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Contexte de l’étude et problématique

Les universités marocaines sont fermées depuis le lundi 16 mars 2020 au Maroc en raison de la pandémie de COVID-19. Le ministère de l’Éducation nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a recommandé à tous les enseignants de maintenir la continuité pédagogique (note officielle du vendredi 13 mars 2020). Cela consistait à garder le contact avec les étudiants et à assurer la continuité de leurs apprentissages en vue de maintenir les acquis déjà développés depuis le début du semestre 2 et de permettre l’acquisition de nouveaux apprentissages à distance. De ce fait, les enseignants sont impliqués dans une autre forme d’enseignement, à distance, en s’appuyant sur les outils numériques de l’environnement numérique de travail (ENT). Ainsi, dans ces nouvelles conditions de travail, il est légitime de s’interroger sur l’efficacité de ce type d’enseignement en explorant la perception des étudiants et en évaluant leur satisfaction à l’égard de l’EAD. L’une des méthodes utilisées pour évaluer l’efficacité de cette méthode d’apprentissage consiste à évaluer la satisfaction des étudiants (Avery et al., 2008; Burns, 2013).

En effet, l’évaluation des enseignements par les étudiants (EEE) est une démarche de recueil d’information auprès des étudiants « sur le processus d’enseignement ou d’apprentissage dont ils ont été bénéficiaires lors d’un ou plusieurs cours donné(s) » (Detroz, 2014). C’est une forme d’évaluation qui s’est développée en vue d’améliorer l’enseignement dans une perspective d’évaluation formative.

Notre problématique s’inscrit dans une stratégie d’amélioration de la qualité de l’enseignement à distance (EAD). L’objectif est d’évaluer la satisfaction des étudiants à l’égard de ce nouveau mode d’enseignement dans le cadre du cours « Méthodologie et technologie de l’évaluation ». Sahin et Shelley (2008) affirment qu’il est important d’explorer la relation entre la satisfaction des étudiants et l’EAD. Dans cette optique, le modèle d’acceptation de la technologie (technology acceptance model [TAM]) fournit un cadre théorique important pour comprendre l’utilisation des nouvelles technologies et les attitudes sous-jacentes. L’objectif de ce modèle théorique est de prédire l’acceptation des TIC par les utilisateurs. Le TAM analyse cette acceptation en se basant sur deux facteurs : la perception de l’utilité et la perception de la facilité d’utilisation des TIC (Dillon et Morris, 1996). Ce modèle aide les enseignants à déterminer l’acceptation des programmes en ligne (Davis et al., 1989).

De façon plus précise, notre problématique vise à répondre à la question suivante :

Est-ce que l’utilité et la facilité d’utilisation perçues influencent positivement la satisfaction des étudiants à l’égard de l’enseignement à distance?

1. Cadre théorique

1.1 Les TIC et l’enseignement à distance

Définition des TIC

L’expression TIC renvoie à « un ensemble de technologies parmi lesquelles l’ordinateur occupe une place privilégiée. Ses caractéristiques principales sont de rendre accessible et de transmettre, n’importe où dans l’espace humain, une quantité quasi illimitée de données très diversifiées » (Lietart, 2015, p. 57). L’utilisation des TIC dans les apprentissages peut modifier la forme de transmission du savoir et l’appropriation de celui-ci en rompant avec les trois unités de temps, lieu et action, ce qui permet aux apprenants de se former sans avoir à se déplacer dans un lieu spécifiquement destiné à la formation, en entrant en contact avec le formateur-accompagnateur ou l’enseignant par l’intermédiaire des moyens de communication (Peraya et Peltier, 2012).

Intégration pédagogique des TIC dans l’enseignement

Les TIC et l’Internet ont facilité la mise en place des approches d’enseignement innovantes axées sur les interactions et le lien social. De ce fait, la relation personne-machine est prise en considération dans les nouvelles méthodes d’enseignement. L’échange et le dialogue entre l’utilisateur et l’ordinateur ont poussé des chercheurs comme Naymark à « humaniser » la machine. Celui-ci définit l’interactivité comme étant : « la capacité de réaction de l’ordinateur (et de ses logiciels) aux actions de l’usager, sa capacité de rétroaction ou feed-back » (Naymark, 1999, p. 21).

En effet, l’e-learning est un terme anglais qui veut dire « apprentissage par des moyens électroniques ». Il réfère à l’utilisation du Web et des nouvelles applications technologiques d’apprentissage distribué pour améliorer le processus d’acquisition d’un nouveau savoir ou la mise à jour de nouvelles connaissances. Pour Moore (1990), l’EAD est « l’ensemble des dispositifs fournissant une instruction par communication d’imprimés ou d’information électronique à des personnes engagées dans un apprentissage planifié à un lieu ou un moment différents de ceux auxquels interviennent les instructeurs[3] » (p. xv). C’est un ensemble cohérent, organisé (scénarisé), souple et régulé d’activités pédagogiques (pour l’apprenant) caractérisé par :

  • une séparation spatiale et/ou temporelle entre apprenant et enseignant;

  • un recours aux médias permettant l’apprentissage malgré cette séparation;

  • un accompagnement (tutorat pédagogique, animation de groupe, etc.).

On peut ainsi considérer l’EAD comme un outil, parmi une large panoplie de moyens, qui peut à la fois faciliter l’apprentissage et soutenir des formes variées d’enseignement. C’est donc un outil ou plutôt un moyen dynamisé par les TIC utilisé pour faciliter ou prolonger l’enseignement et l’apprentissage.

1.2 L’évaluation des enseignements par les étudiants

Définitions

L’évaluation des enseignements est un outil mis à la disposition des enseignants pour recueillir l’avis des étudiants sur la qualité des enseignements. C’est aussi, selon Younes (2006), une forme d’évaluation particulièrement significative puisqu’elle touche au coeur de l’acte pédagogique et qu’elle se situe à la confluence des principaux acteurs du système d’enseignement universitaire. L’objectif poursuivi est d’établir et d’analyser les forces et les faiblesses d’un enseignement afin d’y apporter des améliorations progressives et continues pour en augmenter la qualité.

Le point de vue des étudiants sur les enseignements qu’ils reçoivent est un élément fondamental puisqu’ils en sont les principaux destinataires et aussi parce qu’ils apparaissent de plus en plus comme des partenaires de la dynamique de formation.

Les critères de l’évaluation

Comme le souligne Murray (1984), les étudiants sont les seuls témoins constants de la prestation de l’enseignement, ils sont donc en bonne place pour juger si les exposés du professeur sont clairs, si les commentaires sur les travaux les aident à progresser et si les documents utilisés favorisent la compréhension de la matière.

Les critères d’évaluation d’un enseignement sont nombreux et il n’est pas toujours facile d’en isoler certains au détriment d’autres. Certains enseignants universitaires adoptent des méthodes axées sur l’exposé magistral, parfois agrémenté d’une technique plus interactive (Detroz et Younes, 2014). D’autres ont recours à l’approche par projet. Certains enseignants demandent aux étudiants de produire des exposés interactifs. Notons enfin que des enseignants ont également recours à la mise à distance de leurs cours ou exploitent l’apprentissage hybride (blended learning) (Detroz, 2010). Comme nous le voyons, les options sont nombreuses et les objets d’évaluation multiples. Il faudra faire des choix et c’est dans ce sens que des efforts sont faits pour proposer un cadre conceptuel qui peut s’adapter à chacun des cas de figure évoqués. Citons, à titre d’exemple, l’approche fondée sur des preuves (evidence-based), qui consiste à exploiter la littérature portant sur le sujet et à se concentrer sur les éléments dont on a la preuve qu’ils favorisent les apprentissages des étudiants (Detroz, 2008).

1.3 Le modèle d’acceptation de la technologie (TAM)

Définitions

En 1986, Davis a développé ce modèle théorique d’évaluation des effets et des caractéristiques d’un système informatique sur l’acceptation de l’utilisateur (figure 1). C’est le plus simple, le plus facile à utiliser et le plus puissant des modèles sur les usages informatiques (McFarland et Hamilton, 2006). Les études qui sont focalisées sur le TAM cherchent à comprendre la relation entre les perceptions (l’utilité perçue, la facilité d’utilisation perçue des technologies) et l’intention d’usage (Shroff et al., 2011). Ce modèle étudie l’adoption des TIC sous l’angle de la facilité d’utilisation perçue et de l’utilité perçue sur la base des intentions de comportement et les croyances relatives au système (Van Akkeren et Harker, 2002). Son objectif est de fournir une explication des déterminants de l’acceptation.

Figure 1

Modèle d’acceptation de la technologie de Davis (1989)

Modèle d’acceptation de la technologie de Davis (1989)

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La perception de l’utilité (PU) et la perception de la facilité d’utilisation (PFU) sont les déterminants de l’attitude envers l’utilisation des innovations (Davis et al., 1989).

L’utilité perçue est définie comme « le degré auquel une personne croit que l’utilisation d’un système particulier pourrait améliorer sa performance au travail [the extent to which a person believes that utilising a particular method or technique would enhance his or her job performance] » (p. 320).

La facilité d’utilisation perçue est définie comme « le degré auquel une personne croit que l’utilisation d’un système particulier sera exempte d’efforts [the extent to which an individual considers that making use of a specific system would be effortless] » (p. 320).

Modèle théorique sur l’acception d’un système d’information pour l’enseignement

Selon Bétrancourt (2008), pour évaluer le potentiel de prise en main du système d’information pour l’enseignement (SIE) par les utilisateurs, il est nécessaire d’évaluer le rapport entre le SIE et l’utilisateur. Celui-ci se décompose en trois dimensions :

L’utilisabilité. Elle porte sur la qualité de la relation entre l’individu et le système (Bétrancourt 2008). Le SIE sera jugé utilisable en fonction de critères de performance, de satisfaction de l’utilisateur et de rapidité de l’apprentissage (Luethi, 2012). L’utilisabilité répondra à des exigences d’efficience, de prévention des erreurs, de satisfaction (Nielsen, 1993) ou de convivialité, de facilité d’utilisation (Bétrancourt, 2008) et, élément particulier au SIE, à des exigences en matière d’apprentissage.

L’utilité. C’est la relation entre l’utilisation du système et les objectifs de l’individu ou du groupe (Bétrancourt, 2008). Pour le SIE, l’utilité se définit comme l’adéquation entre l’objectif défini de l’individu et l’apprentissage effectif (Tricot et al., 2003). Cette dimension permet d’évaluer l’adéquation qui s’inscrit dans la relation entre l’objectif et le résultat, en faisant la promotion des activités d’apprentissage (Luethi, 2012).

L’acceptabilité. « L’acceptabilité réfère à l’ensemble des relations entre le système, l’individu et son environnement au sens large. » (Bétrancourt, 2008). Elle se mesure par le changement de comportement nécessaire à l’adoption du SIE par l’individu en contexte réel (Luethi, 2012). Cette dimension s’inscrit dans la relation entre le SIE, l’individu et l’environnement.

2. Cadre pratique

2.1 Méthodologie

Rappelons que l’objectif de la présente recherche est d’évaluer la satisfaction des étudiants à l’égard de ce nouveau mode d’enseignement dans le cadre du cours « Méthodologie et technologie de l’évaluation ». À cet effet, nous avons opté pour une approche quantitative de données collectées. Nous présentons dans cette section la démarche suivie, le terrain d’étude, le public cible, l’instrument utilisé ainsi les techniques de collecte et de traitement des données.

L’environnement d’apprentissage et le scénario adopté

Afin d’assurer la continuité pédagogique en cette période de confinement, nous avons administré le cours à travers la plateforme Moodle, accessible dans l’espace numérique de travail de l’Université.

Le scénario est basé sur la mise en place d’une classe virtuelle au moyen de l’outil BigBlueButton de Moodle et d’une série de tests sous forme de devoirs remis après chaque séquence de cours. Le forum aussi est proposé aux étudiants afin de favoriser la communication entre les étudiants et entre l’enseignant et les étudiants.

La séance de la classe virtuelle comprenait deux volets. Dans un premier temps, les étudiants étaient invités à présenter leurs exposés, puis dans un deuxième temps, l’enseignant présentait son cours afin de compléter et renforcer les concepts étudiés.

Figure 2

Capture d’écran d’un exemple d’outils utilisés

Capture d’écran d’un exemple d’outils utilisés

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Pour les évaluations formatives, des rétroactions sont proposées aux étudiants en vue d’une amélioration continue de l’apprentissage (figure 3).

L’expérimentation a été réalisée pour l’enseignement du cours « Méthodologie et technologie de l’évaluation » destiné aux étudiants de la première année de master, et ce, pour le semestre 2 de l’année universitaire 2019‑2020.

Figure 3

Capture d’écran montrant un exemple de rétroaction fourni par l’enseignant

Capture d’écran montrant un exemple de rétroaction fourni par l’enseignant

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Instrument de mesure et collecte de données

Les critères d’évaluation ont été élaborés à la suite d’une recension des écrits fondée sur la question de la qualité en formation à distance, en référence en particulier aux travaux de Shelton (2011) et de Chaney et al. (2010). Nous retenons comme pertinentes pour l’évaluation de l’enseignement les dimensions suivantes :

  • l’organisation de l’enseignement et l’apprentissage;

  • l’encadrement;

  • la technologie;

  • l’appréciation générale.

Les dimensions d’évaluation de l’enseignement retenues ont été critériées, puis nous avons déterminé les indicateurs afin de concrétiser les critères retenus; ce travail est illustré au tableau 1.

Tableau 1

Dimensions, critères et indicateurs retenus pour élaborer le questionnaire

Dimensions, critères et indicateurs retenus pour élaborer le questionnaire

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Ces quatre dimensions font référence à la perception de la facilité et des conditions d’utilisation et à l’utilité perçue, permettant ainsi d’avoir une vision du niveau de satisfaction des étudiants à l’égard de l’utilisation de cette nouvelle approche pédagogique, telle qu’elle est évoquée par le contexte théorique de l’étude.

Les dimensions de l’évaluation et les critères sont reflétés par des items spécifiques dans un questionnaire de type multidimensionnel. Ces items sont des propositions par rapport auxquelles les étudiants se positionnent sur une échelle de type Likert en 5 points : pas du tout, plutôt non, plutôt oui, tout à fait, plus une case « sans avis ».

Avant la passation du questionnaire, le respect des aspects éthiques est pris en considération. La participation à cette étude rentre dans le cadre du volontariat et le consentement éclairé des étudiants est obtenu après explication de l’objet et de l’intérêt de l’étude ainsi que du respect de l’anonymat. La distribution du questionnaire aux étudiants est faite après la fin du cours sur la plateforme Moodle, le mode « anonyme » ayant été activé afin de respecter l’anonymat des participants.

Échantillon

Notre échantillon est constitué de 29 étudiants.

2.2 Présentation et analyse des résultats

Fiabilité de l’instrument de mesure

Nous apprécions la consistance interne des échelles à l’aide du coefficient alpha de Cronbach (1951). Celui-ci permet de tester la cohérence de chaque item avec l’ensemble des autres énoncés de l’échelle à laquelle il appartient (Jolibert et Jourdan, 2006, p. 183). Selon ces auteurs, pour une recherche exploratoire, un coefficient de 0,5 ou 0,6 peut être considéré comme acceptable. Pour la présente étude, les indices de cohérence interne des sous-échelles vont de 0,81 à 0,94 :

Tableau 2

Indice de Cronbach

Indice de Cronbach

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Tous les coefficients alpha de Cronbach (tableau 2) attestent une très bonne fiabilité des sous-échelles de notre instrument de mesure avec un α = 0,95 de toute l’échelle. On peut donc conclure que c’est un instrument cohérent du point de vue de la mesure.

Analyse du questionnaire

Tous les étudiants (= 29) ont participé à cette étude (taux de participation = 100 %). La majorité des étudiants étaient de sexe féminin (79 %, = 23).

Globalement, les étudiants avaient une perception positive à l’égard du contenu du cours « Méthodologie et technologie de l’évaluation » en ligne.

La majorité d’entre eux 96,5 % (n = 28) jugeaient que l’organisation du cours était bien structurée et que les activités (exercices, devoirs) étaient bien choisies et en rapport avec le contenu du cours 100 % (n = 29) (tableau 3).

Tableau 3

Perception des étudiants sur le contenu dans le cadre du cours Tech/Éval

Perception des étudiants sur le contenu dans le cadre du cours Tech/Éval

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Concernant l’apprentissage dans le cadre du cours Tech/Éval, la quasi-totalité des participants 97 % (n = 28) trouvaient que les apports théoriques et les exemples étaient bien articulés. Pour le rythme d’apprentissage, 90 % (n = 26) des étudiants considéraient que le rythme du cours était adapté à leur rythme d’apprentissage. En ce qui concerne l’évaluation formative, 97 % (n = 28), des étudiants jugeaient que l’évaluation formative était intéressante et facilitait leur apprentissage grâce aux rétroactions de l’enseignant. En outre, 93 % (n = 27) ont déclaré qu’ils ont pu acquérir une nouvelle méthode d’apprentissage grâce à cette expérience (tableau 4).

En ce qui concerne l’utilisation de la technologie dans le cadre du cours Tech/Éval, la quasi-totalité des participants 97 % (n = 28) trouvaient que la navigation dans l’ENT était claire et facile de même que l’environnement d’apprentissage, 93 % (n = 27) (tableau 5).

Pour ce qui est de la dimension de l’accompagnement des étudiants dans le cadre de ce cours, 97 % (n = 28) considéraient que l’enseignant était disponible pour répondre aux questions des étudiants et qu’il est intervenu pour régler certains problèmes de divers ordres, 86 % (n = 25) (tableau 6).

Tableau 4

Perception des étudiants sur l’apprentissage dans le cadre du cours Tech/Éval

Perception des étudiants sur l’apprentissage dans le cadre du cours Tech/Éval

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Tableau 5

Perception des étudiants sur l’utilisation de la technologie dans le cadre du cours Tech/Éval

Perception des étudiants sur l’utilisation de la technologie dans le cadre du cours Tech/Éval

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Tableau 6

Perception des étudiants sur l’accompagnement dans le cadre de ce cours

Perception des étudiants sur l’accompagnement dans le cadre de ce cours

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Quant à l’appréciation générale de l’EAD, 76 % (= 22) des étudiants trouvaient que l’utilisation de l’EAD améliorait leur apprentissage et 86 % (= 25) jugeaient que l’EAD améliorait leur productivité et qu’ils pouvaient ainsi accomplir leur travail plus rapidement 76 % (= 22) (tableau 7).

Tableau 7

Appréciation générale des étudiants sur l’enseignement à distance

Appréciation générale des étudiants sur l’enseignement à distance

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2.3 Discussion

Dans cette étude, tous les étudiants (n = 29) ont participé à l’enquête, ce qui témoigne de leur intérêt à l’égard de cette nouvelle pratique pédagogique. D’ailleurs, leur assiduité à ce cours en ligne a été remarquée à travers leur participation à la classe virtuelle au moyen de BigBlueButton de Moodle. De plus, la quasi-totalité s’étaient engagés à rendre les travaux de l’évaluation formative et les résultats de cette évaluation étaient satisfaisants.

En général, les étudiants avaient une perception positive à l’égard de l’enseignement du cours de Tech/Éval à distance. Les résultats montrent que 93 % d’entre eux jugeaient que la structuration du cours était bonne et 97 % confirmaient que le cours est structuré selon un fil conducteur et que le contenu est riche et stimule leur apprentissage. De plus, 97 % trouvaient que les activités du cours (nature des exercices, devoirs, projets...) étaient bien choisies et en rapport avec le contenu du cours. Ceci pourrait améliorer le niveau d’appréciation et d’adhésion des étudiants à cette méthode. En fait, Nugraheni et al. (2012) ont étudié la perception des étudiants sur l’EAD et ont relevé que les étudiants appréciaient et soulignaient l’importance de cours bien structurés dans le processus d’apprentissage. La quasi-totalité des étudiants (93 %) avaient une perception positive à l’égard de la clarté des objectifs, c’est-à-dire à leur présentation et à leur lien avec les activités d’apprentissage et le processus d’évaluation formative. McGorry (2003) et Martinez et al. (2006) soulignent l’importance de ces éléments dans les cours en ligne. En outre, l’un des principaux avantages de l’EAD est la flexibilité et l’adaptabilité au rythme de l’apprenant (Karaman, 2011; Lahti et al., 2014; Sowan et al., 2013). Ceci a été confirmé par la majorité des participants. Au total, 90 % des étudiants trouvaient que le rythme du cours était adapté à leur rythme d’apprentissage. Il a été démontré que la flexibilité dans l’utilisation de la méthode d’apprentissage en ligne est considérée comme le facteur le plus important de la qualité de l’apprentissage en ligne par les apprenants (Kanini Mbwesa, 2014). Un autre facteur de qualité considéré comme très important est la communication avec les enseignants et les autres étudiants (Kanini Mbwesa, 2014). Selon la présente étude, 86 % des étudiants ont pu communiquer avec leurs collègues et enseignants en vue de résoudre certains problèmes d’apprentissage et 97 % confirmaient qu’un travail collaboratif a pu être instauré lors de la réalisation des travaux (une entraide et un échange avec les autres). Les interactions enseignant-étudiants ou étudiants-étudiants sont importantes, non seulement pour la motivation des apprenants, mais aussi pour renforcer la compréhension par les étudiants du matériel qui leur est présenté (Kanini Mbwesa, 2014).

En ce qui concerne un autre élément très important de l’EAD, le suivi des étudiants à travers l’évaluation formative, 97 % des étudiants jugeaient que l’évaluation formative intéressante leur permettait de progresser dans leur apprentissage et que les rétroactions fournies par l’enseignant les aidaient à mieux comprendre le cours. Deci et Ryan (2000) ont relevé que l’usage des technologies pour faire l’évaluation formative représente une compétence-clé pour permettre aux étudiants de mieux réussir, d’augmenter leur sentiment d’affiliation et d’accroître leur engagement comportemental (Chemsi et al., 2019).

Concernant la perception des étudiants sur la facilité d’utilisation de la technologie, la quasi-totalité, soit 97 %, trouvaient que la navigation à travers l’ENT était facile et 93 % que l’utilisation de l’environnement d’apprentissage était claire. De même, les ressources déposées par l’enseignant étaient jugées facilement accessibles et téléchargeables à 90 %. Cela peut s’expliquer par le fait que les étudiants trouvaient que l’environnement d’apprentissage était facile à utiliser. L’utilisabilité répond à des exigences d’efficience, de prévention des erreurs, de satisfaction (Nielsen, 1993) ou de convivialité et de facilité d’utilisation (Bétrancourt, 2008).

Concernant l’accompagnement, les étudiants avaient une perception positive à son égard. En effet, 97 % des étudiants trouvaient que la gestion des groupes était suivie par l’enseignant. En outre, l’orientation des étudiants est très importante pour garantir de meilleurs résultats. À ce titre, 93 % des étudiants considéraient que les guides et tutoriels étaient clairs pour les initier à l’utilisation de la plateforme, ce qui les encourageait à suivre le cours et améliorait leur satisfaction envers cette pratique pédagogique. D’ailleurs, l’obstacle à l’utilisation de l’EAD le plus fréquemment mentionné est le manque de soutien technique et administratif (Kanini Mbwesa, 2014). Parmi les facteurs contributifs de l’efficacité de l’EAD figure la rétroaction donnée au cours de l’EAD qui permet d’améliorer les résultats de l’apprentissage (Cook et al., 2010). D’après les résultats de cette étude, 93 % des étudiants confirmaient qu’ils recevaient des rétroactions de la part de leur enseignant.

En ce qui concerne l’appréciation globale de l’EAD, 76 % des étudiants approuvaient l’idée de l’utilisation de l’EAD dans leurs études et jugeaient cette pratique pédagogique utile. Par ailleurs, 86 % trouvaient que l’EAD améliorait leur productivité et 76 % qu’il améliorait leur performance (il leur permet d’accomplir leur travail plus rapidement et améliore leur apprentissage). Ceci va de pair avec les résultats des études de Lu et al. (2009), McMullan et al. (2011) et Smeekens et al. (2011) qui ont montré que les participants du groupe apprenant en ligne présentaient des résultats de performance significativement meilleurs par rapport à leurs pairs du groupe témoin. Quant à l’efficacité, la majorité des étudiants (69 %) trouvaient que l’EAD l’améliorait. Dans le même sens, dans l’étude de Smeekens et al. (2011), les participants appartenant au groupe qui suivait l’EAD avaient un score d’autoefficacité significativement plus élevé par rapport aux participants du groupe témoin.

Nous concluons que l’EAD intégrant un scénario pédagogique bien adapté aux besoins et aux attentes des apprenants (comme l’accompagnement, le suivi, l’interaction entre apprenants et enseignants, les activités pédagogiques variées, la facilité et la disponibilité des supports pédagogiques, les évaluations formatives et les rétroactions, la perception de la facilité d’utilisation de la technologie et de l’utilité des activités pédagogiques) contribue à son succès, ce qui rejoint les résultats de l’étude de Riyami (2018) qui a montré que l’accompagnement des étudiants par l’enseignant et la collaboration entre apprenants sont des facteurs indispensables pour l’implication des étudiants dans un EAD. Soulignons également que les interactions apprenants-contenus en EAD sont hautement corrélées à la satisfaction des apprenants (Kuo et al., 2014), ce qui semble également être le cas dans notre étude.

Il importe de rappeler aussi que le cours qui a fait l’objet de notre étude est « Méthodologie et technologie de l’évaluation », un cours qui est en rapport direct avec les technologies. En cela, les apprenants ont trouvé la plateforme bien adaptée à leurs besoins de manipulation et de compréhension des outils en ligne. Ceci explique leur acceptation et leur satisfaction à l’égard de leur cours. Plus l’apprenant perçoit sa capacité à utiliser la plateforme pédagogique et plus il l’accepterait (Bandura, 1997/2003; Liaw, 2008). Les apprenants expérimentés avec Internet éprouveraient plus de facilité à accepter les outils d’apprentissage en ligne que les apprenants non expérimentés (Piccoli et al., 2001; Wagner et Flannery, 2004).

Ainsi, les résultats obtenus permettent d’appuyer ce qui semblait faire l’unanimité dans la littérature sur le sujet (Davis, 1989; Venkatesh et Davis, 2000; Venkatesh et al., 2003). La facilité d’utilisation de la plateforme pédagogique est un facteur déterminant dans le processus d’acceptation puisqu’il agit sur l’intention d’utilisation et par conséquent sur la satisfaction des apprenants à l’égard de leur cours.

Nous reconnaissons que les résultats de notre étude ne permettent pas de généralisation, compte tenu du faible nombre de participants. Une autre étude doit être envisagée pour évaluer l’efficacité de l’EAD auprès d’un échantillon plus important. L’inclusion d’un échantillon plus large permettra d’avoir une vision plus claire de la facilité et de l’utilité perçues de l’approche et, ainsi, de son efficacité.

Nous sommes également conscients que plusieurs facteurs peuvent influencer la satisfaction des étudiants dans un cours à distance. Ainsi, d’autres études peuvent être réalisées en associant l’EAD et d’autres variables telles que l’engagement comportemental, l’engagement cognitif ainsi que la motivation autodéterminée des étudiants.

Limite de l’étude

Les limites de cette recherche sont essentiellement relatives à deux critères, à savoir la taille de l’échantillon et la subjectivité des répondants. En ce qui concerne la taille de l’échantillon, le nombre réduit de répondants au questionnaire nous oblige à limiter nos conclusions relatives aux résultats obtenus. Pour ce qui est de la subjectivité, il est à noter que certains participants à l’étude peuvent rapporter leurs avis d’une manière subjective en raison de perceptions des items et non pas de pratiques ou de faits réels.

Conclusion

Face à cette pandémie qui a obligé plus de la moitié de la population mondiale à se confiner, il s’est avéré que l’EAD est l’une des solutions efficientes pour assurer la continuité pédagogique et répondre aux besoins de nos apprenants. Dans ces conditions, il est légitime de s’interroger sur l’efficacité de ce type d’enseignement et d’évaluer la perception des étudiants à l’égard de cette nouvelle approche pédagogique. L’analyse des résultats de cette étude montre que les étudiants évaluaient positivement leur enseignement. Cela veut dire qu’ils considéraient le système d’EAD utile à l’opération de l’apprentissage et facile à utiliser, ce qui a influencé positivement l’acceptation de l’EAD. Pour qu’un système d’information soit accepté, il doit d’abord être facile à utiliser (utilisabilité) et promouvoir des activités d’apprentissage (utilité) (Luethi, 2012).