Comptes rendus

Daniela Di Cecco, Entre femmes et jeunes filles. Le roman pour adolescentes en France et au Québec, Montréal, Les Éditions du Remue-ménage, 2000, 206 p.[Record]

  • Suzanne Pouliot

…more information

  • Suzanne Pouliot
    Faculté d’éducation,
    Université de Sherbrooke.

Cet ouvrage analyse 66 romans pour adolescentes, publiés en France et au Québec, principalement depuis 1985. Bien que « l’invention » de l’adolescence, pour reprendre les propos de l’auteure, remonte au XIXe siècle, ce n’est pourtant qu’au début du siècle suivant que des collections spécifiquement destinées aux jeunes filles paraissent en grand nombre. Di Cecco va, tout au long de son livre, caractériser cette production éditoriale spécifique, d’abord en examinant plus attentivement l’adolescence dans la littérature. Cette première partie est double. La première sous-partie, Entre adultes : du roman de l’adolescence au roman pour adolescents aborde sous treize angles différents la place occupée par l’adolescence dans le roman. C’est ainsi que sont traités le roman de l’adolescence tant québécois que français, le portrait de quelques adolescentes en révolte dans l’oeuvre de Marie-Claire Blais, la série « Brigitte », les romans de Marie-Claire Daveluy, à l’aube de la Révolution tranquille et les romans pour adolescentes en France et au Québec avant 1968. La deuxième sous-partie aborde neuf volets de ce créneau éditorial en pleine expansion, influencée par la tendance étatsunienne d’après-guerre, visible aussi bien en France dès 1968, qu’au Québec dans la décennie suivante. Cette partie de l’étude de Di Cecco examine les stratégies éditoriales utilisées pour séduire la lectrice-consommatrice. C’est dans ce contexte que l’auteure étudie le rapport contenant-contenu et compare entre elles les productions française et québécoise. Comme le roman contemporain pour adolescentes constitue un phénomème à la fois littéraire et commercial, l’auteure s’attarde à plusieurs aspects des collections comme la présence de personnages sériels, le rôle des marchés, le paratexte. Ces caractéristiques les apparentent au secteur de l’édition de consommation et plus particulièrement au « roman à l’eau de rose », précurseur et modèle du roman pour adolescentes. La deuxième partie, Entre auteures et lectrices : le roman pour adolescentes, comprend également deux sous-parties. La première, Entre mères et filles : le roman pour adolescentes, regarde de plus près comment ce type de roman spécifique constitue un lieu de rencontre entre auteures et lectrices. C’est dans cet espace thématique que les différentes relations mère-fille sont observées, soit la mère copine, la mère célibataire, la mère femme de carrière, la mort de la mère. Quant à la dernière partie, elle aborde diverses questions reliées à la féminité, à la sexualité et au féminisme. L’auteure scrute, à l’aide d’exemples précis, diverses représentations de l’adolescence comme la jeune fille objet du fantasme masculin, les rapports sexuels, « la première fois », etc. Bien que l’étude de Di Cecco soit exhaustive, ce n’est pourtant pas la première fois que l’on traite du roman pour adolescentes. En effet, au Québec, la même année où paraissait l’étude précitée, Lucie Guillemette (2000) étudiait le discours de l’adolescente dans le récit de jeunesse contemporain à partir des romans de Marie-Francine Hébert et Françoise Lepage (2000a), analysait le roman pour adolescentes de 1945 à 1960. Guillemette l’a fait au sein de la trilogie de Marie-Francine Hébert et a analysé les « pratiques discursives d’une jeune protagoniste qui tente de se dégager des discours d’autorité marqués par la domination du masculin sur le féminin » (Guillemette, 2000, p. 280), alors que Lepage a étudié une période marquée par le conservatisme québécois dans ses thèmes et ses formes. Malgré cette tendance conservatrice intransigeante, apparaissent en filigrane ce que Lepage qualifie de « formations idéologiques en émergence » (Lepage, 2000a, p. 21) qui trahissent, selon l’auteure, l’ouverture croissante de la société québécoise à la pluralité idéologique. Précédemment, Lepage (2000b) s’était attardée au concept d’adolescence en étudiant son évolution et sa représentation …

Appendices