Article body

La thérapie de couple axée sur l’émotion (TCÉ) est une intervention expérientielle et systémique développée au cours des années 1980 par Susan M. Johnson et Leslie Greenberg (Greenberg et Johnson, 1984, 1988). Il s’agit d’une thérapie brève visant à diminuer la détresse conjugale à travers l’expérience et la validation émotionnelles plutôt que par la correction de déficits communicationnels ou l’apprentissage de stratégies relationnelles alternatives (Johnson, 2004). L’objectif de la TCÉ est de rétablir – ou dans certains cas d’établir – un lien d’attachement sécurisant entre les partenaires. Ce but est atteint par l’identification des émotions primaires (p. ex., la peur, la tristesse, la honte, la culpabilité) présentes lors des échanges entre les partenaires, par l’expression de ces émotions et des besoins qui les sous-tendent (p. ex., besoin de connexion émotionnelle, de tendresse), ainsi que par la facilitation de réponses positives aux manifestations claires et directes de vulnérabilité et de besoins émotionnels.

Les chercheurs Johnson et Greenberg ont été les premiers à développer une thérapie de couple principalement axée sur les émotions. Or, depuis le début des années 2000, ces deux chercheurs ont adopté des orientations théoriques et cliniques distinctes et ils proposent des approches différentes dans la conceptualisation des problématiques dyadiques et dans la démarche clinique en thérapie de couple. Les noms de ces deux interventions sont cependant très semblables, ce qui pourrait porter à confusion. En effet, l’approche de Johnson se nomme dans la langue originale anglaise Emotionally Focused Therapy, alors que celle de Greenberg est nommée Emotion-Focused Therapy. La distinction se fait plus difficilement lorsque le terme est utilisé en français. Certains auteurs vont parler de « la thérapie de couple centrée sur les émotions » (Meneses et al., 2015), alors que d’autres utilisent le terme « la thérapie de couple axée sur l’émotion » (Couture-Lalande et al., 2007; Lafontaine et al., 2008), et ce, peu importe l’approche utilisée. Notre recension porte sur l’approche de Johnson (Emotionally Focused Therapy) qui accorde une place plus importante à l’attachement dans la compréhension de la problématique présentée par les partenaires, ainsi que dans la planification et l’implantation de l’intervention. Elle a également fait l’objet d’un grand nombre d’études de validation empirique (Beasley et Ager, 2019).

La présente recension des écrits scientifiques introduit d’abord les fondements théoriques de la TCÉ ainsi que les étapes de cette thérapie. Elle présente ensuite 14 études au cours desquelles les chercheurs ont testé l’efficacité de la TCÉ depuis son développement dans les années 1980, et ce, tant dans la population générale, qu’au sein de populations vivant des problématiques spécifiques. Cette recension diffère des recensions existantes (p. ex., celle de Beasley et Ager, 2019 et celle de Wiebe et Johnson, 2016) par les critères d’inclusion et d’exclusion déterminés ainsi que par les objectifs. L’objectif premier de cette recension est d’offrir aux lecteurs une analyse critique des études sélectionnées, en présentant leurs forces ainsi que leurs limites méthodologiques, statistiques et conceptuelles. Un second objectif est d’élargir le spectre de la littérature scientifique en français sur le sujet. Il s’agit en effet de la première recension des études d’efficacité de la TCÉ à être rédigée dans cette langue.

ATTACHEMENT ET RELATION CONJUGALE

La TCÉ se base sur la théorie de l’attachement formulée initialement par Bowlby en 1969. Cette théorie offre aux thérapeutes une carte de route intéressante pour conceptualiser et pour intervenir au niveau de la relation amoureuse chez l’adulte. Le postulat principal de la théorie de l’attachement stipule la présence d’un besoin fondamental chez l’humain, soit celui de se sentir aimé et en sécurité émotionnelle et de percevoir la disponibilité affective des êtres chers, surtout dans les situations de stress ou de menace. Selon Bowlby, ce besoin persiste « du berceau au cercueil » (Bowlby, 1979, p. 129, traduction libre). En effet, les adultes – tout comme le font les enfants – réagissent de façon prévisible lors de la formation, du maintien et de la rupture des liens avec leurs figures d’attachement. Le partenaire amoureux ayant tendance à devenir la figure d’attachement principale chez les conjoints qui s’investissent dans une relation amoureuse (Guerriero et Zavattini, 2015), la théorie de l’attachement permet en conséquence de comprendre les réactions émotionnelles intenses engendrées par les difficultés vécues au sein du couple (Johnson, 2004, 2013, 2019). Dans cette perspective, les problèmes conjugaux chroniques émergent lorsque le besoin d’attachement sécurisant n’est pas comblé, soit parce que les partenaires perçoivent l’indisponibilité émotionnelle de l’autre, soit parce qu’ils sentent que le lien d’attachement qui les unit est menacé.

L’insatisfaction liée au besoin fondamental de se sentir proche émotionnellement d’une figure d’attachement entraîne généralement des émotions négatives comme la peur de perdre l’autre, la colère, le désespoir et éventuellement, le désengagement (Guerriero et Zavattini, 2015; Johnson, 2013; Zeifman et Hazan, 2016). L’insatisfaction par rapport aux besoins d’attachement peut également contribuer de façon importante aux problèmes de santé mentale (Shaver et Mikulincer, 2014) et physique (King et Reis, 2012; Schmidt et al., 2002; Sher et al., 2014).

Depuis la publication de la première étude portant sur les relations amoureuses chez l’adulte en tant que processus d’attachement (Hazan et Shaver, 1987), les résultats de plus de 500 études en psychologie sociale, psychologie de la personnalité, psychologie de la santé et psychologie clinique appuient la notion selon laquelle les partenaires ont tendance à s’installer dans une dynamique conjugale qui reflète leurs tentatives de satisfaire leurs besoins d’attachement primaires (Zeifman et Hazan, 2016). Afin de réguler les émotions négatives vécues lors des « ruptures de connexion émotionnelle » avec leur partenaire, les conjoints utilisent des stratégies qui peuvent s’avérer inefficaces. Ces dernières se structurent habituellement autour de deux grandes catégories, soit 1) l’hyperactivation des stratégies d’attachement (poursuite) où le conjoint devient anxieux et cherche à s’accrocher à son partenaire, en le critiquant et même parfois en devenant agressif, soit 2) la désactivation du système d’attachement (retrait) où le conjoint devient plus indépendant et s’éloigne de ses besoins d’attachement, ainsi que de la peine et de la peur qui accompagnent le lien insécurisant à l’autre. Cette stratégie implique l’évitement de la proximité émotionnelle avec son partenaire en se concentrant sur des activités en dehors du couple (p. ex., sport, travail, relations avec des amis) (Bartholomew et Horowitz, 1991; Mikulincer et Shaver, 2007; Shaver et Mikulincer, 2002). La dynamique d’interaction qui se crée alors entre les conjoints peut prendre l’une ou l’autre des trois formes suivantes : 1) poursuite chez un des partenaires et retrait chez l’autre (un des partenaires cherche le contact et est critique alors que l’autre partenaire s’éloigne), 2) poursuite chez les deux partenaires (les deux partenaires cherchent à s’accrocher à l’autre et ils se critiquent) ou 3) retrait chez les deux partenaires (les partenaires s’éloignent l’un de l’autre).

La dynamique interactionnelle la plus fréquemment rapportée se traduit par une stratégie d’approche/retrait, caractérisée par un comportement de poursuite chez la femme et par un comportement de retrait chez l’homme (Gottman, 2011). La dynamique qui se crée alors entre les partenaires peut devenir la façon habituelle d’interagir face aux difficultés vécues dans le couple (Birnbaum et al., 2006). L’objectif de la TCÉ est de restructurer cette dynamique d’interaction problématique, afin de rétablir un lien d’attachement sécurisant. Les conjoints au sein d’une relation intime où prévaut un mode d’attachement sécurisant rapportent, par exemple, pouvoir faire confiance à leur partenaire et rechercher du soutien auprès de lui/d’elle, principalement dans les situations où ils auront affectivement besoin de lui/d’elle (Couture-Lalande, et al., 2007).

STADES ET ÉTAPES DE LA THÉRAPIE AXÉE SUR L’ÉMOTION

La TCÉ est une intervention brève, d’une durée approximative de 8 à 25 rencontres. Elle se compose de trois stades qui se subdivisent à leur tour en neuf étapes (Johnson, 2004, 2019; Johnson et Greenman, 2006; Johnson et Whiffen, 1999; Lafontaine et al., 2008). Le premier stade, la désescalade/désintensification de la dynamique, vise à diminuer la sévérité de la dynamique d’interaction. Cela se fait par l’établissement de l’alliance thérapeutique (étape 1), par l’identification de la dynamique d’interaction et des positions prises par chacun des partenaires (étape 2), par la reconnaissance de leurs émotions primaires (p. ex., peur, peine, solitude, honte) à la base de cette dynamique (étape 3) et par la présentation de leur problème en termes de cycle d’interaction, plutôt qu’en termes d’erreurs commises par l’un ou l’autre des partenaires (étape 4). En effet, au cours de ce premier stade, les conjoints sont amenés à voir leur dynamique d’interaction (p. ex., poursuite-retrait) comme étant la source de leurs difficultés plutôt que de se blâmer l’un et l’autre. Ils en arrivent également à mieux comprendre leur rôle dans le développement et l’entretien du cycle. Ils sont encouragés à s’allier pour changer ce cycle que Johnson (2004) nomme une « danse ». À la fin du stade un, bien que la dynamique d’interaction n’ait pas encore changé, on note généralement un adoucissement dans les positions prises par chacun des partenaires. Le conjoint qui est en position de poursuite ressent toujours de la colère, mais il devient moins critique et il est soulagé de comprendre que l’autre se retire pour se protéger ou protéger la relation. De son côté, le conjoint en position de retrait peut s’exprimer davantage et comprendre que les critiques de son partenaire peuvent être des tentatives non optimales pour se rapprocher.

Le deuxième stade vise à restructurer les interactions : reconnaître ses propres besoins d’attachement et ses émotions (étape 5), accepter de façon empathique les nouvelles expériences émotionnelles du partenaire (étape 6) et exprimer directement ses émotions et ses besoins à l’autre (étape 7). Dans une perspective expérientielle, la TCÉ ne vise pas seulement l’identification des émotions; l’objectif est d’amener les conjoints à ressentir leurs émotions, afin de les exprimer et de mieux les réguler. Par ailleurs, la simple expression des émotions reliées aux besoins d’attachement n’est pas suffisante. La manière dont le partenaire répond à l’expression des besoins et à la vulnérabilité de son conjoint (à l’étape 6) est d’une importance primordiale, au sens où la réponse empathique aux besoins de réconfort et de réassurance aura pour effet d’encourager l’engagement émotionnel des deux partenaires et de favoriser la mise en place d’une nouvelle dynamique d’interaction (Johnson et Greenman, 2006). Parce que les partenaires s’appuient l’un et l’autre dans leurs nouvelles expériences émotionnelles, l’engagement qui les unit s’en trouve approfondi. À la fin du stade deux, le partenaire en position de poursuite devient moins critique et se montre plus vulnérable (relâchement émotionnel), alors que le partenaire qui est en position de retrait s’exprime davantage (réengagement émotionnel).

Le troisième stade se centre finalement sur la consolidation et l’intégration des acquis. Les problèmes qui ont pu être soulevés antérieurement en thérapie (p. ex., l’éducation des enfants, les finances, les tâches ménagères) sont revisités et les partenaires tentent de leur apporter une solution (étape 8), tout en consolidant la nouvelle dynamique d’interaction empreinte de sécurité au niveau de l’attachement (étape 9). L’objectif de la TCÉ n’est pas seulement d’éliminer la détresse conjugale, mais surtout de permettre le maintien de l’engagement émotionnel entre les partenaires dans une perspective à long terme.

Selon le stade et l’étape, différentes techniques visant soit à explorer les émotions (p. ex., reflet, validation, interprétation empathique), soit à restructurer les interactions du couple (p. ex., mise en acte) sont utilisées par le thérapeute (pour plus de détails, voir Johnson, 2004). Notons finalement que, bien que la démarche thérapeutique soit structurée, l’intervention reste flexible et il est indiqué pour le thérapeute de revisiter les différentes étapes au cours d’un même stade (Johnson, 2004, 2019).

EFFICACITÉ DE LA THÉRAPIE DE COUPLE AXÉE SUR L’ÉMOTION (TCÉ) AUPRÈS DE LA POPULATION GÉNÉRALE ET DE CLIENTÈLES SPÉCIFIQUES

La recension des articles sur l’efficacité de la TCÉ a été réalisée en janvier 2019 par la première auteure de la présente étude. Les critères d’inclusion ont été préalablement définis. Les études retenues devaient : 1) avoir un groupe contrôle auquel les participants étaient assignés de façon aléatoire, 2) mesurer la satisfaction conjugale, et 3) porter sur la différence du niveau de la satisfaction conjugale pré et post intervention. Par ailleurs, les articles devaient être rédigés en français ou en anglais. Il est cependant à noter que, en dépit de l’inclusion d’articles en français dans les critères, tous les articles retenus avaient été rédigés en anglais. Tous les types de recherches publiées (p. ex., articles, thèses de doctorat) répondant aux critères d’inclusion ont par ailleurs été considérés. Les bases de données « PubMed » et « PsycARTICLES » ont été consultées. Les mots Emotionally focused therapy ont été pairés avec les mots clés suivants : efficacy, distressed couples, randomized study. Cent vingt-sept articles sont ressortis de cette première sélection. En parallèle, des recensions des écrits scientifiques existantes ont également été consultées (Beasley et Ager, 2019; Byrne et al., 2004; Johnson et al., 1999; Rathgeber et al., 2018; Wiebe et Johnson, 2016). De cette revue manuelle, 71 articles additionnels ont été identifiés. Après l’élimination des doublons, la lecture des titres et des résumés a permis d’identifier un total de 22 articles. Suite à une lecture approfondie de ces articles, 14 études ont été retenues en fonction des critères d’inclusion. Les études qui ont été exclues n’étaient pas en lien avec le sujet du présent article, n’avaient pas de groupe contrôle auquel les participants étaient assignés de façon aléatoire ou n’avaient pas mesuré le niveau de satisfaction conjugale. Pour un diagramme illustrant le processus de sélection des études, voir la Figure 1.

La majorité des études recensées ont utilisé l’Échelle d’ajustement dyadique (ÉAD, Spanier, 1976) pour mesurer la satisfaction conjugale. Ce questionnaire permet d’obtenir une cote d’ajustement global pour chacun des membres de la dyade (Baillargeon, Dubois et Marineau, 1986). Il est composé de 32 items qui font référence à quatre composantes du fonctionnement du couple : degré d’accord entre les partenaires (consensus), fréquence de conflits et d’interactions négatives (satisfaction), fréquence d’activités communes (cohésion) et difficultés affectives et/ou sexuelles (expression affective) (Antoine et al., 2008). L’instrument présente de bonnes qualités psychométriques, tant sur le plan de la validité que de la fidélité. La majorité des auteurs ont utilisé la version longue de l’échelle, soit celle de 32 items, et ont considéré le score global obtenu par les participants. Les auteurs de deux études ont néanmoins fait un choix différent en utilisant une version abrégée de l’ÉAD. McLean et al. (2011) ont ainsi utilisé l’ÉAD révisée (14 items), alors que Wittenborn et al. (2018) ont utilisé seulement la sous-échelle de la satisfaction dyadique de l’ÉAD (10 items).

Même si l’ÉAD constituait la mesure de l’ajustement dyadique la plus fréquemment utilisée, un groupe de chercheurs (Denton et al., 2012) a utilisé un instrument de mesure de la satisfaction conjugale différent, soit l’Index de qualité du mariage (Norton, 1983). Il s’agit d’un questionnaire de six items qui a de bonnes qualités psychométriques, tant au niveau de la validité que de la fidélité (Norton, 1983; Schumm et al., 1986).

Figure 1

Diagramme de la sélection des études

Diagramme de la sélection des études

-> See the list of figures

Population générale

Notre recension fait d’abord état de l’efficacité de la TCÉ dans l’amélioration de l’ajustement conjugal chez les partenaires amoureux provenant de la population générale. Dès les années 1980, des chercheurs dans ce domaine ont obtenu des résultats positifs à cet effet en comparant la TCÉ à une condition de liste d’attente ou à un autre type de thérapie conjugale. Ils ont effectué une première étude randomisée (Johnson et Greenberg, 1985a) dans laquelle ils ont comparé le niveau d’ajustement conjugal de couples ayant pris part à huit rencontres de TCÉ à celui de couples ayant participé à huit rencontres de thérapie comportementale axée sur la résolution de problèmes, ainsi qu’à celui de couples ayant été assignés à une condition de liste d’attente. Les couples des deux groupes de traitement ont vu leur niveau d’ajustement conjugal s’améliorer de façon significative, contrairement aux couples assignés à la liste d’attente. Les couples de la condition expérimentale TCÉ sont néanmoins ceux qui ont rapporté le niveau d’ajustement le plus élevé suite au traitement et lors d’une relance deux mois plus tard, suggérant ainsi le maintien des effets positifs de la TCÉ (Johnson et Greenberg, 1985a). Les couples ayant d’abord été assignés à la liste d’attente ont ensuite participé à huit rencontres de TCÉ (Johnson et Greenberg, 1985b). À nouveau, les résultats ont démontré une amélioration significative de l’ajustement conjugal suite à l’intervention et un maintien des résultats positifs dans le temps, soit deux mois suivant la thérapie.

Par la suite, James (1991) a comparé l’efficacité de 12 rencontres de TCÉ classique à huit rencontres de TCÉ auxquelles ont été ajoutées quatre séances d’entraînement aux habiletés de communication, ainsi qu’à une condition de liste d’attente. Les deux formes d’interventions se sont avérées supérieures à la condition de liste d’attente et toutes deux ont été efficaces dans l’augmentation du niveau d’ajustement conjugal. Finalement, Denton et ses collègues (2000) ont comparé le niveau de satisfaction de couples ayant pris part à huit rencontres de TCÉ, à celui de couples placés en liste d’attente. Leurs résultats ont démontré la supériorité de la TCÉ par rapport à la condition contrôle dans l’augmentation de la satisfaction conjugale (Denton et al., 2000). Voir le Tableau 1 pour un résumé de ces études. Il est à noter que les données concernant la satisfaction conjugale ont été priorisées. Les résultats indiqués dans ce tableau sont donc ceux obtenus à l’ÉAD (Spanier, 1976) ou à l’Index de qualité du mariage (Norton, 1983).

Clientèles spécifiques

Les écrits scientifiques démontrent que la TCÉ peut être bénéfique auprès de clientèles spécifiques à risque de vivre de la détresse conjugale. Des chercheurs ont entrepris des études cliniques randomisées, afin de tester cette approche auprès de parents d’enfants ayant une maladie chronique, de couples dont l’un des partenaires a subi des abus dans l’enfance, de couples infertiles et de couples dont l’un des conjoints souffre d’un problème de santé physique ou mentale.

Une clientèle à risque de vivre de la détresse conjugale se retrouve donc chez les parents qui font face à la maladie chronique d’un enfant. Ces conjoints sont en effet plus à risque de vivre de la détresse conjugale ainsi que des conflits, à souffrir d’un manque d’intimité et à démontrer des problèmes de communication. Le système d’attachement au sein de la relation pourrait en outre être plus activé en raison de ce stress (Gordon Walker et al., 1996). Les résultats des recherches faites auprès de cette population sont prometteurs. En effet, les données obtenues dans une étude comparant la participation à 10 séances de TCÉ à une condition de liste d’attente ont démontré une amélioration statistiquement et cliniquement significative de l’ajustement des couples ayant pris part au traitement. Cette amélioration était présente suite aux rencontres de thérapie ainsi qu’à cinq mois après la fin de la thérapie (Gordon Walker et al., 1996). Des mesures post-thérapie prises deux ans après la fin de l’intervention ont par ailleurs démontré que l’ajustement conjugal s’est maintenu dans le temps et qu’il a même augmenté chez certains de ces couples (Cloutier et al., 2002).

Tableau 1

Présentation des études – population générale

Présentation des études – population générale

-> See the list of tables

Les couples dont l’un des partenaires a rapporté avoir subi des traumas dans l’enfance, tels que des abus physiques, sexuels ou émotionnels, sont aussi plus à risque de vivre de la détresse conjugale (Dalton et al., 2013). Les conséquences interpersonnelles de ce type d’abus sont variées : peur de l’intimité, problèmes sexuels, peur de l’abandon, difficulté à faire confiance, revictimisation, faible niveau de satisfaction conjugale, hypervigilance, plus de possibilités d’échec de la relation et de divorce (Classen et al., 2001; Watson et Halford, 2010). Les données obtenues suggèrent que la TCÉ peut être efficace dans la diminution de la détresse chez ces couples. Ainsi, dans une étude randomisée, des couples dont la femme a été victime d’abus physiques ou sexuels dans l’enfance ont été assignés de façon aléatoire à 24 rencontres de TCÉ ou à une condition de liste d’attente. Les couples de la condition TCÉ ont rapporté une amélioration cliniquement et statistiquement significative de leur ajustement conjugal suite aux rencontres de thérapie, contrairement aux couples en liste d’attente (Dalton et al., 2013).

La TCÉ semble également efficace pour les couples dont l’un des conjoints souffre d’un problème de santé physique. Dans le domaine de la psychologie de la santé, la théorie de l’attachement serait en mesure de prédire la vulnérabilité ou la résilience face à divers événements de vie stressants, puisque le système d’attachement est particulièrement activé dans les périodes de stress et de maladie (Schmidt et al., 2002). En effet, les émotions négatives ressenties et les difficultés d’adaptation face au diagnostic peuvent engendrer une distance émotionnelle entre les partenaires ainsi qu’une diminution de l’intimité, affectant ainsi la capacité des conjoints de donner et de recevoir du support au sein de la relation, et ce, même pour les couples dont l’attachement pourrait avoir été sécurisant au départ (Kowal et al., 2003). Les chercheurs se sont aussi intéressés à l’utilisation de la TCÉ auprès de couples dont un des partenaires a reçu un diagnostic de cancer. McLean et al. (2013) ont effectué une étude randomisée après de couples dont l’un des conjoints faisait face à un cancer métastatique. Ces couples ont été assignés de façon aléatoire à huit séances de TCÉ ou à des séances axées sur les soins psychosociaux de base usuels, c’est-à-dire des rencontres de psychoéducation individuelles ou en couple avec un professionnel de la santé. Les résultats démontrent que le niveau d’ajustement conjugal des partenaires ayant participé à la TCÉ a augmenté de façon significative suite au traitement et qu’il s’est maintenu trois mois après la fin de la thérapie, comparativement à celui des couples ayant reçu les soins de base habituels (McLean et al., 2013). De son côté, Naaman (2008) a conduit un essai clinique randomisé auprès de couples dont la femme est atteinte d’un cancer du sein. Ces couples étaient assignés de façon aléatoire à la TCÉ ou à des rencontres de psychoéducation. Les résultats suggèrent que plus de la moitié des couples ayant participé aux 20 séances de TCÉ se sont améliorés de façon cliniquement significative quant à l’ajustement conjugal et à la qualité de vie, alors qu’aucun des couples ayant reçu la psychoéducation n’a démontré d’amélioration suite aux rencontres.

L’impact délétère de l’infertilité sur l’ajustement des couples a aussi été bien documenté. En effet, les couples qui font face à ce problème peuvent vivre une détresse psychologique importante, ce qui peut influencer leur qualité de vie en général et leur bien-être conjugal en particulier (Chachamovich et al., 2010). Au niveau sexuel, des liens ont été postulés entre l’infertilité et la fréquence des relations sexuelles, la satisfaction sexuelle ainsi que la présence d’un trouble sexuel (Monga et al., 2004). Soleimani et ses collègues (2015) ont mesuré l’ajustement conjugal, la satisfaction sexuelle et le niveau de qualité de vie chez 30 couples aux prises avec un problème d’infertilité. Les participants ont été assignés de façon aléatoire entre le groupe contrôle et le groupe expérimental qui prenait part à dix séances de TCÉ. Les résultats suggèrent une amélioration significativement plus grande de l’ajustement conjugal et de la satisfaction sexuelle entre le début et la fin de l’intervention chez les couples ayant reçu la thérapie (Soleimani et al., 2015).

Finalement, un champ d’études relativement nouveau vise à intégrer la thérapie conjugale dans le traitement de troubles de santé mentale, et ce, par le biais de l’amélioration de la relation de couple. De nombreux chercheurs se sont penchés sur les conséquences interpersonnelles et conjugales engendrées par la dépression majeure. Ces recherches soulignent l’existence d’un lien entre les symptômes dépressifs et la détresse conjugale (Bélanger et al., 2017; Whisman et Bruce, 1999). Ce constat a mené des chercheurs à développer et à utiliser des traitements conjugaux auprès de couples dont l’un des partenaires a reçu un diagnostic de dépression majeure (Bélanger et al., 2008). Bien que la majorité des interventions ciblées dans ce contexte aient été d’orientation cognitive et comportementale, l’efficacité de la TCÉ a aussi été évaluée auprès de cette clientèle.

Deux essais cliniques randomisés ont été réalisés, afin de comparer l’efficacité de la TCÉ à la pharmacothérapie et ainsi de documenter l’application possible de cette intervention dans la diminution des symptômes dépressifs. Dans les deux cas, les chercheurs se sont penchés sur l’expérience de femmes ayant reçu un diagnostic de dépression majeure. Denton et al. (2012) ont comparé un groupe de femmes qui prenaient une médication psychotrope à un groupe de femmes qui recevaient cette même médication, mais qui participaient aussi à 15 rencontres de TCÉ avec leur conjoint. Les symptômes dépressifs ont diminué de façon significative dans les deux groupes de traitement. Cependant, les femmes du groupe TCÉ ont rapporté une amélioration significativement plus importante de leur satisfaction conjugale, amélioration qui a perduré dans le temps (Denton et al., 2012). De leur côté, Dessaulles et al. (2003) ont comparé un groupe de femmes prenant un antidépresseur à un groupe de femmes non médicamentées prenant part à des rencontres de TCÉ avec leur conjoint pendant 16 semaines. Leurs résultats indiquent que les femmes ayant participé à la thérapie ont vu leur niveau d’ajustement conjugal augmenter de façon significative suite au traitement, amélioration qui s’est maintenue à la relance de six mois. Leurs résultats démontrent également que les symptômes dépressifs se sont atténués dans les deux groupes, c’est-à-dire chez les femmes prenant une médication, mais aussi chez celles ayant pris part aux rencontres de thérapie conjugale seulement. Par ailleurs, les femmes du groupe TCÉ ont vu leur état dépressif s’améliorer entre la fin de la thérapie et la relance à six mois, alors que les femmes ayant pris une médication n’ont pas obtenu de gain supplémentaire après l’arrêt du traitement (Dessaulles et al., 2003).

Un groupe de chercheurs ont également comparé la TCÉ à d’autres types de thérapies conjugales dans le traitement de la dépression (Wittenborn et al., 2018). Des couples vivant de la détresse conjugale, dont au moins un des partenaires présentait des symptômes de dépression de légers à modérés, ont été assignés de façon aléatoire à deux groupes. Les participants du groupe expérimental ont pris part à 15 rencontres de TCÉ. Les participants du groupe contrôle ont reçu un suivi en couple auprès d’un professionnel d’une autre approche (p. ex., comportementale et psychodynamique). Parmi les participants, sept femmes et 12 hommes présentaient des symptômes dépressifs. Dans cinq des 16 couples, les deux partenaires étaient déprimés. Les résultats de cette étude suggèrent que la satisfaction conjugale a augmenté de façon significative chez les couples ayant reçu la TCÉ, lorsque comparés aux couples ayant participé à un autre type de thérapie. Au niveau des symptômes dépressifs, les couples des deux groupes ont vu leur état s’améliorer de façon significative au cours du traitement. Par ailleurs, il semble que les symptômes dépressifs ont diminué davantage chez les hommes du groupe TCÉ. Les résultats de cette étude appuient l’utilité de la TCÉ dans le traitement de la dépression et suggèrent qu’elle peut être efficace tant pour les hommes que pour les femmes (Wittenborn et al., 2018).

L’efficacité de la TCÉ a aussi été vérifiée auprès d’une population présentant un autre type de problème de santé mentale, soit un trouble somatoforme. Dans une étude par Walsh (2002), seize couples ont été assignés de façon aléatoire entre un groupe de traitement dans lequel les participants ont pris part à huit séances de TCÉ et une condition de liste d’attente. Les résultats obtenus ne confirment pas l’impact de la thérapie auprès de cette population. En effet, les analyses n’ont pas fait ressortir d’effet significatif entre les groupes quant à l’amélioration de l’ajustement conjugal. Par ailleurs, il semble que la présence de symptômes ait augmenté de façon significative chez les conjoints ayant un trouble somatoforme et ayant participé au groupe de traitement TCÉ, possiblement parce qu’ils ont été amenés à parler des émotions sous-jacentes aux symptômes, ce qui a eu comme effet de les accentuer (Walsh, 2002). Comme il s’agit d’une population vivant une problématique complexe impliquant souvent des comorbidités (Leibbrand et al., 1999b), d’autres études seront nécessaires afin de vérifier si la TCÉ est efficace auprès de couples dont l’un des partenaires présente un trouble somatoforme et, le cas échéant, pour adapter ce type d’intervention à cette population.

En résumé, les résultats d’une majorité d’études empiriques démontrent que la TCÉ permet l’augmentation du bien-être et l’ajustement conjugal chez les couples vivant des difficultés diverses, et il semble que son impact positif se maintienne dans le temps (Lewandowski et al., 2015; Snyder et al., 2006, Wiebe et Johnson, 2016). Les données obtenues dans ces recherches démontrent en effet qu’il s’agit d’une intervention efficace dans la diminution de la détresse conjugale pour les couples faisant face à certaines problématiques spécifiques : maladie chronique d’un enfant, présence de traumas dans l’enfance chez la femme, maladie physique telle un cancer chez l’un des conjoints, infertilité, dépression chez l’un des partenaires. Voir le Tableau 2 pour un résumé de ces études.

FORCES MÉTHODOLOGIQUES DES ÉTUDES RECENSÉES

Le niveau de satisfaction conjugale comme mesure d’efficacité de la TCÉ a été évalué dans les 14 études recensées. La mesure d’une même variable parmi les études recensées permet une meilleure comparaison des résultats. Cette mesure a été effectuée à l’aide de l’Échelle d’ajustement dyadique (Spanier, 1976) dans 13 études, alors que Denton et al. (2012) ont utilisé une autre mesure de la satisfaction conjugale, soit l’Index de qualité du mariage (Norton, 1983). Les qualités psychométriques de ces deux questionnaires autorapportés sont bien établies.

Les chercheurs des études citées ont également tous eu recours à un groupe contrôle auquel les participants ont été assignés de façon aléatoire, à l’exception de l’étude de Johnson et Greenberg (1985b) et de celle de Cloutier et al. (2002) qui ont étudié des couples ayant préalablement participé à la TCÉ lors d’un essai clinique randomisé.

La présence d’un groupe contrôle dans ces études a permis de solidifier leur validité interne et d’exclure l’effet de certaines variables confondantes, tel le passage du temps (Kazdin, 2003). Par ailleurs, dans la majorité des études présentées, l’intégrité thérapeutique a été vérifiée. En effet, certaines séances de TCÉ étaient enregistrées puis vérifiées, afin d’assurer la conformité de l’intervention au protocole de traitement manualisé tel qu’utilisé. Seuls les auteurs d’une étude (Soleimani et al., 2015) ne font pas mention d’une telle vérification de conformité dans leurs articles.

Tableau 2

Présentation des études – clientèles spécifiques

Présentation des études – clientèles spécifiques

Tableau 2 (continuation)

Présentation des études – clientèles spécifiques

Tableau 2 (continuation)

Présentation des études – clientèles spécifiques

-> See the list of tables

Lors de l’évaluation de l’efficacité d’une intervention, il est pertinent de vérifier s’il y a eu une amélioration cliniquement significative de la condition des participants. Pour ce faire, Jacobson et Truax (1991) suggèrent de comparer le score final des participants à un seuil normatif qui distingue la population fonctionnelle de la population dysfonctionnelle, puis de documenter leur passage d’un état de détresse à un état de mieux-être. Plusieurs des études recensées incluent ce type d’analyse (Cloutier et al., 2002. Dalton et al., 2013; Gordon Walker et al., 1996; James, 1991; McLean et al., 2013; Naaman, 2008). Ces chercheurs se sont intéressés à l’amélioration clinique des couples en utilisant la différence pré et post-traitement du score des participants sur l’Échelle d’ajustement dyadique (Spanier, 1976). Le score final des couples a ainsi été comparé au seuil normatif de cet instrument et leur passage d’un état de détresse à un état de satisfaction conjugale post intervention a été mesuré. À travers les études recensées, une proportion nettement plus importante de couples ayant reçu la TCÉ ont vu leur niveau de satisfaction augmenter, contrairement aux couples des conditions contrôle. Les résultats obtenus à partir de ces différentes recherches démontrent donc qu’en plus d’entraîner une réduction statistiquement significative de la détresse conjugale, la TCÉ entraîne également une diminution cliniquement significative de cette détresse chez les couples.

Finalement, la recension des écrits scientifiques fait ressortir l’intérêt des chercheurs pour des clientèles spécifiques, et l’efficacité de la TCÉ a été à cet égard mesurée tant chez les couples de la population générale qu’auprès de couples vivant des problématiques particulières.

LIMITES MÉTHODOLOGIQUES, STATISTIQUES ET CONCEPTUELLES

Les résultats des différentes études d’efficacité portant sur la TCÉ doivent être interprétés en tenant compte de leurs limites. D’abord, certains éléments spécifiques aux échantillons recrutés affectent la possibilité de généraliser les résultats à l’ensemble de la population. En effet, les essais cliniques cités ici ont tous de petits échantillons (N = 12 à 45). Ces échantillons sont plutôt homogènes, étant composés de couples hétérosexuels majoritairement caucasiens. Par ailleurs, dans trois de ces études (Dalton et al., 2013; Denton et al., 2012; Dessaulles et al., 2003), les chercheurs se sont penchés sur l’expérience des femmes seulement dans l’application de la TCÉ et son impact (femmes ayant un diagnostic de dépression majeure ou ayant rapporté des abus dans l’enfance). Une autre limite à la généralisation des résultats provient du fait que la majorité des couples inclus dans ces études présentent un niveau de détresse conjugale pré-intervention modérée. En effet, les couples dont au moins un des partenaires présentait un niveau de détresse entre 70 et 101 sur l’Échelle d’ajustement dyadique ont été sélectionnés. Par ailleurs, des couples dont le niveau d’ajustement était élevé, avec des scores pouvant aller jusqu’à 110, ont été inclus dans deux recherches (Cloutier et al., 2002; Gordon Walker et al., 1996). Ce critère d’inclusion ne nous permet donc pas de déterminer si le TCÉ est efficace auprès de couples qui vivent une détresse conjugale sévère.

Bien que la majorité de ces recherches aient inclus une mesure longitudinale afin de mesurer la pérennité des bénéfices suite aux interventions, le temps entre la fin du traitement et la prise de mesure à la relance est en général relativement court, soit entre deux et six mois. Seuls Cloutier et ses collègues (2002) ont obtenu des résultats positifs quant au maintien des effets de la TCÉ lors d’une mesure prise deux ans après la fin du traitement. L’état actuel de la recherche permet donc difficilement d’établir avec certitude l’impact à long terme de la TCÉ.

Finalement, peu d’études ont comparé l’impact de la TCÉ à celui d’autres types de thérapie conjugale. Les chercheurs qui l’ont fait (James, 1991; Johnson et Greenberg, 1985a; Wittenborn, et al., 2018) suggèrent qu’il s’agit d’une intervention efficace dans la diminution de la détresse conjugale. Toutefois, les résultats obtenus par les autres types d’intervention sont également positifs. Le manque d’études comparant la TCÉ et d’autres types de thérapies de couple ne permet pas, à ce jour, de dégager les spécificités de la TCÉ, ni de valider si elle a un impact supérieur aux autres approches de thérapie conjugale.

En résumé, d’autres études seront nécessaires, afin de valider les résultats obtenus quant à l’utilisation de la TCÉ face à des problématiques particulières. Il sera également nécessaire de diversifier les échantillons étudiés, afin de généraliser les résultats aux couples dont l’homme présente des difficultés spécifiques, aux couples présentant un niveau de détresse plus sévère, aux couples LGBTQ+ ainsi qu’aux couples d’origines ethniques diverses. Par ailleurs, d’autres recherches longitudinales, incluant plusieurs temps de mesure et des temps de relance dépassant un an, seront requises dans le but de mieux documenter l’impact à long terme de la TCÉ sur la diminution de la détresse conjugale. Finalement, des études comparatives devront être réalisées en vue de dégager l’impact de la TCÉ ainsi que ses spécificités face à d’autres types d’approches.

CONCLUSION

Il importe que les professionnels appelés à travailler auprès des couples puissent offrir des interventions qui se basent sur les données probantes. La présente recension des écrits montre que la thérapie de couple axée sur l’émotion (TCÉ) bénéficie de ce type d’appuis empiriques. Les écrits scientifiques suggèrent que la théorie de l’attachement peut offrir un cadre conceptuel efficace pour venir en aide aux couples en détresse. Les résultats des recherches ayant fait l’objet de cette recension tendent à démontrer la supériorité de la TCÉ face à une condition de liste d’attente dans la diminution de la détresse conjugale. Les résultats obtenus suggèrent également le maintien des acquis dans le temps et font ressortir l’impact positif de l’utilisation de la TCÉ auprès de couples vivant diverses problématiques. En prenant en compte les limitations des études conduites à ce jour, les recherches futures pourront certainement venir bonifier et complémenter les données existantes.

Par ailleurs, il est important de noter que les études sur l’efficacité de la TCÉ représentent une des voies possibles prises par les chercheurs pour évaluer et mieux comprendre son impact. Plusieurs études s’intéressent aussi au processus thérapeutique, c’est-à-dire qu’elles cherchent à identifier et à détailler les moments critiques de la TCÉ, les attitudes du thérapeute et les caractéristiques des clients qui sous-tendent le succès thérapeutique (voir Greenman et Johnson, 2012, ainsi que Wiebe et Johnson, 2016 pour plus de détails). À titre d’exemple, les résultats obtenus démontrent que le relâchement (softening) chez le conjoint en poursuite pendant le stade deux est lié à l’augmentation de la satisfaction conjugale au cours de la thérapie. Ce relâchement semble possible grâce à la capacité accrue des partenaires d’exprimer plus librement leurs émotions et leurs besoins d’attachement, ainsi que de répondre de manière empathique aux émotions et besoins de l’autre (Dalgleish et al., 2015). La présence des recherches d’efficacité, combinées aux études sur le processus, permet une amélioration constante de la pratique de la TCÉ et un meilleur lien entre la théorie et la clinique.