Cet ouvrage rassemble les analyses de plusieurs mouvements sociaux québécois partageant une même sensibilité politique en plus d’un même environnement culturel et national. Pourquoi rassembler dans un même ouvrage ces analyses des mouvements sociaux de gauche et d’extrême gauche québécois ? Cette question trouve sa réponse dans l’élément fédérateur et la source de renouveau qu’a représentés pour ces mouvements le Sommet des Amériques de 2001. Ce sommet aura donné aux auteurs de Québec en mouvements de bonnes raisons d’aborder les mouvements sociaux sous l’angle de ce qui les rassemble tout en n’occultant en rien les particularités de chacun d’entre eux. En tant que mise en liaison analytique, dense et détaillée des dynamiques propres aux différents mouvements sociaux québécois de gauche et d'extrême gauche, Québec en mouvements aide à apprécier l’importance de la globalisation et des principes organisationnels démocratiques et paritaires – par opposition à bureaucratiques, élitistes et patriarcaux – dans l’action collective militante. Il illustre aussi comment les mouvements sociaux n’échappent pas aux éventuels « cycles de contestation » pour reprendre une expression de Charles Tilly. En effet, ces mouvements, après avoir subi, les uns plus que les autres, une morosité contextuelle les conduisant à ne compter que très peu dans l’arène politique, se sont saisi des opportunités du Sommet des Amériques pour s’imposer à travers leurs discours ou comme des interlocuteurs incontournables. En mettant en évidence cette transition, Québec en mouvements délégitime toute raison de n’étudier exclusivement qu’une sphère particulière des mouvements sociaux (féminisme, syndicalisme, mouvement étudiant ou anarchisme). Cette perspective est d’autant plus intéressante que l’ouvrage précise en quoi les idées qui sous-tendent le mouvement altermondialiste, à l’instar de ses acteurs, sont majoritairement diffuses à travers les dynamiques propres aux autres mouvements sociaux. Composé de douze chapitres traitant chacun d'un mouvement social, de son organisation, de ses stratégies d’action, de son discours politique et (ou) de ses militants, Québec en mouvements propose une analyse spécifiant les évolutions, les alliances, les adversaires et les défis des organisations citoyennes de gauche ou d’extrême gauche. À part les chapitres 2 et 7 qui portent respectivement sur le discours de la jeune gauche intellectuelle (J.-P. Warren) et sur les défis de la gauche électorale au Québec, particulièrement ceux du parti Québec solidaire (C. Beaupré-Laforest), chacun des autres chapitres de l'ouvrage est un état des lieux, parfois délibérément partisan, mais toujours approfondi, des enjeux et des évolutions d'un mouvement social québécois particulier. Les différents mouvements sociaux analysés, qualifiés dans l’ouvrage de « progressistes », sont le mouvement altermondialiste (D. Lamoureux), le mouvement féministe (P. Dufour, M. Blais), le mouvement étudiant contemporain (B. Lacoursière), le mouvement syndical (J.-M. Piotte), le mouvement paysan (M. Silvestro), le mouvement anarchiste (L.-F. Gaudet et R. Sarrasin), le mouvement contre la guerre (F. Dupuis-Déri), le mouvement de solidarité internationale (C. Rioux) et le mouvement autochtone (J. Rousseau). D. Lamoureux analyse les conséquences de cette occasion de s’approprier les enjeux de la globalisation, fournie par le Sommet des Amériques de 2001 et saisie par les mouvements féministe, étudiant, communautaire et syndical québécois. La mobilisation et le travail commun d’éducation populaire, mis en route à l’occasion de ce sommet, furent la source d’un tournant dans l’histoire des mouvements sociaux québécois de gauche. Grâce au sommet, ces derniers sont entrés en effet dans une nouvelle phase de leur histoire, celle du renouvellement de leur cadre de référence, de l’accueil de nouvelles sensibilités militantes et de la coordination de leurs actions à partir d’une organisation en réseau. Cependant, le changement majeur est, pour D. Lamoureux, la transformation du cadre de référence qui a permis une redéfinition des « luttes locales » en tenant …
Francis Dupuis-Déri (dir.), Québec en mouvements. Idées et pratiques militantes contemporaines, Montréal, Lux Éditeur, 2008, 276 p. (Futur proche.)[Record]
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Moustapha Faye
Université de Montréal.
moustapha.faye@umontreal.ca