In memoriam : Colette Carisse[Record]

  • Nicole Laurin

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  • Nicole Laurin
    Département de sociologie, Université de Montréal, C.P. 6128, succ. Centre-ville, Montréal (Québec) H3C 3J7
    laurinn@socio.umontreal.ca

Colette Beaudet-Carisse est décédée à Saint-Hyacinthe, le 17 mars 2008, à l’âge de 82 ans. Elle avait pris sa retraite en 1988, au terme d’une brillante carrière. Depuis, elle séjournait au Mexique, son terrain de recherche préféré. Toutefois, elle a assumé diverses tâches ponctuelles au Département de sociologie jusqu’en 1992. Par la suite, elle y faisait de temps en temps de petites visites amicales. On ne saurait rendre compte de manière exhaustive d’un parcours aussi long que le sien, fertile en événements, publications et réalisations de toutes sortes. On peut seulement en esquisser les grandes lignes. En 1946, Colette Carisse obtient une maîtrise en sciences humaines de l’Université Laval et en 1949, une maîtrise en sociologie. Son mémoire porte sur les indicateurs qui permettent de définir la « banlieue réelle » de la ville de Québec, notamment les frais téléphoniques interurbains et le nombre d’autobus circulant entre l’un et l’autre territoires. Le professeur Jean-Charles Falardeau dirige ce travail. Formé à l’École de Chicago, il privilégie la recherche de terrain et transmet cette tradition à ses élèves. Colette Carisse occupe d’abord un poste de chercheur au gouvernement fédéral et plus tard à l’Université McGill. Son arrivée au Département de sociologie de l’Université de Montréal, en 1960, est un événement important. Elle enseigne, tout en préparant sa thèse de doctorat qu’elle soutiendra en 1964. Ce sera la première thèse présentée au Département de sociologie. Les cours sont levés, les professeurs et les étudiant(e)s assistent à la soutenance. Son travail sera publié au cours de l’année sous le titre « Planification des naissances en milieu canadien-français », aux Presses de l’Université de Montréal. Le sujet est audacieux à l’époque, de même que l’usage combiné des méthodes quantitatives, qualitatives et des techniques informatiques. Le Centre de calcul, qui héberge le premier ordinateur de l’Université, est mis à contribution. L’étude porte sur quatre-vingts couples montréalais, de milieu bourgeois et de milieu ouvrier. La moitié d’entre eux sont mariés depuis cinq ans, les autres depuis onze ans. Seule l’épouse est interviewée. L’analyse statistique et le contenu des entretiens démontrent que les aspirations de fécondité sont relativement élevées, si on les compare à celles relevées dans d’autres pays. Les épouses qui désirent une famille nombreuse n’ont pas le sentiment de dévier de la norme. L’auteur en conclut que « le modèle culturel de la famille nombreuse est fortement valorisé. [...] D’ailleurs, les épouses qui désirent avoir une petite famille [...] ont le sentiment de dévier de la norme sociale qui définit la dimension idéale de la famille » (Carisse, 1964 : 115). Pendant plusieurs années, à titre de professeur associée, agrégée puis titulaire, Colette Carisse assume avec brio les cours de sociologie de la famille et les cours de méthodologie. Jouissant d’une renommée déjà considérable, elle réalise d’importantes recherches à la demande de deux Commissions fédérales d’enquête. D’abord, une étude des orientations culturelles des conjoints dans les mariages bi-ethniques, pour la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme. Par la suite, une analyse de l’image de la femme dans la presse anglaise et française, pour la Commission d’enquête sur le statut de la femme. Chaque semaine, elle tient l’antenne à l’émission « Femmes d’aujourd’hui », diffusée par Radio-Canada. Elle participe aussi à d’autres émissions dont celle du Père Legault. Outre son engagement actif dans plusieurs associations nationales et internationales de sociologie, elle sera secrétaire de l’Association canadienne de 1964 à 1976. Le séjour à Montréal du sociologue français Joffre Dumazedier, spécialiste de la sociologie du loisir, lui fait découvrir un nouveau champ de recherche. Comment la condition des femmes — leur travail et leurs loisirs — se …

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