Comptes rendus

Paul-André Lapointe et Guy Bellemare (dirs), Innovations sociales dans le travail et l’emploi. Recherches empiriques et perspectives théoriques, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2006, 330 p. (Collection Sociologie contemporaine).[Record]

  • Carol Saucier

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  • Carol Saucier
    Département des sciences humaines,
    Université du Québec à Rimouski.

Cet ouvrage porte sur les innovations sociales dans le travail et l’emploi, notamment les nouvelles pratiques et règles liées à la coordination des acteurs et à la résolution de problèmes socioéconomiques. Analyses quantitatives, études de cas et réflexions théoriques font cheminer le lecteur vers une théorie de l’innovation sociale, définie comme étant « la coordination des relations entre les acteurs sociaux et la résolution de problèmes socio-économiques en vue d’une amélioration des performances » (p. 2). La première partie de l’ouvrage traite de nouveaux modèles de travail. Lapointe, Cucumel, Bélanger et Lévesque s’intéressent aux innovations sociales dans le secteur manufacturier introduites pour surmonter la crise des années 1970 au Québec et leur recherche s’insère dans le débat entourant la démocratie salariale versus le modèle tayloriste-fordiste. Les auteurs sont d’avis que les nouveaux modèles de travail sont appelés à remplacer le fordisme et que « la participation apparaît vraiment comme l’élément de démarcation par rapport au taylorisme » (p. 12). Ainsi, pour dépasser le fordisme, il faut que la participation et le partenariat fassent partie intégrante des dimensions organisationnelle et institutionnelle de l’entreprise. Les auteurs construisent quatre modèles conceptuels selon l’absence ou la présence de participation et de partenariat : d’abord le fordisme et la démocratie salariale, qui sont à l’opposé, et ensuite, deux modèles intermédiaires, le partenariat sans participation et la participation sans partenariat. Les auteurs ont effectué un sondage auprès de représentants patronaux et syndicaux d’entreprises manufacturières de plus de 50 employés au Québec. Le modèle traditionnel se retrouve dans environ la moitié des usines sondées, le partenariat sans participation dans 15 à 30 %, la participation sans partenariat pour 10 % et la démocratie salariale, pour 15 à 20 %. On apprend aussi que les pratiques de gestion des ressources humaines sont présentes à des pourcentages variables, mais toujours plus élevées dans le modèle de démocratie salariale. Les auteurs concluent qu’ils considèrent cette recherche importante parce que le modèle de démocratie salariale affiche des résultats supérieurs dans presque toutes les dimensions étudiées. Cependant, il est faiblement diffusé, entre autres parce que les actionnaires veulent des résultats à court terme alors que la mise en place de ce modèle demande des investissements, de la formation, de l’autonomie locale devant la centralisation croissante. Ross, Legault et Cloutier présentent des données empiriques sur la prévalence réelle de la négociation basée sur les intérêts (NBI) ou négociation raisonnée dans le monde québécois des relations de travail ; ils analysent également l’influence du porte-parole dans la façon dont sont menées les négociations et ils résument les similitudes entre le système québécois et la situation américaine. Les porte-parole syndicaux sont davantage portés à utiliser la NBI que leurs vis-à-vis patronaux et au sein des deux groupes, le fait de détenir un diplôme universitaire est un incitatif favorable envers la négociation raisonnée. L’utilisation de la méthode n’égale pas confiance totale en celle-ci. De plus, les représentants patronaux et syndicaux ont une expérience divergente de la NBI : malgré que la partie syndicale sondée ici ait plus d’expérience d’utilisation de la négociation raisonnée, ce sont les patrons qui la préconisent davantage. Ces attitudes et comportements significativement différents face à la NBI ne sont pas sans causer des tensions qui compliquent la négociation. Paquet et Gaétan s’intéressent plus globalement à l’innovation dans le monde du travail. Celle-ci va au-delà d’une simple modification à une règle de travail ou à une clause de convention collective et elle fait appel à de nouvelles façons de faire des acteurs en place. Ils s’interrogent sur le rapport entre l’utilisation de la NBI et la conclusion d’ententes plus favorables aux deux parties …