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Le Chantier des histoires régionales du Québec, qui tire maintenant à sa fin, a permis de produire plus d’une vingtaine de volumineuses synthèses qui couvrent l’ensemble du territoire de la province. Même si, tant sur le plan scientifique que matériel, ces synthèses partagent certains traits communs, elles reflètent les particularités de l’équipe réunie pour les produire et, surtout, des régions couvertes. Si certains volumes ont pour objet des secteurs à la riche historiographie, comme Montréal, ou alors aux contours bien définis et s’inscrivant dans la longue durée, comme la Gaspésie, d’autres ont la tâche plus ardue d’explorer des territoires peu abordés auparavant et dont l’unité ne va pas de soi. L’Histoire du Centre-du-Québec s’inscrit dans cette dernière catégorie.

Vingt-troisième ouvrage de la collection, il a été dirigé par trois professeurs de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) appartenant au Centre interuniversitaire d’études québécoises (CIEQ), appuyés par un grand nombre de collaborateurs et d’assistants de recherche. Comme pour les autres volumes de la collection, cette équipe a été confrontée au défi particulièrement épineux que représente la production d’une synthèse aussi massive (un millier de pages) qui réponde à la fois à des attentes d’érudition et de diffusion vers un large public. Ils ont également été appelés à « donner du sens à la région » (p. 9), une entité dont la naissance administrative (1997) précède de deux ans celle du projet de recherche qui a mené à la production de cette synthèse! Les auteurs sont bien conscients des questions que soulève ce contexte et elles hantent en quelque sorte les différents chapitres de l’ouvrage, où les auteurs s’attachent à montrer l’existence d’un certain nombre de sous-régions dont la cohérence historique et mémorielle est plus grande.

Difficile de résumer en quelques centaines de mots le contenu d’un ouvrage aussi riche. Contentons-nous de souligner que les auteurs parviennent à rassembler assez habilement les morceaux d’une historiographie fragmentée pour tracer un portrait d’ensemble qui met l’histoire socioéconomique classique à l’honneur ou, pour les citer, qui « privilégie l’examen des tendances historiques de fond » (p. 18). Cela dit, l’ouvrage contient d’excellents chapitres sur l’histoire religieuse et politique de la région, ainsi qu’un riche chapitre d’histoire culturelle qui précède une dernière partie qui, comme il se doit, s’ouvre sur une Révolution tranquille qui accouche d’un « Centre-du-Québec contemporain ». Tout au long de l’ouvrage, les auteurs parviennent à dégager les caractéristiques propres à cette région qui, géographiquement centrale, est en quelque sorte à la périphérie d’un nombre important de pôles urbains situés à l’extérieur de son territoire. En effet, comment Drummondville et Victoriaville, ses principales agglomérations, pourraient-elles rivaliser avec Trois-Rivières, Sherbrooke, Québec ou Montréal?

Comme la grande majorité des ouvrages de la collection, cette Histoire du Centre-du-Québec est une autre contribution importante au développement d’une historiographie québécoise plus équilibrée, moins centrée sur la métropole montréalaise. Espérons que de nombreux chercheurs vont s’appuyer sur les solides bases posées ici pour explorer ce que l’histoire du Centre-du-Québec a d’intéressant à faire connaître aux historiens d’ici et d’ailleurs.