Présentation : Juri M. LotmanPresentation: Juri M. Lotman[Record]

  • Edna Andrews

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  • Edna Andrews
    Duke University

L’oeuvre de Juri Lotman a transformé à jamais le domaine de l’anthroposémiotique. Que l’on se penche sur ses contributions institutionnelles en tant qu’un des fondateurs de l’École de sémiotique de Tartu-Moscou, sur ses premiers travaux de sémiotique structuraliste, sur ses contributions à l’histoire culturelle russe, à l’analyse littéraire ou encore à ses recherches plus tardives qui ont ouvert une voie nouvelle et solide dans la théorie sémiotique, la vision unique de Lotman parvient à capter l’attention du lecteur et à constamment fournir une perspective à la fois fraîche et originale sur son objet d’étude. À ce jour inégalée, l’étendue encyclopédique de son savoir sur l’art, de même que sur le langage des arts visuels russes, slaves et soviétiques des 18e, 19e et 20e siècles a su informer l’ensemble de ses analyses systémiques de la culture. Les travaux rassemblés dans ce numéro de RS/SI offrent divers prolongements de la théorie sémiotique lotmanienne. Chacun à sa manière démontre la puissance génératrice des principes théoriques spécifiques qui sont à la base de tous les travaux de Lotman. Si l’on peut noter que Lotman n’a jamais complètement abandonné la perspective structuraliste binaire et saussurienne de la sémiotique, ni adopté celle non-structuraliste de Peirce, je dirais qu’il a su néanmoins créer un nouvel espace pour son travail qui, dès le début, l’a distingué de ces deux approches. Ce nouvel espace se révèle en son intégralité dans son travail sur la sémiosphère et sur la sémiotique de la culture. Or, là où Lotman rejoint la tradition sémiotique de Peirce, c’est dans son intérêt pour la sémiose et non pour le signe lui-même. Ceci dit, Lotman ne perd jamais de vue le contexte plus vaste où opèrent les textes culturels (Andrews 2003 : 22-25). Cet engagement l’a conduit à ses travaux tardifs sur la sémiosphère, un concept d’abord formulé en 1984 (Lotman 1990, 1992a, 2009). Comme il l’indique lui-même, la sémiosphère est “l’espace sémiotique nécessaire à l’existence et au fonctionnement des langues, et non pas la somme des différentes langues; dans un sens, la sémiosphère a une existence antérieure et est en constante interaction avec les langues ... elle est un générateur d’informations” (ibid. 1990 : 123, 127). C’est avec la sémiosphère que s’ouvre notre recueil. Pierre-Louis Patoine et Jonathan Hope concentrent leur réflexion sur la conceptualisation lotmanienne de la sémiosphère et en explorent les bases biosémiotiques. Évoquant tant le travail de Vernadsky sur la biosphère que la formation scientifique de Lotman, Patoine et Hope examinent les principaux thèmes des écrits théoriques de Lotman, en commençant par La structure du texte artistique et les différentes définitions de l’art qu’on y trouve (1973). Ils considèrent ensuite la notion d’autocommunication et quelques autres principes déterminants pour la sémiosphère, et en particulier les tensions qui existent entre le “centre” et la “périphérie”. L’étude que signe Elena Maksimova intègre les principes sémiosphériques avec la conception lotmanienne “d’espace artistique” (художественное пространство) dans une analyse des oeuvres littéraires d’Ivan Bunin. À la manière de Lotman qui a consacré plusieurs de ses travaux sur l’espace artistique de la littérature russe, en particulier chez Karamzine, Pouchkine, Tolstoï, Gogol, et Boulgakov (1992b; 1995; 1997a/b; 1998), Maksimova reprend cette conception pour l’appliquer aux oeuvres en prose d’Ivan Bunin. Une fois combinée avec les principes de l’étude de la sémiosphère, l’analyse conduit à une refonte puissante des espaces artistiques uniques qu’on trouve chez Bunin, lesquels offrent une construction en mode ‘conditionnel’ qui résiste à une définition en termes simplement temporels, géographiques ou même éthiques. Andrews et Lowry examinent comment l’espace textuel artistique de même que les oeuvres artistiques apparaissent dans les oeuvres …

Appendices

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