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Éducation transfrontalière, assurance qualité, accountability, ranking, capitalisme académique et économie du savoir sont quelques-uns des termes qui nourrissent la complexité du débat qui a trait à la transformation de l'enseignement supérieur en Europe, rythmée par le processus de Bologne (qui a débuté en 1999) et la volonté de promouvoir l'alignement des universités en ce qui concerne l'évaluation de la qualité. Ainsi, cet ouvrage collectif s'est-il donné pour mission d'éclairer le lecteur en ce qui a trait à cette vague de contrôle de la qualité et les enjeux politico-socio-économiques que cela représente pour les acteurs du monde universitaire européen.

Le processus de Bologne (1999) et ses réformes suscitent des discussions plus ou moins vives dans le cadre des différents chapitres de cet ouvrage. Au coeur de cette initiative, la création d'un espace de l'enseignement supérieur européen qui doit garantir, entre autres, un enseignement supérieur de pointe et de qualité ainsi que le soutien à la mobilité des étudiants, des chercheurs, etc. Le premier axe identifié à la lecture de ce collectif traite du désir d'autonomie des universités en termes de procédure d'évaluation et d'assurance de la qualité. En effet, si elles s'accordent sur l'idée d’un partage de bonnes pratiques, respectant les mêmes standards, ces dernières ont rejeté la proposition d'une coopération dans le contrôle de la qualité. Le second axe porte sur la transformation des universités, désormais lieux de commercialisation et d'échange de savoir. Naguère au coeur d'une culture sociale de transmission, le fait de savoir semble être devenu une marchandise. Ainsi les auteurs parlent-ils de capitalisme académique, reposant sur l'économie du savoir dans un climat de compétition intra et interuniversitaire, d'ententes partenariales avec le secteur de l'industrie et les agences privées d'assurance-qualité. Enfin, au sein d’un troisième axe, les auteurs reviennent sur l'évolution des approches-qualité dans l'enseignement supérieur, sur les processus de rationalisation de la qualité, sur les liens entre l'évaluation de la qualité et sur le mouvement du ranking, mais aussi sur la mobilité des étudiants, le tout avec des exemples à l'appui.

La force de ce collectif réside dans sa finalité : offrir, sans désir de consensus, une perspective analytique des changements opérés dans le monde européen de l'enseignement supérieur à la suite, entre autres, des réformes du processus de Bologne. Au fil des chapitres, les discours ont d'ailleurs tendance à se nuancer pour nous permettre de saisir toutes les dimensions du débat, et de nous forger ainsi notre propre opinion. Cependant, en raison de la complexité de certains concepts il aurait été pertinent d'inclure un glossaire, de même que de fournir la description de l'évolution du processus de Bologne plus tôt dans l'ouvrage. En effet, face aux profils divers des lecteurs (acteurs de l’enseignement supérieur, étudiants y compris), il paraît primordial de les outiller afin qu'ils bénéficient pleinement de ce que les auteurs ont à offrir.

Je recommande cet ouvrage à tous les acteurs du milieu universitaire, car il nous sensibilise aux enjeux liés à la nécessité de garantir la qualité de l'enseignement supérieur, tout en conservant l'autonomie et l’identité de nos institutions universitaires, et ce, dans une atmosphère de compétition, de marchandisation et de maximisation du savoir pour le développement économique des pays à travers le monde.