Recensions et comptes rendusThéologie

William Cavanagh et James K.A. Smith (ed.), Evolution and the Fall, Foreword by Michael Gulker. Grand Rapids MI, Wm. B. Eerdmans, 2017, 15 × 22,5 cm, xxix-231 p., ISBN 978-0-8028-7379-8[Record]

  • Pierre Debanné

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  • Pierre Debanné
    Montréal

Depuis la parution de l’Origine des espèces de Darwin en 1859, le christianisme connaît une remise en question profonde de sa manière d’interpréter les premiers chapitres de la Genèse. Il doit revisiter régulièrement les doctrines traditionnelles de la création, de l’unicité de l’humain comme Imago Dei, et la question de l’origine du péché. Dans le monde universitaire actuel dominé par l’humanisme scientifique, la théologie chrétienne est de plus en plus sur la défensive, perdant du terrain à chaque avancée de la science ou presque, et se retranchant derrière différentes stratégies de gestion de défaite, que ce soit par le créationnisme militant, le concordisme, la stricte séparation des magistères, voire même la mise en sourdine des Écritures elles-mêmes. Pour les dix auteurs de Evolution and the Fall, tous universitaires chrétiens représentant différentes spécialisations et dénominations, le défi se transforme en opportunité dans la mesure où il est approché de l’intérieur de la tradition théologique et liturgique du christianisme classique. C’est l’approche générale du Colossian Forum, groupe de réflexion qui a aidé à produire cet ouvrage collectif (voir le « Foreword »). Son pari : si l’on remplace le paradigme épistémologique de la science magistérielle et conquérante par celui du Christ Seigneur, source de toute science et soutien de toute la création (cf. Colossiens), cette crise pourrait être vécue comme un nouveau moment « chalcédonien », où la tension entre tradition et remise en question ambiante produira non pas une cassure mais un pas en avant qui honorera les paradoxes. L’ouvrage traite de la question spécifique de l’origine du péché, désignée en théologie comme la chute et souvent associée à la doctrine plus spécifique du péché originel. La science actuelle laisse-t-elle encore de la place pour une telle doctrine, et si oui, sous quelle forme ? Après une introduction rédigée par les deux éditeurs, dix chapitres sont regroupés dans quatre sections : « Mapping the Questions » (3 chap.) ; « Biblical Studies and Theological Implications » (3) ; « Beyond « Origins » : Cultural Implications » sur la pertinence de la doctrine de la Chute dans la culture occidentale actuelle (2) ; « Reimagining the Conversation : Faithful Ways Forward », nouvelles questions à apporter au débat (2). L’introduction (xv-xxix), « Dépasser Galilée pour atteindre Chalcédoine : ressources pour imaginer à nouveau l’évolution, les origines de l’humain, et la Chute », explique le paradigme épistémologique général du projet. Alors que l’affaire Galilée du XVIIe siècle est souvent proposée comme le modèle à suivre pour dénouer les crises entre science et foi, nos auteurs invitent les croyants à entrer plutôt dans l’esprit du concile de Chalcédoine, où la tension entre tradition et nouvelles connaissances venant de l’extérieur est soumise à une réflexion imaginative et communautaire interne. Osons voir le défi présent, disent-ils, non pas comme un autre « moment galiléen », mais comme une « opportunité chalcédonienne » (xvii). Prenons au sérieux les nouvelles connaissances, restons fidèles au cadre de la tradition en pratiquant la vie liturgique (« l’incubateur » de la créativité théologique nécessaire, p. xx), tenons à la conviction évangélique selon laquelle toute connaissance est en Jésus Christ, pour ensuite explorer librement comment et jusqu’où la tradition peut être renouvelée sans être trahie. C’est ainsi que la tradition fut renouvelée à Chalcédoine lorsque fut intégrée la notion d’union hypostatique. Le premier chapitre de Darrel Falk, « Les origines de l’humain. Le récit scientifique » (3-22), fait le point sur le consensus scientifique actuel. Les données fossiles et génétiques s’accordent pour indiquer une origine qui ne serait pas monogénique (d’un seul couple « Adam-Ève »), …

Appendices