Texte de création

Lettres à Donat[Record]

  • Rémi Belliveau

Depuis, Jean Dularge est devenu le contexte d’une recherche plus approfondie sur l’histoire du rock en Acadie que je mène par le biais de ma pratique artistique. Lettres à Donat est, en ce sens, la pierre angulaire de ce projet, soit le moment où je me suis accordé la permission de l’aborder conceptuellement comme sujet. Bonjour Monsieur Lacroix, Vous ne me connaissez pas. C’est-à-dire que nous ne nous sommes jamais officiellement rencontrés. Par contre, étant vous-même musicien, vous connaissez peut-être mon groupe Les Jeunes d’Asteure? Notre album Paradis, possiblement était en nomination pour les Prix Éloizes cette année. Nous étions également le groupe de soutien lors de la soirée de lecture du Festival de poésie de Caraquet en 2014 – étiez-vous dans la salle? Bref, je m’appelle Rémi Belliveau. Je suis artiste en arts visuels, je suis un Acadien originaire de Memramcook et je m’intéresse à vous. En particulier, je m’intéresse à votre album Viens voir l’Acadie, à son histoire, à son enregistrement, à son contenu et à son legs. Bien sûr, j’ai entendu la chanson titre plusieurs fois dans l’interphone de l’école Abbey-Landry, mais j’ai seulement eu l’occasion de découvrir l’album au complet dernièrement dans le cadre de mes recherches artistiques. J’imagine que vous avez vos propres réponses à ces questions, mais j’aimerais quand même vous faire part de mes réflexions puisque j’y songe beaucoup ces temps-ci. En fait, je suis candidat à la maîtrise en arts visuels et médiatiques de l’UQAM et mon projet de recherche s’approprie des éléments de votre album Viens voir l’Acadie, notamment la maison de disques Acadisco, la chanson titre et le personnage de Jean Dularge. Bien entendu, je n’ai pas l’intention de vous représenter, Monsieur Lacroix, mais j’utilise quand même votre biographie et votre alter ego comme point de départ pour une nouvelle fiction. Dans mon projet, le personnage de Jean Dularge (joué par moi-même), va gagner (comme vous) le concours de la chanson thème du Festival acadien de Caraquet à l’été 1965 (Rivière, 2005). C’est à ce moment-là que sa fiction commence. Il sera repéré par votre ancien gérant et administrateur de la maison de disques Acadisco, le père Jean-Guy Gagnon, c.s.c. (H. Chiasson, communication personnelle, 7 septembre 2018), qui l’enverra à Montréal afin d’écrire et d’enregistrer sa musique. Malheureusement, il quittera la ville un an plus tard suite à un échec pour enfin retourner à Caraquet et adopter la vie d’un pêcheur – du moins c’est ce que je prévois pour l’instant. Alors, comme vous voyez, je dois trouver mes repères afin de ne pas simplement voler votre identité. En d’autres mots, j’ai besoin de bien saisir qui est Donat Lacroix le sujet, qui est Jean Dularge le sujet et qui est Rémi Belliveau le sujet afin d’assurer un dialogue éthique (et surtout intéressant) entre les trois. Heureusement, je participe à un séminaire ce semestre qui s’attarde justement sur ces questions philosophiques. Est-ce que vous avez eu la chance d’étudier la philosophie lors de vos années au Collège de Bathurst ou à l’Université Laval (Rivière, 2005)? Si oui, vous savez autant que moi que c’est une discipline intellectuelle très dense, mais si je me réfère au chapitre Réflexions de votre biographie, je constate que vous êtes un homme qui songe. Je constate également que vous êtes un homme religieux. Vous verrez que les textes que nous lisons dans notre cours remontent jusqu’au Paléolithique et passent par la Grèce antique, le Haut Moyen Âge et la Renaissance avant d’aboutir dans les temps modernes et contemporains. Vous pardonnerez ainsi le ton objectif avec lequel j’aborderai ces systèmes de croyances – on …

Appendices