Comptes rendus

John Demos, Une captive heureuse chez les Iroquois. Histoire d’une famille de Nouvelle-Angleterre au début du XVIIIe siècle, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2009, 355 p. (traduit de l’américain par Berthe Fouchier-Axelsen).[Record]

  • Louis Jacques Filion

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John Demos est professeur d’histoire à Yale. Il a publié de nombreux livres, en particulier sur la vie des premiers colons de Nouvelle-Angleterre. Cette fois, il a cherché un sujet pour produire une « histoire narrative ». Ayant beaucoup étudié et écrit sur les premiers « colons » anglais, il voulait traiter des « peuples qui étaient déjà là » (préface, p. xi). Il a réussi à le faire à partir de l’histoire d’une captive qui a choisi de rester chez les Iroquois. Il s’agit d’une histoire bien documentée puisque le père de cette captive, le révérend John Williams, ne cessera de travailler à la libération de sa fille tant par ses voyages en Nouvelle-France que par ses nombreuses lettres envoyées au gouverneur de Boston ainsi qu’à d’autres leaders politiques et spirituels de Nouvelle-Angleterre jusqu’à sa mort en 1729. Dès le début, Demos explique son choix d’utiliser le terme « indien » plutôt que celui d’« autochtone », bien qu’aucun de ces deux termes ne le satisfasse vraiment. Les lignes qui suivent présentent un bref résumé de l’histoire racontée. Le gouverneur Philippe de Rigaud, marquis de Vaudreuil, a besoin de prisonniers anglais qu’il pourra échanger pour faire libérer un certain nombre de prisonniers français détenus à Boston. Il veut, entre autres, récupérer un corsaire de grande renommée mais considéré par les Anglais comme un pirate abominable, le « Capitaine Baptiste », et, pour ce faire, il a besoin d’un prisonnier de rang égal. À cette époque, le nord de la colonie du Massachusetts se situe à la frontière du développement et est vulnérable. Un petit village aux fortifications déficientes, Deerfield, y est visé. Un pasteur jouissant d’une certaine renommée, John Williams, y vit avec sa famille. Il se présente comme un captif potentiel présentant une bonne valeur d’échange. Vaudreuil prépare l’expédition au cours de l’automne 1703. Une cinquantaine de Français, soldats et officiers, ainsi que 200 Indiens en feront partie : Abénaquis de Saint-François, Hurons de Lorette et Mohawks de Kahnawake. Il convient de rappeler que la « Grande paix » de 1701 a réconcilié Iroquois et Français. Vaudreuil confie la direction de cette expédition à un jeune lieutenant dont la famille est renommée pour ses prouesses militaires : Jean-Baptiste Hertel de Rouville. L’attaque aura lieu dans la nuit du 29 février 1704. Les combats se dérouleront entre quatre et neuf heures du matin. Des renforts viendront des villages voisins. Le bilan montre 48 tués, 112 prisonniers et 140 survivants. Plusieurs femmes et enfants périront dans les flammes de leur maison, d’autres sauvagement tués. Dix-sept maisons et leurs granges furent brûlées à l’intérieur et à l’extérieur du fort, 9 maisons resteront à l’intérieur du fort et 15 à l’extérieur. Du côté des assaillants, les témoignages des pertes sont contradictoires mais celles-ci peuvent être évaluées entre 40 et 50 tués dont trois Français et une dizaine de blessés. Parmi les captifs, se trouvent John Williams et son épouse, laquelle décédera au cours de la longue marche de retour vers Montréal qui durera jusqu’en avril, de même que cinq de leurs enfants dont leur fille Eunice (1696-1785). Celle-ci sera amenée captive chez les Mohawks de Kahnawake où elle passera le reste de son existence. Une fois libéré, son père réussira à faire rapatrier ses autres enfants, mais Eunice refusera de retourner vivre en Nouvelle-Angleterre. Elle refusera de voir son père et de le suivre lorsqu’il fera des voyages pour aller la chercher à Kahnawake. En fait, une bonne partie du livre, à compter du deuxième chapitre (p. 47) porte sur les efforts de son père pour la ramener à Deerfield. Cela …