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Dans la tradition scolaire francophone, on met depuis longtemps un accent important sur l’enseignement de la grammaire. Garante de la norme linguistique pour plusieurs, cette discipline scolaire fait couler beaucoup d’encre, surtout depuis l’arrivée de la grammaire rénovée dans les écoles québécoises, il y a de cela vingt ans. Pour faire le point sur le sujet, Chartrand réunit dans un ouvrage collectif un ensemble de didacticiens chevronnés et, arrimant théorie et pratique, suggère des avenues à emprunter pour doter les élèves de 8 à 15 ans de savoirs et de savoir-faire grammaticaux fondamentaux opératoires (p. 1).

Divisé en deux parties et en 14 chapitres, le livre s’adresse aux praticiens, aux étudiants en éducation et à ceux qui les forment. La première partie, les chapitres de 1 à 5, présente les fondements de la transposition didactique préconisée par les instances éducatives au Canada et ailleurs dans le monde. Bronckart ouvre le bal en brossant le panorama historique des réformes de l’enseignement de la grammaire dans plusieurs des espaces francophones, alors que Chartrand, Lord et Lépine signent un chapitre qui expose les assises didactiques sur lesquelles s’érige la grammaire rénovée. Au fil de la première section de l’ouvrage sont notamment abordées la nécessité de recourir à un métalangage juste et précis en classe, la pertinence des outils analytiques que sont le modèle phrase P et les manipulations syntaxiques, et l’insertion de l’enseignement de la grammaire dans une progression spiralaire. Majoritairement théorique, cette partie permet au lectorat de se familiariser avec les rouages de l’enseignement grammatical actuel et le prépare à la suite du livre, qui porte sur les dispositifs à privilégier pour enseigner la grammaire.

Certains des neuf chapitres de la deuxième partie se focalisent sur l’enseignement de faits de langue précis. Cogis et ses collaboratrices abordent l’orthographe grammaticale et les dictées métacognitives, Roy-Mercier et Chartrand font état de propositions novatrices pour enseigner la conjugaison, et de leur côté, Paolacci, Bain et Dufour traitent un signe de ponctuation difficile à maitriser : la virgule. D’autres chapitres délaissent pour leur part une centration sur l’objet enseigné. Par exemple, Péret et Gagnon rendent compte d’une approche de la syntaxe de l’écrit pour soutenir l’apprentissage linguistique des élèves en difficulté, tandis que Lecavalier, Chartrand et Lépine abordent la révision-correction comme vecteur de l’activité grammaticale.

Rares sont les publications qui proposent une vue d’ensemble accessible de la recherche en didactique de la grammaire; il s’agit là du principal point fort de l’ouvrage. Il aurait toutefois été important d’y aborder une approche sociale de l’enseignement grammatical en tenant compte de l’hétérogénéisation linguistique des populations scolaires actuelles ou, comme le font plusieurs sociodidacticiens, de la place des variations intralinguistiques du français dans cette discipline scolaire. Cela étant, le livre ici recensé saura indubitablement orienter les réflexions des acteurs de notre scène éducative.