Abstracts
Résumé
La présence sur le territoire du Canada d’une importante population originaire des pays musulmans a suscité un contentieux nouveau portant sur des institutions familiales de facture religieuse. Les tribunaux sont de plus en plus sollicités pour donner effet à des décisions de divorce rendues en vertu des lois d’inspiration musulmane. Malgré le libéralisme caractérisant le régime de reconnaissance et d’exécution des décisions étrangères, la jurisprudence québécoise se montre de prima facie assez réfractaire à la réception des divorces islamiques. La présente contribution ambitionne de déterminer les différentes variables qui influencent l’efficacité de ces jugements dans l’espace juridique québécois. L’analyse met en lumière l’ambivalence de la jurisprudence qui traduit le tiraillement entre deux impératifs : celui de préserver la cohésion et les valeurs de l’ordre juridique du for d’une part et celui de favoriser l’harmonie internationale des solutions d’autre part.
Abstract
The presence in Canada of a large population from Muslim countries has given rise to new litigation relating to religion-based family institutions. The courts are increasingly called upon to give effect to divorce decisions made under Muslim laws. Despite liberalism characterizing the regime for the recognition and enforcement of foreign decisions, Quebec jurisprudence is prima facie quite resistant to the reception of Islamic divorces. This contribution aims to determine the different variables that influence the effectiveness of these judgments in the Quebec legal space. The analysis highlights the ambivalence of the case law which reflects the tension between two imperatives: that of preserving the cohesion and the values of the forum's legal order, on the one hand, and that of promoting international harmony between solutions, on the other hand.
Resumen
La presencia en Canadá de una gran población procedente de países musulmanes ha dado lugar a nuevos litigios relacionados con las instituciones familiares de carácter religioso. Cada vez es más frecuente que los tribunales tengan que hacer efectivas las sentencias de divorcio dictadas en virtud de leyes de inspiración musulmana. A pesar del régimen liberal de reconocimiento y ejecución de las decisiones extranjeras, la jurisprudencia de Quebec es, prima facie, bastante resistente a la recepción de los divorcios islámicos. Este trabajo pretende determinar las diferentes variables que influyen en la eficacia de estos juicios en el sistema jurídico de Quebec. El análisis subraya la ambivalencia de la jurisprudencia, que refleja el tira y afloja entre dos imperativos: el de preservar la cohesión y los valores del ordenamiento jurídico del foro, por un lado, y por el otro, el de promover la armonía internacional de las soluciones.
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Les contacts du système juridique québécois avec des systèmes religieux étrangers sont devenus plus fréquents aujourd’hui. La mobilité accrue des personnes et l’accélération des échanges internationaux tendent à accentuer l’intensité des contacts avec des lois étrangères de facture confessionnelle. Cet accroissement particulièrement est dû à l’importance du phénomène migratoire mettant en relation des populations d’origines diverses avec celles du Québec et du Canada.
Avec la récente implantation au pays de ressortissants des États musulmans, les juges québécois doivent faire face à des normes ou pratiques familiales ou sociales « différentes », apportées par l’immigration[1]. On se retrouve alors devant un phénomène bien semblable à celui décrit dès les années 1980 en France sous la plume de Jean Déprez :
L’importance de la communauté musulmane établie en France donne à l'application de son statut personnel une ampleur, une fréquence et une publicité jusqu'alors inconnues, au point de transformer en véritable problème de société ce qui n'était à l'origine qu'une réception occasionnelle et en quelque sorte confidentielle[2].
Un contentieux nouveau portant sur des institutions familiales musulmanes, ignorées jusqu’alors ou contraires aux valeurs de la société d’accueil, s’est multiplié ces dernières années. C’est le cas notamment s’agissant de la polygamie, du mariage coutumier nikah, du recueil légal kafala, de la dot mahr, des régimes matrimoniaux et enfin du divorce musulman dans ses diverses formes[3]. C’est justement ce dernier qui a retenu notre attention dans le cadre de la présente étude.
C'est un lieu commun que de constater l'extrême fragilité des couples un peu partout dans le monde. L’accroissement du nombre de couples originaires d’un pays musulman s’est accompagné naturellement par la multiplication des cas de séparation de ces couples. Il n’est donc guère étonnant qu’en cette terre d’immigration, les tribunaux soient souvent appelés à régler des litiges impliquant des personnes divorcées à l'étranger. Les juges québécois ont dû statuer sur la réception des divorces prononcés dans des pays où la religion demeure une source principale d’inspiration en matière familiale.
La première question qui se pose en pareil cas est de savoir si le statut obtenu à l'étranger peut être reconnu dans la juridiction saisie du litige. C’est alors aux règles de droit international privé qu’il appartient de gérer ce « pluralisme juridique » en vue d’assurer la continuité des relations privées internationales[4]. L’objectif de cette discipline n’est en effet autre que la résolution des difficultés résultant du « phénomène de la frontière »[5], face auquel il doit permettre une certaine circulation des situations juridiques en dépassant les clivages entre les droits internes, voire au sein même des droits internes. Cette préoccupation se pose avec acuité en matière familiale où l’objectif d’assurer une harmonie internationale et une prévisibilité des solutions se traduit par un « besoin social de continuité et de stabilité des états juridiques personnels et familiaux »[6].
Toutefois, lorsqu’il s’agit de donner effet à une situation constituée dans un pays musulman, les tribunaux occidentaux se trouvent régulièrement confrontés à la problématique identifiée par plusieurs auteurs comme relevant d’un « conflit de civilisations »[7], représentation qu’il convient de mettre à l’épreuve[8]. En effet, le juge est appelé alors à articuler une loi civile à une loi religieuse mettent en jeu des conceptions souvent antinomiques, entre Orient et Occident, de l’individu et de sa place dans la cellule familiale et dans la société. Or, les possibilités de communication des ordres juridiques varient grandement en fonction de la nature des systèmes, de leurs sources d’inspiration, des valeurs qui les sous-tendent. Le divorce international met en cause diverses valeurs concernant l'individu et la famille, les rapports entre le droit et la religion, le rôle de l'État, et ces valeurs s'opposent parfois radicalement[9]. À cet égard, les divergences qui séparent les droits religieux des droits laïcisés sont notoires. Pour Pierre Gannagé, l’effacement de la loi du for au profit de la loi étrangère suppose que les lois en présence soient unies par une communauté de valeurs suffisante : « Lorsque cette parenté fait défaut, le mécanisme […] se grippe et ne fonctionne plus normalement »[10]. La réception au Québec des divorces prononcés dans un pays musulman en fournit une illustration éclatante.
Les règles relatives à la reconnaissance et à l’exécution des décisions étrangères sont contenues au quatrième Titre du Livre X du Code civil du Québec (CcQ) portant sur le droit international privé. Ces règles établissent la portée du contrôle exercé par l’autorité judiciaire préalablement à la reconnaissance, autrement dit le régime de l’exequatur[11]. Bien évidemment, les effets rattachés au jugement étranger de divorce ne dépendent pas systématiquement de sa reconnaissance judiciaire; des effets variables peuvent en découler indépendamment de tout exequatur. Toutefois, seules les règles concernant la reconnaissance par voie judiciaire seront développées dans le cadre nécessairement limité de cette étude[12]. La présente contribution se propose donc d’examiner les conditions d’accueil que les juges québécois, au regard des règles du droit international privé, doivent réserver aux jugements de divorce rendus en pays d’Islam, plus précisément les États du Maghreb et du Moyen-Orient. Elle ambitionne de comprendre les raisons qui ont pu rendre si difficile dans cette matière la formation d’une jurisprudence ferme et cohérente. La question spécifique à laquelle nous nous proposons de répondre est de savoir comment et dans quelle mesure une décision de divorce émanant d’une autorité compétente dans un pays musulman peut être reçue et produire des effets au Québec. Plus largement, l’intérêt de cette recherche consiste à apprécier le seuil de tolérance à l’égard de situations juridiques importées de pays aux traditions très différentes, où la religion demeure une source principale d’inspiration du droit familial.
On sait que l’un des objectifs poursuivis en la matière par les rédacteurs du Code civil du Québec en 1991 était celui de faciliter la reconnaissance et l’exécution des décisions prononcées par les autorités étrangères. La volonté du législateur était de mettre en place un régime général cohérent et moderne inspiré de la Convention de La Haye de 1971[13] dans un esprit d’ouverture et de courtoisie internationale[14]. Les nouvelles dispositions (articles 3155 à 3163 CcQ) marquent une évolution sensible par rapport à l’ancien régime vers une simplification de la reconnaissance des jugements étrangers[15]. La mobilité accélérée des personnes et les exigences du commerce international ont imposé un relatif effacement des frontières afin de permettre la réception des jugements étrangers dans l’ordre juridique québécois. Le souci est grand d'éviter des solutions « boiteuses », reconnues dans un État et non dans un autre. Pour les professeurs Talpis et Goldstein,
les nouvelles règles québécoises ont pratiquement éliminé tout préjugé défavorable, toute méfiance vis-à-vis des décisions et des tribunaux étrangers, ce qui est une grande amélioration par rapport au droit antérieur[16].
Bien que ces règles soient maintenant en vigueur depuis plus de vingt-cinq ans, peu d’études en ont évalué la réelle portée en matière de divorces internationaux. Pour se tenir aux divorces rendus dans les pays musulmans, l’examen révèle que la réforme peine à avoir l’effet escompté. Pour le démontrer, il convient de se pencher sur le régime juridique applicable en la matière. Ce régime se retrouve à la fois à l’article 22 de la Loi sur le divorce[17] qui est une loi fédérale s’appliquant à l’ensemble du Canada, qu’aux articles 3155, 3156 et 3167 CcQ, la question de la reconnaissance des jugements étrangers étant de compétence provinciale. L’article 3158 CcQ dispose en effet que « [l]’autorité québécoise se limite à vérifier si la décision dont la reconnaissance ou l’exécution est demandée remplit les conditions prévues au présent titre, sans procéder à l’examen au fond de cette décision »[18]. Les exceptions à la reconnaissance énoncées à l’article 3155 CcQ font alors figure des conditions à remplir par le jugement pour acquérir l’efficacité substantielle. Grosso modo, il s’agit en matière de divorce de satisfaire aux cinq conditions suivantes : il faut que le tribunal étranger ait été compétent, que la décision ne soit pas susceptible de recours ordinaire, qu'elle n'ait pas été rendue en violation des principes essentiels de la procédure, qu'il n'y ait pas litispendance, qu'elle ne soit pas incompatible avec l'ordre public « tel qu'il est entendu dans les relations internationales ». Aux fins de l’analyse, les conditions susmentionnées peuvent être regroupées sous deux chefs : primo, régularité, finalité et antériorité du divorce étranger et secundo, le respect de l’ordre public procédural et substantiel. Ce sont les deux points que nous examinerons successivement.
I. Régularité, finalité et antériorité du divorce étranger
Pour être reconnu, le divorce étranger devra remplir certaines conditions intrinsèques. Le juge québécois contrôle d’une part, le caractère final du divorce étranger et pour quelle raison l’autorité étrangère s’est reconnue compétente (A) et d’autre part, il doit vérifier l’antériorité de la décision, en d’autres termes l’absence d’un divorce prononcé ou d’une action pendante au Québec (B).
A. Compétence de l’autorité étrangère et caractère final du divorce
L’article 3155 alinéas 1 et 2 écarte la reconnaissance dans deux cas :
1° L’autorité de l’État dans lequel la décision a été rendue n’était pas compétente suivant les dispositions du présent titre; 2° La décision, au lieu où elle a été rendue, est susceptible d’un recours ordinaire, ou n’est pas définitive ou exécutoire[19].
L’examen de la jurisprudence révèle que la condition de « finalité » du jugement étranger ne pose guère de difficulté en matière de divorce, en revanche la question de la compétence de l’autorité ayant prononcé le divorce a fait l’objet d’un vif débat.
D’abord, il va sans dire que seules les décisions finales de divorce rendues par une autorité étrangère peuvent être reconnues et produire des effets au Québec. On entend par là que le jugement étranger doit avoir, entre les parties, un caractère définitif mettant ainsi fin à la contestation. Cela suppose qu'il ne soit pas susceptible de révision par le tribunal qui l'a rendu ou à l’occasion d’un appel interjeté à son encontre. La reconnaissance achoppe si le jugement est susceptible d’un recours ordinaire, autrement dit d’un recours de nature à pouvoir entraîner l’annulation ou la modification de la décision qui en est l’objet[20]. Cette condition se justifie par le fait qu’on ne saurait donner effet à une décision dont on ignore le sort et qui pourrait être modifiée à l’étranger[21].
Il conviendra alors d’examiner le caractère final de la décision étrangère à l’aune des règles de procédure de l’État d’origine. À cet égard, l’article 508 Cpc prévoit que
[l]a partie qui demande la reconnaissance ou l’exécution d’une décision étrangère joint à sa demande, outre la décision, l’attestation d’un officier public étranger compétent affirmant que la décision n’est plus, dans l’État où elle a été rendue, susceptible d’appel ou qu’elle est définitive ou exécutoire…
Ainsi, ne satisfait pas ce critère un jugement de divorce révocable (talaq rajii) puisque le sort de l’union n’est pas scellé et il se peut que la situation soit modifiée à l’étranger. Rappelons qu’en droit musulman, le talaq révocable prend fin si l'époux manifeste son intention de revenir au domicile conjugal ou s'il y a reprise des relations sexuelles entre les époux pendant la période de trois mois qui suit son prononcé, soit pendant le délai de viduité (idda)[22]. Sans entrer dans les détails, l’institution serait comparable à une séparation de corps; les liens du mariage sont purement et simplement relâchés et non dissous définitivement. Un tel cas de figure se présenté dans L.P. c. F.B., où le juge Frappier s’interroge sur le caractère final d’un jugement de divorce révocable prononcé au Maroc. Il conclut que « [d]e toute façon, ce jugement est devenu définitif au cours de la présente instance alors que le mari avait bien indiqué qu'il n'entendait pas révoquer ce divorce ou "reprendre" son épouse »[23].
Le caractère final du jugement est constamment vérifié par les tribunaux. Ainsi dans S.F. c. R.J.-S., la juge souligne que « Le jugement de divorce prononcé en Iran est final, aucune objection n'ayant été faite, ce que constate le certificat émis en Iran »[24]. Le caractère final peut aussi découler de l’épuisement de toutes les voies de recours[25] ou de l’expiration des délais d’appel et de l’exécution par les parties des mesures ordonnées par le jugement[26]. De même, il a été décidé au sujet d’un jugement tunisien de divorce que « [l]a décision a fait l’objet d’un pourvoi en cassation par l’époux, mais rejetée quant à la forme vu qu’il n’eût pas déposé de mémoire. Ainsi, le jugement rendu en première instance de divorce devient irrévocable »[27].
L’accueil d’un divorce final étranger exige ensuite de vérifier la compétence internationale indirecte du juge étranger. Il s’agit de se demander si l’autorité étrangère ayant prononcé le divorce était compétente en vertu des règles du droit international privé québécois. À cet égard, l’article 3164 CcQ établit la bilatéralisation des compétences directes et indirectes, c'est-à-dire le principe dit du « miroir », en vertu duquel les tribunaux étrangers seront considérés compétents dans les mêmes hypothèses que les tribunaux québécois. Ce principe s’applique en toutes matières à moins d’une règle spéciale[28]. En matière de divorce, il existe justement une règle particulière de compétence internationale. Le divorce étant de juridiction fédérale, c’est l’article 22 de la Loi sur le divorce de 1985 qui s’applique aux divorces prononcés en dehors du Canada. D’après son paragraphe 1er, le tribunal étranger est compétent dès lors que l’un des époux a résidé habituellement dans le ressort du tribunal pendant au moins l’année précédant l’introduction de l’action en divorce[29]. Il en résulte que la compétence du tribunal étranger se fonde sur la résidence habituelle de l’un des époux dans le pays où le divorce a été prononcé pendant au moins un an avant l’introduction de l’instance. Ainsi, l’exequatur sera exclu s’il a été établi qu’aucune des parties n’a résidé habituellement dans la juridiction concernée au cours de l’année précédant le divorce[30].
Lors de la recodification, le législateur québécois a décidé tout de même de formuler expressément des règles de compétence indirecte en matière de divorce et de dissolution d’union civile, il s’agit de l’article 3167 CcQ. Le texte reprend les critères énoncés par le législateur fédéral en y ajoutant toutefois la compétence fondée sur la nationalité commune des époux. Les chefs de compétence retenus sont alternatifs et non hiérarchisés. L’article 3167 donne compétence aux autorités étrangères pour statuer sur le divorce de leurs nationaux, au même titre que la résidence habituelle d’un an. Le texte tient compte du rôle que joue la nationalité des intéressés dans certains États quant à la compétence des autorités locales en vue de favoriser la reconnaissance des décisions rendues en matière de divorce[31].
Du fait de cet élargissement, la constitutionnalité de l’article 3167 a fait l’objet d’un vif débat. Le divorce étant de compétence fédérale, certains auteurs ont émis des réserves quant à la validité de ce critère pour fonder la compétence des tribunaux étrangers[32]. Allant au-delà des règles fédérales, le droit québécois semblait ultra vires, étant en contradiction avec la Loi sur le divorce, ce qui risque de rendre la disposition inconstitutionnelle[33]. Toutefois, une partie de la doctrine[34] écarte ce grief d’inconstitutionnalité en se fondant sur le fait que la jurisprudence des autres provinces canadiennes admet déjà la compétence étrangère en matière de divorce dans le cas où il existe « un lien réel et substantiel » entre les parties et l’autorité étrangère[35]. Ce critère est d’ailleurs expressément consacré au paragraphe 3 de l’article 22 de la Loi fédérale. La nationalité commune des époux caractériserait souvent ce lien étroit entre les parties et le pays où elles divorcent. Dès lors, les dispositions de l’article 3167 CcQ ne sont pas nécessairement incompatibles avec celles de l’article 22(3) de la Loi sur le divorce, cela d’autant plus qu’elles riment avec principe de la courtoisie internationale auquel sous-tend ce texte[36].
La question revêt une importance particulière pour les couples immigrés chaque fois où l’un des époux saisit le tribunal du pays d’origine. Peut-on reconnaître une décision de divorce émanant du tribunal de la nationalité commune des époux, un critère non retenu par le législateur fédéral? C’est effectivement dans ce cadre factuel où le problème de constitutionnalité a surgi devant les tribunaux. Il a donné lieu à une jurisprudence contradictoire.
Dans l’affaire Droit de la famille – 2054, pour s’opposer à un jugement de divorce prononcé en Algérie, madame soulève l'inconstitutionnalité de l'article 3167 CcQ, en prétendant que le texte va à l'encontre de la loi canadienne sur le divorce[37]. La Cour supérieure, sous la plume de la juge Bénard, a par conséquent déclaré cette disposition « inapplicable en matière de divorce »[38]. D’après la Cour, l'article 91(16) de Loi constitutionnelle de 1867 confère au législateur fédéral une compétence exclusive en matière de divorce et de mariage[39]. La compétence du Québec quant à la reconnaissance des jugements étrangers, ne permet pas d'ajouter des conditions qui vont à l'encontre de l'article 22 de la Loi sur le divorce[40]. Soutenir le contraire « permettrait à certaines parties de se soustraire aux lois canadiennes pour s'assujettir à des lois étrangères qui favoriseraient davantage leur intérêt personnel »[41]. Le même raisonnement a été retenu douze ans plus tard dans Droit de la famille – 091444[42], où le juge Senécal considère « sans valeur au Canada » le divorce prononcé en Algérie, faisant abstraction de la nationalité commune des époux[43]. En revanche, dans S.F. c. R.J.-S., la juge Louise Lemelin refuse d’écarter ce critère et considère que « les parties sont de nationalité iranienne, ce seul fait confère compétence aux tribunaux de l'Iran »[44].
En 1998, à l’occasion d’un appel contre le jugement de la juge Bénard, la Cour d’appel s’est abstenue de se prononcer sur la validité constitutionnelle de l’article 3167 dans la mesure où cela n’était pas nécessaire pour régler le litige[45]. Les hauts magistrats ont dû toutefois aborder le débat en 2017, car la validité de cette disposition fut de nouveau remise en cause. Pour la Cour d’appel, « [l]’incompatibilité apparente entre l’article 3167 al. 1 C.c.Q., qui prévoit ce critère, et le paragraphe 22(1) de la L.d. qui n’en fait pas mention, ne suffit toutefois pas à écarter ce critère de la nationalité commune des époux »[46]. En effet, le paragraphe 3 de l’article 22 de la Loi sur le divorce suffit pour le rendre valide. Ce texte admet l’application d’autres facteurs reconnus par la jurisprudence, dont celui du lien réel et substantiel avec l’État d’où émane le divorce. L’intention du législateur était donc d’intégrer les facteurs élaborés par la jurisprudence[47]. Par conséquent, « [s]i, à première vue, cette disposition paraît plus étendue que le seul critère du paragraphe 22(1) de la L.d., il n’en est rien lorsqu’on réfère aux critères bien établis du paragraphe 22(3) de la L.d. »[48]. Après avoir fait référence à divers jugements de la common law, la Cour d’appel conclut que « [l]’article 3167 C.c.Q. se conjugue harmonieusement avec les critères associés au paragraphe 22(3) de la L.d. »[49]. Il en ressort que la validité de ce texte « ne fait pas doute lorsqu’il s’agit de reconnaître un jugement de divorce prononcé par un tribunal étranger à l’égard de ressortissants qui sont en mesure d’établir l’existence de liens réels et substantiels avec ce for étranger »[50].
Saisie d’un pourvoi contre cet arrêt, la Cour suprême n’a pas eu l’occasion de se prononcer clairement sur ce point[51]. Les conclusions de la Cour d’appel demeurent, croyons-nous, valables à cet égard. Elles se trouvent, au surplus, implicitement entérinées dans un autre arrêt rendu par la Cour suprême le 22 février 2019. Dans les motifs concordants, le juge Brown relève que « le critère du "lien réel et substantiel" énoncé dans la jurisprudence de common law est subsumé dans les dispositions du livre dixième du Code civil »[52], dont l’article 3167. Une telle interprétation rime avec le principe favor validatatis :
L’article 3167 C.c.Q. est également plus généreux que l’art. 22 de la Loi sur le divorce, L.R.C. 1985, c. 3 (2e suppl.), en matière de reconnaissance des divorces étrangers. Cette « portée élargie » s’explique toutefois par [TRADUCTION] « le principe de validation qui s’applique en matière d’état civil et qui est généralement approuvé dans les instruments internationaux et dans les codifications modernes du droit international privé »[53].
En effet, la nationalité est un critère effectif retenu par de nombreux pays de tradition civiliste. Elle reflète, indubitablement, un lien réel et substantiel entre un individu et l’État de sa nationalité. Dans le contexte de l’immigration musulmane, nous savons que la plupart des couples immigrés gardent la nationalité de leur pays d’origine et continuent, dans les faits, d’avoir de liens affectifs concrets et significatifs avec ce pays où ils se sont mariés et dans lequel ils possèdent souvent des actifs substantiels[54]. C’est dans ce sens qu’il convient de saluer, à l’instar de la Cour d’appel, cette compatibilité heureuse entre l’article 3167 CcQ et 22(3) de la Loi sur le divorce, « [à] une époque où l’immigration prend différentes formes et est partie de la vie quotidienne »[55].
À l’aune de ces considérations, le juge québécois ne saurait, dorénavant, faire abstraction de la compétence du tribunal de la nationalité commune des époux en matière de divorce. En témoigne un récent jugement de la Cour supérieure dans Droit de la famille – 191053[56]. En l’espèce, la juge Tessier estime que le tribunal tunisien était compétent pour prononcer le divorce des parties qui détenaient la nationalité de ce pays conformément à l’article 3167, écartant ainsi le moyen du défendeur selon lequel telle compétence enfreint l’article 22(1) de la Loi sur le divorce[57]. Il va sans dire que cette orientation constitue une libéralisation sensible des critères de compétence juridictionnelle internationale en matière de jugements de divorce. La résidence habituelle à l’étranger pendant au moins l'année précédant l'introduction de la demande n’est plus requise pour donner compétence au tribunal du pays de la nationalité commune des époux.
B. Absence d’un divorce déjà prononcé ou pendant au Québec
Pour parer au risque de contrariété de décisions, la reconnaissance du jugement étranger sera rejetée si le divorce des parties a déjà été prononcé au Québec ou si une action en ce sens avait antérieurement été initiée devant le tribunal québécois. L’article 3155(4) CcQ exclut en effet la reconnaissance dans le cas où
[u]n litige entre les mêmes parties, fondé sur les mêmes faits et ayant le même objet, a donné lieu au Québec à une décision passée ou non en force de chose jugée, ou est pendant devant une autorité québécoise, première saisie, ou a été jugé dans un État tiers et la décision remplit les conditions nécessaires pour sa reconnaissance au Québec.
Ce texte applique à l’exequatur par analogie l’exception de litispendance internationale prévue à l’article 3137 CcQ, qui permet aux tribunaux québécois, suite à une procédure parallèle à l'étranger, de surseoir à statuer jusqu'à l'obtention d'une décision étrangère susceptible d'être reconnue au Québec. Toutefois, contrairement à l’article 3137, le texte de l’article 3155(4) prive le juge de tout pouvoir discrétionnaire et interdit ipso jure la reconnaissance[58]. Le texte poursuit notamment comme objectif de « décourager la multiplication des procédures et d’écarter le forum shopping à l’étranger » qui pourrait en résulter[59].
La question de litispendance surgit dès le moment où deux autorités compétentes, québécoise et étrangère, ont été saisies de la question. Pour les départager, le critère retenu par le législateur est celui de l’« antériorité de la décision ou de la saisine ». La compétence pour entendre le litige sera attribuée au premier tribunal saisi. Il est donc primordial de déterminer quelle autorité a d'abord été saisie d'une demande en divorce ou d'un litige entre les parties ayant le même objet[60]. Concrètement devant deux jugements de divorce, l’un québécois et l’autre étranger, le juge devra déterminer chronologiquement laquelle des deux juridictions a été saisie la première. Le refus de reconnaissance est encouru si la saisine préalable de l’autorité québécoise est établie. Ainsi, dans Droit de la famille – 2054[61], la Cour d’appel a approuvé la juge de première instance pour avoir refusé de reconnaître un divorce algérien aux motifs qu’une procédure en divorce était pendante au Québec au moment où l’on demandait la reconnaissance du jugement étranger et que le tribunal québécois était le premier saisi. En l’espèce, il existait en effet deux procédures intentées en Algérie, la première antérieure à la procédure québécoise avait été annulée pour défaut d’assignation. La Cour d’appel a décidé, à bon droit, de ne pas en tenir compte et de ne prendre en considération que la seconde procédure ayant donné lieu au divorce algérien en question et qui découlait d’une saisine postérieure à celle du tribunal québécois. Par conséquent, pour admettre la compétence du tribunal étranger il faut que sa saisine soit valide et que la date de celle-ci soit antérieure aux procédures initiées au Québec.
La litispendance implique naturellement la compétence des deux tribunaux saisis. La compétence concurrente du juge étranger peut découler, comme nous l’avons vu, de l’article 3167 CcQ, le juge étranger étant celui de la nationalité commune des époux. En contexte migratoire, on peut légitimement craindre que l’action soit parfois intentée dans le pays d’origine par l’un des époux en vue de paralyser celle introduite par l’autre au Québec. Une telle manoeuvre n’est pas sans rappeler un phénomène bien connu par la doctrine française sous le nom de « voyage de répudiation » par lequel le mari musulman s’esquive dans le pays d’origine et obtient, dans un délai court, une décision en vue de faire échec à une instance ouverte contre lui en France[62]. Toutefois en contexte québécois, le critère du « premier tribunal saisi » se révèle salvateur dans la mesure où il permet de neutraliser ce phénomène. Dans tous les cas où l’autorité étrangère est saisie la dernière, la reconnaissance ou l’exécution de sa décision sera refusée, même si ladite décision précède la décision des autorités québécoises[63]. Ainsi, lorsque les procédures à l’étranger interviennent en riposte à une instance en divorce intentée au Québec, le jeu de litispendance donne compétence au tribunal québécois. En témoigne le jugement de la Cour supérieure dans L.P. c. F.B.[64], où la Cour a refusé la reconnaissance d’un divorce prononcé au Maroc à la demande du mari alors qu’une action en divorce intentée par l’épouse était encore pendante au Québec et que la Cour supérieure était « l’autorité la première saisie »[65].
Au demeurant, la doctrine s’accorde que le critère de l’antériorité de la saisine joue chaque fois où un litige est simplement pendant au Québec au moment de la demande en reconnaissance. La question s’avère plus délicate dans le cas où il existe un divorce déjà prononcé au Québec au moment de l’introduction de la demande en reconnaissance du divorce étranger. Faut-il déterminer le tribunal le premier saisi? En effet, le libellé de l’article 3155(4) n’est pas dénué de toute ambiguïté et soulève une difficulté d’interprétation. La doctrine semble partagée sur la question de savoir si ce critère d’antériorité devrait également prospérer en cas de contrariété des jugements. Certains auteurs[66] suggèrent que l’existence d’une décision québécoise ne fait obstacle à la procédure que si l’autorité québécoise était au surplus la première saisie. Par conséquent, si le tribunal québécois, saisi en second, a prononcé le divorce avant le tribunal étranger, sa décision ne sera pas opposable à l’encontre de celui qui invoque le jugement étranger antérieur. D’autres auteurs[67] estiment, en revanche, qu’une décision québécoise déjà rendue tiendra inévitablement en échec l’action en reconnaissance, peu importe laquelle de deux autorités fut saisie la première de l’affaire. Dans cette hypothèse, il n’est pas nécessaire que l’autorité québécoise ait été saisie avant l’autorité étrangère. Il s’ensuit une préférence accordée à la décision québécoise, même si le tribunal québécois a été saisi en second. Pour le professeur Goldstein, « l’autorité de la chose jugée s’attache à la décision québécoise rendu même si le tribunal du Québec a été saisi en second, mais a procédé plus rapidement que le tribunal étranger »[68]; l’objectif poursuivi étant, selon l’auteur, « soit d’affirmer le principe même de l’autorité de chose jugée, soit de ne pas y mettre obstacle alors que cet effet va découler de la décision québécoise »[69].Cet argument justifie le refus de reconnaissance lorsqu’un jugement québécois a déjà été rendu ou sur le point de l’être.
Or à bien y regarder, le texte même de l’article 3155(4) semble indifférent à ce fondement dans la mesure où il vise toute décision rendue au Québec « passée ou non en force de chose jugée ». La première interprétation devrait, nous semble-t-il, prévaloir dans la mesure où elle permet de parer au risque de fraude, cela d’autant plus qu’elle rime avec le principe de la courtoisie internationale et avec l’objectif de garantir la permanence du statut de l’individu[70]. Faire fi du critère de l’antériorité de la saisine permettrait à une partie de s’opposer au divorce étranger antérieur par le simple fait de s’empresser d’obtenir un jugement québécois avant que son adversaire ne cherche à faire reconnaître au Québec le jugement étranger[71]. La Cour suprême vient de rappeler dans un arrêt récent l’objectif poursuivi par ce critère en précisant que « [l]a condition d'antériorité de saisine permet donc essentiellement de s'assurer que les parties ne se livrent pas à un forum shopping abusif »[72]. Ainsi, appliqué en matière de divorce, nous croyons que l’article 3155(4) CcQ doit être entendu de la manière suivante : le jugement étranger sera dépourvu d’effet si une procédure en divorce entre les mêmes parties est pendante devant un tribunal québécois premier saisi, ou si une décision de divorce, passée ou non en force de chose jugée, a été déjà rendue par un tribunal québécois, premier saisi.
En toutes hypothèses, pour admettre la litispendance le tribunal québécois doit vérifier la triple identité des parties, des faits et de l’objet. Si l’identité des parties ne suscite guère de difficulté en matière de divorce, il en va autrement de la détermination de l’identité des faits et d’objet entre les recours au Québec et à l’étranger. La Cour d'appel nous enseigne que, dans un contexte international, l'identité de cause n'est pas nécessaire pour qu'il y ait litispendance[73]. Il sied de prendre en compte les caractéristiques des systèmes juridiques différents dans leurs structures et leurs méthodes et appliquer le critère plus souple de l'identité des faits. L’on ne saurait ainsi exiger que « les étapes et l'intitulé des procédures du droit étranger soient identiques aux nôtres, mais plutôt rechercher l'objet des recours »[74]. Or, comme l’ont fait remarquer les professeurs Talpis et Goldstein, « [e]n cas de litispendance internationale il n'est pas toujours facile de savoir si l'objet des actions est le même »[75]. Pour remplir cette condition, il sera fort utile pour la partie désireuse de se prévaloir de l’exequatur d’établir la teneur de la loi appliquée par le tribunal étranger. Le tribunal québécois n’est pas tenu d’en prendre connaissance d’office pour décider s’il y a identité de cause et d’objet, deux critères qui doivent être pris en compte pour conclure à la litispendance[76].
Pour s’en tenir au divorce, la litispendance est attestée lorsque chacun de deux tribunaux est saisi de procédure visant in fine la dissolution du lien matrimonial. Ainsi, l’émission par un tribunal iranien d’un « incompatibility certificate for divorce » à la demande d’une partie a, à juste titre, été considérée comme une première étape, une procédure utile, en vue d’obtenir le divorce. La demande étant manifestement formulée en vue d’obtenir une autorisation de divorcer, le tribunal iranien était le premier saisi puisqu’il s’agit d’un recours initial poursuivant le même objet[77]. En revanche, l’identité d’objet fait défaut dès lors qu’il a été établi que l’action intentée au Maroc visait une ordonnance pour forcer le retour de l'épouse au domicile conjugal[78]. En l’espèce, le mari cherchait à faire admettre à la Cour qu’une telle procédure constituait une action faisant partie du divorce et était donc antérieure aux procédures québécoises. Aux yeux du juge, même en retenant une acception large et libérale de la notion « d’objet », l’action marocaine ne peut avoir un objet identique ni même similaire à une demande en divorce puisqu’elle tendait au contraire au maintien du lien conjugal[79].
Enfin, la question se pose de savoir si une action en séparation de corps pendante au Québec pourrait faire obstacle à la reconnaissance d’un divorce étranger. Cette question revêt une importance particulière en contexte migratoire notamment dans le cas où les conjoints sont retournés s’installer dans le pays d’origine, et aucun d’eux ne réside au Québec depuis plus d’un an. Les tribunaux québécois ne sont pas compétents en l’occurrence pour connaître de l’action en divorce, mais ils ont toutefois compétence pour l’action en séparation de corps. La pratique révèle que l’épouse tente parfois un retour au Québec en vue d’introduire une action en séparation de corps pour riposter à celle en divorce intentée à l’étranger par son mari[80]. Nous pensons que la litispendance ne saurait être invoquée au Québec, étant donné l’objet différent de deux actions. En droit interne, il a été jugé qu’il n'y a pas litispendance entre une demande en séparation de corps et une autre en divorce impliquant les mêmes parties[81]. Dans le même ordre d’idées, il a été décidé que l’existence d’un divorce libanais non contesté ne fait pas obstacle à la recevabilité de l’action en nullité de mariage au Québec, vu la nature différente de deux actions[82]. Cependant, aussitôt reconnu au Québec, un jugement étranger de divorce serait de nature à rendre inutile faute d'objet une action en séparation de corps postérieurement introduite devant le juge québécois[83].
II. Respect de l’ordre public procédural et substantiel
Outre les conditions susmentionnées, l’efficacité internationale du divorce étranger est subordonnée à des exigences de régularité d’ordre extrinsèque. Le défendeur peut toujours soutenir la contrariété du jugement à l’ordre public international de fond et de procédure. Il conviendra dès lors d’envisager successivement le respect des principes essentiels de la procédure (A) et la compatibilité avec l’ordre public international (B).
A. Conformité aux principes essentiels de la procédure
Aux termes de l’article 3155(3), pour être reconnue, la décision étrangère ne doit pas avoir été rendue en violation des principes essentiels de la procédure. Le texte ne précise toutefois pas en quoi consistent ces « principes essentiels » sur le plan procédural dont la méconnaissance entraînerait le refus d'effet au Québec à un jugement étranger. Comme cela a été souligné par la doctrine,
[l]a notion de principes essentiels reste assez vague, ce qui est un inconvénient du point de vue des parties, au plan de la prévisibilité. Mais ceci représente peut-être un avantage, du point de vue du juge, en termes de pouvoir discrétionnaire[84].
De plus, le texte est muet sur le point de savoir s'il s'agit des principes essentiels de la procédure en vigueur au Québec, ceux du lieu où la décision a été rendue ou ceux prévalant à l’échelle internationale. Pour les professeurs Talpis et Castel, « il faudrait tenir compte des principes essentiels de la procédure universellement reconnus »[85]. Le professeur Goldstein estime de sa part qu’
à la différence de l’ordre public quant au fond, il ne semble pas que l’on doive y voir une conception internationale de la procédure. Puisqu’il s’agit des principes essentiels, le degré de divergence admissible entre la conception interne et les situations internationales est très réduit[86].
Par conséquent, il préfère se référer aux « principes fondamentaux de la procédure québécoise »[87]. Certains jugements semblent par ailleurs interpréter ces principes à la lumière du droit du tribunal étranger. Ainsi, en Droit de la famille – 093010[88], s’agissant d’une demande de révision d’un jugement marocain rendu en matière d’aliments, la juge Trahan souligne que
[e]n l'instance, le Tribunal n'a pas eu de preuve du droit [étranger] de quelque façon que ce soit. Il doit donc appliquer le droit québécois et déterminer, selon les règles du droit québécois, si la décision a été rendue en violation des principes essentiels de la procédure[89].
La juge conclut, à tort, que ledit jugement méconnaît les principes essentiels de la procédure, car aucune des parties n’a été domiciliée au Maroc, comme l’exige l’article 70 Cpc[90].
À la vérité, l’article 3155(3) vise l’ordre public international de procédure. Le texte reflète des impératifs d’ordre processuel liés au droit à une défense pleine et entière. Ces principes peuvent se résumer dans la règle audi alteram partem, bien connue en droit international et qui exige que la personne poursuivie « ait été entendue ou dûment appelée »[91]. L’exequatur ne saurait être accordé si les droits de la défense ont été méconnus à l’étranger. Pour satisfaire à cette condition, il faut que le jugement étranger soit rendu au terme d’un procès où chaque partie a été régulièrement citée et a pu faire valoir ses prétentions et défenses. Dans l’affaire Canfield Technologies Inc. c. Servi-Metals Canada Inc., la Cour supérieure a eu l’occasion de préciser que « les principes essentiels de la procédure dont parle l’article 3155 CcQ 3e paragraphe, se limitent aux principes très larges d’être assigné avant son procès ainsi que le droit de faire valoir ses moyens de défense »[92]. Les tribunaux vérifient généralement si le défendeur a été régulièrement assigné et représenté et qu’il ait pu faire valoir ses droits.
Il est certain que « nos tribunaux considéreraient comme contraire à l'ordre public [procédural] un jugement obtenu sans qu'il y ait eu débat ou contestation »[93]. Ainsi, encourt le rejet une décision étrangère constatant la rupture du mariage par déclaration unilatérale du mari (talaq) sans que l’épouse n’ait été dûment citée ou représentée. L’exequatur sera également refusé si le défendeur n'a pas été atteint par l'assignation du fait des manoeuvres frauduleuses du demandeur. Tel est le cas notamment lorsque l’un des époux a fait signifier à l’autre l’action en divorce à une ancienne adresse en sachant pertinemment qu’il n’y habitait plus, le privant ainsi de son droit de se faire entendre[94].
De même, ne répond pas aux exigences de l’ordre public procédural un divorce obtenu en utilisant la supercherie et la fraude. Dans Droit de la famille – 072464[95], la Cour supérieure refuse de reconnaître pour fraude un divorce prononcé au Royaume de Bahreïn où les parties étaient domiciliées à l’époque avant leur immigration au Canada. Les procédures avaient certes été signifiées à l’épouse, mais l’époux lui avait fait croire qu’il s’était réconcilié avec elle pour qu’elle ne se présente pas à la cour. Le divorce était donc entaché de manoeuvres frauduleuses de la part de l’époux privant l’épouse du moyen d'être entendu du juge étranger[96]. Dans la même veine, un jugement étranger obtenu sous de fausses représentations ne saurait être reconnu au Québec. C’est le cas lorsque les parties indiquent dans le certificat de divorce établi par un notaire étranger que « leur union matrimoniale a perdu tout son sens », tandis que la preuve révèle qu’elles ont continué « à vivre ensemble à un rythme encore plus prononcé… après le divorce »[97]. À l’inverse, la jurisprudence a admis que l’absence de motivation n’était pas, à elle seule, de nature à vicier la procédure[98] et qu’un procès sommaire ne viole pas nécessairement les principes essentiels de la procédure[99].
Le respect des principes essentiels de la procédure apparaît sous un jour particulier dans le cas où le jugement a été rendu par défaut à l’étranger. Sur ce plan, l’article 3156 alinéa 1 CcQ met en place un régime plus exigeant en prévoyant qu’« [u]ne décision rendue par défaut ne sera reconnue et déclarée exécutoire que si le demandeur prouve que l’acte introductif d’instance a été régulièrement signifié à la partie défaillante, selon la loi du lieu où elle a été rendue ». Cette disposition inverse la charge de la preuve dans le sens que c’est au demandeur d’apporter la preuve de la signification régulière à l’étranger de l’acte introductif de l’instance ayant conduit à la décision dont il demande la reconnaissance[100]. La jurisprudence a par ailleurs décidé que même si le jugement étranger atteste du fait que l’acte introductif fut signifié conformément à la loi locale, ceci ne fait pas preuve, surtout si la partie défaillante nie avoir eu connaissance des procédures dirigées contre elle à l’étranger[101]. Il est donc indispensable que la preuve provienne d’éléments extérieurs à la décision dont la reconnaissance est demandée[102]. C’est pourquoi l’article 508 Cpc exige, lorsque la décision a été rendue par défaut, de joindre à la demande « les documents certifiés permettant d’établir que la demande introductive d’instance a été régulièrement notifiée à la partie défaillante ».
Il s’ensuit qu’une décision de divorce obtenu ex parte dans un pays musulman ne sera reconnue et déclarée exécutoire que si la demande a dûment été signifiée en vertu des règles existantes dans le pays d’origine du jugement. Dans une procédure par défaut, le juge doit être en mesure de vérifier si la défaillance du défendeur est volontaire ou imputable à une signification irrégulière. De surcroît, même si une signification régulière est établie, le défendeur peut toujours faire obstacle à la reconnaissance en prouvant que « compte tenu des circonstances, [il] n’a pu prendre connaissance de l’acte introductif d’instance ou n’a pu disposer d’un délai suffisant pour présenter sa défense »[103]. L’affaire Droit de la famille – 182[104] en fournit une illustration intéressante. Un couple canado-australien marié à Abu Dhabi en 2008, se séparent en 2011. Le mari quitte le pays en avril 2013 pour retourner au Canada. Un mois après, l’épouse intente une action et obtient le divorce à Abu Dhabi en mai 2014. Le mari n’a pas comparu, car l’épouse a prétendu ne pas connaître son adresse et a par conséquent été autorisée par le tribunal étranger à signifier la requête par publication dans un journal local. Une fois apprise l’existence du divorce étranger, le mari intente à tour une action en divorce au Québec en juin 2015. La Cour supérieure a eu à décider s’il y a lieu de reconnaître le jugement émirati. Selon le juge Hamilton, cette reconnaissance se heurte aux principes essentiels de la procédure, car monsieur a produit des échanges courriels prouvant que les parties sont restés en contact pendant toute cette période et que madame savait pertinemment comment le joindre, mais elle a choisi de ne pas le faire. D’après le juge, le mari « was deprived of the opportunity to contest the Abu Dhabi proceedings. This is a clear breach of audi alteram partem, which is a fundamental principle of procedure »[105].
La jurisprudence est à cet égard assez fournie. Dans Droit de la famille – 141651[106], le juge Thomas M. Davis refusa de reconnaître le divorce marocain pour violation des principes essentiels de la procédure au sens de l’article 3155(3) CcQ, car madame n’a eu aucunement l’occasion d’être entendue au Maroc[107], cela d’autant plus que la preuve de sa signification sur place n’a pas été dûment établie conformément à l’article 3156 CcQ[108]. La reconnaissance est également exclue lorsque Madame n’a jamais été informée de la procédure puisque Monsieur avait signifié sa demande par publication dans un journal local à l’étranger alors que les deux parties étaient représentées par avocat au Québec[109]. Enfin, dans S.F. c. R.J.-S.[110], pour refuser de reconnaître un jugement de divorce rendu par défaut en Iran, la juge Louise Lemelin met l’accent sur l’irrégularité de la signification à l’étranger :
[47] Alors que monsieur réside habituellement au Canada depuis quatre ans, il intente des procédures en Iran. Il explique que la procédure n'a pu être signifiée prétextant qu'il ignorait où vivait la demanderesse. Cette impossibilité de retracer madame n'a pas été établie, mais l'aveu de monsieur confirme l'absence de signification. Le témoignage de la demanderesse corrobore ce fait, non seulement la procédure ne lui a pas été signifiée, mais elle n'a eu aucune connaissance de ce recours. Elle apprend l'existence de ce jugement plus tard.
[48] Ce défaut de signification est fatal et le jugement étranger de divorce ne peut être reconnu.
Il n’en demeure pas moins que la conformité à l’ordre public sur le plan procédural ne suffise pas pour doter le divorce musulman de pleine efficacité, faudra-t-il encore que celui-ci franchisse un dernier obstacle majeur, celui de la compatibilité avec l’ordre public substantiel.
B. Non-contrariété à l’ordre public international
Aux termes de l’article 3155(5) CcQ la décision étrangère sera privée d’effet lorsque son « résultat […] est manifestement incompatible avec l’ordre public tel qu’il est entendu dans les relations internationales ». Ce texte reprend en matière d’exequatur, les dispositions de l'article 3081 CcQ ayant trait à l’exception d’ordre public. Sur ce point, les commentaires du ministre de la Justice mettent l’accent sur la nécessité de distinguer l’ordre public, tel qu’il est entendu dans les relations internationales, de l’ordre public en droit interne :
[L’article 3081] est de droit nouveau. Le Code civil du Bas-Canada ne distingue pas l'ordre public interne de l'ordre public international. La doctrine moderne reconnaît qu'une telle distinction doit être faite et la jurisprudence l'a confirmée.
En effet, la situation n'est pas la même suivant qu'une disposition d'ordre public fait obstacle à l'acquisition d'un droit au Québec ou suivant qu'il s'agit de laisser se produire au Québec les effets d'un droit acquis à l'étranger en conformité avec la loi applicable suivant les règles de droit international privé québécoises. Dans ce dernier cas, il faut, pour que l'application des dispositions de la loi d'un État étranger soit exclue, que celles-ci heurtent des conceptions morales, sociales, économiques et politiques fondamentales[111].
Il en découle qu’une décision étrangère ne saurait être reconnue si son résultat heurte de front les conceptions morales, sociales, économiques ou même politiques qui sous-tendent l'ordre juridique québécois. L’ordre public international est en effet un mécanisme de défense de l’ordre juridique du for qui constitue un frein aux solutions étrangères et à l’accueil des jugements étrangers. L’usage de l’expression « manifestement incompatible » met en relief que les tribunaux ne devraient faire appel à l’ordre public que dans des cas graves. À cet égard, la Cour suprême a eu récemment l’occasion de préciser qu’une telle opposition « doit être grave et doit s'apprécier concrètement, afin de vérifier si l'incorporation de ce résultat dans l'ordre juridique québécois matérialise véritablement ce conflit de conceptions »[112].Le point focal de l’analyse doit au surplus porter sur le résultat de la décision objet de l’exequatur et non sur la loi étrangère[113]. À l’aune de ces principes, la question se pose avec acuité quant à la mise en oeuvre de l’ordre public pour s’opposer aux divorces prononcés selon les préceptes en vigueur en pays d’Islam.
Soulignons d’abord que le droit musulman classique (fiqh) admet la dissolution du mariage par des moyens très variés, pour des motifs très différents et à des proportions très variables selon l’école considérée[114]. Il sied donc d’examiner minutieusement la loi étrangère ayant été appliquée pour savoir exactement laquelle des voies a été empruntée pour dissoudre le lien conjugal. En dépit de l’hétérogénéité des législations, on peut ramener à quatre les modes de divorce souvent usités dans les systèmes d’inspiration musulmane : le talaq qui est la rupture du mariage par la volonté unilatérale du mari, le khul qui est le divorce par consentement mutuel moyennant compensation, le tafriq ou faskh qui est la résiliation du lien matrimonial prononcé par le juge à la demande de l’une des parties dans les cas déterminés par la loi, et enfin le tafwid, qui est la rupture du mariage par déclaration unilatérale de la femme lorsque cette faculté lui a été octroyée par une clause dans l’acte du mariage ou après[115].
Il sied d’affirmer d’emblée que l’ordre public au sens de l’article 3155 ne s’oppose point à la réception des divorces étrangers prononcés sur des bases inconnues du droit canadien[116]. Dans cette perspective, le divorce par consentement mutuel avec ou sans compensation[117] ne pose guère de difficulté en pratique, compte tenu de la facilité avec laquelle on peut, en droit positif canadien, obtenir un divorce en cas de séparation d’un an[118]. Le khul, une forme de divorce consensuel connue, selon des modalités différentes, de la plupart des systèmes musulmans, pourrait ainsi être accueilli[119]. L’article 114 du Code de la famille marocain y fait allusion en précisant que
les époux peuvent consentir d’un commun accord au principe de mettre fin à leur relation conjugale, sans ou avec des conditions, pourvu que celles-ci ne soient pas contraires aux dispositions de ce code et ne portent pas préjudice aux intérêts des enfants.
Dans Droit de la famille – 1466[120], la Cour d’appel semble admettre implicitement la possibilité par une partie de renoncer à certains droits pécuniaires pour obtenir l’acquiescement de l’autre partie au divorce[121]. De même, dans Droit de la famille – 192203[122] le tribunal donne effet à un jugement étranger entérinant un divorce à l’amiable en vertu duquel l’épouse renonce à certaines réclamations financières.
La même solution vaut pour le divorce prononcé par le juge à la demande de l’un des époux pour diverses raisons, telles que la désunion, la discorde, l’absence, le défaut d’entretien ou le préjudice. Les tribunaux québécois ont eu à connaître de tels cas dès 1971 dans Karim c. Ali[123]. En l’espèce, la Cour supérieure déclare valide un jugement de divorce irrévocable prononcé en 1968 par la Cour de première instance du Caire à la demande l’épouse, alors que les parties y étaient encore domiciliées. Aucun argument n’a été soulevé concernant le respect de l’ordre public et le tribunal énonce n’avoir aucun doute sur le respect de cette exigence. Plus récemment, un divorce prononcé par un tribunal tunisien à la demande de l’épouse en raison de la détérioration des relations conjugales (discorde irrémédiable) a été également reconnu et déclaré exécutoire au Québec[124].
Le problème doit dès lors être nettement posé : le seul divorce musulman qui est susceptible d’attirer les foudres de l'ordre public est le divorce par déclaration unilatérale du mari (talaq), couramment appelé « répudiation » dans la littérature occidentale. Les lois qui admettent un tel mode de dissolution du mariage l'accordent le plus fréquemment à la suite de l'intervention d'une autorité compétente (judiciaire ou religieuse). Pour produire ses effets, la dissolution du lien matrimonial nécessite donc le prononcé d’un jugement[125]. La doctrine et la jurisprudence sont partagées sur la question de savoir si l’ordre public international, même sous sa forme atténuée, devrait s’opposer à ce mode de dissolution du mariage.
Compte tenu du caractère égalitaire inhérent au divorce canadien, les professeurs Goldstein et Groffier affirment qu’« il est certain qu’un grand nombre de ces répudiations devra être rejeté en raison des discriminations fondées sur le sexe qu’elles consacrent ». Et d’ajouter que ce rejet est encouru si bien même que l’épouse ait eu la possibilité de faire valoir ses droits et ait pu obtenir des dommages-intérêts, car « la femme ne peut remettre en cause le principe [même] de la répudiation »[126]. Claude Emanuelli va dans le même sens en estimant que « les tribunaux québécois refusent de reconnaître […] un jugement qui entérine la répudiation unilatérale d’une épouse par son époux »[127]. En revanche d’après le professeur Talpis, en l’absence de lien suffisant avec le Québec, les tribunaux devraient reconnaître le divorce par talaq rendu par une autorité compétente, « même s’il est discriminatoire dans l’abstrait »[128].
En pratique, le déclenchement de l’ordre public face aux répudiations musulmanes a suscité une jurisprudence incertaine. En 1997, dans Droit de la famille – 2054[129], la juge Bénard refuse d’accorder effet à un jugement de répudiation rendu en Algérie au motif que la décision étrangère en cause est manifestement incompatible avec l’ordre public international au Québec et plus précisément, avec le principe de l’égalité des époux. Selon la preuve, le Code de la famille algérien traite différemment les demandes formulées par l'époux et l'épouse. Le mari peut tout simplement répudier l’épouse par sa seule volonté, alors que cette dernière est toujours obligée de justifier toute demande en divorce[130]. Ce traitement inégalitaire justifie, d’après la juge, l’intervention de l’ordre public[131]. Pareil raisonnement a également prévalu en 2003 dans l’affaire L.P. c. F.B.[132] où le juge Frappier refuse d’accueillir une décision marocaine constatant une répudiation. En l’espèce, la preuve d’expert a démontré que le droit musulman, codifié au Maroc sous l’ancienne Moudawana, permet au mari de répudier son épouse par sa seule volonté, alors que celle-ci est obligée de motiver toute demande en divorce[133]. D’après le juge,
le principe d’ordre public international est défini et comparé avec l’ordre public du for et qu’en conséquence on peut se référer aux Chartes canadienne et québécoise et à la Déclaration universelle des droits de l’homme qui reconnaissent que l’homme et la femme sont égaux durant le mariage et lors de sa dissolution[134].
Le juge fait siens les motifs énoncés par la juge Bénard, et rappelle que «[l]e simple fait [de permettre] à l’époux de répudier son épouse, que ceci se fasse sous contrôle judiciaire ou non, constitue un manquement fondamental à l’ordre public international »[135].
L’analyse de cette jurisprudence révèle que les juges semblent procéder à une appréciation in abstracto de la loi étrangère sous l’empire de laquelle le divorce a été prononcé et exclure la reconnaissance pour la simple raison que celle-ci est contraire au principe de l’égalité des époux. Il n’est donc guère surprenant qu’une telle démarche a pu conduire, suivant les termes mêmes du juge Frappier, à une déclaration catégorique selon laquelle « l'application et le résultat de la loi marocaine seront rarement conformes à notre notion d'ordre public international »[136]. Une telle prise de position risquerait de transformer le Québec en paradis des divorces boiteux internationaux!
À l’opposé, une démarche plus nuancée a été retenue en 2007 dans l’affaire Droit de la famille – 072464[137]. Pour le juge Senécal, on ne saurait s’opposer de façon systématique à un « divorce [qui] est prononcé en pays musulman suivant les principes islamiques »[138]. Il est de même difficile de prétendre que « tout ce qui contrevient aux chartes canadienne et québécoise va contre l'ordre public "international" »[139]. Toute en admettant que l’inégalité des conjoints en droit islamique « heurte les valeurs et la conscience du tribunal », le juge estime néanmoins qu’« il faut se garder d'évaluer ce qui se passe dans un pays étranger à la seule lumière de nos valeurs, même les plus profondes »[140]. Les motivations du juge Senécal sur ce point ont été implicitement approuvées par la Cour d’appel[141]. La relativité de l’ordre public ici prônée a trouvé écho plus tard dans Droit de la famille – 103775[142], où le juge Martin Bédard estime :
[34] Il n'appartient pas à la Cour supérieure du Québec de décider que la façon de vivre que nous avons au Québec, que les lois qui nous régissent doivent avoir préséance sur les façons de vivre ou de se comporter, des gens, de religion ou de moeurs différentes dans d'autres pays.
Pour l’essentiel, cette jurisprudence revient à subordonner le déclenchement de l’exception d’ordre public à l’existence de lien suffisant de la situation considérée avec l’ordre juridique québécois au moment du prononcé de la répudiation. Il s’agit d’une application en droit québécois de la théorie allemande de la Binnenbeziehung faisant dépendre l'intensité de l'intervention de l'ordre public des attaches que présente la situation litigieuse avec le for[143]. Par conséquent, l’ordre public ne s’oppose pas aux répudiations prononcées alors que toutes les personnes concernées résident à l’étranger, indépendamment du fait qu’elles ont immigré au Canada par la suite. Le juge Senécal tient compte du fait qu’au moment où le jugement étranger a été rendu, les parties n’avaient aucun lien avec le Québec[144]. Implicitement, l’évaluation de la proximité s’opère lors du prononcé de la décision à l’étranger et non au moment de sa réception[145]. Ce raisonnement nous semble bien-fondé. Il s’agit des situations qui ont été acquises à l’étranger et qui y ont produit leurs effets alors qu’elles ne présentaient aucun point de contact avec l’ordre juridique du for. En raison de l’éloignement de la situation par rapport à l’ordre juridique québécois, l’ordre public jouera dans son effet « atténué » et ne s’opposera pas à l’accueil du jugement étranger. Une telle position s’aligne sur celle de la Cour de cassation française subordonnant l’intervention de l’ordre public à l’existence de liens de proximité avec le for (nationalité ou domicile en France)[146]. On pourrait dès lors penser que le domicile au Québec de l’un des époux déclencherait le jeu de l’ordre public et ferait obstacle à la reconnaissance de la répudiation étrangère; l’impact dans l’espace juridique québécois étant caractérisé.
Cependant, au-delà de l’élément de proximité, l’appréciation de la contrariété à l’ordre public implique de déterminer s’il existe une divergence intolérable entre les conséquences découlant de l’application de la décision étrangère et les principes fondamentaux du for[147]. Une simple divergence ne suffit pas, même si la loi du for est impérative et d’ordre public. Sous cet aspect, l’ordre public garantit des droits fondamentaux intangibles tels que le droit à la vie ou la prohibition des traitements inhumains et dégradants. Il est loin d’être certain que le fait pour une législation de faire subir à une partie des conséquences économiques défavorables en cas de dissolution du mariage ne « puisse être élevé à la dignité d'un affront à la conscience de l'humanité », a pu admettre la Cour d’appel en 1991[148]. Une telle interprétation est récemment rappelée par la Cour suprême du Canada dans R.S. c. P.R.[149] :
Il ressort de [l’art. 3155 (5)] que c'est le résultat de la décision étrangère qui doit faire l'objet de l'analyse, et non les lois de l'État étranger. L'article 3081 C.c.Q. va d'ailleurs dans le même sens. Il ne s'agit pas de faire la leçon aux autorités étrangères sur leur propre droit. Le rôle du tribunal québécois consiste simplement à s'assurer que ne soit pas exécutée une décision étrangère dont le résultat serait à ce point incompatible avec certaines des valeurs qui sous-tendent le système juridique québécois qu'il ne pourrait être incorporé à celui-ci […]. En somme, la conformité avec l'ordre public international requiert simplement que l'on s'assure que la solution donnée par le jugement étranger pourra s'intégrer de manière harmonieuse dans l'ordre juridique du for québécois[150].
Il en découle qu’au stade de la confrontation à l’ordre public, ce qui compte, ce n’est pas la solution abstraite dont le juge étranger a fait application, mais le résultat concret de l’application de la loi étrangère à la situation considérée[151]. La décision étrangère peut sembler contraire à l’ordre public, alors que son résultat ne l’est pas nécessairement[152]. Appliqué à la répudiation, le principe de l’appréciation in concreto pourrait sauver la reconnaissance si les circonstances de l’espèce faisaient apparaître que la femme ait consenti à la dissolution du mariage; ce consentement serait de nature à compenser l’inégalité originelle[153]. L’acquiescement de l’épouse à la répudiation permettrait dès lors d’accueillir la répudiation en l’assimilant au divorce par consentement mutuel. Le consentement peut être tacite et résulter d’une demande de reconnaissance au Québec formée par la femme, lorsque celle-ci est désireuse de tirer les conséquences de la dissolution du mariage[154] ou du fait que les parties ont procédé, d’un commun accord, à un divorce par répudiation selon les lois du Maroc[155]. Il peut aussi être déduit du fait que
Madame reconnaît elle-même la validité de ce divorce et s’en réclame formellement auprès des autorités québécoises et canadiennes lorsqu’elle remplit ses déclarations d’impôts, demande de l’aide financière ou obtient sa carte d’assurance-maladie, par exemple[156].
Au demeurant, la simplicité avec laquelle un divorce peut être obtenu au Canada empêche aujourd’hui d’opposer l’ordre public au caractère unilatéral du procédé. La décision de divorcer peut autant être unilatérale et résultante du refus de cohabiter pendant un an, plaçant ainsi le juge québécois dans une situation peu ou prou similaire[157]. Cela étant, le débat devra se déplacer sur le terrain de la discrimination dans la mesure où l’accès au divorce n’est pas le même pour l’homme et la femme. Est-ce que l’épouse dispose dans les faits d’un pouvoir équivalent à celui du mari en ce sens qu’elle puisse mettre fin au mariage dans des conditions semblables, c’est-à-dire en l’absence de faute à reprocher à son conjoint, même si celui-ci s’y oppose ? Le raisonnement doit se faire au cas par cas, étant donné que la diversité de législations est très accusée sur ce point. Une appréciation globale des différentes formes de divorce admises par la loi étrangère est alors préconisée[158]. Il convient d’y apprécier si les différentes procédures ouvertes selon les cas à chacun des époux n’aboutissent pas en somme à instaurer une égalité, voire un certain équilibre quant à la dissolution du mariage. Le « [t]out dépend[ra] donc de l’équilibre [général] réalisé ou non par le système juridique en cause », qui, à cet égard, doit être « appréhendé dans sa totalité, avec sa logique interne, ses contrepoids [légaux ou jurisprudentiels] et ses évolutions »[159].
L’on peut certes reprocher aux répudiations musulmanes le fait que ce mode particulier de dissolution établisse une différence flagrante de traitement entre les époux, en ce qu’elle prive l’épouse d’un droit équivalent à celui du mari dans la rupture du lien conjugal. Or, relativement à certaines législations récentes, un examen in globo de la lex causae permettrait de constater que l’épouse peut dorénavant obtenir la dissolution du mariage dans des conditions qui sont plus ou moins similaires à celles du mari[160]. En droit marocain par exemple, il a été soutenu que le divorce pour discorde et désunion (chiqaq), introduit en 2004, serait pour la femme l’équivalent fonctionnel de ce qu’est la répudiation pour l’homme[161]. Il s’agit d’un procédé par laquelle l’épouse parvient unilatéralement à rompre son mariage, sans besoin de motiver sa requête et en dépit d’une éventuelle opposition de son mari. La faculté de mettre fin unilatéralement au mariage se trouverait ainsi bilatéralisée, compte tenu de l’économie générale du système[162].
En somme, la grande malléabilité de la notion d'ordre public permet de répondre à la nécessité de concilier la défense des valeurs chères à l’ordre juridique québécois, avec l’harmonie internationale des solutions et la tolérance due à des traditions culturelles différentes. Seules seront rejetées les répudiations les plus choquantes : celles qui sont faites dans un but frauduleux, celles qui méconnaissent les droits de la défense, ou encore celles qui n’accordent pas à l’épouse de pouvoirs équivalents en termes de dissolution du mariage. Un tel raisonnement rime avec l’approche préconisée par la Cour suprême dans Bruker c. Marcovitz, en présence d’un système d’inspiration religieuse : « [u]ne fois que le tribunal se déclare compétent pour connaitre d’un litige comportant des aspects religieux [...] il doit s’efforcer "d’arriver à la meilleure compréhension possible de la tradition et de la coutume applicable" »[163].
***
Si la désunion des sexes est un problème commun à toute l’humanité, les réponses apportées par les législations nationales diffèrent grandement. Comme l’affirme bien la Cour d’appel sous la plume du juge Dalphond, « [l]a résolution des conflits de droit international privé est souvent complexe, parsemée d’écueils factuels et juridiques »[164]. La question de la reconnaissance des divorces prononcés en terre d’Islam en fournit une belle illustration. Au Québec, l'analyse de la jurisprudence révèle des hésitations, des incertitudes, voire un certain malaise face aux institutions islamiques qui viennent interpeller sans cesse les juges québécois. Elle révèle la difficile coordination d'ordres juridiques dont les particularismes religieux, sociaux, politiques et culturels s'exacerbent et s’affrontent, particulièrement sur le plan de la dissolution du lien conjugal.
Il est indéniable que
[l]es ordres juridiques voyagent en même temps que les personnes. Ils les accompagnent. Et c’est bien la fonction du droit international privé que de permettre cette circulation des systèmes juridiques à travers les frontières. Il lui appartient en effet, de dire si un pays qui accueille un étranger accueille en même temps son droit, ses valeurs et sa normativité. Mais il ne suffit pas d’admettre la possibilité pour un ordre juridique de recevoir un droit étranger. Il importe de savoir comment, dans quelles conditions et dans quelles proportions[165].
À cet égard, si l’intention manifeste du codificateur de 1991 fut celle de favoriser la reconnaissance des jugements étrangers, la pratique jurisprudentielle telle que se dégagent des développements précédents, tend à en limiter sensiblement l'effectivité. Le divorce musulman se heurte inlassablement au phénomène de la frontière.
Comme une excellente thèse l’a bien analysé, deux principes de droit international privé peuvent entrer en collision[166] : d’une part, le principe de continuité des situations juridiques qui tend à assurer la permanence du statut des individus et la sécurité juridique dans les relations internationales et d’autre part, le principe de cohésion du for qui s’oppose à la l’application de lois ou à la reconnaissance de jugements qui heurtent les valeurs intangibles de l’ordre juridique du for. L’équilibre à trouver demeure délicat. L’état des personnes s’accommode mal d’une « validité géographiquement limitée »[167]. Une enquête empirique menée auprès des Canadiens musulmans révèle le souci de cette population, et notamment des femmes, d’obtenir un divorce à la fois reconnu au Canada que dans leurs pays d’origine, car leur vie se situe dans les deux, du moins sur le plan psychologique[168].
Un divorce boiteux, obtenu dans le pays d’origine, mais non reconnu dans le pays d’accueil, est certes à éviter, mais l’accueil inconditionnel
serait certainement la manifestation d’un universalisme juridictionnel déplacé en ce que, ignorant la réalité du phénomène de la frontière qui marque encore de nos jours l'organisation juridique du monde, il oublierait qu'aucune garantie de bonne justice n'est attachée, en soi, ni à la procédure étrangère qui a conduit au jugement ni à la solution que ce dernier consacre[169].
Il risque par ailleurs de compromettre l'intégration tant souhaitée des immigrés.
Il nous semble tout de même erroné de vouloir raisonner en termes de conflit de cultures opposant, d’un côté, les sociétés orientales, dans lesquelles les femmes seraient inexorablement vouées à un statut d’infériorité, et de l’autre, les sociétés occidentales, campées fièrement sur le principe d’égalité des sexes. L’on peut aisément relever aujourd'hui des lignes de convergence se dessinant entre les deux mondes. Une dynamique de rapprochement est susceptible à l’avenir de rendre moins âpre la communicabilité entre les deux. D’une part, une évolution des droits de la famille est perceptible dans le monde musulman. Dans de nombreux pays, la pratique de la répudiation est rendue plus ardue par un certain nombre de mesures édictées par les législateurs contemporains. Elle a tendance à s’émouvoir en véritable divorce judiciaire. Le droit québécois ne s’oppose d’ailleurs pas à l’accueil des autres modes de divorce en vigueur dans ces ordres (divorce pour discorde, le divorce par consentement mutuel, voire une répudiation qui ne présente aucun lien de proximité avec le for). D’autre part, le passage envisagé du droit québécois d’une conception institutionnelle à une conception contractuelle du mariage est également de nature à atténuer les différences avec le mariage musulman[170]. Les propositions de réforme faites à cet égard s’inscrivent dans un courant favorable à l'élargissement de l'espace conféré à la volonté individuelle dans l'aménagement du régime appliqué aux rapports de famille au détriment de l'ordre impératif jadis souverain en la matière[171].
Il n’en demeure pas moins que, pour le juge occidental, l’appréhension d'un droit religieux est davantage malaisée que celle d'un droit laïque, car le premier ne se trouve pas uniquement dans des instruments classiques comme la loi ou la jurisprudence. De nombreux auteurs ont mis avec justesse l’accent sur le fossé qui sépare le droit tel que formulé dans le discours académique (law in books), du droit tel qu’il est perçu, vécu et pratiqué dans ces sociétés (law in minds et law in action)[172]. La spécificité des institutions familiales musulmanes, intimement liées à la morale et à la religion, implique une investigation plus poussée en vue de pénétrer la dimension plurielle du droit.
La gestion du pluralisme n’est certes pas chose aisée. Il ne faudra néanmoins jamais perdre de vue que « la quête du droit international privé a toujours été, et le restera encore, celle de la recherche d’un équilibre entre l’exigence d’ouverture, et la nécessaire préservation de valeurs que le for tient pour fondamentales »[173]. La réception est à ce prix!
Appendices
Notes
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[1]
Selon l'Enquête nationale auprès des ménages de 2011 effectuée par Statistique Canada, il y avait 1 053 945 musulmans au Canada, c'est-à-dire environ 3,2 % de la population totale canadienne estimé à environ 33 millions en 2011. Cette proportion est en augmentation constante : voir Profil de l'enquête nationale auprès des ménages de 2011, produit nº 99-004-XWF, Statistique Canada, en ligne : <https://www150.statcan.gc.ca/n1/fr/catalogue/99-004-X>.
-
[2]
Jean Deprez, « Des droits sociaux des familles polygames : note sous Cour de cassation (Ch. soc), 8 mars 1990 » (1991) RCDIP 694 à la p 709; Jean Deprez, « Droit international privé et conflits de civilisation : aspects méthodologiques, les relations entre systèmes d'Europe occidentale et systèmes islamiques en matière de statut personnel », (1988) 4:211 RCADI 9 aux pp 204-06.
-
[3]
Voir notamment Ariane Leduc, Mélanie Raby et Valérie Scott, « Le mariage polygame et le droit international privé québécois dans une perspective de droit comparé » (2008) 21:1 RQDI 165; Anne Saris et Samia Amor, « Femmes musulmanes et divorce à Montréal : fatalité subie ou liberté acquise ? » (2011) 5:2 Revue scientifique de l’AIFI 61; Marianne Hardy-Dussault et Denise Helly, « Le mahr devant les tribunaux civils canadiens » (2013) 28:3 RCDS 387; Harith Al-Dabbagh, « La réception de la kafala dans l’ordre juridique québécois : vers un renversement du paradigme conflictuel? » (2017) 47:1 RGD 165; voir généralement Jeffrey A. Talpis, L’accommodement raisonnable en droit international privé québécois, coll. Conférences Roger-Comtois, Montréal, Thémis, 2009; Pascale Fournier, Mariage musulman, tribunaux d’Occident : Les transplantations juridiques et le regard du droit, Paris, Presses de Sciences Po, 2013.
-
[4]
Dominique Bureau et Horatia Muir Watt, Droit international privé, t 1, 4e éd., Paris, Presses Universitaires de France, 2017 à la p 25, n 1.
-
[5]
Jean-Paulin Niboyet, Cours de droit international privé, 1e éd, Paris, Sirey, 1946 à la p 22.
-
[6]
Roberto Baratta, « La reconnaissance internationale des situations juridiques personnelles et familiales » (2010) 348 RCADI 253 à la p 464.
-
[7]
Voir notamment Pierre Mercier, Conflits de civilisations et droit international privé : Polygamie et répudiation, coll Comparativa, Genève, Droz, 1972; Marie-Claude Najm, Principes directeurs du droit international privé et conflit de civilisations : Relations entre systèmes laïques et systèmes religieux, coll Nouvelle Bibliothèque de Thèses, Paris, Dalloz, 2005; Khalid Zaher, Conflit de civilisations et droit international privé, coll Logiques juridiques, Paris, L’Harmattan, 2009.
-
[8]
Comparé aux relations internationales, le terme « conflit de civilisations » revêt ici une connotation particulière, car « plutôt que d’exacerber les oppositions, le droit international privé cherche à les résorber »; voir Ali Mezghani, « Détermination de la loi applicable et conflit des civilisations en droit international privé de la famille », dans Yadh Benachour, Jean-Robert Henry et Rostane Mehdi, dir, Le débat juridique au Maghreb : de l’étatisme à l’État de droit, Paris, Publisud-Iremam, 2009, aux pp 23-38.
-
[9]
Hélène Gaudement-Tallon, « La désunion du couple en droit international privé » (1991) 226 RCADI 9 à la p 33.
-
[10]
Pierre Gannagé, « Le juge civil face aux droits religieux », dans Étienne Picard, dir, De tous horizons, Mélanges en l'honneur de Xavier Blanc-Jouvan, Paris, Société de Législation Comparée, 2005 aux pp 247-49.
-
[11]
Il s’agit d’une ordonnance d'un tribunal conférant la force exécutoire à un jugement étranger. Le terme « exequatur » est très peu utilisé dans la doctrine et la jurisprudence québécoises lesquelles préfèrent parfois employer le terme « exemplification ». Pourtant son usage est préconisé par l’Office québécois de la langue française. Selon ce dernier, il semble que l'utilisation courante du terme « exemplification » par la jurisprudence au Québec pour désigner l'action de reconnaître et de rendre exécutoire un jugement étranger vienne d'un glissement du sens anglais : Office québécois de la langue française, Grand dictionnaire terminologique, sub verbo « exequatur » en ligne : <http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8355455>.
-
[12]
L’étude de l’efficacité des jugements de divorce non revêtus de l’exequatur fera l’objet d’un texte ultérieur.
-
[13]
Convention sur la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers en matière civile et commerciale, 1 février 1971, (entrée en vigueur : 20 août 1979), en ligne : <https://www.hcch.net/fr/instruments/conventions/full-text/?cid=78>.
-
[14]
Ministère de la justice, Commentaires du ministre de la Justice : Le Code civil du Québec : un mouvement de société, t II, Québec, Publications du Québec, 1993, aux pp 2014-15.
-
[15]
Sous l’ancien droit, l’influence conjuguée de la tradition civiliste et de la common law avait abouti à créer une situation ubuesque avec de nombreux obstacles à la reconnaissance et à l'exécution des jugements étrangers. Pour plus de détails sur cet impact, voir Ethel Groffier, « L'effectivité des décisions de justice en droit international privé » (1985) 26:4 C de D 1005.
-
[16]
Gérald Goldstein et Jeffrey A. Talpis, « Les perspectives en droit civil québécois de la réforme des règles relatives à l’effet des décisions étrangères au Canada (1ère partie) » (1995) 74 R du B can 642 à la p 658.
-
[17]
Loi sur le divorce, LRC 1985, c 3 (2e supp).
-
[18]
Cette disposition supprime la révision au fond constamment critiquée sous l’ancien droit et aligne le droit québécois sur la règle en vigueur dans les autres provinces du Canada et dans un grand nombre d'autres pays dont la France et l'Angleterre : Ethel Groffier, « La réforme du droit international privé québécois » (1992) RCDIP 548 à la p 563.
-
[19]
Article 3155 CcQ.
-
[20]
Gérald Goldstein, Droit international privé : Extraits de La référence Droit civil, vol 2, coll Commentaires sur le Code civil du Québec, Cowansville, Yvon Blais, 2012 à la p 322.
-
[21]
Claude Emanuelli, Droit international privé québécois, 3e éd, La collection bleue, Montréal, Wilson & Lafleur, 2011 à la n 294.
-
[22]
Mohamed Chafi, Droit de la famille au Maroc : Traditionalisme et modernisme, 2e éd, Marrakech, Imprimerie El-Watanya, 2018 à la p 302.
-
[23]
P.(L.) c B.(F.), [2003] RJQ 564, au para 47, 2002 CanLII 25949 (QC CS).
-
[24]
S.F. c R.J.-S., 2005 CanLII 28456 au para 29 (QC CS).
-
[25]
Calvi c Assicurazioni Generalli S.P.A., [1994] RJQ 1269, 1994 CanLII 5751 (QC CA).
-
[26]
S.F. c R.J.-S., supra note 24 au para 61.
-
[27]
Droit de la famille – 191053, 2019 QCCS 2250 (CanLII) au para 36.
-
[28]
Les matières sujettes à des règles spéciales sont énumérées aux articles 3166, 3167, 3168 CcQ.
-
[29]
Ce paragraphe procède de la doctrine du miroir, ces conditions étant les mêmes que celles figurant dans l’article 3 (1) de la Loi qui, lui, concerne la compétence des tribunaux canadiens.
-
[30]
Droit de la famille – 131574, 2013 QCCS 2721 (CanLII) au para 43.
-
[31]
Ministère de la justice, supra note 14 aux pp 2024-2025.
-
[32]
Voir Jeffrey A. Talpis, « Quelques considérations visant la prévention des conflits en matière de validité du mariage en droit international privé québécois et en droit de l’immigration familiale », dans Développements récents en droit de l’immigration, Service de formation permanente du Barreau du Québec, Cowansville, Yvon Blais, 1998 aux p 135, 155; Gérald Goldstein et Ethel Groffier, Droit international privé, t II, coll Traité de droit civil, Cowansville, Yvon Blais, 2003 aux pp 138-39.
-
[33]
Ethel Groffier, La réforme du droit international privé québécois : supplément au précis de droit international privé québécois, 4e éd, Cowansville, Yvon Blais, 1993 à la p 166.
-
[34]
H. P. Glenn, « Droit international privé », dans La Réforme du Code Civil, textes réunis par le Barreau du Québec et la Chambre des Notaires du Québec, Sainte-Foy, Les Presses de l'Université Laval, 1993, aux p 669, 774-75; en accord avec Claude Emanuelli, Étude comparative sur le droit international privé au Canada, Montréal, Wilson & Lafleur, 2019 à la p 123.
-
[35]
Cette solution procède de la jurisprudence anglaise : lndyka v Indyka (1969) 1 AC 33 (HL (Eng)); lndyka v Indyka (1967) 2 All ER 689; lndyka v Indyka (1967) 3 WLR 510 (HL (Eng)).
-
[36]
Voir Claude Emmanuelli, supra note 21, n 287.
-
[37]
Droit de la famille – 2054, 1997 CanLII 8430 au para 8 (QC CS), conf par (pour d'autres motifs) 1998 CanLII 12833 (QC CA).
-
[38]
Ibid au para 128.
-
[39]
Droit de la famille – 2054, supra note 37 au para 110.
-
[40]
Ibid au para 122.
-
[41]
Ibid au para 116.
-
[42]
Droit de la famille – 091444, 2009 QCCS 2739 (CanLII).
-
[43]
Ibid au para 7; le juge se contente de constater qu’aucune des parties n’a résidé « habituellement dans ce pays […] pendant au moins l’année précédant l’introduction de l’instance »; en accord avec Droit de la famille – 103261, 2010 QCCS 5934 (CanLII) aux para 32-33, où la juge Petras déclare « sans valeur au Canada » le jugement de divorce marocain pour avoir méconnu l’article 22 de la Loi sur le divorce.
-
[44]
S.F. c R.J.-S., supra note 24aux para 33-34.
-
[45]
Droit de la famille – 2054, 1998 CanLII 12833 (QC CA); le tribunal québécois fut le premier saisi, ce qui suffit pour refuser la reconnaissance.
-
[46]
Droit de la famille – 172244, 2017 QCCA 1470 (CanLII) au para 165.
-
[47]
Ibid au para 166.
-
[48]
Droit de la famille – 172244, supra note 47 au para 170.
-
[49]
Ibid au para 172.
-
[50]
Ibid au para 175.
-
[51]
R.S. c P.R., 2019 CSC 49 (CanLII) au para 34; Madame ayant abandonné sa contestation de la constitutionnalité de l'article 3167(1) CcQ.
-
[52]
Barer c Knight Brothers LLC, 2019 CSC 13 (CanLII) au para 145; pour un commentaire détaillé sur cette affaire, voir Gérald Goldstein, « La compétence internationale indirecte et la soumission au tribunal étranger selon la Cour suprême du Canada après l’arrêt Barer c. Knight Brothers » (2019) 97:3 R du B can 449.
-
[53]
Barer c Knight Brothers LLC, supra note 52 au para 144; reprenant le propos de Geneviève Saumier, « The Recognition of Foreign Judgments in Quebec – The Mirror Crack’d? » (2002), 81 R du B can 677 à la p 682, ainsi que les Commentaires du ministre de la justice supra note 31.
-
[54]
Les jugements répertoriés tiennent souvent compte de ces actifs pour statuer sur la pension alimentaire et sur le partage du patrimoine familial et du régime matrimonial.
-
[55]
Droit de la famille – 172244, supra note 46 au para 176.
-
[56]
Droit de la famille – 191053, supra note 27.
-
[57]
Ibid aux para 27-33.
-
[58]
Gérald Goldstein, « Principes généraux et conditions générales de reconnaissance et d’exécution » fascicule 10, dans JurisClasseur Québec-Droit international privé, coll Droit civil, Montréal, LexisNexis Canada, 2012, au para 54.
-
[59]
Gérald Goldstein, supra note 20 à la p 326.
-
[60]
S.F. c R.J.-S., supra note 24 au para 30.
-
[61]
Droit de la famille – 2054, supra note 37.
-
[62]
Sur cette pratique voir Marie-Claude Najm, « Le sort des répudiations musulmanes dans l’ordre juridique français : Droit et idéologie(s) » (2010) 59:1 Droit et Cultures aux pp 209 et s.
-
[63]
H. P. Glenn, supra note 34, à la p 763.
-
[64]
P.(L.) c B.(F.), supra note 23.
-
[65]
Ibid aux para 20-21.
-
[66]
H. P. Glenn, supra note 34 à la p 763; Claude Emanuelli, supra note 21 à la n 297.
-
[67]
Gérald Goldstein et Ethel Groffier, Droit international privé, t I, coll Traité de droit civil, Cowansville, Yvon Blais, 1998 à la p 394.
-
[68]
Gérald Goldstein, supra note 20 à la p 325.
-
[69]
Gérald Goldstein, supra note 58 n 55.
-
[70]
Voir Claude Emanuelli, supra note 21 à la n 297.
-
[71]
Bien évidemment si le demandeur s’adresse aux tribunaux québécois malgré la décision étrangère, le défendeur peut toujours soulever l’exception de litispendance et demander au tribunal saisi de surseoir à statuer sur le fondement de l’article 3137, en attendant de se prononcer sur la reconnaissance au Québec de la décision étrangère. Cela dit, l’autorité québécoise dispose, dans le cadre de l’article 3137, d’un pouvoir discrétionnaire et pourra toujours passer outre la compétence du tribunal étranger.
-
[72]
R.S. c P.R., supra note 51 au para 87.
-
[73]
Birdsall inc. c In Any Event inc., [1999] RJQ 1344, 1999 CanLII 13874 (QC CA).
-
[74]
S.F. c R.J.-S., supra note 24 au para 38.
-
[75]
Gérald Goldstein et Jeffrey A. Talpis, supra note 16 à la p 655.
-
[76]
Droit de la famille – 142311, 2014 QCCS 4425 (CanLII) au para 13; en l’espèce, Monsieur s’oppose à la requête en divorce de la demanderesse en raison des recours en séparation et en annulation de mariage intentés par les parties devant le Tribunal maronite unifié du Liban. Le tribunal n’a pu accéder à sa demande car aucune preuve de la loi libanaise n’ayant été produite.
-
[77]
S.F. c R.J.-S., supra note 24 aux para 39-42.
-
[78]
P.(L.) c B.(F.), supra note 23.
-
[79]
Ibid aux para 28-29; en conséquence, le tribunal arrive à la conclusion que l'autorité québécoise, le 15 mai 2002, a été la première saisie d'une demande en divorce alors que le mari n'a intenté son recours en divorce que le 4 juin 2002 devant la Cour du Maroc; voir P.(L.) c B.(F.), supra note 23 au para 39.
-
[80]
Voir par ex Droit de la famille – 131294, 2013 QCCA 883 (CanLII); Droit de la famille – 131784, 2013 QCCS 3280 (CanLII); la question a toutefois n’a pas été abordée explicitement.
-
[81]
Droit de la famille – 2573, AZ-97021076, JE 97-207 (QC CS) aux para 12-13; Si la séparation de corps ne rompt pas le lien du mariage (article 507 CcQ), le jugement de divorce le rompt et permet aux parties d'en contracter un nouveau (article 516 CcQ et Loi sur le divorce, supra 17 note art 14).
-
[82]
Droit de la famille – 11263, 2011 QCCS 499 (CanLII); requête en irrecevabilité pour chose jugée rejetée.
-
[83]
Droit de la famille – 103775, 2010 QCCS 6882 (CanLII).
-
[84]
Gérald Goldstein, supra note 58, n 66.
-
[85]
Jeffrey A. Talpis et Jean-Gabriel Castel, « Le Code civil du Québec : Interprétation des règles du droit international privé » dans La réforme du Code civil, textes réunis par le Barreau du Québec et la Chambre des notaires du Québec, Québec, Les Presses de l'Université de Laval, 1993, 807 à la p 913; en accord avec Claude Emanuelli, supra note 21 à la n 296.
-
[86]
Gérald Goldstein, supra note 20 aux pp 330-331.
-
[87]
Gérald Goldstein, supra note 58, n 68.
-
[88]
Droit de la famille – 093010, 2009 QCCS 5711 (CanLII).
-
[89]
Ibid au para 5.
-
[90]
Correspond aujourd’hui à l’article 45 du nouveau Cpc.
-
[91]
Henri Kélada, Reconnaissance et exécution des jugements étrangers, Cowansville, Yvon Blais, 2013 à la p 312.
-
[92]
Canfield Technologies Inc. c Servi-Metals Canada Inc., 1999 CanLII 11020 au para 17 (QC CS).
-
[93]
Jeffrey A. Talpis, « Valeur et efficacité des divorces en droit international privé québécois » (1973) 14 C de D 625 à la p 660.
-
[94]
D.(J.-Y.) c. M.(C.)(Curateur de), 2002 CanLII 14424 (QC CS).
-
[95]
Droit de la famille – 072464, [2007] RJQ 2656, 2007 QCCS 4822 (CanLII) [Droit 072464]; conf par Droit de la famille – 08689, 2008 QCCA 549 (CanLII).
-
[96]
Retour à la maison par lui, reprise de la vie commune, reprise des relations sexuelles, décision de partir au Canada avec toute la famille, décision de s’établir au Québec et, enfin, déclaration aux autorités de l’immigration qu’il était toujours marié à madame, alors qu’il donnait pleinement suite aux procédures déjà entreprises.
-
[97]
Droit 131574, supra note 30 aux para 55-56.
-
[98]
Notamment en présence des documents de nature à servir d’équivalents à la motivation; Society of Lloyd’s c Alper, 2006 QCCS 1203 (CanLII).
-
[99]
Stonecroft Resources Inc. c Marble Point Energy Ltd., 2011 QCCA 141 (CanLII).
-
[100]
Gérald Goldstein, supra note 20 à la p 350.
-
[101]
Platania c Di Campo, 2018 QCCA 1532 (CanLII).
-
[102]
Pour plus de détails, voir Harith Al-Dabbagh et Jeffrey A. Talpis, « Jugement rendu par défaut à l’étranger : Le droit québécois protège-t-il suffisamment les défendeurs résidant au Québec? Commentaire sur la décision Jannesar c. Yousuf de la Cour supérieure » (2013) 72 R du B aux pp 555-78.
-
[103]
Art 3156 CcQ.
-
[104]
Droit de la famille – 182, 2018 QCCS 3 (CanLII).
-
[105]
Ibid au para 29.
-
[106]
Droit de la famille – 141651, 2014 QCCS 3221 (CanLII).
-
[107]
Ibid au para 55.
-
[108]
Droit de la famille – 141651 aux para 58-59.
-
[109]
Droit de la famille – 3454, AZ-99022106, JE 99-2297 (QC CS).
-
[110]
S.F. c R. J.-S., supra note 24.
-
[111]
Ministère de la justice, supra note 14 à la p 1954.
-
[112]
R.S. c P.R., supra note 51 au para 53.
-
[113]
Ibid au para 56; dans cette affaire, la Cour suprême reproche à la juge de première instance d’avoir accordé trop d’importance à la question de savoir si l’article 1096 du Code civil belge, qui consacre la révocabilité ad nutum des donations faites entre époux au cours du mariage, était conforme à la Charte canadienne alors que c’était le résultat de la décision étrangère qui devait faire l’objet de l’examen.
-
[114]
Pour une étude d’ensemble de la question, voir Yvon Linant De Bellefonds, Traité de droit musulman comparé. Le mariage. La dissolution du mariage, t 2, Paris – La Haye, Mouton & Co., 1965 à la p 305 et s; ainsi, en droit marocain, l’on a pu recenser la coexistence d’au moins onze voies différentes d’accès au divorce. Voir Mohamed Chafi, supra note 22 à la p 267 et s.
-
[115]
Le mariage musulman étant de nature purement consensuelle, il est admis que l’épouse puisse disposer, en vertu d’une clause matrimoniale, de la faculté d’exercer elle-même le talaq. Le Code de la famille marocain le prévoir expressément à l’article 89, sous le vocable (tamlik).
-
[116]
Jeffrey A. Talpis, supra note 32 à la p 156. En effet, la Loi sur le divorce prévoit une seule cause de divorce : l’échec du mariage, Loi sur le divorce, supra 18 note art 8(1).
-
[117]
La compensation peut être la renonciation par la femme à réclamer la partie de sa dot non encore versée ou la restitution de la portion déjà versée. Pour un divorce Khul en Égypte voir Paquette c Nassef, AZ-96021384, JE 96-1015 (QC CS).
-
[118]
Jeffrey A. Talpis, supra note 32 à la p 157.
-
[119]
Cette solution est admise en droit français, Cass civ 1re, 24 septembre 2014, Légifrance no 13-20.049, en ligne : <https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000029510726/>.
-
[120]
Droit de la famille – 1466, 1991 CanLII 3200 (QC CA).
-
[121]
Selon la Cour d’appel, n’est pas contraire à la Charte, la loi syrienne qui prévoit que « si le mari demande le divorce, il doit payer la dot et laisser les bijoux à l'épouse; si, par contre, c'est elle qui le requiert, elle renonce à exiger la dot et doit remettre les bijoux ».
-
[122]
Droit de la famille – 192203, 2019 QC CS 4562 (CanLII) au para 14; sans se prononcer toutefois sur l’allégation de l’épouse qu’une telle renonciation ait été obtenu par chantage, ce débat pouvant se faire devant le juge saisi des mesures provisoires.
-
[123]
Karim c Ali, AZ-71021131 [1971] CS 439.
-
[124]
Droit de la famille – 191053, supra note 27; je remercie Me Kemal Balti, avocat à Montréal, de m’avoir fourni une copie anonymisée de son rapport d’expertise portant sur cette affaire.
-
[125]
Voir par ex l’article 49 du Code de la famille algérien qui prévoit que « Le divorce ne peut être établi que par jugement précédé de plusieurs tentatives de conciliation des parties effectuées par le juge, au cours d’une période qui ne saurait excéder un délai de trois (3) mois à compter de l’introduction de l’instance »; en accord avec l'article 81 et s du Code de la famille marocain de 2004.
-
[126]
Gérald Goldstein et Ethel Groffier, supra note 33 à la p 142.
-
[127]
Claude Emanuelli, Étude comparative sur le droit international privé au Canada, Montréal, Wilson & Lafleur, 2019 à la p 128.
-
[128]
Jeffrey A. Talpis, supra note 32 à la p 43.
-
[129]
Droit de la famille – 2054, supra note 37.
-
[130]
Ibid aux para 149-50.
-
[131]
Droit de la famille – 2054, supra note 37 aux para 156, 197.
-
[132]
P.(L.) c. B.(F.), supra note 23.
-
[133]
Ibid aux para 51-52.
-
[134]
P.(L.) c. B.(F.), supra note 23 au para 50.
-
[135]
Ibid au para 53.
-
[136]
P.(L.) c. B.(F.), supra note 23 au para 55.
-
[137]
Droit de la famille – 072464, supra note 95.
-
[138]
Ibid au para 44.
-
[139]
Droit de la famille – 072464, supra note 95 au para 47.
-
[140]
Ibid au para 53.
-
[141]
Droit de la famille – 08689, 2008 QCCA 549 (CanLII) au para 6.
-
[142]
Des québécois domiciliés aux Émirats arabes unis depuis plus de cinq ans. Le mari répudie sa femme sur place, celle-ci, une fois retournée au Québec, réplique par une action en séparation de corps et demande la garde des enfants restés à Dubaï. Le juge accède à la demande de Monsieur et décline compétence en faveur des tribunaux émiratis, en vertu de l’article 3142, car les enfants y sont domiciliés et une cause y est pendante où madame est représentée. La requête en séparation est également rejetée aux motifs qu'un divorce a déjà été prononcé à l'étranger et doit être reconnu au Québec jusqu'à preuve du contraire : Droit 113775, supra note 83 aux para 41-42.
-
[143]
L’admission de cette théorie a été réclamée depuis longtemps en doctrine québécoise : voir Gérald Goldstein et Ethel Groffier, supra note 67, n 117 à la p 271.
-
[144]
Droit de la famille – 072464, supra note 95 au para 52.
-
[145]
Jeffrey A. Talpis, supra note 3 à la p 43; H.P. Glenn, supra note 34 aux pp 681-84; contra, Gérald Goldstein supra note 58, n 74. Goldstein estime que le juge devra évaluer la contrariété à l’ordre public non au moment de la décision fut rendue, mais au moment de la reconnaissance.
-
[146]
Cass civ 1re, 17 février 2004, RCDIP, no 2004.424, note Petra Hammje, JDI, no 2004.867, note Gilles Cuniberti; Cass civ 1re, 14 mai 2014, (2014) Bull civ I, no 89.
-
[147]
Jeffrey A. Talpis, supra note 3 aux pp 7-8.
-
[148]
Droit de la famille – 1466, supra note 120.
-
[149]
R.S. c P.R., supra note 51.
-
[150]
Ibid au para 52.
-
[151]
Marie-Laure Niboyet, « Regards français sur la reconnaissance en France des répudiations musulmanes » (2006) 58:1 RIDC 27 à la p 31.
-
[152]
Claude Emanuelli, supra note 21 à la n 299.
-
[153]
Marie-Laure Niboyet, supra note 151 aux pp 27, 32.
-
[154]
Une telle solution est bien acquise en France : Cass civ 1re, 11 mars 1997, D à la p 400 ; Cass civ 1re, 17 février 2004, Bull civ, n° 259.
-
[155]
Idrissi Kaïtouni c Idrissi Kaïtouni, 2006 QCCS 3663 (CanLII) aux para 34-35; en l’espèce, la femme réclame le partage des biens au Québec consécutivement à un talaq au Maroc.
-
[156]
Droit de la famille – 192203, 2019 QCCS 4562 (CanLII) au para 10.
-
[157]
L’article 8(1a) de la Loi sur le divorce consacre une sorte de divorce par répudiation unilatérale en droit québécois. Le juge est obligé de le prononcer après avoir vérifié une condition purement objective : une séparation d’un an.
-
[158]
Harith Al-Dabbagh, « Droit international privé et relativisme culturel : entre contrastes et paradoxes », dans Frédéric Bérard, Jean Leclair et Michel Morin dir, La diversité culturelle et linguistique au Canada et au Maroc en droit interne et en droit international, Montréal, Thémis, 2018 à la p 85 et s.
-
[159]
Hugues Fulchiron, « Ne répudiez point... : Pour une interprétation raisonnée des arrêts du 17 février 2004 » (2006) 58:1 RIDC 7 à la p 18.
-
[160]
En Égypte, la Loi no1-2000 instaure un nouveau mode de dissolution du mariage permettant à la femme de rompre unilatéralement son mariage. Sur ce point, voir Nathalie Bernard-Maugiron, « Quelques développements récents dans le droit du statut personnel en Égypte », (2004) 56:2 RIDC 355 aux pp 359 et s; sur le droit algérien, voir Kamel Saïdi, « La réforme du droit algérien de la famille : Pérennité et rénovation » (2006) 1 RIDC 119; sur le droit irakien : Harith Al-Dabbagh, « Droit de la famille et nouvelle Constitution irakienne » (2007) 3 Revue de la Recherche Juridique – Droit prospectif 1507.
-
[161]
Voir notamment Khalid Zaher, « Plaidoyer pour la reconnaissance des divorces marocains; à propos de l’arrêt de la première chambre civile du 4 novembre 2009 » (2010) 99:2 RCDIP 313; Denis Thévenet-Montfrond, « Refus d’exequatur du divorce sous contrôle judiciaire marocain : une approche incomplète de la Moudawana » 114 Revue Lamy droit civil 2014 39.
-
[162]
Voir Harith Al-Dabbagh, supra note 158 aux pp 106-09; Mohamed Chafi, supra note 22 à la p 298.
-
[163]
Bruker c Marcovitz, 2007 CSC 54 (CanLII) au para 45, citant le juge Gonthier dans Lakeside Colony of Hutterian Brethren c Hofer, [1992] 3 RCS 165, 1992 CanLII 37 (CSC).
-
[164]
M.(G.) c F.(A.M.), [2003] RJQ 2516 au para 5, 2003 CanLII 41691 (QC CA).
-
[165]
Ali Mezghani, supra note 8 à la p 25.
-
[166]
Marie-Claude Najm, supra note 7 aux pp 75 et s.
-
[167]
Marie-Claude Najm, supra note 62 aux pp 220-221.
-
[168]
Anne Saris et al, Étude de cas auprès de Canadiennes musulmanes et d’intervenants civils et religieux en résolution de conflits familiaux : Une recherche exploratoire menée à Montréal en 2005-2007, avec la collaboration du Collectif des femmes immigrantes du Québec, Montréal, 2007 aux pp 68 et s.
-
[169]
Pascal de Vareilles-Sommières, « Jugement étranger : matières civile et commerciale » dans Répertoire de droit international Dalloz, Paris, Dalloz, février 2020, n 3.
-
[170]
La place du consensualisme en droit familial musulman est traditionnellement beaucoup plus étendue que dans les pays occidentaux de tradition civiliste; Yvon Linant De Bellefonds, supra note 114 aux pp 40, 89; Pierre Gannagé, « La pénétration de l’autonomie de la volonté dans le droit international privé de la famille » (1992) RCDIP aux pp 425 et s.
-
[171]
Comité consultatif sur le droit de la famille, Alain Roy (prés.), Pour un droit de la famille adapté aux nouvelles réalités conjugales et familiales, Québec, Thémis, 2015.
-
[172]
Les recherches des sociologues, anthropologues et comparatistes mettent l’accent sur le décalage entre les règles strictes et les pratiques souples en droit musulman : voir par ex Bernard Botiveau, Loi islamique et droit dans les sociétés arabes, coll Hommes et sociétés, Aix-en-Provence, Karthala-Iremam, 1993; Baudouin Dupret (dir.), La Charia aujourd’hui : Usages de la référence au droit islamique, Paris, La Découverte, 2012; sur les concepts law in mind et law in action, voir William Ewald, « Comparative Jurisprudence (I): What Was It like to Try a Rat? » (1995) 143:6 U Pa L Rev 1889 aux pp 2111‑2112.
-
[173]
Ali Mezghani, supra note 8 à la p 37.