Comptes rendus

Au miroir du Lac des cygnes de Tchaïkovski, de Laurence Le Diagon-Jacquin[Record]

  • Gabrielle Prud’homme

Maître de conférences à l’Université de Franche-Comté à Besançon, où elle dirige le département de musicologie, Laurence Le Diagon-Jacquin est spécialiste du xixe siècle en musique, arts et littérature. Elle a consacré plusieurs écrits à Liszt : elle s’est intéressée aux rapports entre les oeuvres de ce dernier et l’art pictural dans La musique de Liszt et les arts visuels (Paris, 2010) ; elle a étudié les séries de concerts qu’a offertes le pianiste en France dans Liszt en Bourgogne (Dijon 2011) ; elle a présenté la vie, l’oeuvre et la pensée du musicien dans Liszt. Guide pratique du mélomane (Paris, 2011) ; et elle a contribué à l’édition des actes du colloque de 2011 de l’Université de Rennes à l’occasion du bicentenaire de l’artiste, dont rendait compte le volume Franz Liszt. Un musicien dans la société (Paris, 2013). Dans son plus récent ouvrage, Au miroir du Lac des cygnes de Tchaïkovski, l’auteure se penche sur un autre compositeur romantique, Tchaïkovski, et plus précisément sur son premier ballet, Le lac des cygnes. Elle traite des diverses lectures que soulève la partition en proposant une étude qui retrace le thème du Lac des cygnes à travers différentes oeuvres appartenant à des genres divers, comme le conte Les six frères cygnes (1818) des frères Grimm ou le long-métrage Black Swan (2010) du cinéaste Darren Aronofsky. Cette approche s’avère particulièrement novatrice dans le contexte des publications sur Tchaïkovski ; Le Diagon-Jacquin se distancie en effet des ouvrages purement musicologiques qui abordent la vie et l’oeuvre du compositeur dans la Russie impériale pour proposer de nouvelles perspectives associées à l’interprétation et à la réception du ballet. Le scénario de l’oeuvre constitue le fil rouge de l’ouvrage : l’auteure propose une étude qui s’articule autour du thème du cygne, lequel, selon elle, est ancré dans l’imaginaire occidental depuis le xviiie siècle en raison de sa force symbolique. L’ouvrage est structuré en sept chapitres, qui proposent divers angles d’approche organisés selon l’ordre suivant : les oeuvres littéraires construites autour du thème du cygne et qui ont pu servir d’inspiration au compositeur ; la vision présentée en 1976 du chorégraphe américain John Neumeier, qui transpose Louis II de Bavière au coeur de l’intrigue de Tchaïkovski ; la structure musicale du ballet lui-même et l’analyse du thème d’Odette ; la genèse tumultueuse de l’oeuvre (1877) et ses premiers succès en Russie (1894) à travers la chorégraphie de Marius Petipa et Lev Ivanov ; une lecture psychanalytique de la proposition de 1984 du chorégraphe russe Rudolf Noureev ; la réinterprétation des genres dans la vision chorégraphiée par Matthew Bourne en 1995 ; et finalement, l’adaptation de l’intrigue par le cinéaste américain Darren Aronofsky en 2010 portée par la dimension fantastique du drame. Le Diagon-Jacquin s’intéresse dans son premier chapitre (« Le Lac des cygnes au miroir de la littérature », p. 13-30) aux sources ayant pu inspirer le compositeur. Elle se penche sur les origines du livret et présente diverses oeuvres issues de la littérature fantastique qui auraient pu servir à la genèse du ballet. L’auteure évoque les intrigues de contes de provenance germanique, danoise et russe qui s’appuient sur le thème du cygne : Le voile dérobé (1782) de Musäus, Les six frères cygnes (1818) des frères Grimm, Les cygnes sauvages (1838) d’Andersen et La cane blanche (1855) d’Afanassiev. Elle met ensuite en relation leurs trames narratives avec celle du Lac des cygnes afin de démontrer l’ampleur de l’imaginaire suscité et nourri par les archétypes du lac et du cygne, qui a laissé des traces dans la tradition orale bien avant la création du …

Appendices