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La formation des maîtres est peu orientée vers la pratique : elle est souvent conçue comme une accumulation de savoirs propositionnels, constituée de disciplines isolées, écartelée entre formation théorique et stages, et elle n’accorde que peu d’intérêt aux pratiques quotidiennes de l’enseignant (Lenoir, p. 9-10). Cet ouvrage a ainsi pour objectifs 1) de comprendre d’où viennent les pratiques d’enseignement afin de 2) améliorer la formation des enseignants.

Quatre contributions répondent au premier objectif. Faulx met en valeur l’apport de l’élève dans la construction de l’action pédagogique. Roger étudie les différences entre savoirs didactiques et professionnels et la nature des savoirs professionnels. Astolfi explore la distinction entre les notions d’élémentation et d’abréviation pour dépasser l’opposition entre centration sur les savoirs et centration sur l’élève. Pour sa part, Mayen identifie les différents aspects du travail de l’enseignant et de la formation à l’enseignement, et les difficultés auxquelles fait face le chercheur en raison de sa familiarité avec les phénomènes étudiés, des thèmes qu’explorent Lenoir et Rey dans le paratexte.

D’autres contributions répondent au second objectif. Veyrac et Bouiller-Oudot montrent bien la complexité de la tâche de l’enseignant, même si le découpage de cette tâche en plus petites unités paraît artificiel : elles observent que dans la formation initiale à l’enseignement, il est possible de traiter ces activités séparément, ce qui est difficile dans la pratique (p. 240). Buysse, qui modélise la régulation des savoirs professionnels des enseignants, aurait gagné à uniformiser son vocabulaire : quelles distinctions entre savoirs référentiels et universitaires, savoirs pratiques et en action ? C’est l’une des faiblesses de l’ouvrage : les notions sont peu uniformes, malgré des contributions (Roger, Astolfi) visant à les définir.

Enfin, certaines publications semblent prématurées, quoique prometteuses. La nature de la recherche de Beckers – un compagnonnage réflexif sur la manière dont le futur enseignant et le futur formateur affinent leur représentation de l’enseignement et font appel aux savoirs scientifiques – ne garantit pas la répétabilité de ses constats et leur dépersonnalisation (Rey, p. 326) : chaque accompagnement présente ses particularités et son histoire (p. 109). L’étude de Grangeat ainsi que celle de Presseau, Martineau et Portelance portent sur des échantillons trop restreints (deux et cinq sujets) pour que leurs conclusions soient utiles dans l’immédiat. Le texte de Maubant aurait mérité une relecture : dans le vocabulaire de Platon, les idées ne sont pas des constructions (p. 47) ; de plus, où est le second questionnement constitutif du rapport entre recherche et formation annoncé (p. 70) ? Cette remarque s’applique à l’ensemble, qui comporte nombre de coquilles et erreurs : les épreuves évoquées par Buysse (p. 250) ne seraient-elles pas celles d’Héraclès ?

Les lecteurs qui s’intéressent au premier objectif de l’ouvrage seront les mieux servis. Ils pourront tirer parti des travaux d’Astolfi, Mayen, Rey, Roger et Faulx, pour répondre aux questionnements identifiés par Lenoir, Maubant et Martineau. Les autres attendront des résultats de recherche plus achevés.