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Deux chapitres sur le Québec justifient la mention de ce livre dans Recherches sociographiques : Jacques Légaré et Pierre-Olivier Ménard, « L’augmentation des taux d’activité chez les travailleurs âgés du Québec : une solution pour faire face à une éventuelle baisse de main-d’oeuvre ? » et Hervé Gauthier, « Les changements de la structure par âge des professions comme révélateurs de leur histoire et de leurs caractéristiques ». Un coup d’oeil sur l’ensemble les mettra en contexte.

L’ouvrage « traite de l’évolution quantitative et qualitative de divers groupes qui composent la population active » compte tenu des « facteurs qui déterminent les flux d’entrées et de sorties » : « tendances démographiques », « comportements socio-économiques des individus », « pratiques institutionnelles » et « réglementations qui régulent les passages entre activité et inactivité » (p. 15). Il comprend deux parties. La première porte sur les « prévisions de niveaux d’activités à l’horizon 2050 ». Elle comprend six chapitres consacrés à autant de pays (quatre européens, le Québec et le Canada). La seconde, consacrée aux « structures démographiques » et aux « adaptations socio-économiques », compte six chapitres, quatre sur chacun un pays (trois européens et le Québec) et deux autres, comparatifs et synthétiques sur l’Europe seulement.

Jacques Légaré et Pierre-Olivier Ménard montrent d’abord que le vieillissement de la population québécoise et un taux d’activité décroissant chez les travailleurs âgés entraîneront une diminution de la population active dans les décennies à venir (horizon 2050), puis ils se demandent quels facteurs pourraient contribuer à maintenir celle-ci au niveau de 2004. Première étape, ils évaluent l’effet qu’aurait une hausse d’activité des personnes âgées sur l’évolution de la population active. Conclusion : ils estiment possible qu’une « hausse des taux d’activité chez les travailleurs âgés aurait un impact appréciable sur la taille de la population active » (p. 49). Deuxième étape, les auteurs se demandent, à l’inverse, l’effet que pourraient avoir sur la population active certains facteurs affectant les taux d’activité des travailleurs âgés. Ils considèrent trois possibilités, d’où trois scénarios en réponse à trois questions : « quels devraient être les taux d’activité chez les travailleurs âgés pour maintenir la population active québécoise au niveau de 2004 ? » (p. 49) ; « quel serait l’impact d’appliquer les taux d’activité des travailleurs âgés de certains pays [plus performants] de l’OCDE aux travailleurs du Québec ? » (p. 50) : « quel serait l’impact d’une augmentation des taux d’activité des femmes vers ceux des hommes ? » (p. 54)

Tous les résultats sont négatifs. Aucun des scénarios ne permet, peu s’en faut, de maintenir la population active au niveau de 2004. Seul le troisième pourrait avoir « un impact considérable en comparaison avec les autres ». En conséquence, Légaré et Ménard proposent que « le Québec ait recours à des interventions démographiques telles qu’un meilleur contrôle de la migration nette ou la mise en place d’importants programmes visant une hausse de la fécondité afin de mieux équilibrer le financement de ses programmes de sécurité sociale » (p. 56).

Notant l’importance des changements des structures par âge de la population et de la population active au Québec, Hervé Gauthier s’interroge sur les changements de la structure par âge des professions et sur les facteurs qui les provoquent ou les affectent et scrute à cette fin des données des recensements du Canada. Précision importante : pour ceux-ci, la profession d’une personne réfère au travail qu’elle fait et non pas à la formation qu’elle a reçue. L’analyse se développe sur cinq thèmes : 1. « Population et population active : deux évolutions convergentes selon l’âge » ; 2. « Âge médian des grandes catégories professionnelles » ; 3. Variation de l’âge médian dans les professions de base » ; 4. «Effet démographique et des taux d’activité : quelques cas types » ; 5. « Analyse par génération ». Il en résulte deux ordres d’observations. Voici les principales.

D’une part, suivant la tendance observée dans la population en général, l’âge médian de plusieurs professions augmente, mais l’effet du vieillissement varie considérablement d’une à l’autre dans leur ensemble et entre les mêmes groupes d’âge de l’une et de l’autre en conséquence des variations du taux d’activité dans chaque cas. D’autre part, le taux d’activité qui s’avère être le second facteur de changement de la structure par âge des professions subit lui-même l’influence d’autres facteurs dont les changements technologiques, les transformations dans l’organisation du travail, les besoins personnels dus au développement d’un service. Par ailleurs, Gauthier observe que l’effet des variables externes sur la structure par âge d’une profession agit en fonction des caractéristiques et de l’histoire de celle-ci. Finalement, tout cela produit une multiplicité d’évolutions et de situations qui exigeront des actions très diversifiées.

Ces deux articles permettent de mieux comprendre certains aspects caractéristiques du vieillissement de la main-d’oeuvre au Québec et convergent vers la même nécessité d’interventions multiples et complémentaires. À l’évidence d’autres recherches s’imposent.