Introduction

La quatrième génération de sociologues québécois : une sociologie spécialisée?

  • Jean-François Laniel and
  • François-Olivier Dorais

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Cover of D’une génération à l’autre., Special Issue, 2024, pp. 9-242, Recherches sociographiques

Il y a cinquante ans cette année paraissait le numéro spécial « La sociologie au Québec » sous la direction de Jean-Charles Falardeau. Deux questions présidaient à cette entreprise : « comment on fait des sociologues; ce qu’ont fait les sociologues » (Falardeau, 1974a, p. 133). Les sociologues du Québec de langue française furent invités à parler de sociologie : « celle qui les a inspirés; celle qu’ils ont faite; celle qu’ils ont voulu communiquer » (Ibid.). Pour l’occasion, environ 400 sociologues de formation ou de profession furent approchés; 34 d’entre eux relevèrent le défi de raconter leur itinéraire de sociologue et contribuer à documenter pour la postérité certains des enjeux, projets et profils d’une génération. Si toutes les générations sont uniques, cette génération « pré baby-boomer » le fut peut-être plus que d’autres. Elle a eu la tâche autant que le privilège d’être la première à enseigner la sociologie dans des départements qui lui étaient consacrés, dès 1943 à l’Université Laval et à partir de 1955 à l’Université de Montréal. Cette génération fondatrice, fer de lance laïque de la Révolution tranquille et alliée fonctionnelle de son État-providence, est intimement associée à l’« âge d’or » (Rocher, 1998, p. 30) de la sociologie québécoise et au fil d’arrivée de « la longue marche des technocrates » (Simard, 1977). Une génération de sociologues « révolutionnaires tranquilles » (Gagné, 2011), intra- et extra-muros, qui a construit une « société globale » québécoise en découvrant sur le mode critique sa « société globale » canadienne-française (Dumont, 1963; Fournier et Houle, 1980; Bourque, Duchastel et Kuzminski, 1997). Cette génération fondatrice partageait de nombreux traits avec celles qui la précédaient, nommément la « sociologie leplaysienne » de Léon Gérin puis la « sociologie doctrinale » des Esdras Minville et Édouard Montpetit (Warren, 2003). Au premier chef, elle partageait avec elles ce que Gilles Gagné et Jean-Philippe Warren ont qualifié de « visée de totalité », soit « le projet de connaître comme totalité une société particulière » (Gagné et Warren, 2003, p. 11). Le projet de ne pas réfléchir « d’abord sur l’intégration à une société d’individus relevant de milieux particuliers (intégration sociale) mais sur les principes généraux d’intégration des pratiques les unes aux autres (intégration sociétale) » (Ibid.). Organiquement liée à la famille paysanne chez Léon Gérin et à l’ordre social catholique chez les sociologues « doctrinaux », cette totalité sociale aux accents traditionnels n’en était pas moins travaillée par la modernité et ses processus. Une commune « intention modernisatrice » animait ainsi ces trois générations, les deux premières avec un objectif plus prononcé d’adaptation de la société canadienne-française aux réalités modernes, la troisième avec un objectif d’actualisation plus affirmé, toutes trois néanmoins marquées « d’un discours de modernisation où une totalité sociale problématique est posée au centre d’un effort de connaissance sous le choc de transformations sociales qui étaient étrangères à ses propres structures d’action collective » (Gagné et Warren, 2003, p. 14). Cette différence entre adaptation comme conservation face à la modernité et actualisation comme régénération pour la modernité s’explique sans doute en partie par une « inspiration catholique » partagée mais différenciée, associant la chrétienté à un ordre social traditionnel chez les uns et à une société résolument moderne quoique vitalement catholique chez les autres (Meunier et Warren, 2002; Gauvreau, 2008). C’est ce cinquantième anniversaire du numéro spécial « La sociologie au Québec » que fête le présent numéro, en se tournant cette fois vers la génération des baby-boomers, célèbres héritiers de la Révolution tranquille …

Appendices