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La face cachée de l’organisation : groupes, cliques et clans, par Luc Brunet et André Savoie, Montréal : Les Presses de l’Université de Montréal, 2003, 158 p., ISBN 2-7606-1866-8.[Record]

  • Richard Pépin

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  • Richard Pépin
    Université du Québec à Trois-Rivières

Même si au cours de leur carrière la plupart des gens a déjà fait partie au moins d’un groupe informel en milieu de travail, c’est-à-dire d’un groupe qui émerge sans avoir été planifié par l’autorité formelle, on ne connaît encore que très peu de choses sur l’émergence, le développement et les effets des groupes informels dans les organisations. C’est précisément ce vide que cherche à combler ce volume. En s’appuyant sur près de dix années d’études sur le terrain menées par une équipe de recherche de l’Université de Montréal sur le développement naturel des groupes en milieu de travail, cet ouvrage présente une synthèse fort bien appuyée des connaissances empiriques acquises depuis les années 1930 sur un phénomène social qui, même s’il fait partie intégrante de la vie organisationnelle, demeure néanmoins encore très peu étudié. À cette fin, l’ouvrage, qui comporte cinq chapitres, situe tout d’abord la notion de groupe informel à l’intérieur du développement de la psychologie du travail et des théories de l’organisation. Par la suite, il définit la nature des groupes non officiels dans les organisations, puis attire l’attention tour à tour sur l’émergence et l’influence de la culture du groupe informel, sur les fonctions, les rôles et les effets des groupes informels sur le fonctionnement de l’organisation, et enfin sur le rôle du groupe informel dans l’accès, la rétention et la déformation possible de l’information en milieu organisationnel. Le premier chapitre traite de la réalité informelle des organisations. On y apporte des distinctions utiles entre la structure formelle et la structure informelle en rappelant qu’à toute structure formelle (ou ensemble de relations prescrites et officialisées entre les unités ou les membres d’une organisation) se greffe inévitablement une structure informelle (ou liens non mandatés en vertu des règles de l’organisation formelle et qui émergent spontanément de manière à satisfaire les besoins des individus). À ce propos, les auteurs rappellent à juste titre que les études réalisées à l’usine Western Electric de Hawthorne sous la gouverne d’Elton Mayo (1933), et plus tard sous celle de Roethlisberger et Dickson (1939), ainsi que l’étude empirique réalisée par l’Institut Tavistock dans les mines de charbon britanniques vers la fin des années 1940, furent les premières à mettre en évidence l’inévitabilité des relations informelles et leur impact sur l’efficacité de l’organisation. Le deuxième chapitre se concentre sur la définition et la nature du groupe informel. Les auteurs associent d’entrée de jeu les groupes informels aux groupes restreints, c’est-à-dire à des structures sociales au sein desquelles les êtres humains se retrouvent afin de répondre à certains besoins de la vie en milieu organisationnel. À ce titre, le groupe informel comporte trois caractéristiques : 1) la présence d’interactions psychologiques directes entre les membres (ce qui implique un nombre relativement restreint de personnes); 2) l’interdépendance des membres par rapport à une cible commune (qu’il s’agisse par exemple de s’épauler et de se soutenir ou de s’unir pour accomplir une tâche); et 3) un champ psychologique en constante évolution (sous l’influence de mécanismes normatifs propres au groupe). Les auteurs soulignent qu’en comblant des besoins relationnels (à savoir les besoins de similitude, de complémentarité et de protection) laissés pour compte par l’organisation, le groupe informel constitue un dispositif de gestion des intérêts individuels au travail. Ils précisent que la non-satisfaction de ces besoins ainsi qu’un environnement de travail caractérisé, entre autres, par un degré élevé et rigide de formalisation, une distribution restreinte des ressources, la proximité physique des travailleurs et le caractère plus ou moins stressant du travail peuvent affecter l’émergence et la nature des groupes informels. Les auteurs précisent à ce propos qu’il existe plusieurs types …