Abstracts
Résumé
La connaissance des quantiles de précipitations extrêmes comme normes hydrologiques est nécessaire dans le cadre de projets d’aménagement pour la conception d’ouvrages hydrauliques et dans de nombreuses applications d’ingénierie. Dans un contexte de changements climatiques constatés en Afrique de l’Ouest, l’estimation des précipitations associées aux événements extrêmes est un sujet qui suscite des réflexions. Cette problématique soulève la question principale suivante : « Sur quelle base pourrait-on/devrait-on élaborer de nouveaux quantiles pour la gestion de projets de construction d’ouvrages hydrauliques? » Ainsi, l’objectif de cette étude est l’analyse des impacts des changements climatiques sur les normes hydrologiques relatives aux quantiles des pluies journalières maximales annuelles dans le district d’Abidjan (sud de la Côte d’Ivoire). L’approche méthodologique utilisée a consisté à la collecte de données de pluviométrie journalière pour la période 1961-2014. Les tests statistiques de base ont été effectués. Le choix du modèle statistique s’est porté sur la loi de Gumbel. Les paramètres du modèle ont été estimés et ont permis de calculer les quantiles sur plusieurs périodes de référence (1961-1990, 1971-2000, 1981-2010, 1961-2014) et plusieurs durées de retour (2, 5, 10, 20, 50 et 100 ans). Une comparaison des quantiles déterminés a été réalisée à partir des matrices d’écarts relatifs absolus. Les principaux résultats ont montré que les différentes séries définies sont constituées de valeurs indépendantes, stationnaires et homogènes. Les quantiles calculés varient pour une durée de retour donnée en fonction des périodes de référence choisies pour leur détermination. Cela traduit une non-stationnarité des quantiles due à l’instabilité du climat. Pour une meilleure sécurité des ouvrages hydrauliques, les recommandations de ce travail proposent d’utiliser les quantiles de la période historique (1961-1990) pour les périodes de retour inférieures à 50 ans. En ce qui concerne les durées de retour supérieures à 50 ans, il est possible d’utiliser les quantiles de deux périodes de référence (1961-1990, 1981-2010). Pour la valeur du gradex des méthodes empiriques de l’Office de la recherche scientifique et technique outre-mer (ORSTOM) et du Comité interafricain d’études hydrauliques (CIEH), il est recommandé de considérer 0,44 comme valeur pour le dimensionnement des ouvrages hydrauliques dans le district d’Abidjan.
Mots-clés:
- changement climatique,
- normes hydrologiques,
- district d’Abidjan,
- Côte d’Ivoire
Abstract
Knowledge of quantiles of extreme precipitation as hydrological standards is required for the design of hydraulic projects and many other engineering applications. In the context of climate change in West Africa, the estimation of precipitation associated with extreme events is an issue to be adressed. This raises one main question: "On what basis can new quantiles be developed for the management of hydraulic work construction projects?" The objective of this study is the analysis of the impacts of climate change on the hydrological standards relating to the quantiles of maximum daily rainfall in the Abidjan District (southern Ivory Coast). The methodological approach used was to collect daily precipitation data covering the period 1961-2014. Basic statistical tests were performed. The choice of the statistical model was based on Gumbel's law. The parameters of the model were estimated and the quantiles calculated for several reference periods (1961-1990, 1971-2000, 1981-2010, 1961-2014) and return periods (2, 5, 10, 20, 50 and 100 years). A comparison of the quantiles determined was performed from the absolute relative deviation matrices. The main results showed that the different series defined are made up of independent, stationary, and homogeneous values. The quantiles calculated vary for a given return period as a function of the reference periods chosen for their determination. This reflects a non-stationarity of the quantiles due to climate instability. For improved safety of hydraulic works, the recommendation of this work is to use quantiles of the historical period (1961-1990) for return periods of less than 50 years. For return periods over 50 years, it is possible to use quantiles of two reference periods (1961-1990, 1981-2010). For the gradex value of the empirical methods of ORSTOM (Office de la recherche scientifique et technique outre-mer) and Inter-African Committee for Hydraulic Studies (CIEH), it is recommended to consider 0.44 for sizing hydraulic works in the Abidjan District.
Key words:
- climate change,
- hydrological standards,
- Abidjan District,
- Ivory Coast
Article body
1. Introduction
L’estimation des précipitations associées aux événements extrêmes comme normes hydrologiques est un sujet qui suscite de plus en plus d’intérêt dans le domaine des sciences de l’eau. Ainsi, la connaissance des quantiles des précipitations extrêmes est nécessaire dans le cadre des projets d’aménagement pour la conception des ouvrages hydrauliques tels que les ouvrages de protection contre les inondations, les réseaux d’assainissement pluviaux et dans de nombreuses applications d’ingénierie. Le choix du niveau de protection est basé sur des analyses économiques du couple investissements-dommages. Ces quantiles sont en général déterminés à partir de données pluviométriques qui sont influencées par une instabilité du climat. En ce qui concerne l’Afrique de l’Ouest, elle connait depuis les années 1970 des phénomènes de changement climatique et se place comme l’une des régions du monde les plus vulnérables à la variabilité climatique. Le changement climatique constitue l’un des plus grands défis auxquels l’humanité doit faire face au cours du XXIe siècle. Il représente aujourd’hui une menace potentiellement majeure pour l'environnement et le développement durable (KOUMASSI et al., 2014).
En dépit de ce contexte climatique caractérisé par un déficit pluviométrique, de nombreux pays de l’Afrique de l’Ouest (Benin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Niger, Ghana, Sénégal, Togo, Nigeria, etc.) sont confrontés à de graves problèmes d’inondation tant en milieu urbain que rural (GOULA et al., 2010; SORO, 2011; PANTHOU, 2013). Les inondations ont constitué durant ces dernières années un risque majeur pour le territoire national de la Côte d’Ivoire, surtout pour les villes situées au sud (Abidjan, San Pedro, Grand-Lahou, etc.). Le district d’Abidjan est un exemple de ces villes qui connaissent en permanence des inondations, dites parfois catastrophiques (pertes en vies humaines, personnes sinistrées, blessées, effondrements de maisons et bien d’autres dommages importants aux infrastructures). En effet, les changements climatiques entrainent l’augmentation de la fréquence des évènements hydroclimatiques. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) estime très vraisemblable (90 à 95 % de probabilité) que les chaleurs extrêmes et les événements de fortes précipitations continueront à devenir plus fréquents, plus intenses et surtout de plus en plus variables d’une année sur l’autre (POMERLEAU, 2009). L’augmentation de la fréquence des événements extrêmes, tels que les inondations et les pluies très intenses, avait été évoquée par plusieurs auteurs (BENISTON et al., 2007). Ces phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes vont conditionner la vulnérabilité à l’égard des phénomènes extrêmes futurs en modifiant les écosystèmes déjà fragiles (KATZ et BROWN, 1992). L’occurrence de ces épisodes exceptionnels incite donc à réviser les quantiles des pluies journalières maximales annuelles en Côte d’Ivoire en général et dans le district d’Abidjan (sud de la Côte d’Ivoire) en particulier.
En Afrique de l’Ouest et centrale en général, et en Côte d’Ivoire en particulier, les ouvrages hydrauliques sont souvent dimensionnés à partir des méthodes de l’Office de la recherche scientifique et technique outre-mer (ORSTOM) (BRUNET-MORET, 1967) et du Comité interafricain d’études hydrauliques (CIEH, 1985). Dans l’application de ces méthodes empiriques, des cartes de pluies décennales et centennales ont été établies, basées sur des données passées, elles-mêmes affectées par le phénomène de changements climatiques. Ces cartes établies concernent souvent des périodes largement dépassées de nos jours. Pour la détermination de la crue centennale (crue de projet) à partir de la crue décennale, il est utilisé un coefficient majorateur, supérieur à 1, qui dépend, entre autres paramètres, des pluies décennales (P10) et centennales (P100). Ce coefficient est appelé gradex (gradient des valeurs extrêmes). Selon les auteurs de ces méthodes, le gradient prend la valeur 0,45 en zone sahélienne et 0,38 en zone tropicale. En effet, le gradex est un invariant climatologique saisonnier et local dépendant de la situation géographique (CFGB, 1994). Cependant, dans un contexte de non-stationnarité des normales pluviométriques, la validité d’un tel principe est discutable. Dans un contexte potentiellement amplificateur de la fréquence et de l’intensité des événements pluviométriques et hydrologiques extrêmes tel que traversé par la Côte d’Ivoire, la validité des méthodes de prédétermination des crues décennales et centennales prescrites par les hydrologues de l’ORSTOM est de plus en plus questionnée (SORO, 2011; NKA, 2016). Cette problématique soulève la question principale suivante : « Sur quelle base pourrait-on/devrait-on élaborer de nouveaux quantiles pour la gestion de nouveaux projets de construction des ouvrages hydrauliques? »
Ainsi, l’objectif de ce travail est l’analyse des impacts des changements climatiques sur les normes hydrologiques relatives aux pluies journalières maximales annuelles dans le district d’Abidjan (sud de la Côte d’Ivoire). Il s’agit d’une contribution au débat sur la révision des normes hydrologiques en général et la révision des quantiles des pluies extrêmes en particulier.
2. Présentation de la zone d’étude
2.1 Situation géographique et administrative
La Côte d’Ivoire fait partie des pays du golfe de Guinée. Elle s’étend sur une superficie de 322 462 km2 (environ 1 % du continent africain). La zone d’étude est le district d’Abidjan. Le district d’Abidjan est situé au sud de la Côte d’Ivoire, entre les latitudes 5°10' et 5°30' Nord et les longitudes 3°45' et 4°21' Ouest. Il est composé de dix communes auxquelles s’ajoutent trois sous-préfectures : Bingerville, Songon et Anyama (Figure 1). Avec une superficie totale de 2 119 km2 dont 566 m2 de lagune, pour une population estimée à environ 4 707 404 habitants selon le Recensement général de la population et de l’habitat de 2014 (INS, 2014), le district d’Abidjan est limité au nord par la ligne de contact socle-bassin sédimentaire, au sud par la lagune Ébrié, à l’ouest par les cours d’eau Agnéby, Niéké et à l’est par la rivière la Mé, les lagunes Adjin et Potou.
2.2 Cadre biophysique
2.2.1 Climat et végétation
Concernant la pluviométrie, la moyenne mensuelle des pluies varie de 23 mm en janvier à 525 mm en juin. La pluviométrie dans le district d’Abidjan est très importante. Elle participerait à l’effet d’inondation par débordement de réseau et au transport de polluants liquides et solides, affectant ainsi les conditions de vie et d’assainissement des populations (DONGO et al., 2008). Le district d’Abidjan est caractérisé par un climat équatorial avec quatre saisons, dont deux saisons pluvieuses et deux saisons sèches. Au cours de la grande saison pluvieuse, il est enregistré plus de deux tiers de la pluviométrie annuelle (1 922 mm). Une petite saison sèche vient ensuite (aout-septembre). Un second pic de pluies est atteint pendant la petite saison pluvieuse (octobre à novembre). La dernière saison est la grande saison sèche qui va de décembre à mars. Les températures moyennes mensuelles dans le district d’Abidjan varient de 24,2 °C en août à 27,4 °C en mars (KABLAN, 2016). La durée moyenne mensuelle de l’insolation est comprise entre 110 et 219 h (KABLAN, 2016). L’humidité relative moyenne mensuelle varie entre 78 % et 87 % (KABLAN, 2016). La végétation du district d’Abidjan est marquée par la forêt dense qui constitue la végétation primaire du littoral, la forêt marécageuse qui se présente en îlots isolés ou sur les marges de la forêt dense humide et le fourré littoral est caractérisé par la savane germinée à îlots arbustifs.
2.2.2 Relief et hydrographie
La géomorphologie est caractérisée par trois grands ensembles que sont les hauts plateaux à deux niveaux (40 à 50 m et 100 à 120 m) représentés par les buttes du Continental Terminal au nord de la lagune Ébrié; les moyens plateaux d’altitude allant de 8 à 12 m constituent les affleurements du cordon littoral du Quaternaire, les plaines et lagunes, au sud, constituent l’ensemble le plus affaissé; les vallées profondes allant de 12 à 40 m, issues du Centre Nord de la zone, entaillent les hauts plateaux du Tertiaire. Le district d’Abidjan repose sur un sol qui est issu des formations sédimentaires, de type ferrallitique (KABLAN, 2016). Ces formations sédimentaires présentent une texture argilosableuse très favorable à l’érosion. En effet, la pluviométrie élevée et l’effet du climat favorisent l’altération intense des roches ferrallitiques. Cela constitue l’une des causes des problèmes de risques naturels sur les versants de certains quartiers à Abidjan. La géologie du district d’Abidjan s’identifie à celle du bassin sédimentaire côtier de la Côte d’Ivoire. La lithostratigraphie du bassin sédimentaire est marquée par des formations d’âge crétacé quaternaire, avec d’importantes variations latérales et verticales de toutes les formations lithologiques. Au nord de la faille des lagunes, on rencontre les terrains du Continental terminal, formations d’âge mio-pliocène caractérisées par une stratification lenticulaire, des sables grossiers, des argiles bariolées, des grès ferrugineux et des minerais de fer. Les vases et les sables lessivés sont rencontrés vers les bordures lagunaires. Au sud de la faille des lagunes, ce sont les sédiments du Quaternaire constitués de sables des cordons marins, de sables, d’argiles et de grès ferrugineux avec des vases et des sables lessivés. Sur le plan paléogéographique, du Crétacé au Quaternaire actuel, trois épisodes de transgression sont bien connus : Albo-Aptien (argiles et grès du Crétacé inférieur), Maestrichtien-Éocène inférieur (argiles glauconieuses, argiles et sables) et Miocène inférieur (marnes noires à reliques de requins, argiles bariolées et lignites).
3. Matériel et méthodes
3.1 Matériel
Les données climatiques utilisées au cours de cette étude ont été mises à notre disposition par la Société d’exploitation et de développement aéroportuaire, aéronautique et météorologique (SODEXAM) à travers la Direction de la météorologie nationale (DMN). Il s’agit des données de pluviométrie journalière de la station synoptique de Port-Bouët (Abidjan). Les données collectées s’étendent sur la période 1961-2014. Le traitement des données a nécessité l’utilisation du logiciel Excel 2016 pour la réalisation des calculs et des graphes.
3.2. Méthodes
3.2.1 Extraction des variables descriptives des pluies extrêmes
La théorie des valeurs extrêmes a été développée par plusieurs auteurs (COLES, 2001; COLES et PERRICHI 2003; COLES et al., 2003; NAVEAU et al., 2005). L’extraction des variables extrêmes constitue une étape importante de la modélisation statistique des pluies extrêmes. En effet, la qualité des résultats dépend en premier lieu du soin apporté à cette étape. Il existe plusieurs méthodes d’extraction des variables descriptives basées sur la théorie des valeurs extrêmes (SORO, 2011). Cependant, celle adoptée est l’échantillonnage des valeurs maximales. Il s’agit de sélectionner sur une année civile (du 1er janvier au 31 décembre), la hauteur de pluie journalière la plus élevée, c’est-à-dire la pluie journalière maximale annuelle. La modélisation statistique des valeurs extrêmes avec les valeurs de pluies journalières maximales est généralement préférée à celles des pluies journalières supérieures à un seuil, aussi bien par les chercheurs que par les projeteurs, car elle est plus facile à appliquer et souvent statistiquement plus efficace (HABIBI et al., 2013). Plusieurs auteurs utilisent la même variable de pluies journalières maximales annuelles pour modéliser les pluies extrêmes (ONIBON et al., 2004; BENKHALED, 2007; GOULA et al., 2007; ZAHAR et LABORDE, 2007; HABIBI et al., 2013; KOUMASSI et al., 2014; AGUE et AFOUDA, 2015).
3.2.2 Hypothèses de l’analyse fréquentielle
L’analyse fréquentielle ou l’hydrologie fréquentielle est l’ensemble des méthodes utilisées pour l’interprétation de séries d’évènements hydrologiques passés en termes de probabilités de future apparition. L’analyse fréquentielle réalisée a pour but de déterminer les quantiles de pluies journalières maximales annuelles servant de normes hydrologiques et passe par l’appréciation de la qualité des séries à posséder une fonction de distribution en utilisant les tests de stationnarité de Kendall, d’indépendance de Wald-Wolfowitz et d’homogénéité de Wilcoxon (HABIBI et al., 2013; AGUE et AFOUDA, 2015). Ces tests fonctionnent tous sur le même principe qui consiste à énoncer une hypothèse sur la population mère et à vérifier sur les observations constatées si celles-ci sont vraisemblables dans le cadre de cette hypothèse. L’hypothèse à tester est appelée H0 (hypothèse nulle) et s’accompagne impérativement de son hypothèse alternative appelée H1. Le test s’attachera à valider ou à rejeter H0 (et par conséquent à tirer la conclusion inverse pour H1). Si le résultat du test amène à accepter l’hypothèse nulle H0, alors la probabilité que la répartition soit aléatoire est élevée. En revanche, le rejet de H0 signifie que cette répartition des réponses recèle des informations qui ne semblent pas être aléatoires et qu’il convient d’approfondir l’analyse.
Le test d’indépendance de Wald-Wolfowitz est utile pour vérifier dans les observations l’existence d’une dépendance séquentielle qui conduirait, lorsque celle-ci est avérée, à définir le type et le niveau de celle-ci avant de continuer l’étude du processus des fréquences. Pour cela les hypothèses sont les suivantes :
H0 : les observations sont indépendantes;
H1 : les observations sont dépendantes.
Le test de stationnarité de Kendall, qui est un test de corrélation sur le rang, sert à détecter les tendances dans les séries (YUE et PILON, 2004). Pour ce test, les hypothèses sont les suivantes :
H0 : il n'y a aucune tendance dans les observations;
H1 : il y a une tendance dans les observations.
Le test d’homogénéité de Wilcoxon à l’échelle annuelle consiste à découper la série selon les différentes ruptures et à vérifier si ces sous-séries ont la même moyenne. Les hypothèses sont donc :
H0 : les moyennes des deux sous-échantillons sont égales;
H1 : les moyennes des deux sous-échantillons sont différentes.
3.2.3 Méthode de calcul des quantiles
Les quantiles ont été déterminés à partir de la loi de Gumbel qui s’est illustrée comme le meilleur modèle statistique ajustant au mieux les données de pluies journalières maximales annuelles de la station d'Abidjan-Port-Bouet (GOULA et al., 2007; GOULA et al., 2010; SORO, 2011; KOUASSI et al., 2018).
En effet, plusieurs lois de distribution employées dans la conception des ouvrages hydrauliques ont ainsi été retenues dans le cadre des travaux antérieurs cités (loi de Weibull, loi de Gumbel et loi lognormale). Elles ont été ajustées aux pluies journalières maximales annuelles et les paramètres ont été estimés de manière spécifique. Les fréquences empiriques ont été calculées à partir de la relation de Hazen. Les paramètres des différentes lois ont été déterminés par la méthode des moments pondérés. L’ajustement a été apprécié à partir de représentation graphique et du test de khi-deux. Deux critères (critère d’Akaike et critère bayésien) ont été retenus pour trancher sur le choix des meilleurs modèles. Les différentes lois ont montré en général une bonne adéquation à la série des pluies journalières maximales annuelles de la station d'Abidjan-Port-Bouet. Cependant, la loi qui ajuste le mieux les pluies journalières maximales annuelles de la station d'Abidjan-Port-Bouet est la loi de Gumbel. Selon les travaux de KOUASSI et al. (2018), dans les faibles valeurs de probabilité de dépassement, la loi lognormale a tendance à sous-estimer les quantiles par rapport à la loi de Gumbel. Quant à la loi Weibull, elle a tendance à surestimer les quantiles par rapport à la loi de Gumbel. Au niveau des fortes valeurs de probabilité de dépassement, la tendance est inversée. Il est constaté que la loi lognormale a tendance à surestimer les quantiles par rapport à la loi de Gumbel alors que la loi Weibull a tendance à sous-estimer les quantiles par rapport à la loi de Gumbel. Dans les valeurs moyennes de probabilité de dépassement, les trois lois ont pratiquement le même comportement.
La détermination des quantiles s’est faite selon deux approches :
la première approche a consisté à déterminer les quantiles en considérant des sous-périodes glissantes de trente ans (SIGHOMNOU, 2004);
la deuxième approche a consisté à déterminer les quantiles en considérant toute la chronique disponible (SIGHOMNOU, 2004; GOULA et al., 2007; GOULA et al., 2010; SORO, 2011).
Ainsi, les quantiles des pluies journalières maximales annuelles ont été calculés sur les périodes 1961-1990, 1971-2000, 1981-2010 et 1961-2014.
Les quantiles des pluies journalières maximales annuelles ont été évalués pour plusieurs durées de retour T (2, 5, 10, 20, 50 et 100 ans) à partir de la loi de Gumbel. En effet, dans les projets de dimensionnement des ouvrages hydrauliques, le choix de la période de retour est fonction de l’importance de l’ouvrage à concevoir. On peut cependant rappeler quelques récurrences habituellement utilisées dans le cadre de ces projets en Côte d’Ivoire :
2 à 5 ans pour les canaux primaires à tertiaires;
10 ans pour les petits ouvrages de franchissement comme les buses et dalots;
20 à 50 ans pour les ponts de petite à moyenne importance;
100 ans pour les ponts de portée importante (de plus de 100 m).
3.2.4 Procédure de comparaison des quantiles des pluies maximales annuelles
L’analyse comparative des quantiles a été basée sur le principe selon lequel le concept de normes hydrologiques fait référence à une stabilité du climat (PATUREL et al., 2003). Ainsi, les écarts relatifs absolus entre les quantiles des pluies journalières maximales annuelles, en considérant à chaque fois un quantile comme valeur de référence, ont été évalués. Les écarts relatifs absolus représentent la valeur absolue de la différence entre le quantile considéré et le quantile de référence rapportée au quantile de référence. Les écarts relatifs absolus sont exprimés en pourcentage. La formulation des écarts relatifs absolus des quantiles pour une période de retour donnée se présente comme suit :
où ∆Pi/réf : écart relatif absolu, Pi : normale de la période i, Préf : normale de référence et i : période (année).
Un seuil d’acceptabilité de 5 % a été retenu, c’est-à-dire que si l’écart relatif absolu est inférieur ou égal à 5 %, on considère que la différence entre le quantile considéré et le quantile de référence n’est pas statistiquement significative.
3.2.5 Calcul du gradex des méthodes de l’ORSTOM et du CIEH
Une analyse du gradex des méthodes de l’ORSTOM et du CIEH, généralement utilisé par les praticiens pour la détermination de la crue de projet a été réalisée. L’expression du coefficient majorateur est :
où P10 : précipitation journalière correspondant à une période de retour de dix ans; P100 : précipitation journalière correspondant à une période de retour de 100 ans; Tb : temps de base en heures; Kr10 : coefficient de ruissellement de la crue décennale (exprimé en fraction et non pas en pourcentage); Tb et Kr10restent constants pour un bassin donné.
On appelle λ l’expression suivante :
Pour une durée de retour donnée, les valeurs de λ varient en fonction des quantiles P100 et P10. Ainsi, les valeurs de λ ont été calculées pour les différentes périodes normales retenues (1961-1990, 1971-2000, 1981-2010 et 1961-2014) et les durées de retour fixées (2, 5, 10, 20, 50 et 100 ans) à partir de l’équation 3.
4. Résultats et discussion
4.1. Vérification des hypothèses de l’analyse fréquentielle
Les résultats de différents tests d’hypothèses (test d’indépendance de Wald-Wolfowitz, test de stationnarité de Kendall et test d’homogénéité de Wilcoxon) appliqués aux sous-séries de trente ans (1961-1990, 1971-2000, 1981-2010) et à la série entière (1961-2014) de pluies journalières maximales annuelles de la station pluviométrique d'Abidjan-Port-Bouet sont synthétisés dans le tableau 1. Le test d’indépendance a été validé avec un niveau de signification de 5 % pour toutes les séries considérées à l’exception de la série 1961-1990 qui valide ce test avec un niveau de signification de 1 % après refus au seuil de 5 %. Les séries 1971-2000 et 1981-2010 valident le test de stationnarité au seuil de 5 %, tandis que les séries 1981-1990 et 1961-2014 après refus au seuil de 5 % affichent une validité de l’hypothèse de stationnarité au niveau de signification de 1 %. L’homogénéité est acceptée au niveau de signification de 5 % pour toutes les séries considérées. Ces résultats montrent que la série des valeurs maximales annuelles de précipitations journalières considérées est constituée de valeurs indépendantes, stationnaires et homogènes en général.
4.2. Analyse des quantiles déterminés
Les quantiles et leurs intervalles de confiance ont été évalués sur trois normales glissantes (1961-1990, 1971-2000 et 1981-2010) et sur toute la chronique (1961-2014) à travers six périodes de retour (T = 2, 5, 10, 20, 50 et 100 ans) (Tableau 2). Les quantiles des pluies journalières maximales annuelles des périodes trentenaires sont compris dans l’intervalle 118-281 mm. Ceux de la période de référence historique (1961-1990) varient entre 135 et 281 mm avec une moyenne de 211,67 mm et un écart-type de 53,59 mm. Les quantiles de la période (1971-2000) oscillent entre 125 et 263 mm avec une moyenne de 197,67 mm et un écart-type de 50,80 mm. Quant aux quantiles de la période de référence actualisée (1981-2010), ils vont de 118 à 280 mm avec une moyenne de 203,50 mm et un écart-type de 59,85 mm. Pour ce qui concerne les quantiles évalués sur toute la chronique disponible, ils varient entre 123 et 275 mm avec une moyenne de 202,83 mm et un écart-type de 51,20 mm.
Pour bien cerner l’évolution des quantiles en fonction des quatre périodes considérées, des représentations graphiques ont été réalisées (Figure 2). Les quantiles calculés à partir des données de la période de référence historique (1961-1990) sont supérieurs à ceux calculés avec les autres périodes de 30 ans (1971-2000, 1981-2010) quelle que soit la période de retour considérée. Pour les grandes durées de retour (T allant de 50 à 100 ans), ces quantiles sont quasi-identiques à ceux de la période de référence actualisée (1981-2010). Les quantiles évalués sur la période 1971-2000 sont légèrement supérieurs aux quantiles de la période de référence actualisée (1981-2010) pour les périodes de retour inférieures à dix ans, mais pour les périodes de retour de dix ans et plus, les quantiles de la série 1971-2000 restent inférieurs à ceux des autres séries. Pour ce qui est des quantiles de la période de référence actualisée (1981-2010), ils sont inférieurs à ceux des autres périodes de 30 ans (1961-1990, 1971-2000) pour des périodes de retour faibles (T < 5 ans). Au-delà de la période de retour de cinq ans, ces quantiles s’intercalent entre ceux de la période de référence historique (1961-1990) et de la période 1971-2000, mais se rapprochent plus des quantiles de la période de référence historique (1961-1990) pour les périodes de retour très importantes (50-100 ans). Concernant les quantiles déterminés à partir de la série complète 1961-2014, ils sont presque égaux aux quantiles de la période 1971-2000 pour les durées de retour allant de 2 à 10 ans et s’intercalent entre ceux de la période 1971-2000 et ceux de la période de référence actualisée (1981-2010) pour des périodes de retour comprises entre 10 et 100 ans. Les différences entre quantiles sont telles qu’une pluie de récurrence cinquantennale calculée à partir des données de la période de référence historique (1961-1990) se rapproche de la pluie de récurrence centennale évaluée à partir de celles de la période 1971-2000. L’incidence du choix de l’une ou l’autre série pour les calculs relatifs aux projets d’investissement est donc considérable.
4.3. Analyse des matrices des écarts des quantiles des pluies journalières maximales
L’analyse des matrices des écarts absolus relatifs met en évidence deux tendances. La première tendance concerne les quantiles des périodes de retour égales à 2 et 5 ans (Tableaux 3-4). En effet, il est enregistré autant de valeurs (6) d’écarts absolus relatifs inférieures ou égales à 5 % que de valeurs supérieures à 5 %. Dans cette tendance, les écarts entre les deux périodes de référence (période de référence historique [1961-1990] et période de référence actualisée [1981-2010]) sont les plus élevés. La deuxième tendance concerne les quantiles des périodes de retour égales à 10, 20, 50 et 100 ans (Tableaux 5 à 8). À ce niveau, il est enregistré plus de valeurs d’écarts absolus relatifs inférieures ou égales à 5 % que de valeurs supérieures à 5 %. Dans cette tendance, les écarts entre les deux périodes de référence (historique [1961-1990] et actualisée [1981-2010]) sont les plus faibles pour les périodes de retour de 50 et 100 ans. Les écarts entre les quantiles de la période de référence historique (1961-1990) et les autres quantiles sont les plus élevés quelle que soit la période de retour. À l’opposé, les écarts entre les quantiles de la période de référence actualisée (1981-2010) et les autres quantiles sont les plus faibles quelle que soit la période de retour. De façon générale, les écarts diminuent avec la durée de retour. Ces résultats montrent que les quantiles diffèrent plus aux faibles périodes de retour (2, 5 ans). Cependant, pour les grandes périodes de retour, donc les pluies de fréquences rares, voire très rares, la différence entre les quantiles n’est pas statistiquement significative. On peut conclure qu’en général, la différence entre les quantiles est beaucoup plus importante aux faibles périodes de retour (2, 5 et 10 ans), mais les quantiles restent statistiquement équivalents aux grandes périodes de retour (20, 50 et 100 ans). Ce fait est plus remarquable pour les quantiles des périodes de référence standard (1961-1990, 1981-2010).
4.4. Analyse du gradex des méthodes de l’ORSTOM et du CIEH
Les différentes valeurs du gradex (λ) des méthodes de l’ORSTOM et du CIEH évaluées en fonction des périodes de 30 ans et de la chronique complète sont consignées dans le tableau 9. Les différentes valeurs du gradex évaluées à partir des quantiles de période de retour de 10 ans et 100 ans varient entre 0,41 et 0,47 avec une moyenne de 0,44 et un écart-type de 0,03. Une valeur similaire de gradex (0,41) a été observée d’une part pour les deux premières périodes de 30 ans (1961-1990 et 1971-2000). D’autre part, il est constaté une valeur de gradex presque similaire entre la période de référence actualisée (1981-2010) (0,47) et la chronique complète 1961-2014 (0,45) avec une légère dominance du gradex de la période de référence actualisée (0,02) sur celui de la période entière (1961-2014). La différence entre le premier groupe de gradex (1961-1990 et 1971-2000) et le deuxième groupe de gradex (1981-2010, 1961-2014) est de l’ordre de 10-2 (4 x 10-2-6 x 10-2).
4.5. Discussion
Les quantiles varient pour une durée de retour donnée en fonction des périodes de référence choisies pour leur détermination. En effet, le choix de la période de référence impacte les quantiles des pluies journalières maximales annuelles. L’incidence du choix d’une série hydrologique (pluies journalières maximales annuelles) pour les calculs relatifs aux projets d’investissement en hydraulique urbaine est donc considérable. Cela semble être dû à l’impact du changement climatique sur les quantiles des pluies journalières maximales annuelles. Les différents résultats obtenus ont montré que les périodes de référence de calcul des quantiles que choisissent les projecteurs des ouvrages hydrauliques connaissent une instabilité due à la non-stationnarité du climat pendant la période d’étude considérée.
Une comparaison des résultats obtenus au cours de cette étude à ceux des travaux antérieurs a été réalisée (Tableaux 10-12). Les quantiles de différentes durées de retour (10, 50, 100 ans) de la présente étude sont inférieurs à ceux obtenus pour les mêmes périodes de retour et la même station par GOULA et al. (2007), GOULA et al. (2010) et SORO (2011). Les écarts relatifs absolus évalués (Tableaux 10-11) montrent que les quantiles obtenus au cours de cette étude sont statistiquement différents de ceux de GOULA et al. (2007) et GOULA et al. (2010), dont les études ont été menées sur les périodes 1947-1995 et 1947-1993. Seule la pluie décennale de la période de référence historique (1961-1990) n’est pas statistiquement différente des autres quantiles décennaux déterminés par GOULA et al. (2010) (Tableau 11). En effet, l’écart relatif est de 4,76 % qui reste inférieur à 5 %. La majorité (58 %) des quantiles calculés aux périodes de retour égales à 10, 50 et 100 ans est différente statistiquement de ceux de SORO (2011) pour la période 1942-2002 (Tableau 12). En effet, l’écart relatif varie entre 6,01 % et 10,24 % qui reste supérieur à 5 %. L’écart entre les quantiles croît avec la période de retour. De façon générale, l’écart est plus faible au niveau des quantiles de la période de référence historique (1961-1990) suivie de ceux de la période de référence actualisée (1981-2010). En considérant les périodes de référence (1961-1990 et 1981-2010), il apparait une différence significative entre les valeurs de quantiles proposées par GOULA et al. (2007) et GOULA et al. (2010) et celles obtenues au cours de cette étude. En effet, les quantiles proposés par GOULA et al. (2007) et GOULA et al. (2010) sont surestimés par rapport à ceux calculés à partir des données des périodes de référence de l’OMM (1961-1990, 1981-2010). Par contre, il apparait une différence non significative entre les valeurs de quantiles proposées par SORO (2011) et celles obtenues au cours de cette étude sur la base des périodes de référence standard (1961-1990 et 1981-2010) surtout pour les quantiles de la période de référence historique (1961-1990). Cette différence peut s’expliquer par le choix des échantillons. En effet, les séries utilisées par GOULA et al. (2007) et GOULA et al. (2010) ne prennent pas en compte la période après 1993 d’une part et après 1995 d’autre part. Ces séries s’insèrent dans la période considérée par SORO (2011) qui va de 1942 à 2002. Il ressort que les quantiles de la période 1961-1990 (période de référence historique) peuvent être admis pour le dimensionnement des ouvrages hydrauliques en général et les ouvrages d’assainissement en particulier dans le district d’Abidjan, en lieu et place des quantiles des séries entières proposés par les travaux antérieurs (GOULA et al., 2007; GOULA et al., 2010; SORO, 2011). Pour les pluies de fréquence rares (50 et 100 ans), il est possible d’utiliser les quantiles proposés par SORO (2011). Pour une meilleure sécurité des ouvrages hydrauliques, les recommandations de ce travail proposent d’utiliser les quantiles de la période historique (1961-1990) pour les périodes de retour inférieures à 50 ans. En ce qui concerne les durées de retour supérieures à 50 ans, il est possible d’utiliser les quantiles des deux périodes de référence (1961-1990, 1981-2010).
Étant dans une zone tropicale humide, une comparaison a été effectuée entre les valeurs de gradex locales déterminées dans cette étude et la valeur de référence sous régionale de gradex dans l’application de la méthode de l’ORSTOM et du CIEH. Ainsi, les valeurs de l’écart entre les gradex des différentes périodes et le gradex de référence sont consignées dans le tableau 13. En s’imposant une marge de tolérance de 5 %, il ressort que tous les écarts relatifs déterminés sont au-dessus de ce seuil (7,89-23,68 %). Ainsi, l’erreur qu’impliquerait l’utilisation du gradex de référence sous régional en lieu et place des gradex locaux est très importante. Ceci étant, l’interchangeabilité du gradex de référence sous régional avec les gradex locaux présente un risque considérable. En effet, le choix du gradex régional de 0,38 en lieu et place des gradex obtenus grâce aux observations pluviométriques de la zone d’étude, qui sont bien supérieurs à ce dernier (0,41-0,47), revient à sous-estimer le coefficient majorateur C dans la formule du débit de projet proposé par l’ORSTOM et le CIEH. Ce dernier sera sous-estimé, ce qui implique une sous-estimation des dimensions des ouvrages hydrauliques projetés. De ce fait, la recrudescence des inondations ces dernières décennies dans le district d’Abidjan ne serait-elle pas attribuée en partie à l’usage de la valeur régionalisée du gradex proposé par les méthodes de l’ORSTOM et du CIEH? Le résultat de cette analyse sur le gradex reste donc un outil d’aide pour les concepteurs et ingénieurs quant à la détermination des débits de projet pour le dimensionnement des ouvrages hydrauliques dans le district d’Abidjan.
Au regard de tout ce qui précède, il apparait clairement que les méthodes de l’ORSTOM et du CIEH sont à adapter au nouveau contexte climatique qui est marqué par une augmentation des intensités de précipitations extrêmes ainsi que l’occurrence plus fréquente de ces phénomènes en réponse aux changements climatiques, ce qui appelle à une mise à jour des méthodes de conception des ouvrages hydrauliques. Pour la valeur du gradex des méthodes empiriques de l’ORSTOM et du CIEH, il est recommandé de considérer 0,44 comme valeur pour le dimensionnement des ouvrages hydrauliques dans le district d’Abidjan (sud de la Côte d’Ivoire).
5. Conclusion
La vérification des hypothèses de l’analyse fréquentielle a montré que les différentes séries définies sont constituées de valeurs indépendantes, stationnaires et homogènes. Les quantiles calculés varient pour une durée de retour donnée (2, 5, 10, 20, 50 et 100 ans) en fonction des périodes de référence choisies pour leur détermination. Le choix de la période de référence impacte donc les quantiles des pluies journalières maximales annuelles. Cette non-stationnarité des quantiles est due à l’instabilité du climat.
L’analyse comparative des quantiles à partir des matrices d’écarts a montré que, de façon générale, les écarts diminuent avec la durée de retour. On peut conclure qu’en général les quantiles sont très différents aux faibles périodes de retour (2, 5 et 10 ans). Cependant, ils restent statistiquement équivalents aux grandes périodes de retour (20, 50 et 100 ans). Ce fait est plus remarquable pour les quantiles des périodes de référence standard (1961-1990, 1981-2010). Une comparaison des quantiles obtenus au cours des travaux antérieurs réalisés sur la même station a montré que les quantiles proposés par les études antérieures ont été en général surestimés par rapport aux références de l’OMM (1961-1990 : référence historique, 1981-2010 : référence actualisée). À partir de 2021, ces normes seront donc actualisées sur la période 1991-2020. Pour une meilleure sécurité des ouvrages hydrauliques, les recommandations de ce travail proposent d’utiliser les quantiles de la période historique (1961-1990) pour les périodes de retour inférieures à 50 ans. En ce qui concerne les durées de retour supérieures à 50 ans, il est possible d’utiliser les quantiles des deux périodes de référence (1961-1990, 1981-2010).
Une analyse du gradex à partir des quantiles de période de retour de 10 ans et 100 ans dans le district d’Abidjan a mis en évidence des valeurs fluctuant entre 0,41 et 0,47 avec une moyenne de 0,44 et un écart-type de 0,03. Une comparaison des valeurs locales obtenues à celle régionale proposée par l’ORSTOM et le CIEH (0,38) a été effectuée. Il ressort que tous les écarts relatifs déterminés sont au-dessus du seuil de 5 % (7,89-23,68 %), ce qui traduit une différence statistiquement significative entre les valeurs de gradex obtenues et celle de référence (0,38). Il est de ce fait recommandé d’utiliser la valeur moyenne locale de 0,44 dans le district d’Abidjan dans l’application des méthodes empiriques de l’ORSTOM et du CIEH pour le dimensionnement des ouvrages hydrauliques.
Les résultats obtenus au cours de ce travail sur les quantiles constituent des éléments de base pour les concepteurs et ingénieurs quant à la détermination des débits de projet pour le dimensionnement des ouvrages hydrauliques dans le district d’Abidjan. Ces normes estimées constituent un important outil d’aide à la décision dans les processus de recherche des stratégies de lutte contre les risques hydroclimatiques en général et les inondations en particulier dans le district d’Abidjan. L’étude des quantiles a révélé la caducité des méthodes empiriques de l’ORSTOM et du CIEH très souvent utilisés dans le dimensionnement des ouvrages hydrauliques. Il apparait donc judicieux de considérer les nouvelles propositions pour garantir une sécurité des ouvrages dans le contexte actuel de changement climatique. Ce travail mérite d’être étendu à toute la Côte d’Ivoire dans le but d’une mise à jour des méthodes empiriques de l’ORSTOM et du CIEH utilisées pour la conception des ouvrages hydrauliques en Côte d’Ivoire.
Appendices
Remerciements
Les auteurs de cet article remercient les instructeurs dont les critiques et les suggestions ont permis d’améliorer le présent article. Ils remercient également la direction de la SODEXAM pour leur avoir fourni les données climatiques utilisées dans cette étude.
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