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Questions sociales : analyses anglo-saxonnes – Socialement incorrect ?, Par Julien Damon, Paris : Presses Universitaires de France, 2009, 240 p., ISBN 978-2-13-957918-9[Record]

  • Hedva Sarfati

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  • Hedva Sarfati
    Consultante en matière de réformes du marché du travail et de la protection sociale, AISS, Genève

Alors que les décideurs politiques et les acteurs sociaux se débattent sur la direction et sur les moyens de relancer les économies et de préserver la protection sociale à la suite de la crise financière et économique des années 2008-2009, cet ouvrage porte un éclairage fort utile sur une trentaine d’ouvrages d’analyse et de critique anglo-saxons des quinze dernières années concernant les orientations de l’État-Providence, des politiques sociales et des divers objectifs qu’elles poursuivent ou devraient poursuivre et sur les moyens de mise en oeuvre de ces politiques qu’il convient de réorienter pour en assurer une meilleure efficacité. Il s’agit d’auteurs nord-américains ou européens enseignant dans des universités américaines et anglaises, la plupart sont peu connus ou peu cités en Europe et n’ont pas encore été traduits en français. L’ouvrage est donc une compilation de recensions faites par l’auteur, sociologue de formation, mais ayant des solides connaissances en économie. Les textes sont très divers par leur portée et leur approche présentant une originalité quant aux sujets abordés et aux préconisations suggérées. Ils sont regroupés autour de dix questions de société abordées de façon critique pour déterminer les trajectoires respectivement du modèle social (français, européen, blairiste, etc. ) et des diverses politiques concernant successivement la protection sociale, la famille, l’enfance, l’exclusion, les sans-abri, l’insécurité, les incivilités, la discrimination raciale, le bien-être et, un peu moins attendues dans ce contexte, les voies d’accès et les contours du management, abordant aussi le problème de conciliation entre vie professionnelle et personnelle, plus proche des préoccupations de ce volume. Les auteurs choisis viennent d’horizons divers tant par leurs préférences idéologiques (conservateurs et progressistes, libéraux ou socio-démocrates), que par leur formation (économie, sociologie, criminologie, histoire, journalisme, géographie, droit, philosophie et psychiatrie). Les opinions présentées sont donc fort différentes, parfois « socialement incorrectes » selon l’auteur, qui les présente de façon très didactique, avec des renvois fort utiles à d’autres auteurs, souvent européens, qui contredisent ou étayent les arguments ou qui analysent les mêmes problématiques dans le contexte européen. Ces renvois figurent judicieusement dans des encadrés, facilitant la lecture de sujets aussi divers. L’auteur s’efforce toujours de présenter les différentes thèses de façon équilibrée, en soulignant toujours les côtés positifs et novateurs et leur potentiel d’application au contexte européen, sans ménager les critiques que lui ou d’autres adressent à ces opinions, parfois surprenantes, voire régressives. Étant donné la grande variété des sujets traités et des auteurs cités, ce compte rendu ne peut les résumer. Un bref survol du sommaire donnera une idée de la portée du champ couvert. Ainsi les dix questions, déclinées en autant de chapitres, commencent par un regard critique du modèle social en Europe tel qu’il est exprimé ou pratiqué dans différents contextes européens (France, Danemark, etc.) et tels qu’ils sont vus par les tenants de la « troisième voie » britannique ou aux États-Unis. Ainsi, les détracteurs de l’État-Providence français mettent en avant ses échecs – notamment, le chômage de masse, la ségrégation urbaine, le clivage générationnel, la pauvreté, l’écart grandissant entre secteurs public et privé. Ils lui reprochent le poids du compromis social passé et la puissance du corporatisme qui produisent une société plus inégalitaire et moins solidaire que prétendent ses défenseurs. Alors que ces derniers soulignent ses performances en termes d’espérance de vie croissante, de qualité des équipements, de la réduction de la pauvreté, de la meilleure protection et de l’état de la santé de la population et une fécondité élevée. Parlant de l’Europe, des contributeurs adeptes de la « troisième voie » britannique considèrent qu’une nouvelle protection sociale est prioritaire pour l’avenir de l’Europe, conçue autour de la « flexicurité …