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Cet ouvrage collectif présente douze chapitres divisés en six parties abordant autant de dimensions de l’accès des jeunes au travail. Christian Papinot et Mircea Vultur ont regroupé de manière pertinente les textes de façon à nous donner à lire les pendants québécois et français d’un même phénomène, d’où le sous-titre de l’ouvrage évoquant des regards croisés. Cette organisation de l’ouvrage vise « une compréhension par rapprochements successifs d’analogies développées à partir de données situées dans les contextes nationaux où elles font sens » (p. 3).

L’ouvrage aborde ainsi l’insertion professionnelle, le déclassement, la formation professionnelle, les dispositifs d’insertion, les trajectoires professionnelles et les nouvelles formes d’emploi des jeunes. Cette diversité de thèmes laisse présager une tout aussi grande diversité d’approches théoriques permettant d’appréhender ces phénomènes sociaux. C’est là une des qualités de cette publication, car les chapitres permettent d’obtenir un panorama assez complet de l’éventail de postures théoriques dans ce champ. Alors que certains chapitres laissent place à une assez grande marge de manoeuvre de l’individu dans son processus d’accès à l’emploi (Vultur et Trottier), d’autres montrent l’influence des structures sociales sur les trajectoires d’insertion (Eckert et Mora).

Il faut souligner que l’ouvrage consacre une partie (deux chapitres) à la formation professionnelle, en France (Moreau) et au Québec (Doray). Cette importante filière de formation est bien souvent le parent pauvre des publications sur l’insertion professionnelle, ce qui n’est manifestement pas le cas ici. Ces deux chapitres sont très instructifs et permettent de camper les deux contextes nationaux de façon exemplaire.

Probablement de manière inévitable, le niveau des textes est assez varié. En fait, peu d’entre eux présentent une analyse théorique du phénomène étudié. Certains, à la lumière de données empiriques, remettent en question des définitions ou des concepts (Merle ou Lima) ou encore élaborent une mise à plat fort convaincante d’un phénomène multidimensionnel (Eckert et Mora, en particulier), alors que d’autres contributions demeurent franchement descriptives (Legris, Baril et Ouellet ou Tremblay).

En ce qui concerne les regards croisés entre la France et le Québec, cet ouvrage ne remplit pas tout à fait les attentes. Bien qu’honoré du respect que les directeurs de l’ouvrage portent à notre intelligence, il aurait été apprécié qu’une conclusion soit ajoutée afin d’aider le lecteur à évaluer la portée des apports scientifiques de ces comparaisons en les mettant en perspective, peut-être contrastées, en fin d’ouvrage.

Il faut aussi en venir à une délicate question : la pertinence de ce type d’ouvrage. Il permet certes d’aborder en un seul endroit différentes facettes d’un phénomène. Par contre, le délai d’édition joue parfois en défaveur des auteurs, ne permettant pas de référer à des articles de périodiques récemment parus. Prenons pour exemple un article de Eckert sur le travail durant les études paru en 2009 et qui n’est pas cité bien que ce thème soit assez souvent abordé dans l’ouvrage paru en 2010. Dans la même veine, il faut critiquer le « recyclage » d’articles déjà parus. Bien que Vultur mentionne l’autorisation de l’éditeur de la revue, son chapitre est une reproduction d’un article, certes excellent et primé, néanmoins paru en 2006.

En somme, cet ouvrage constitue une belle initiation aux travaux menés dans ce champ de recherche, mais ne saurait en constituer une synthèse substantielle, encore moins incontournable.