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1. Introduction et problématique

Au Québec, c’est à l’ordre d’enseignement secondaire que se situe la première sortie officielle de travailleurs diplômés, et ce, même si les élèves qui s’inscrivent dans ces formations sont des jeunes (moins de 20 ans) et des adultes (20 ans et plus). C’est à partir de 1987 que le ministère de l’Éducation a actualisé un plan d’action qui allait permettre de réunir les programmes de formation professionnelle jusqu’alors offerts de façon séparée pour les jeunes et les adultes (Gouvernement du Québec, 2002). Les programmes ont évolué, passant d’une approche par objectifs à une approche par compétences et se déclinent, entre autres, principalement sous deux formes : le diplôme d’études professionnelles-DEP et l’attestation de spécialisation professionnelle-ASP. Avec cette harmonisation, effective depuis la fin des années1990, les milieux d’enseignement propres à ce secteur sont appelés des centres de formation professionnelle-CFP ou des écoles spécialisées, et sont toujours régis par la Loi sur l’instruction publique.

Depuis le début des années 2000, après de nombreuses années où ces formations étaient considérées des voies d’évitement et encouragées uniquement en dernier recours pour des élèves en difficulté scolaire (Hardy et Maroy, 1995; Tardif, Castellan et Perez-Roux, 2010; Tondreau et Robert, 2011), ce secteur de formation a été fortement amélioré et revalorisé. Entre autres, une plus grande implication des partenaires du marché du travail et l’apport des entreprises dans le cycle de gestion des programmes, de l’élaboration à l’implantation (Gouvernement du Québec, 2002), ont permis de rendre les formations plus pertinentes et attrayantes auprès des employeurs. La demande de travailleurs qualifiés s’est accrue, et ainsi, le nombre d’élèves inscrits au secteur professionnel du secondaire a considérablement augmenté. En effet, selon le ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du Québec-MEESR (Gouvernement du Québec, 2015), le nombre d’élèves inscrits aux différents programmes s’élevait à 112 621 en 2012-2013, une augmentation de plus de 30 % depuis 2001-2002. Précisons ici que, depuis sa création, le ministère de l’Éducation du Québec s’est retrouvé dans divers regroupements de ministères dont : le ministère de l’Éducation du Québec-MEQ, le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport-MELS, le ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche-MEESR et actuellement, le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur-MEES. Selon la même source, bien que l’effectif jeune soit en augmentation de 12,8 % sur une période de 11 ans, passant de 23 986 en 2001-2002 à 27 066 en 2012-2013, l’effectif adulte a augmenté jusqu’à constituer près des trois quarts des élèves en formation professionnelle. Ainsi, ils étaient 59 140 en 2001-2002 (Gouvernement du Québec, 2010) par rapport à 85. 555 en 2012-2013 (Gouvernement du Québec, 2015), soit une augmentation de 44,7 %.

Ces variations des inscriptions dans les programmes de formation professionnelle sont directement associées à la qualité des formations offertes, ainsi qu’aux réalités économiques et aux demandes de personnels spécialisés du marché de l’emploi. Par exemple, le domaine de l’imprimerie se meurt depuis quelques années, ce qui a un impact négatif sur les admissions dans les programmes préparant une main-d’oeuvre qualifiée dans ce domaine. À l’inverse, un très grand besoin de personnel infirmier au cours des dernières années a poussé à la hausse les inscriptions menant au métier d’infirmière-auxiliaire. Ces réalités du marché du travail exigent une réponse rapide des établissements d’enseignement afin de cibler en conséquence le personnel enseignant compétent pour assurer ces formations. Ainsi, la hausse des inscriptions aux diplômes d’études professionnelles et aux attestations de spécialisation professionnelle a entraîné un accroissement de la demande en personnel enseignant en formation professionnelle puisque, contrairement au secteur de la formation générale des jeunes où les enseignants sont formés à l’université durant quatre années à temps complet avant leur début en enseignement, les enseignants de la formation professionnelle sont engagés sur la base de leur expertise dans le métier, et ce, en forte majorité sans avoir une formation préalable à l’enseignement (Balleux, 2006; Deschenaux et Roussel, 2010). Le nombre d’enseignants en formation professionnelle au Québec est passé de 8.122 en 2000-2001 (Gouvernement du Québec, 2007) à 10. 165 en 2012-2013 (Gouvernement du Québec, 2015), une hausse de 25,2 %. Bien que cette particularité d’engager du personnel enseignant sans formation pédagogique initiale permette de combler un besoin de ressource enseignante à brève échéance, elle impose, notamment aux directions de centres de formation professionnelle, une implication et un niveau de responsabilité non négligeable, pédagogique, entre autres, lors de l’accueil, de l’encadrement, de l’accompagnement et de la formation du nouveau personnel enseignant. En effet, comme l’indique Bernatchez (2011), les directions actuelles sont responsables tant de la gestion pédagogique que de la gestion administrative dans leur établissement scolaire.

Par ailleurs, il faut savoir que les conditions de travail de ces nouveaux enseignants du secteur professionnel sont parfois difficiles (Gagné, 2015), ce qui peut entraîner un départ aussi rapide que leur arrivée en enseignement. Le passage à l’enseignement se réalise surtout sous le signe de la précarité, ces nouveaux enseignants étant surtout engagés à taux horaire, plus rarement à contrat, comme le montre le tableau 1, inspiré des données gouvernementales (Gouvernement du Québec, 2007, 2015).

Tableau 1

Évolution du personnel enseignant en formation professionnelle

Évolution du personnel enseignant en formation professionnelle

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De plus, s’ils souhaitent continuer en enseignement et ainsi profiter des avantages de la condition d’emploi plus stable que procure un contrat, ces nouveaux enseignants ont l’obligation de s’inscrire à une formation universitaire. Il faut donc comprendre, selon les modalités de formation offertes par les universités, que ces nouveaux enseignants devront suivre une formation universitaire, à temps partiel, le soir, les fins de semaine ou en ligne, en même temps qu’ils font leurs premières armes en enseignement (Deschenaux et Roussel, 2010). Pour différentes raisons, plusieurs abandonneront leur formation à l’enseignement professionnel, davantage dans les premiers mois et les premières années d’inscription au programme d’études universitaires (Tardif et Deschenaux, 2014a). Selon ces auteurs, même si le phénomène est difficile à cerner, environ la moitié des étudiants quittent leur programme de formation à l’enseignement professionnel.

Cette incertitude liée aux conditions d’emploi, en plus des exigences de formation universitaire, contribue à l’abandon de la carrière enseignante très peu de temps après les débuts en enseignement. Comme pour le secteur de la formation générale des jeunes (Mukamurera, 2014), les données du taux d’abandon pour les enseignants de la formation professionnelle au Québec montrent une désertion importante, encore une fois dès les premières années, surtout lors des premiers mois d’exercice en enseignement (Tardif, 2001). En ce sens, le travail des directions d’établissement s’en trouverait affecté, elles qui doivent assurer un recrutement plus fréquent de nouveaux enseignants.

À cette situation déjà fort complexe s’ajoute une modification législative majeure concernant les autorisations d’enseigner en formation professionnelle. Le règlement sur les autorisations d’enseigner (Gouvernement du Québec, 2016, a. 456) balise les exigences de formation universitaire donnant la possibilité aux enseignants d’obtenir et de renouveler leur autorisation légale d’enseigner qui leur permet notamment d’obtenir un contrat ou un poste régulier d’enseignement (permanence). Ainsi, depuis 2003, l’exigence ministérielle de formation universitaire pour l’obtention du brevet d’enseignement est passée d’un certificat de 30 crédits à un baccalauréat de 120 crédits, en réponse à l’évolution du marché du travail, des métiers et professions à enseigner, de même qu’à la complexification de l’acte d’enseigner (Gouvernement du Québec, 2001).

En choisissant une carrière en enseignement et la formation universitaire qui s’y rattache, les enseignants doivent donc composer avec des exigences nouvelles qui les placent dans des conditions contextuelles complexes (Deschenaux et Roussel, 2010; Tardif et Deschenaux, 2014a). Notamment, la dimension temporelle revient constamment dans le discours des enseignants qui estiment manquer de temps, puisque leur nouvelle réalité leur demande beaucoup d’adaptation et de travail (Deschenaux et Roussel, 2010; 2013). Ce manque de temps est rapporté par Deschenaux, Monette et Tardif (2012) comme la deuxième raison principale la plus souvent évoquée par des enseignants qui ont abandonné leur programme de formation à l’enseignement professionnel, la première étant un changement de carrière ou de formation, raison qui en cache vraisemblablement une autre. Leur nouvelle réalité d’enseignant représente un défi, tant sur le plan intellectuel que sur celui de l’organisation concrète de leur horaire hebdomadaire. En effet, la minorité des personnes qui se destinaient à l’université vient exacerber l’intensité et la difficulté de l’expérience de formation qui leur est imposée, et la conciliation avec leurs obligations personnelles et professionnelles relève parfois de l’exploit. Les difficultés de conciliation entre la vie personnelle et le travail ainsi qu’entre le travail et les études représentent, lorsqu’elles sont combinées, la troisième raison principale la plus fréquemment évoquées par les enseignants qui ont abandonné leurs études universitaires les préparant à la profession enseignante (Deschenaux, Monette et Tardif, 2012).

Par ailleurs, l’augmentation considérable des exigences de formation a, comme on peut l’imaginer, créé divers bouleversements dans les centres de formation professionnelle-CFP, entre autres, par l’introduction, comme au secteur général des jeunes, d’un minimum de 700 heures de stage en enseignement. Des enseignants associés doivent dorénavant accompagner des collègues enseignants-stagiaires dans leur formation universitaire, ce qui constitue, sans aucun doute, un changement important pour ces enseignants associés qui voient leurs responsabilités augmentées envers leurs nouveaux collègues. Pour les directions, en plus de devoir assurer le recrutement parfois difficile des enseignants associés dotés des caractéristiques recherchées, il s’agit d’une responsabilité supplémentaire que de leur offrir le soutien nécessaire. Ainsi, la nouveauté des stages prescrits dans le référentiel de formation et calqués sur la formation à l’enseignement général ouvre la porte des centres de formation professionnelle aux intervenants universitaires qui sont les superviseurs de stage. Cette nouvelle situation impose une culture de formation universitaire jusqu’alors inexistante dans les centres de formation professionnelle, et elle déteint forcément sur les responsabilités des directions de ces centres.

Or, la gestion pédagogique d’une direction prend racine sur les compétences du référentiel de formation des enseignants. Comme enseignant d’expérience, le directeur d’établissement doit maîtriser ces compétences. Comme responsable de la supervision pédagogique, il doit bien les comprendre et être en mesure de conseiller les enseignants à ce sujet (Bernatchez, 2011, p. 165).

D’une part, les conditions de formation des directions de centres de formation professionnelle sont particulières, puisqu’au Québec, ces directions se retrouvent en minorité dans des groupes composés majoritairement de directions d’écoles primaires et secondaires générales lorsqu’il s’agit de suivre leur formation obligatoire de 2e cycle universitaire de 30 crédits. D’autre part, le référentiel de formation des enseignants de la formation professionnelle est officiellement en place depuis l’automne 2003, ce qui laisse assez peu de possibilités d’avoir terminé une formation de 120 crédits jumelée avec des années d’expérience comme enseignant.

Ainsi, après avoir laissé le temps estimé nécessaire à l’implantation de ce programme de 120 crédits dans les universités québécoises, la Table MELS-Universités a mandaté, en 2009, un groupe de réflexion afin de dresser le bilan de la formation à l’enseignement professionnel depuis la mise en place du baccalauréat en enseignement professionnel-BEP en 2003. À ce moment, six universités québécoises offraient le baccalauréat en enseignement professionnel-BEP : Université Laval, Université du Québec à Chicoutimi, Université du Québec à Montréal, Université du Québec à Rimouski, Université du Québec au Témiscamingue, Université de Sherbrooke.

Les personnes interrogées sont les étudiants, les intervenants dans le programme (par exemple, les professeurs, les superviseurs) et les directions de centre de formation professionnelle. À la suite de son enquête, le Groupe de réflexion sur la formation à l’enseignement professionnel a déposé son rapport à la Table MELS-Universités (Deschenaux, Monette et Tardif, 2012) qui présente les principales données obtenues, résume les faits saillants qui en découlent et avance des recommandations. Il importe de mentionner que les données ont été recueillies par le comité mandaté par la Table de concertation MELS-Universités sur la formation à l’enseignement et financé par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, les universités participantes et l’Association des doyens, doyennes et directeurs, directrices pour l’étude et la recherche en éducation au Québec−ADEREQ. Toutefois, les calculs, analyses, les propos et les conclusions ici exposés n’engagent en rien cette instance et demeurent notre entière responsabilité.

En plus d’interroger les directions d’établissement sur des éléments comme la qualité et la pertinence du baccalauréat en enseignement professionnel, des questions spécifiques leur ont été adressées. Notamment, parmi les préoccupations et critiques entendues au fil du temps pouvant guider le groupe de réflexion, certaines étaient récurrentes à propos de la pertinence du baccalauréat de 120 crédits, comparativement à l’ancien certificat de 30 crédits. Ces préoccupations ont été retenues et directement abordées auprès des directions de centre de formation professionnelle. Ainsi, cet article vise d’abord à exposer l’évaluation faite par les directions de centres de formation professionnelle à propos du baccalauréat de 120 crédits depuis sa mise en place en 2003, pour ensuite établir des liens avec les compétences de leur référentiel pour la gestion d’un établissement d’enseignement.

2. Contexte théorique

Afin de bien comprendre le contexte d’intervention des directions de centres de formation professionnelle auprès des enseignants de leur centre, nous exposerons d’abord les référentiels de compétences qui touchent, d’une part, les enseignants de la formation professionnelle et, d’autre part, les directions d’établissement. Par la suite, nous présenterons quelques repères du cheminement de ces nouveaux enseignants sous l’angle de leur transition professionnelle, car ce phénomène, en trame de fond, caractérise de manière importante le contexte en formation professionnelle. Nous terminerons cette section par la présentation d’une étude qui décrit la réalité des directions de centres.

2.1 Les référentiels de compétences

Actuellement, pour obtenir le brevet d’enseigner au secteur professionnel, comme pour les autres programmes de formation des enseignants, c’est l’Université qui a la responsabilité de qualifier les enseignants, et cette qualification passe par le développement des 12 compétences du référentiel de formation à l’enseignement. Ces compétences se répartissent dans quatre catégories: fondements, acte d’enseigner, contexte social et scolaire et identité professionnelle. Chaque compétence se compose d’un énoncé de compétence, d’une explication de son sens puis de ses diverses composantes. Chaque présentation se termine par le niveau de maitrise attendu au cours et au terme de la formation (Gouvernement du Québec, 2001). Une composante du référentiel de formation, les stages, constitue une nouveauté importante pour les centres de formation professionnelle. Auparavant, la réussite du certificat de 30 crédits était suivie d’une période probatoire d’une durée maximale de 1200 heures, dont la réussite devait être confirmée par la direction de l’établissement d’enseignement professionnel. Depuis l’instauration du baccalauréat de 120 crédits, c’est une formation pratique, par des stages d’enseignement dans le milieu, qui tient lieu de période probatoire (Gouvernement du Québec, 2001). En plus des stages, les autres composantes du programme sont : 1) une initiation à l’enseignement; 2) une formation psychopédagogique et andragogique; 3) des activités de perfectionnement relatives au métier ou au secteur d’enseignement; 4) la reconnaissance des acquis de la compétence disciplinaire (métier).

Le référentiel spécifique à l’enseignement professionnel étant le même que celui de l’enseignement général concernant les 12 compétences puisque, quel que soit le secteur d’enseignement, les énoncés de compétences attendues des enseignants et des enseignantes sont les mêmes (Gouvernement du Québec, 2001, p. X, liminaire), la conclusion de l’étude de Gervais, Correa Molina et Lepage (2007) est importante. Ces auteurs se prononcent sur la validité conceptuelle du référentiel de formation à l’enseignement général. Même si l’approche qu’ils ont utilisée […] ne permet pas de se prononcer sur la totalité des compétences définies dans le référentiel (p. 80-81), ils concluent : En ce qui concerne les compétences liées à l’acte d’enseigner décrit dans le référentiel, les résultats permettent de valider assez largement, à la fois, la nature des éléments retenus dans le référentiel et la description qui en est faite (p. 81).

Par ailleurs, depuis 2008, la formation à la gestion d’un établissement scolaire, non spécifique à la formation professionnelle, est également balisée par un référentiel de compétences (Gouvernement du Québec, 2008). Il comprend 10 compétences réparties en 4 blocs touchant la gestion des services éducatifs, de l’environnement éducatif, des ressources humaines et la gestion administrative de l’établissement. Chaque compétence s’articule autour de six capacités transversales (méthode/démarche, communication, leadership/sens politique, interaction/coopération, évaluation/rétroaction et éthique). Finalement, des actions-clés illustrent ces capacités transversales. La validité conceptuelle de ce référentiel n’a pas été confirmée. Ses appuis conceptuels, tels que présentés dans le référentiel (Gouvernement du Québec, 2008, p. 21), s’appuient sur les travaux du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport-MELS (Gouvernement du Québec, 2006), de Brassard, Cloutier, De Saedeleer, Corriveau, Fortin, Gélinas, A. et Savoie-Zajc, (2004) et de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement (2006).

Ce sont ces deux référentiels de compétences qui balisent la formation universitaire des enseignants de la formation professionnelle et des directions de centres de formation professionnelle. Alors que ces derniers détiennent obligatoirement un diplôme universitaire en enseignement, pas nécessairement en enseignement professionnel, et acquièrent ces compétences dans une formation au deuxième cycle, les nouveaux enseignants de la formation professionnelle doivent bien souvent composer pour une première fois avec la formation universitaire.

2.2 La sociologie des parcours en filigrane du contexte enseignant

Cette obligation de formation universitaire des enseignants constitue une dimension importante de la compréhension du contexte avec lequel doivent composer les directions de centre, puisque ces enseignants n’avaient pour la plupart jamais pensé faire des études universitaires. Ils expriment d’ailleurs un rapport aux études universitaires assez contradictoire, puisque leur formation leur fournit des outils qui permettent de réduire l’anxiété liée à leur nouveau statut d’enseignant, mais rompt souvent de manière marquée avec le pragmatisme qui caractérisait jusque-là leur parcours scolaire. En effet, ces personnes sont souvent peu familiarisées avec le type de tâches exigées à l’université : par exemple, lire des textes à caractère théorique ou rédiger des synthèses. En plus, elles doivent maîtriser des compétences informatiques pour réaliser leur cours en enseignement à distance ou tout simplement pour remettre leurs travaux. La dissemblance avec leur réalité scolaire initialement connue est d’autant accentuée par le fait que presque tous les répondants à leur étude sont issus de familles faiblement scolarisées (Deschenaux et Roussel, 2010; 2013).

Ainsi, le cas des enseignants de la formation professionnelle présente plusieurs particularités avec lesquelles les directions de centre doivent composer au quotidien, résultat de l’importante bifurcation qu’ils vivent entre leur métier et l’enseignement de ce métier. L’étude de ces bifurcations s’inscrit dans le champ d’étude des reconversions professionnelles volontaires (Negroni, 2005). En effet, forts d’une expérience de métier appréciable (Tardif et Deschenaux, 2014b), certaines personnes décident de bifurquer de la pratique de leur métier vers l’enseignement de ce dernier. Cette bifurcation de leur trajectoire, certes choisie, bien que liée à des effets de conjoncture, constitue une bifurcation notable dans leur parcours, et induit ce que certains chercheurs appellent une reconstruction identitaire (Gagné, 2015; Balleux et Perez-Roux, 2011; Grossmann, 2011); d’autres, une reconfiguration de l’habitus (Deschenaux, Roussel et Alexandre, 2013). À part la situation des étudiants sans tâche d’enseignement qui permet de réfuter ce modèle (Tardif et Deschenaux, 2014b), les directions de centre doivent généralement composer avec des personnes qui n’avaient que très rarement prévu faire carrière en enseignement.

Afin d’éclairer l’objet d’étude, trois concepts principaux semblent utiles : le champ, l’espace professionnel et l’habitus. Ces concepts sont présentés en partant du contexte social général jusqu’à l’individu en particulier. Un rapport dialectique unit le champ et l’habitus, à savoir que l’habitus oriente l’action d’un acteur qui fait partie d’un champ; cette action détermine alors la structure de ce champ qui agira ensuite sur la formation de l’habitus des agents qui s’y trouvent.

Bourdieu (1980) définit les champs comme des espaces structurés de positions (ou de postes) dont les propriétés dépendent de leur position dans ces espaces et qui peuvent être analysés indépendamment des caractéristiques de leurs occupants (p. 113). En d’autres mots, il serait possible d’analyser, bien que de manière plus limitée, l’activité d’un champ en décrivant sa structuration et les rapports de pouvoir qui s’y déroulent, sans nécessairement s’attarder aux motivations ou aux caractéristiques personnelles des individus qui y évoluent.

L’existence d’un enjeu qui rallie les occupants du champ est en fait une condition sine qua non à l’existence de ce champ. Comme dans le sport, où les joueurs doivent connaître les règles du jeu, les accepter et les respecter, les occupants d’un champ évoluent nécessairement autour d’un enjeu tout en respectant les lois immanentes de ce champ (Bourdieu 1980). Cette connaissance du jeu, incorporée par le biais de l’habitus, est ce que Bourdieu appelle le sens pratique, point de jonction entre les concepts d’habitus et de champ. Ce sens pratique permet l’incorporation de l’illusio du champ, c’est-à-dire du principe selon lequel les acteurs sont prêts à jouer le jeu de l’enjeu, ce qui fait en sorte qu’ils soient socialement adaptés au jeu. Leur adaptation au champ repose en grande partie sur le capital symbolique dont ils disposent, c’est-à-dire n’importe quelle forme de capital (économique, culturel, social), perçue par des agents qui possèdent les capitaux ou les dispositions nécessaires pour lui accorder de la valeur. Ainsi, lorsque des agents sont en mesure de reconnaître un capital et de lui accorder une valeur dans le champ, celui-ci revêt alors un caractère symbolique propre à ce champ et aux agents qui s’y trouvent. Ce caractère n’est pas automatiquement transférable d’un champ à un autre, car tous les capitaux n’ont pas la même valeur symbolique d’un champ à un autre (Bourdieu, 1994). La formation professionnelle au secondaire, par sa grande diversité, fait en sorte que plusieurs champs se côtoient au sein des centres de formation professionnelle. En conséquence, les enseignants sont issus d’une vaste gamme d’espaces professionnels.

À ce sujet, Bourdon (1996) propose une division du marché du travail en espaces professionnels en s’appuyant, entre autres, sur la notion de champ (Bourdieu, 1980) et sur la théorie de la segmentation des marchés (Reich, Gordon et Edwards, 1973). Ainsi, un espace professionnel ne couvre qu’une partie du marché du travail, puisqu’un diplôme donné ne livre accès, potentiellement et théoriquement, qu’à un nombre restreint de postes sur le marché global de l’emploi (Bourdon, 1996, p. 39).

Les espaces professionnels sont régis selon des règles implicites ou explicites qui en déterminent la structure. En effet, un espace professionnel régi par des règles d’accès très strictes et formelles est fermé, comparativement à un espace professionnel qui est qualifié d’ouvert lorsque son accès n’est pas réglementé. Or, il faut noter qu’un espace n’est jamais totalement fermé ou totalement ouvert, les différentes possibilités s’étalant sur un continuum. En conséquence, les espaces professionnels, à la manière du champ, socialisent leurs occupants à certaines pratiques et valeurs qui leur sont propres, et sont donc propices à la reconfiguration de l’habitus de leurs occupants.

Pour l’habitus, il est présenté comme un système socialement constitué de dispositions structurées et structurantes qui est acquis par la pratique et constamment orienté vers des fonctions pratiques (Bourdieu et Wacquant, 1992, p. 97). On peut penser que l’habitus est une sorte de répertoire de réactions qui est tributaire du milieu dans lequel évolue l’agent, en ce sens que le répertoire d’actions possibles s’inscrit dans les limites et potentialités du cadre social dans lequel il s’inscrit.

De fait, ce système de dispositions est structuré par les caractéristiques du champ et il conditionne l’action de l’agent qui a incorporé ce système qui, ce faisant, transforme l’action en une sorte de réflexe socialement conditionné. Ainsi, l’habitus est un avoir acquis qui s’est transformé en être (Accardo, 1997, p. 117), en ce sens que les dispositions héritées de l’habitus sont tellement intériorisées qu’elles deviennent en quelque sorte une part de l’agent qui les possède.

Selon l’habitus bourdieusien, le personnel, le subjectif, voire le singulier, est social, collectif, car l’habitus est en quelque sorte une subjectivité socialisée (Bourdieu et Wacquant, 1992, p. 101). Donc, l’habitus est une structure interne toujours en voie de restructuration (Accardo, 1997, p. 122), ce qui confirme du coup le caractère évolutif de l’habitus.

Ces outils théoriques apparaissent pertinents pour expliquer la transition vers l’enseignement professionnel. Ce passage bouleverse leur parcours, qui repose avant tout sur les capitaux sociaux développés dans leur espace professionnel de spécialisation (d’origine). Au surplus, en choisissant ce nouvel espace, ces personnes doivent, en concomitance, obtenir la clé d’accès permanent à l’enseignement en réussissant une formation universitaire de 120 crédits. On peut alors supposer que cette imbrication de conjonctures, à la fois professionnelles et scolaires, influence le développement de l’habitus des nouveaux enseignants. Il est alors possible de postuler que la formation et la pratique d’un métier permettent la constitution d’un habitus qui devient le point de référence de ces nouveaux enseignants, une fois intégrés dans leur nouvel espace professionnel. Ils sont recrutés en tant que spécialistes dans leur métier et ils abordent leur rôle d’enseignant avec les capitaux qu’ils ont développés dans celui-ci.

2.3 Un contexte particulier peu étoffé scientifiquement

Contrairement à leurs collègues des écoles primaires et secondaires, les directions des centres de formation professionnelle n’embauchent pas des enseignants qui sortent de l’université dans un cheminement scolaire linéaire où la décision d’oeuvrer en enseignement est parfois prise depuis l’enfance (Riopel, 2006). Ils vivent ainsi une situation particulière qui n’est à peu près pas documentée. L’Association des cadres scolaires du Québec-ACSQ (2005) indique avoir mené successivement deux enquêtes sur les résultats d’embauche du personnel enseignant en formation professionnelle. La première présentait les résultats d’un sondage en ligne auprès de 41 directions en formation professionnelle. La seconde présentait les résultats de deux groupes de discussion auprès de 15 cadres scolaires. Selon l’Association des cadres scolaires du Québec-ACSQ (2005), il ressort de ces enquêtes que les directions en formation professionnelle identifient six difficultés majeures rencontrées en matière d’embauche de personnel enseignant avec lesquelles ils doivent composer : 1) Le contexte d’urgence ou de dernière minute des embauches, 2) la précarité du statut d’emploi, 3) les conditions d’emploi peu compétitives, 4) les pratiques d’embauche axées sur le court terme, 5) le manque d’investissement en matière de formation de la relève enseignante en formation professionnelle et 6) des lacunes en matière d’accueil et d’intégration du nouveau personnel enseignant.

Hormis ces études réalisées auprès de directions d’établissement de formation professionnelle au Québec, les tentatives pour trouver des études qui se rapprochent de celle en cours ont été infructueuses. Évidemment, le contexte très particulier de la formation professionnelle au Québec et les spécificités du changement majeur d’exigence de formation universitaire, passant du certificat au baccalauréat, restreignent grandement les possibilités de recherches similaires. Cette quasi-absence d’études impliquant des directions d’établissement de centre de formation professionnelle soutient donc la pertinence scientifique du présent article et, bien entendu, sa pertinence sociale.

Devant ce rehaussement d’exigence de formation, dans un contexte où de très nombreux enseignants de la formation professionnelle effectuent leurs débuts sans avoir préalablement reçu cette formation universitaire, il apparaît comme primordial de donner la parole aux directions de centres de formation professionnelle qui doivent, au quotidien, composer avec cette réalité. Ainsi, cet article vise d’abord à exposer l’évaluation faite par les directions de centres de formation professionnelle à propos du baccalauréat en enseignement professionnel de 120 crédits depuis sa mise en place en 2003 pour ensuite établir des liens avec les compétences de leur référentiel pour la gestion d’un établissement d’enseignement.

3. Méthodologie

Dans le cadre des travaux du groupe de réflexion, différents groupes de répondants ont été rejoints : les étudiants (actifs, diplômés ou ayant abandonné), les intervenants dans les programmes (professeurs, chargés de cours, superviseurs de stage) et les directions. C’est précisément ce dernier groupe qui retient l’attention ici.

3.1 Participants

Au moment de l’enquête, le Québec comptait 72 commissions scolaires : 60 francophones, 9 anglophones, 3 à statut particulier (particularités linguistiques : bilingues et langues autochtones). Dans celles-ci, l’enseignement professionnel était offert dans 191 centres de formation professionnelle (Gouvernement du Québec, 2014).

Les directeurs et directrices travaillent dans les centres de formation professionnelle comme direction ou direction adjointe. Au point de vue méthodologique, l’échantillon de cette étude correspond à l’ensemble de la population mentionnée précédemment. Le questionnaire a donc été envoyé à 363 directions, et 164 y ont répondu. Environ la moitié (50,6 %) est constituée de directions de centres de formation professionnelle qui ont, en moyenne, 6,2 années d’expérience dans cette fonction, alors que l’autre moitié (49,4 %) représente des directions adjointes qui ont, en moyenne, 4,4 années d’expérience. Toutes ces personnes cumulent, en moyenne, 5,0 années d’expérience comme conseillers pédagogiques et 11,3 années d’expérience comme enseignants dans le domaine de la formation professionnelle (Deschenaux, Monette et Tardif, 2012).

3.2 Instrumentation

Les directions ont été sondées à partir d’un questionnaire composé surtout de questions fermées (le questionnaire est disponible à la fin de l’article). Celles-ci utilisent, pour la plupart, une échelle en six points 1) Entièrement en désaccord; 2) En désaccord; 3) Plutôt en désaccord; 4) Plutôt en accord; 5) En accord; 6) Entièrement en accord, selon la variable identifiée. Les répondants étaient invités aussi à expliquer leur réponse à quelques questions; de plus, à la toute fin du questionnaire, une question ouverte leur était posée. En tout, le questionnaire destiné aux directions comporte 17 questions, dont deux ouvertes, et peut être rempli en 10 à 15 minutes.

Le questionnaire a été élaboré afin de répondre au mandat confié au Groupe de réflexion, et il se compose de deux parties. La première aborde leur connaissance du baccalauréat en enseignement professionnel en explorant la pertinence de chacune des composantes prescrites par le ministère et leur capacité à développer les compétences du référentiel du ministère. Les directions sont ensuite appelées à comparer le baccalauréat à l’ancien certificat, pour finalement indiquer leur perception des motifs d’inscription au baccalauréat ou les motifs justifiant le refus de s’y inscrire. La deuxième partie du questionnaire s’attarde sur les critères valorisés par les directions à l’embauche de nouveaux enseignants et à la situation particulière de leur établissement par rapport aux enseignants en formation (par exemple, nombre d’élèves, de programmes). Finalement, une question ouverte invite les participants à énoncer des modifications pouvant favoriser la réussite des personnes inscrites au baccalauréat.

Les travaux entourant la composition du questionnaire ont été réalisés par l’ensemble des membres du Groupe de réflexion. Le questionnaire a ensuite été élaboré par les membres d’un comité restreint composé de neuf membres, dont deux chargés de projet, qui représentent leurs instances respectives : trois universitaires, trois du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport−MELS et un de la Fédération des syndicats de l’enseignement du Québec. Lorsqu’il a été finalisé, le questionnaire destiné aux directions de centre a été validé par pré-expérimentation auprès d’une direction retraitée et d’une direction adjointe retournée à l’enseignement afin de vérifier la clarté et la pertinence des questions. Leurs réponses n’ont pas été considérées dans l’analyse et les directions concernées n’ont pas été invitées à remplir le questionnaire final. À la suite des ajustements nécessaires, ce dernier a été traduit dans une forme électronique permettant la cueillette des données en ligne. Toute la procédure de traduction en version électronique et de cueillette des données a été confiée à la firme de sondage SOM.

3.3 Déroulement

La liste des directions de centre de formation professionnelle a été obtenue auprès du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport-MELS du Québec. À partir de cette liste, un professionnel de recherche a contacté, par courrier électronique, toutes les directions afin qu’elles identifient les directions adjointes dans chaque centre. C’est ainsi qu’a été constituée la liste des directions composée des directions et des directions adjointes.

Les travaux préliminaires de construction du questionnaire ont été réalisés entre septembre 2009 et mars 2010 alors que le développement du questionnaire s’est fait entre mars 2010 et janvier 2011. Le sondage électronique a été envoyé à toutes les personnes de la liste en date du 3 février 2011. Deux rappels ont été effectués, toujours de façon électronique, et la cueillette s’est terminée le 1er mars 2011.

3.4 Méthode d’analyse des données

Des données quantitatives et qualitatives ont été recueillies. Du côté quantitatif, les données sont surtout des variables ordinales, et certaines sont nominales. Elles se prêtent aisément à l’utilisation de statistiques descriptives qui servent à qualifier les caractéristiques étudiées (Howell, 2009). Les analyses quantitatives se limitent essentiellement à des tableaux de fréquences, dans lesquels les niveaux d’accord à l’énoncé ont été recodés pour regrouper les réponses en deux catégories (en accord ou en désaccord). De plus, il importe de noter qu’en vertu d’une entente entre les universités concernées dans le cadre des travaux de l’enquête, les résultats ne doivent pas permettre d’isoler ou d’identifier une université en particulier. C’est pourquoi, dans les résultats présentés, il est question des programmes de formation à l’enseignement qui sont désignés sous le vocable le programme de baccalauréat en enseignement professionnel.

En ce qui concerne les données qualitatives, les commentaires recueillis notamment à la fin du questionnaire ont été analysés suivant les principes de l’analyse thématique (Paillé, 1996; Paillé et Mucchielli, 2008). Cette technique d’analyse a été choisie pour sa polyvalence, car elle peut s’exercer de manière inductive, en partant du corpus pour générer des thèmes, ou encore, de manière déductive en ayant, préalablement à l’analyse, identifié les thèmes à repérer.

Cette analyse constitue un processus éprouvé de déstructuration-restructuration du corpus (Huberman et Miles, 1991; Paillé et Mucchielli, 2008; Tesch, 1990) qui permet, d’une part, de regrouper en unités sémantiques des unités sémiologiques disparates pour enrichir et formaliser la description conceptuelle (saturation des catégories) et, d’autre part, de faire ressortir les relations entre ces catégories pour dégager des constantes et en vérifier la stabilité (Denzin et Lincoln, 1994).

3.5 Considérations éthiques

Avant de procéder à la collecte de données, des démarches de certification éthique ont été effectuées auprès des comités d’éthique des universités concernées par l’enquête. Puisque l’objectif premier de la démarche de recherche concernait une évaluation de programme, un aspect qui n’est pas évalué par les comités d’éthique, de la recherche, nous avons obtenu l’aval de tous les comités d’éthique et notre démarche respecte tous les principes éthiques. En effet, les données recueillies sont confidentielles, puisque les répondants y sont anonymes, et leurs réponses sont amalgamées dans une base de données par un logiciel durant la collecte de données. Il n’est possible d’aucune façon, pour les chercheurs, d’identifier un répondant. Les participants ont également pu donner un consentement implicite, reconnu comme moyen légitime par l’Énoncé de politique des trois conseils dans le cadre d’une enquête en ligne. Les participants pouvaient en tout temps cesser de répondre aux questions sans aucune conséquence pour eux. Finalement, une copie du rapport final du groupe de réflexion a été distribuée aux directions de centres de formation professionnelle, ayant ou non participé à la recherche, par le truchement d’une association de cadres scolaires.

4. Résultats

4.1 Les données quantitatives

Afin d’apprécier globalement les réponses des directions d’établissement, une question visait à connaître leur niveau de connaissance du programme de formation des enseignants, le baccalauréat, sur lequel ils se prononcent. Ainsi, 9,9 % des répondants (n = 164) disent connaître parfaitement le baccalauréat en enseignement professionnel-BEP; 27,0 %, beaucoup; 43,4 %, modérément; 18,4 %, un peu et 1,3 %, aucunement.

En ce qui concerne les questions directement en lien avec le programme de formation des enseignants, les directions devaient se prononcer sur la qualité de celui-ci, sur sa pertinence et sur leur capacité à favoriser l’atteinte des compétences du référentiel à l’enseignement prescrit. Pour ce qui est de la qualité, sur une échelle en 5 points allant de 1 : Médiocre à 5 : Excellent, ce sont 58,8 % des directions qui estiment que les programmes de formation à l’enseignement sont de bonne ou d’excellente qualité, seulement 4,6 % croient qu’ils sont de mauvaise ou de médiocre qualité.

Pour la pertinence, les directions se prononcent sur chacune des huit composantes du programme. En regroupant les niveaux 5 (En accord) et 6 (Entièrement en accord), les directions considèrent comme pertinentes toutes les composantes, les taux allant de 84,9 % pour la composante Perfectionnement dans le métier à 94,4 %, pour celle nommée Cours de psychopédagogie. Enfin, en ce qui concerne la capacité des programmes à développer les compétences à l’enseignement du référentiel de formation, les directions sont majoritairement d’accord avec cette proposition. Les pourcentages d’accord avec cette proposition, toujours en regroupant les niveaux 5 et 6, vont de 70,6 % pour la compétence à Adapter ses interventions aux besoins des élèves en difficulté à plus de 90 % pour les compétences liées à la planification des situations d’enseignement-apprentissage, à l’enseignement de celles-ci et à l’évaluation des compétences des élèves.

Lorsqu’on les questionne sur les facteurs qui, selon leur point de vue, favorisent l’inscription au baccalauréat en enseignement professionnel, les directions retiennent principalement deux facteurs : celui qui obtient le niveau d’accord (5 et 6) le plus élevé est L’amélioration de leurs compétences en enseignement (83,9 %) qui devrait, selon les directions, motiver les enseignants à s’inscrire au baccalauréat. Le deuxième facteur est Le soutien offert par l’établissement de formation (80,3 %). À l’opposé, les directions jugent Le soutien offert par les universités comme le facteur avec lequel elles sont le moins d’accord (50,4 %). Dans le même sens, Le soutien offert par la commission scolaire (pour ceux qui enseignent) obtient 56,9 % d’accord.

Par ailleurs, pour quiconque s’intéresse au fonctionnement et aux pratiques administratives des centres de formation professionnelle, il est connu que des enseignants devraient s’inscrire au baccalauréat en enseignement professionnel, mais ne le font pas. Ces personnes font le choix d’enseigner à taux horaire. Compte tenu de cela, les directions ont été invitées à indiquer dans quelle mesure (de 1. Jamais à 4. Souvent) des raisons sont invoquées par ces enseignants pour ne pas s’inscrire au baccalauréat. Parmi les 11 raisons présentées, les trois suivantes sont Leplus souvent (3 Assez souvent et 4 Souvent) par les enseignants selon les directions : la formation trop longue (79,7 %), la crainte des difficultés à concilier le travail et les études (71,9 %) et la crainte des difficultés à concilier la vie personnelle et les études (66,4 %).

Enfin, questionnées sur les critères qu’elles valorisent lors de l’embauche, les directions d’établissement d’enseignement de la formation professionnelle classent les cinq critères soumis par ordre d’importance (1 étant le plus important et 5 le moins important). Le tableau ci-dessous présente, pour chaque critère, le pourcentage des réponses selon l’importance accordée en termes de rang.

Tableau 2

Ordre d’importance de critères de sélection lors de l’embauche

Ordre d’importance de critères de sélection lors de l’embauche

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Parmi tous les critères proposés, c’est celui de la qualité de la langue qui reçoit le plus grand nombre de premier choix avec la moitié des premiers rangs accordés. Quant à l’expérience dans le métier c’est le premier choix de moins du quart des répondants alors qu’il est aussi le dernier critère de sélection de plus du quart (26,5 %) des directions sondées. Par ailleurs, les trois critères réunis de nature plus pédagogique (brevet d’enseignement, études universitaires en enseignement débutées, expérience en enseignement) atteignent moins de 30 % (27,2 %) comme premier critère de sélection. Parmi ceux-ci, le critère des études universitaires en enseignement débutées se classe clairement comme le troisième critère en importance (58,1 %), alors que celui d’avoir un brevet d’enseignement est le quatrième critère de sélection (77,2 %) des répondants.

4.2 Les données qualitatives

À la toute fin du questionnaire, les répondants étaient invités à proposer des modifications au programme de formation à l’enseignement actuel pour favoriser la réussite des personnes inscrites. Les 105 directions (64,0 %) qui ont répondu à cette question ont généré 133 commentaires qui ont été regroupés en 8 catégories. Celle qui obtient le plus grand nombre de commentaires (40) concerne la durée du baccalauréat, tous les commentaires indiquant qu’elle est trop longue. La moitié estime que, de façon générale, le baccalauréat est trop long et, ce faisant, trop lourd à compléter pour des enseignants qui cumulent différents statuts simultanément. L’autre moitié des directions prône un retour au programme de certificat de 30 crédits; certaines en l’assortissant d’exigences de formation supplémentaires sur divers sujets que les enseignants pourraient suivre, par exemple, durant les journées pédagogiques. Sur l’ensemble des directions qui ont répondu au sondage, c’est un peu moins du quart (40/164) qui suggère de réduire la durée du programme, un peu moins du huitième (20/164) qui propose le retour au certificat, dont certaines directions avec des conditions qui se rapprochent du programme de baccalauréat actuel.

Lors de l’élaboration du questionnaire destiné aux directions, puisque le changement quant aux exigences de formation universitaire était un élément fréquemment entendu dans les discussions informelles avec les directions de centres, il a été décidé de les questionner spécifiquement sur la capacité du baccalauréat à mieux former les enseignants que l’ancien programme de certificat de 30 crédits. Or, malgré les commentaires souvent entendus de la part des directions et qui seront confirmés par celles interrogées dans cette étude quant à la diminution du temps requis, et donc du nombre de crédits pour compléter la formation universitaire obligatoire, ce sont 40,4 % des directions qui croient que le baccalauréat de 120 crédits permet de mieux former les enseignants que l’ancien programme de certificat; 34,8 % croient le contraire, tandis que 24,8 % ne le savent pas ou ne connaissent pas cet ancien programme.

Chez les directions qui croient que le baccalauréat permet de mieux former les enseignants que le certificat, 47 ont expliqué leur réponse. Plus des trois quarts (36/47) estiment que c’est une formation plus complète et que c’est la centration sur la pédagogie et le développement des compétences professionnelles à l’enseignement qui lui donne un avantage par rapport au certificat. Ainsi, le baccalauréat permettrait de mieux préparer et de former les enseignants à la réalité qu’ils doivent affronter en formation professionnelle. Selon ces directions, la plus grande variété de cours et de situations d’apprentissage correspond mieux aux besoins des centres de formation professionnelle. Cela dit, ces directions n’excluent pas le fait que le baccalauréat soit trop long, et quelques-unes notent que des exigences comme la maîtrise de langue poussent certains enseignants à choisir d’enseigner à taux horaire, ce qui implique qu’ils ne sont pas obligés de s’inscrire au baccalauréat en enseignement professionnel.

Du côté des directions qui estiment que le baccalauréat ne permet pas de mieux former les enseignants, 44 sur les 164 ont répondu à l’invitation d’expliquer leur choix. Environ la moitié d’entre elles estime qu’un certificat axé sur la pédagogie et la didactique procurerait une formation suffisante. D’autres indiquent qu’un certificat bonifié par des stages serait un modèle qui répondrait aux attentes et besoins des centres de formation professionnelle. Selon plusieurs de ces directions, le baccalauréat dans sa forme actuelle, particulièrement dans sa durée, décourage trop de nouveaux candidats.

Concernant les suggestions émises par les directions en réponse à la question ouverte en fin de questionnaire, la catégorie de la durée du baccalauréat mise à part, deux autres catégories recueillent un nombre appréciable de commentaires; ce sont l’offre de formation et les facteurs de persévérance dans les programmes.

Plusieurs directions ont abordé le thème de l’offre de formation dans leurs suggestions d’amélioration, et ce, de manière assez variée. Parmi les 39 commentaires (29,3 %), certains traitent des modalités de l’offre de cours (en ligne, à distance), d’autres du contenu de ces cours, en suggérant des contenus plus concrets ou des activités pédagogiques spécifiques (gestion de classe, toxicomanie, problèmes de santé mentale). Par ailleurs, certaines directions déplorent le caractère trop théorique du programme, pensent que des intervenants plus au fait de la réalité de la formation professionnelle devraient y enseigner, ou encore souhaitent que les exigences des travaux soient réduites, jugeant que les enseignants y consacrent trop de temps.

À propos de la catégorie des facteurs de persévérance dans les programmes, qui regroupe 21 des 133 commentaires (15,8 %), quelques directions (6) abordent la charge de travail globale (enseignement, études) qui est jugée trop lourde. Afin de pallier la lourdeur du processus de formation dans la situation bien particulière des enseignants de la formation professionnelle, différents moyens sont proposés, notamment, l’inclusion d’heures permettant de faire les travaux universitaires dans les contrats avec les commissions scolaires, qui seraient partie intégrante de la tâche éducative. L’adaptation aux études universitaires est un autre facteur de persévérance abordé et différentes suggestions s’y rapportent. Par exemple, certaines directions souhaiteraient un mentorat universitaire pour l’accompagnement des étudiants dans la réalisation de leurs études. Finalement, pour d’autres, il faudrait que la stabilité d’emploi et les perspectives de carrière en enseignement soient favorisées afin de permettre aux étudiants de s’investir réellement dans ce processus, en ayant l’assurance que tous ces efforts ne seront pas vains.

Les autres suggestions (33) sont regroupées selon les thèmes suivants : la reconnaissance des acquis (9/133 - 6,8 %), les stages (7/133 – 5,2 %), les compétences pédagogiques et disciplinaires (7/133 – 5,2 %) et enfin d’autres suggestions (10/133−7,5 %).

5. Discussion des résultats

En ce qui concerne leur niveau de connaissance du baccalauréat en enseignement professionnel, ce sont presque les deux tiers des directions sondées qui ont, au mieux, une connaissance moyenne du programme visant à former le personnel enseignant qu’ils engagent. Ce résultat pourrait s’expliquer par le fait que les enseignants ont le choix entre divers établissements universitaires de formation. Ainsi, il arrive que dans un même centre de formation professionnelle, une direction puisse voir des enseignants inscrits dans trois programmes de formation différents, ce qui augmente l’exigence de bien connaître tous les programmes concernés. D’ailleurs, cette situation précise est rapportée par 13 directions d’établissement, alors que 65 autres indiquent la présence de leurs enseignants dans deux programmes universitaires différents. Cette situation représente certainement un défi pour l’atteinte de plusieurs compétences du référentiel des directions d’établissement qui touchent les pratiques pédagogiques (compétence 2) et le développement des compétences du personnel (compétences 6 et 8). En effet, la tâche peut s’avérer ardue pour les directions quand vient le temps de soutenir le développement de pratiques éducatives adaptées aux élèves sans dédoubler les contenus vus à l’université ou sans savoir à quel moment de leur cheminement les enseignants aborderont certaines pratiques pédagogiques dans leur formation universitaire. Une connaissance plus fine des programmes de formation universitaire de ce personnel pourrait constituer un atout pour soutenir le développement de pratiques éducatives adaptées aux besoins des élèves.

De manière générale, les directions se montrent satisfaites de la qualité des programmes de formation à l’enseignement pour les divers programmes offerts.

Quant aux facteurs pouvant inciter leurs enseignants à s’inscrire au baccalauréat en enseignement professionnel, les directions identifient en plus grande proportion l’amélioration des compétences en enseignement des enseignants comme le facteur le plus important. On peut penser qu’elles valorisent cet objectif en vertu des compétences regroupées dans la catégorie de la gestion des ressources humaines de l’établissement (6, 7 et 8), puisqu’elles ont la responsabilité de l’agir compétent du personnel de leur établissement. Elles considèrent aussi qu’elles ont un rôle important à jouer, puisqu’elles identifient, comme deuxième facteur le plus important, le soutien offert par l’établissement de formation, ce qui concorde parfaitement avec la compétence 8 du référentiel de gestion d’un établissement d’enseignement qui vise à assurer le développement des compétences de tous les membres du personnel.

Quant aux critères de sélection des nouveaux enseignants, la qualité de la langue constitue le premier critère privilégié par les directions de centre de formation professionnelle en se positionnant nettement comme le plus important, même devant le critère de l’expérience dans le métier. Ce résultat surprend, surtout si on le compare avec les difficultés rencontrées par les directions lors de l’embauche d’enseignants en formation professionnelle (L’Association des cadres scolaires du Québec-ACSQ, 2005). Compte tenu de la responsabilité pédagogique des directions, on pourrait aussi s’étonner du peu d’importance accordée au critère de l’expérience en enseignement comme à celui des études universitaires en enseignement déjà débutées. Les difficultés exprimées par les directions touchant le recrutement de dernière minute et les conditions d’emploi peu favorables, voire précaires, pourraient expliquer ces réponses. Dans l’urgence, elles doivent recruter les meilleurs candidats et, en tenant compte d’une certaine rareté de main-d’oeuvre, pour ne pas parler d’inexistence de cette main-d’oeuvre, les directions doivent tabler sur d’autres critères et miser sur la formation universitaire pour parfaire les compétences en enseignement. Le phénomène des étudiants sans tâche d’enseignement (Tardif et Deschenaux, 2014a) pourrait infléchir cette tendance s’il continue à progresser.

En fait, les résultats décrits dans la section précédente laissent entrevoir une certaine ambivalence des directions face aux programmes universitaires de formation. Comme l’ont révélé deux enquêtes de l’Association des cadres scolaires du Québec−ACSQ (2005), les directions doivent composer avec un contexte d’urgence et des conditions d’emploi sur lesquelles elles détiennent peu de contrôle. En fonction des inscriptions dans les divers programmes offerts dans leurs centres, les directions doivent trouver le personnel enseignant pour offrir la formation. Il en résulte une gestion à court terme, peu propice au développement de la relève enseignante. Les directions doivent composer avec du personnel enseignant qui doit se former simultanément à son intégration dans l’enseignement, ce qui explique peut-être le fait que la durée de la formation universitaire et son caractère trop théorique soient décriés par plusieurs directions. L’ambivalence se traduit cependant par les réponses jugeant de la pertinence et de la qualité des programmes universitaires en vigueur.

Les études sur la transition et la formation universitaire des enseignants de la formation professionnelle (Balleux et Perez-Roux, 2011; Deschenaux et Roussel, 2010; 2013) et sur leur persévérance en formation universitaire (Tardif et Deschenaux, 2014b) abordent toutes la difficile conciliation entre la vie professionnelle (en enseignement et dans leur métier), les études et la vie familiale. Les directions de centre ressentent également cette pression quand elles constatent que certains enseignants refusent la formation universitaire, même s’il en résulte pour eux un statut précaire (taux horaire). On peut penser que la conscience du lourd contexte vécu par les enseignants de la formation professionnelle explique que plusieurs directions prônent un allègement de la durée de la formation universitaire pour les délivrer plus rapidement de cette épreuve.

Enfin, les résultats de notre étude montrent que les directions ne semblent pas considérer que le soutien offert par les universités ou même par la commission scolaire permettent d’augmenter les inscriptions en formation universitaire. En écho à la compétence 5 du référentiel de compétence des directions, qui vise à soutenir le développement de collaborations et de partenariats axés sur la réussite des élèves, le renforcement des relations entre les directions de centre, les universités et les commissions scolaires semble une piste intéressante pour mieux intégrer les exigences de formation du personnel enseignant, selon une vision systémique, dans leur processus de gestion et dans la mission éducative de leur établissement d’enseignement.

6. Conclusion

Au Québec, les directions d’institutions d’enseignements où sont offerts les programmes de formation professionnelle doivent composer avec des fluctuations importantes d’enseignants, les programmes étant grandement influencés par les besoins de main-d’oeuvre du marché de l’emploi. Le personnel enseignant est recruté pour sa compétence disciplinaire, soit de métier, et il doit se former à l’enseignement en même temps qu’il débute en enseignement. Depuis 2003, un baccalauréat de 120 crédits, suivi à temps partiel, est exigé de ces nouveaux enseignants. Au début des années 2010, tous les acteurs concernés par cette formation ont été consultés, dont les directions de centres de formation professionnelle, afin qu’ils se prononcent sur ce programme de formation et sur d’autres dimensions. Ainsi, cet article visait d’abord à exposer l’évaluation faite par les directions de centres à propos du baccalauréat en enseignement professionnel de 120 crédits depuis sa mise en place en 2003, pour ensuite établir des liens avec les compétences de leur référentiel pour la gestion d’un établissement d’enseignement.

Questionnées par voie électronique, les directions et directions adjointes qui ont répondu au sondage ont une connaissance plutôt moyenne des programmes de formation à l’enseignement professionnel offerts, confirment la qualité et la pertinence du programme ainsi que sa capacité à développer les compétences du référentiel de formation à l’enseignement professionnel. Plusieurs répondants questionnent la durée du programme et s’inquiètent de la conciliation entre le travail, les études et la vie personnelle des enseignants qui sont inscrits au baccalauréat. Par ailleurs, un ordonnancement des critères de sélection lors de l’embauche d’un nouvel enseignant montre que les directions consultées privilégient la qualité de la langue à l’expertise de métier ou à la compétence pédagogique.

Les directions d’établissement d’enseignement professionnel, particulièrement sur la base de leurs fonctions énoncées dans la Loi sur l’instruction publique (Gouvernement du Québec, 2016) et du référentiel pour la gestion d’un établissement d’enseignement (Gouvernement du Québec, 2008), ont un rôle important à jouer auprès de ces nouveaux enseignants, rôle qui apparaît comme spécifique à l’enseignement professionnel. D’ailleurs, les compétences du référentiel pour la gestion d’un établissement d’enseignement qui doivent être mises en oeuvre, notamment celles liées à la gestion pédagogique des directions, sont particulièrement mobilisées et affectées par les caractéristiques des nouveaux enseignants, de leur programme d’études universitaires et le contexte de leur arrivée en enseignement. En ce sens, puisque la majorité commence sa formation universitaire après son embauche comme enseignant, nous estimons, à partir des réponses fournies au sondage, que les directions auraient avantage à mieux connaître les programmes de formation à l’enseignement professionnel et leurs fondements, au-delà de leur durée trop longue ou de leur caractère trop théorique.

Une limite du sondage concerne la prise en compte globale des réponses des directions en lien avec le programme, aucun établissement universitaire ne devant être identifié. Cette limite diminue peu la portée de cette étude, dans la mesure où elle ne concerne pas les dimensions spécifiques liées aux compétences des directions de centres de formation professionnelle.

Toutefois, le choix de porter notre regard uniquement sur les réponses des directions de centres impose des limites quant aux possibilités de croisements avec les autres groupes de répondants du sondage initial, en raison notamment du manque d’espace pour déployer de telles comparaisons. De plus, l’analyse secondaire de données est souvent marquée par des renoncements qui s’expliquent souvent par l’absence de question sur un sujet qui n’a pas été abordé dans l’étude principale.

Quant aux recherches futures qui pourraient éclairer la présente étude, nous croyons en la nécessité d’approfondir le lien entre les critères de sélection des directions lors de l’embauche de nouveaux enseignants et les compétences pédagogiques requises par ces derniers dans l’exercice de leur fonction. En ce sens, comme cela a déjà été recommandé dans le rapport final du Groupe de réflexion sur la formation à l’enseignement professionnel, il serait nécessaire d’analyser les conditions d’embauche qui ont cours dans les centres de formation professionnelle dans une perspective de qualification et de stabilité du corps enseignant. Par ailleurs, il serait judicieux et utile d’étudier les conditions de gestion de ces directions, notamment du point de vue pédagogique, au sens de Lapointe et Archambault (2014), et de voir comment ces données pourraient être réinvesties dans les formations offertes à ces directions.