Abstracts
Résumé
Une question reste actuelle : un code, envisagé comme l’aboutissement ultime de la réflexion sur le droit en tant qu’objet de science, doit-il être un ensemble construit qui obéit à une logique à la fois pratique et préétablie, ou ne peut-il être qu’un ouvrage de compilation des sources normatives présentées sous un format compact et aisé pour la consultation ?
Cette question reste toujours au fond des problématiques contemporaines de la codification et elle avait déjà été envisagée, presque dans les mêmes termes, à l’occasion de l’immense entreprise que devait constituer la consignation par écrit des normes du droit. Aussi, est-ce à un aperçu de la progression de cette réflexion que l’on invite le lecteur à travers quelques-unes des grandes étapes historiques de cette évolution.
Le besoin ressenti de disposer d’un corpus offrant une mise à disposition aisée des normes juridiques donna idée à des praticiens, essentiellement des juges, de mettre par écrit les normes coutumières qu’ils devaient mettre en oeuvre dans leurs jugements dès la fin du XIIe siècle.
Puis, de privée qu’elle était, cette initiative fut reprise à son compte par le pouvoir royal dès le milieu du XVe : le roi Charles VII prescrivait en effet la rédaction officielle des coutumes des différents pays du royaume.
La mise à disposition de ces ensembles normatifs, dorénavant écrits et moins aléatoires, permit de passer à l’observation des normes envisagées maintenant pour elles-mêmes. Le droit devint ainsi un objet de science, suscitant tout un travail de comparaison, de recherche de la rationalité des règles et même, la formulation que pourrait bien présider à un ensemble assez disparate, une forme d’esprit commun. Cet esprit commun fut un des moteurs de la quête pour une unité juridique du royaume et la question de la confection de codes put alors être abordée. Un tel travail commença avec le règne de Louis XIV et fut partiellement continué sous les règnes de ses successeurs, mais il n’avait concerné que les lois du roi et non l’ensemble du droit coutumier.
C’est avec la Révolution française que le principe de constituer un Code civil unique pour la nation fut posé; mais il ne devait déboucher qu’en 1804. Le nouveau Code s’inspirait de la tradition antérieure tout en intégrant les apports que lui avait fait subir le droit révolutionnaire. Ce Code, qui a deux siècles d’existence, voit régulièrement se poser la question de sa refonte qui est sans cesse reculée pour privilégier des refontes partielles. À cet égard, la Belle Province sut prendre le pari d’offir un nouveau Code civil en 1994 pour remplacer l’ancien de 1867. Par ailleurs, on voit se multiplier l’apparition de « codes » qui n’en sont guère dans la mesure où ils se bornent à opérer des compilations sans obéir à aucune logique d’organisation. L’idée de codification demeure avec des questions inchangées quant au fond pour savoir ce que doit être un code.
Ce petit détour par l’histoire permet ainsi d’éclairer le contexte ancien de questions actuelles.
Abstract
Nowadays, a question still subsists: does a code, considered as the result of reflecting upon the Law as a scientific object, have to be a rational entity which complies with a practical and preestablished logic or is it simply a compiled work of normative legal sources, presented as a compact format which is easily accessible?
This question remains at the heart of the matter when comparing the French and the common-lawyer attitudes on the general purpose of codification. It had been already considered when the French royal power initiated the process of putting into writing the legal rules originating from the customary law. The reader is therefore invited to follow different stages of the historical evolution of the codification, from the middle-ages up to the Napoleonic 1804 Civil Code. The first step was initiated by practitioners (mostly judges) who, as early as in the 12th century, put into writing the customary law they applied in their judgements. The urgent need of having at its disposal a comprehensive normative corpus which presented an easier access to customary rules of law, led the royal power to order, in the middle of the 15th century, an official codification of the customary laws of the "sundry countries of the realm."
This codification enabled to reach a further stage. The fact that the law was now considered, scientific matter, gave rise to works of comparisons and to searching for the rationality of the rule considered individually and as a whole. From these apparently ill-assorted sets of rules, the idea that these rules were inspired by a common background or a common spirit progressively emerged. This was certainly the major impulse which was to lead to the quest for a legal and normative unity. The codification could be planned as such and was initiated by King Louis XIV who promulgated his "great Ordinances" from 1667 up to 1685. King Louis XV continued the codification but cautiously. Nevertheless the royal statutes were the only legal rules to be concerned by these codifications, the customary rules being put aside.
The principle of a unique and unified Civil Code was clearly laid down in the beginning of the 1789 Revolution but it could not succeed before the Napoleonic times where the 1804 Civil Code was promulgated. The French Civil Code is today a bisecular Code and the question of its revision or of its entire remodeling is regularly asked but unceasingly postponed. However, the Canadian province of Québec could have shown the way when it let a new Civil Code be promulgated in 1994. Moreover, the modern "codes" which are published are not codes at all, they are only compiled statutes or by-laws without any logical organization. The principle of codification still instigates many unanswered questions.
A brief history review may help to explain and to answer some pertinent questions for our times.
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