Comptes rendus

Yvan Perrier, De la libre contractualisation à la négociation factice, Québec, Éditions Nota bene, 2001, 148 p. (Interventions.)[Record]

  • Jean-François Tremblay

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  • Jean-François Tremblay
    Département de relations industrielles,
    Université du Québec en Outaouais.

D’aucuns s’entendent pour affirmer que la négociation collective est un phénomène complexe dont il s’avère difficile d’en circonscrire pleinement les tenants et les aboutissants. À cet égard, la négociation collective dans les secteurs public et parapublic ne fait pas exception, au contraire. À preuve, peu d’ouvrages académiques se sont spécifiquement intéressés à cette problématique et, qui plus est, ont fourni un cadre d’analyse cohérent permettant de comprendre les interactions complexes entre les acteurs durant le processus de négociation, de même que les différents moyens d’exceptions utilisés par le législateur afin de résoudre les nombreuses impasses qui ont caractérisé les négociations entre l’État et ses salariés depuis 40 ans. C’est pourtant à cet exercice ardu que s’est livré Yvan Perrier dans son ouvrage « De la libre contractualisation à la négociation factice » où l’auteur cherche à présenter, à la fois de façon descriptive et critique, l’évolution des rapports entre l’État québécois et les salariés des secteurs public et parapublic du milieu des années 1960 à aujourd’hui. L’ouvrage s’attarde à expliquer le contexte sociopolitique dans lequel la négociation dans les secteurs public et parapublic a émergé, à décrire de façon succincte le déroulement des différentes négociations qui se sont déroulées depuis 1964, à fournir un rappel des principaux enjeux au coeur des revendications des parties et les différents moyens utilisés par l’État pour sortir les nombreuses impasses rencontrées lors de ces négociations. C’est justement en regard de la « légitimité » des moyens d’interventions utilisés par l’État lors des négociations avec ses salariés que l’analyse critique de Perrier se veut le plus acerbe, en montrant notamment comment les nombreuses régulations exceptionnelles apportées par l’État au cours des différentes rondes de négociations remettent en question la plausibilité d’un réel exercice de négociation dans les secteurs public et parapublic. Lois spéciales, modifications des lois habilitantes, décrets unilatéraux des conditions de travail ont marqué, selon l’auteur, la négociation entre l’État et ses salariés. Cette possibilité pour l’État de déroger aux règles du jeu selon son bon vouloir a créé un déséquilibre structurel dans le rapport de force entre les parties. De plus, cette réalité a faussé la négociation collective, faisant en sorte que le résultat dans les secteurs public et parapublic ne soit pas une réelle co-détermination des conditions de travail dans le cadre d’un processus de libre contractualisation, mais un processus faussé à sa base même, qui s’éloigne des prémisses de la libre discussion entre les parties qui caractérisent la négociation collective en Amérique du Nord. Divisé en trois parties, l’ouvrage propose, d’abord, une analyse de la problématique de la régulation étatique dans les rapports collectifs de travail dans les secteurs public et parapublic au Québec de 1964 à 1986. Perrier présente, ensuite, une analyse théorico-descriptive des rôles et fonctions de l’État « bicéphale », à la fois employeur et législateur. L’auteur conclu par une réflexion à caractère stratégique sur différents leviers de mobilisation syndicale permettant de mieux préparer les salariés de l’État aux prochaines négociations de « l’ère des surplus milliardaires » (p. 22). L’auteur identifie dans la première partie deux grandes périodes caractérisant la négociation dans les secteurs public et parapublic. Une première, celle de la libre contractualisation, couvre la période 1964-1965 à 1985 alors que la deuxième, celle de la négociation factice, s’étend de 1985 à aujourd’hui. Afin de déterminer ces deux périodes, l’auteur s’inspire d’un cadre conceptuel emprunté à la théorie de la régulation de système de Jean Daniel Reynaud et à la théorie des cycles disciplinaires de Jean-Paul de Gaudemard. Pour Perrier, la Loi 37, promulguée en 1985, a limité le champ du négociable en précisant les dispositions …