Itinéraires

Une sociologie marquée à l’aune de la démographie

  • Céline Le Bourdais

…more information

Access to this article is restricted to subscribers. Only the first 600 words of this article will be displayed.

Access options:

  • Institutional access. If you are a member of one of Érudit's 1,200 library subscribers or partners (university and college libraries, public libraries, research centers, etc.), you can log in through your library's digital resource portal. If your institution is not a subscriber, you can let them know that you are interested in Érudit and this journal by clicking on the "Access options" button.

  • Individual access. Some journals offer individual digital subscriptions. Log in if you already have a subscription or click on the “Access options” button for details about individual subscriptions.

As part of Érudit's commitment to open access, only the most recent issues of this journal are restricted. All of its archives can be freely consulted on the platform.

Access options
Cover of D’une génération à l’autre., Special Issue, 2024, pp. 9-242, Recherches sociographiques

Je suis venue bien tardivement à la sociologie. En fait, rien ne m’y prédestinait. Mon parcours scolaire a été influencé par la commission Parent, mise sur pied par le gouvernement Lesage en 1961. En 1957, je suis entrée en première année à l’école Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours à Montréal, une école réservée aux filles et gérée par les soeurs de la Congrégation Notre-Dame. C’était bien avant que le rapport Parent ne recommande la création d’un ministère de l’Éducation, qui vit le jour en 1964 et donna à l’État la responsabilité de l’éducation jusque-là placée sous l’égide du clergé. On était en plein baby-boom et les écoles manquaient cruellement d’espace. J’allais donc à l’école seulement le matin ou l’après-midi. Comme j’avais de bonnes notes lorsque je terminai la septième année que comptait alors le primaire, je fus inscrite au cours classique au couvent des Soeurs de Sainte-Anne à Saint-Jérôme. Les collèges classiques étaient « des établissements privés (…) contrôlés par le clergé » et « constituaient alors la seule porte d’entrée à l’université » (Bienvenue, citée par Gauvreau, 2019). Le rapport Parent en recommanda l’abolition, et préconisa plutôt l’ajout d’une cinquième année au secondaire et la mise sur pied des cégeps, comme nouvelle voie assurant la gratuité des études et pouvant mener à l’université. Mes études classiques furent ainsi interrompues après la onzième année, communément appelée « versification ». J’aimais beaucoup les mathématiques, une matière dans laquelle j’excellais. On m’orienta donc vers les sciences pures pour ma 12e année (ou 5e secondaire). Ce fut une année extrêmement difficile, que je terminai de peine et de misère. Je n’avais reçu à peu près aucun enseignement en science, hormis quelque vague introduction en chimie, et je me retrouvais soudain entourée d’élèves issus du « scientifique » et férus de chimie, de physique et de biologie. Je poursuivis en sciences pures au cégep, question de « ne pas me fermer de portes », comme on a encore tendance à le conseiller aux jeunes aujourd’hui (Carrier, 2023). Au tournant des années 1970, les avenues professionnelles ouvertes aux femmes étaient passablement restreintes. À mes yeux, mes choix se réduisaient aux carrières suivantes : secrétaire, infirmière, hôtesse de l’air ou institutrice. J’optai pour la dernière avenue. Les postes d’enseignement ouverts en mathématiques étant rares, j’entrepris un programme en éducation physique. C’est là que je suivis mon premier cours d’introduction à la sociologie. Je détestai farouchement ce cours obligatoire donné à un grand groupe en amphithéâtre. C’était bien mal parti pour la sociologie… Ma carrière comme professeure d’éducation fut brève. Après avoir enseigné un an au niveau secondaire cette matière obligatoire mais non prise en compte dans le calcul de la moyenne scolaire des élèves, je décidai de retourner aux études. J’entrepris un deuxième baccalauréat en mathématiques alors que mon conjoint d’alors entamait des études en sociologie. Je me revois encore lui dire : « Vous, les sociologues, avez la tête dans les nuages; nous, les mathématiciens, sommes concrets ». Pourtant, la première année du programme en mathématiques était essentiellement constituée de cours théoriques axés vers la démonstration de théorèmes. Il m’était bien difficile, lors de nos réunions de famille, de parler de la beauté d’une preuve mathématique, ou encore d’expliquer une preuve par l’absurde, alors que mon conjoint pouvait discuter aisément des problèmes d’inégalité ou des conflits traversant la société. Comme je terminais ma première année, un ami d’un ami de mon conjoint évoqua la démographie, une discipline dont je n’avais jamais entendu parler. On me dit que si j’aimais les mathématiques appliquées, j’aimerais le programme en démographie offert à l’Université de Montréal. …

Appendices