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Le sujet de cet ouvrage est d’actualité. Il s’attaque spécifiquement à la problématique de la recomposition de la sphère éducative en France à partir de l’analyse des rapports entre espaces scolaires et espaces locaux.
Cet ouvrage dense, riche et bien documenté, s’appuie principalement sur plusieurs recherches empiriques menées par l’auteur et son équipe, et dont les fondements théoriques sont issus surtout de la sociologie française. C’est un ouvrage pour un public initié ; néanmoins, sa structure confère à chaque chapitre son autonomie et en facilite la lecture et la compréhension.
Après avoir introduit l’ouvrage, l’auteur nous présente dans le premier chapitre sa posture de recherche épistémologique et politique en ce qui concerne l’évolution de la signification du local et son influence dans la sphère éducative de la France.
Le chapitre II traite la question de la mixité sociale à l’école en relation surtout avec la réussite éducative. Comme le signale le titre, « Les fausses évidences de la mixité sociale », l’auteur critique dans ce chapitre le discours politique qui attribue l’accroissement des ségrégations scolaires raciales ou de classe aux dysfonctionnements des organisations ou tout simplement aux désordres urbains et qui, en plus, sous-estime la construction des logiques de concurrence entre les populations. Il souligne que cette problématique, peu explorée dans les travaux de recherche, est bien installée dans le débat de société, tout particulièrement en ce qui a trait au rapport de la réussite scolaire au lieu de la scolarisation.
Le chapitre III présente les résultats d’une recherche récente sur la réussite scolaire, développée dans le département de la Loire. L’auteur y analyse les inégalités sociospatiales de l’éducation. Cette analyse permet, entre autres, de montrer que les disparités territoriales concernent tous les élèves, quel que soit leur groupe social d’appartenance. Ainsi, les parcours scolaires sont déterminés par des médiations complexes entre le territoire et l’origine sociale des élèves.
Le chapitre IV aborde la question des mobilisations éducatives locales à partir de deux exemples : une école de Saint-Étienne et un collectif associatif d’éducation populaire dans la ville d’Orange. Ces deux exemples montrent comment les acteurs professionnels agissent en fonction des populations telles qu’elles sont. Ces acteurs se positionnent malgré eux contre les normes et l’État, et constituent ainsi un nouvel ordre politique. Finalement, la question de la décentralisation éducative est traitée dans le chapitre V, à partir du travail réalisé dans la région Rhône-Alpes. Dans ce cas, la décentralisation a créé un espace de conflit et de controverses, et l’auteur met en évidence le décalage entre les réalisations réelles et le discours officiel, qui prône l’adaptation des politiques éducatives aux réalités locales et à l’accroissement de l’efficacité du système.
En somme, l’ensemble de cet ouvrage apporte un éclairage nouveau sur des questions de grande actualité comme la mixité, les mobilisations éducatives, la disqualification scolaire et la décentralisation, tout en considérant la sphère éducative influencée par le local, qui ne comprend pas seulement le territoire, mais aussi la question sociale, avec toutes ses contradictions.