Abstracts
Résumé
Comment sont réceptionnés les récits par les lecteurs ? Cet article prétend traiter cette question à partir de l’analyse des formes de réception des publications liées à une enquête sociologique sur les placements d’enfants. L’auteure rend compte d’échanges avec des lecteurs et montre le continuum entre la narration sociologique et les enquêtes menées par les personnes concernées : les récits publicisés appellent d’autres récits. Dans la perspective d’un rapport réversible entre connaissance et reconnaissance, l’article invite à remettre en question le pouvoir des récits pour les lecteurs et le pouvoir des retours des lecteurs pour l’analyse sociologique. Les formes de mobilisation des récits par les lecteurs montrent que la narration sociologique participe au dialogue social en exposant des situations singulières pour mieux les inscrire dans la dialectique du social entre eux et moi ; eux et nous ; avant et aujourd’hui ; ici et là-bas. Les récits donnent du pouvoir collectif quand ils permettent de se relier à d’autres en montrant les logiques afférentes à l’institution du placement et ainsi replacer les responsabilités individuelles dans les responsabilités collectives.
D’un point de vue méthodologique, l’expérience-enquête sur les réceptions relève d’une analyse a posteriori des interactions qui ont pris la forme de correspondance numérique, de communication téléphonique, de rencontre virtuelle et réelle.
Mots-clés :
- récit sociologique,
- réception,
- protection de l’enfance,
- placement
Abstract
How do readers receive narratives ? This article sets out to look at this issue by analyzing the ways in which publications related to a sociological survey on child placement are received. The author reports on exchanges with readers and shows the continuum between sociological narration and enquiries made by the involved individuals : the advertised narratives give rise to other narratives. In the perspective of a reversible relation between knowledge and recognition, the article encourages the questioning of the power of narratives for readers and the power of reader feedback for sociological analysis. The readers’ forms of narrative mobilization show that sociological narration participates in the social dialogue by shedding light on unique situations in order to better include them in the social dialectic of “them and me” ; “them and us” ; “before and now” ; “here and there.” The narratives provide collective power when they make it possible to relate to others by showing the accompanying logic of the placement institution and in this way frame individual responsibilities within collective responsibilities. From a methodological point of view, the experiment-survey on receptions is part of an after-the-fact analysis of different types of interaction such as emails, phone calls, and virtual and face-to-face meetings.
Keywords:
- sociological narrative,
- reception,
- child protection,
- placement
Resumen
¿Cómo reciben los lectores las narraciones ? Este artículo trata este asunto a partir del análisis de las formas de recepción de las publicaciones asociadas a una investigación sociológica acerca de la ubicación de menores. La autora da cuenta de intercambios con lectores y presenta la secuencia entre la narración sociológica y las investigaciones realizadas por las personas concernidas : las narraciones publicadas provocan otras narraciones. En la perspectiva de una relación reversible entre conocimiento y reconocimiento, este artículo invita a cuestionar el poder de las narraciones en los lectores y el poder de las reacciones de los lectores en el análisis sociológico. Las formas de movilización de las narraciones por parte de los lectores muestran que la narración sociológica participa en el diálogo social, exponiendo situaciones singulares para inscribirlas más adecuadamente en la dialéctica de lo social, entre “ellos y yo”, “ellos y nosotros”, “antes y ahora”, “aquí y allí”. Las narraciones otorgan un poder colectivo cuando éstas permiten asociarse a otras, mostrando las lógicas aferentes a la institución de la ubicación y así relocalizar las responsabilidades individuales en las responsabilidades colectivas. Desde un punto de vista metodológico, esta experiencia-investigación acerca de las formas de recepción depende de un análisis a posteriori de las interacciones que han tomado la forma de correspondencia numérica, de comunicación telefónica, de encuentro virtual y real.
Palabras clave:
- narración sociológica,
- recepción,
- protección de la infancia,
- ubicación de menores
Download the article in PDF to read it.
Download
Appendices
Bibliographie
- Beliard, A. et J.-S. Eideliman (2008), « Au-delà de la déontologie », in Bensa, A. et Fassin, D. (dir.), Les politiques de l’enquête, Paris, La Découverte, p. 123-141.
- Bourdieu, P. (1980), Questions de sociologie, Paris, Éditions de Minuit.
- Burawoy, M. (2006), « Pour la sociologie publique », socio-logos. Revue de l’Association française de sociologie, n° 1.
- Callon, M. et V. Rabeharisoa (1999), « La leçon d’humanité de Gino », Réseaux, vol. 17, n° 95.
- Carbonnier, J. (2007), « La sociologie juridique et son emploi en législation : communication de Jean Carbonnier à l’Académie des sciences morales et politiques : Communications (23 octobre 1967), Paris, Académie des sciences morales et politiques, 1968, 91-98 », L’Année sociologique, vol. 57, n° 2, p. 393-401.
- Cardi, C. (2004), « La figure de la mauvaise mère dans la justice des mineurs », inKnibiehler, Y. et Neyrand, G. (dir.), Maternité et parentalité, Rennes, ENSP, p. 69-82. Colombani, J.-M. (2008), « Rapport sur l’adoption », rapport public, Paris, La documentation Française.
- Cour des comptes (2009), « La protection de l’enfance », Rapport public thématique, Paris, Cour des comptes.
- Demailly, L., 2009, « Fortunes et ambiguïtés de l’accompagnement », Empan, vol. 74, n° 2, p. 21-28.
- Deshayes, F. (2013), « Lire son dossier au tribunal pour enfants : entre accusation, traduction et trouble dans la place », SociologieS [En ligne], Premiers textes, mis en ligne le 25 juin 2013, consulté le 10 décembre 2016. : http://sociologies.revues.org/4372
- Goffman, E. (1968), Asiles. Études sur la condition sociale des malades mentaux, Paris, Éditions de Minuit.
- Goffman, E. (1973), La mise en scène de la vie quotidienne. Les relations en public, Paris, Éditions de Minuit.
- Goyette, M. et I. Frechon (2013), « Comprendre le devenir des jeunes placés : la nécessité d’une observation longitudinale et représentative tenant compte des contextes socio-culturel et politique », Revue française des affaires sociales, n° 1-2, p. 164-180. Ion, J. (2006), Le travail social au singulier : la fin du travail social ?, Paris, Dunod. Israël, L. (1999), « Les mises en scène d’une justice quotidienne », Droit et société, vol. 42, n° 1, p. 393-419.
- Lahire, B. (2002), À quoi sert la sociologie ?, Paris, La Découverte.
- Laplantine, F. (2012), « Anthropologie et numérique », Journal des anthropologues, n° 128-129, p. 301-323.
- Madec, A. (2002), « Rires et relations d’enquête », Ethnologie française, Vol. 32, 1, p. 89-94.
- Madec, A. (2015), Enquêter en conversant, Paris, L’Harmattan.
- Meunier, M. (2014), « Rapport sur la proposition de loi relative à la protection de l’enfant », Commission des affaires sociales, Paris.
- Murard, N., 2003, La morale de la question sociale, Paris, La Dispute.
- Passeron, J.-C. (1999), « Présentation de Marseille à Richard Hoggart, et vice-versa », inPasseron, J.-C. (dir.), Richard Hoggart en France, Paris, BPI-Centre Georges Pompidou.
- Passeron, J.-C. (2005), « Que reste-t-il des Héritiers et de La Reproduction (1964-1971) aujourd’hui ? », in Chapoulie, J.-M. et al. (dir.), Sociologues et sociologies. La France des années 1960, Paris, L’Harmattan, p. 34-64.
- Paugam, S. (dir.) (2014), L’intégration inégale, Paris, PUF.
- Perrot, M. et M. de La Soudière (1994), « L’écriture des sciences de l’homme : enjeux », Communication, vol. 58, n° 1, p. 5-21.
- Pinçon, M. et M. Pinçon-Charlot (1997), Voyage en grande bourgeoisie. Journal d’enquête, Paris, PUF.
- Potin, E. (2012), Enfants placés, déplacés, replacés : parcours en protection de l’enfance, Toulouse, Érès.
- Pruvost, G. (2008), « La production d’un récit maîtrisé : les effets de la prise en note des entretiens et de la socialisation professionnelle », Langage et société, n° 123, p. 73-86.
- Ravon, B. et J. Ion (2012), Les travailleurs sociaux, Paris, la Découverte.
- Rondepierre, E. (2008), Placement, Paris, Seuil.
- Schnapper, D. (2012) « L’expérience-enquête au Conseil constitutionnel. Réflexion sur la méthode », Sociologie, vol. 2, n° 3, p. 295-309.
- Soulet, M.-H. (2005), « La vulnérabilité comme catégorie de l’action publique », Pensée plurielle, vol. 10, n° 2, p. 49-59.
- Touahria, A. (2011), « La force des liens dématérialisés : associations de parents d’enfants placés, technologies de l’information et mobilisations », inBureau, M.-C. et I. Sainsaulieu, Reconfigurations de l’État social en pratique, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires Septentrion, p. 265-280.
- Weber, M. (1965), Essais sur la théorie de la science, Paris, Plon.