Effets de l’équipe de soutien sur les parents

Plus que majorité des intervenants scolaires impliqués dans les équipes de soutien (89%) pense que l’équipe de soutien a favorisé une meilleure collaboration et meilleure entente avec l’école. Quatre-vingt-cinq pour cent considèrent que l’équipe de soutien a assuré une participation régulière des parents à l’école en vue de les faire progresser. La presque totalité des intervenants scolaires, soit 92%, affirme que l’équipe de soutien permet aux parents de suivre la progression de leur enfant tant au niveau scolaire, comportemental que social, alors que tout autant (94%) indique qu’elle contribue à accroitre la collaboration avec les parents. À ce sujet, une enseignante précise qu’en «[maintenant] le suivi, [l’équipe de soutien] sécurise les parents, et augmente les chances de mettre effectivement en place les stratégies». C’est pourquoi les stratégies proposées dans les plans d’action par les équipes de soutien étaient également utilisées à la maison. Quatre parents ont également exprimé leur satisfaction concernant le processus d’aide mis en place pour leur enfant et pour eux-mêmes à la suite des rencontres de suivi.

Au départ, certains parents semblaient réticents à participer à la rencontre initiale. Ils ont pu constater rapidement que l’équipe travaille pour trouver des solutions pour assurer le succès scolaire de leur enfant, ce qui a facilité leur implication dans le processus. Au fil des rencontres, certains parents prenaient des notes sur les stratégies utilisées à la maison (stratégies discutées lors de la rencontre précédente) et voulaient davantage d’informations pour continuer le processus entamé. De plus, il s’est avéré que la participation des parents aux équipes de soutien a permis d’apporter des informations essentielles pour l’élaboration des plans d’action. Par exemple, un parent qui informe les intervenants de l’équipe de soutien sur les objets ou des jouets spécifiques qui captent l’attention de son enfant et qui pourraient servir de renforçateurs lors des interventions.

Discussion

Au Canada, si la majorité des provinces adhère au principe de l’inclusion scolaire, peu de politiques semblent effectivement soutenir cette pratique (Bunch et Finnegan, 2008). L’absence de législation fédérale pour gouverner l’éducation canadienne rend chaque province responsable de son système d’éducation. Cette situation entraine une grande variabilité dans les pratiques et les politiques entre chacune des provinces. En Ontario, les défis de mise en oeuvre des équipes de soutien à l’enseignant pour intégrer les services à l’école s’ajoutent à ceux de l’inclusion scolaire. En premier lieu, nous avons été confrontées à la difficulté de trouver des experts francophones dans les organismes de la communauté, pour répondre aux besoins des élèves ayant un trouble du spectre de l’autisme. En outre, malgré les programmes de soutien en milieu scolaire mis en place par le ministère de l’Éducation, il n’existe pas de structure officielle pour travailler en collaboration avec les écoles. C’est pourquoi, à partir des écrits scientifiques, nous avons choisi d’opérationnaliser un modèle théorique qui tentait de tenir compte de l’ensemble des éléments caractéristiques de l’offre de services intégrés à l’école et de soutien à l’enseignant. En plus de besoins de services en langue française, s’ajoute la nécessité d’accéder à un service d’interprète pour l’un des parents de l’élève, car plus de 60% des parents rencontrés préfèrent s’exprimer en langue anglaise. Cette difficulté a ralenti le processus de mise en oeuvre de nos équipes de soutien pour nos élèves qui présentent un trouble du spectre de l’autisme. Bien que nous n’ayons pas évalué spécifiquement cet aspect, il est possible que la participation de certains parents s’en soit retrouvée diminuée. À notre connaissance, aucune étude en lien avec notre sujet ne souligne cette difficulté. Un autre défi rencontré dans la mise en oeuvre des équipes de soutien à l’enseignant pour intégrer les services à l’école est la distance entre les écoles. Le vaste territoire ontarien a par ailleurs occasionné de nombreuses pertes de temps en déplacement qui se sont ajoutées à la charge de travail des intervenants, ce qui a eu pour effet de retarder certains suivis.

Dans la mise en oeuvre de notre modèle, les intervenants des organismes de la communauté ont été invités à participer à des réunions qui ont lieu à l’école. Ils devaient connaitre en profondeur ou être très familiers avec le diagnostic du trouble du spectre de l’autisme. Toutefois, rien ne garantissait pour autant le lien entre la difficulté de l’élève et l’école. En effet, les intervenants des organismes de la communauté ont affirmé qu’ils n’avaient jamais assisté auparavant à des réunions où les interventions étaient orientées exclusivement sur les progrès de l’élève. Nous avons donc contré ce problème en invitant des conseillers pédagogiques dans les équipes concernées afin de faciliter le transfert des stratégies proposées aux situations pédagogiques.

Par leur participation continue aux rencontres et leurs réponses aux questionnaires, les intervenants scolaires ont démontré une grande satisfaction quant à leur perception des progrès accomplis par les élèves ciblés. Dans le même ordre d’idées, Wang, Haertel, et Walberg notaient en 1993 que, là où ils sont offerts, les services intégrés ont des effets positifs sur le rendement des élèves, sur le taux de décrochage et sur l’assiduité des élèves (Wang, Haertel, et Walberg, 1993). Il serait pertinent, lors d’études ultérieures et dans la mesure où ce modèle de service continue d’être appliqué, d’évaluer plus systématiquement les indicateurs du rendement scolaire de la réussite des élèves intégrés qui ont bénéficié de l’intervention des équipes de soutien. Cette double perspective n’est, à notre connaissance, jamais évaluée dans les études.

Les résultats de notre recherche démontrent que notre modèle d’équipe de soutien à l’enseignant peut effectivement agir comme porte d’entrée pour offrir des services intégrés à l’école, tout en respectant les principes de l’inclusion scolaire. Dans le même sens que le soulignent Trépanier et Paré (2009), cette équipe permet à l’enseignant d’être appuyé dans ses interventions auprès d’un élève en difficulté dans sa classe, par des intervenants d’organismes extérieurs à l’école et par les intervenants scolaires. Les commentaires émis par les intervenants scolaires (directions d’école, enseignants titulaires, enseignants-ressources, éducateurs, aides-enseignants) vont dans ce sens.

Dans l’opérationnalisation de notre modèle de services, l’intervenant des organismes de la communauté agit comme un membre à part entière de l’équipe et les pistes d’intervention qu’il apporte sont orientées vers la réussite scolaire de l’élève. La collaboration et le travail en partenariat prennent ainsi une place centrale au niveau des équipes de soutien. Cette collaboration ne peut qu’améliorer la qualité des services offerts et le partage d’informations entre les agences (Fleming et Lubin, 1998). En effet, la mise en oeuvre de ce modèle de soutien à l'enseignant permet non seulement d'appuyer l'enseignant dans ses interventions mais aussi d'intégrer les services à l'école, c'est-à-dire d'offrir les services nécessaires à la réussite scolaire d'un élève de façon concertée et coordonnée (Trépanier et Beauregard, 2013). Cela signifie qu'en plus de comprendre une partie de la démarche du plan d'intervention individualisé, elle peut inclure celle du plan de services individualisés voire, selon la situation de l'élève concerné, la démarche du plan de transition. Dans le cas de Dominique, un travail sur les transitions a ainsi pu être amorcé et évalué avec succès. Il est donc possible d'arrimer un ou plusieurs plans d'intervention individualisés au plan d'action proposé par l'équipe de soutien lorsque, par exemple, des spécialistes jugeraient nécessaire d'intervenir de façon plus soutenue auprès de l'élève ciblé. Dans le même ordre d'idées, si le plan d'action nécessite une coordination plus élargie de l'offre de services nécessaire pour aider un élève dans sa réussite scolaire en impliquant par exemple des services à sa famille ou une planification des transitions de sa vie qui peut impliquer une offre de services particulières ou une planification plus élargies des interventions, il s'arrime alors au plan de services individualisés et/ou au plan de transition. Le choix du terme «plan d'action» dans le processus de mise en oeuvre de notre modèle de services est donc délibéré et permet d'englober l'ensemble des services, des pratiques ou des interventions nécessaires pour la réussite scolaire d'un élève qui rencontre des difficultés dans son parcours scolaire. En ce sens, le plan d'action proposé ici se distingue de celui proposé par exemple au Nouveau-Brunswick, où il sert d'appui au plan d'intervention individualisé et est conçu par l'enseignant (Leblanc et Vienneau, 2010; Ministère de l'Éducation du Nouveau-Brunswick, 2008).

Les données recueillies auprès des intervenants, y incluant les parents des élèves ciblés, révèlent des effets probants des interventions proposées par les équipes de soutien. Les intervenants disent avoir remarqué chez les élèves ciblés des progrès scolaires, socioaffectifs et émotionnels, sociaux, comportementaux et de leur participation en classe. D’ailleurs les recherches suggèrent depuis un bon moment déjà que les équipes de soutien à l’enseignant augmentent la performance des élèves (Bahr, Fuchs, et Fuchs, 1990; Chalfant et Pysh, 1989; Fuchs, 1991). Cette situation semble être confirmée par les intervenants de notre étude. Les enseignants qui se sont investis avec l’équipe de soutien et qui ont assuré les suivis avec l’équipe-école ont rapporté des changements chez les élèves qui présentent un trouble du spectre de l’autisme. De la même manière, lors des rencontres de suivi ou lors de discussions avec les enseignants, les parents indiquent une progression de leur enfant. Ils disent l’attribuer aux stratégies recommandées par l’équipe et affirment remarquer des changements à la maison. Dans ce sens, nos données viennent appuyer les résultats de l’étude d’Andringa et Keller’s (1991) qui démontrent clairement que le modèle des équipes de soutien, lorsqu’utilisé efficacement comme modèle collaboratif, peut assurer le maintien des élèves en difficulté en classe ordinaire (Labonté et Trépanier, 2011). En outre, il semble que le travail interagence contribue à diminuer l’exclusion des élèves qui ont des difficultés de comportement (Webb et Vuillamy, 2001). Il y a lieu de croire que cet état de fait s’applique également aux élèves qui présentent un trouble du spectre de l’autisme. Les résultats obtenus confirment que le modèle d’équipe de soutien à l’enseignant peut répondre à différents besoins des intervenants scolaires et assurer une réussite pour les élèves diagnostiqués comme ayant un trouble du spectre de l’autisme. Ils ouvrent de plus la voie pour intégrer les services pour tout élève à risque d’échec scolaire inclus dans la classe ordinaire.

Enfin, nos outils de collecte de données ayant été axés sur les perceptions des intervenants, il serait possible de concentrer une prochaine collecte de données sur la validation de ces perceptions par l’utilisation d’outils standardisés. D’autres voies de recherche seraient d’investiguer les effets à long terme d’une telle démarche, notamment sur le cheminement des élèves qu’elle aurait desservis, de leurs parents et des intervenants scolaires impliqués, voire des orientations et politiques du conseil scolaire.