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Introduction

L’intervalle qui émerge au sein des formes de productions sérielles constitue l’un des éléments clés de la fondation d’une communauté de fans. Il impose le décalage, l’attente, l’anticipation ; il est un vide intermédiaire – entre les épisodes et les saisons – durant lequel le temps de la narration est suspendu. Il devient alors l’occasion d’une mobilisation : il provoque les discussions autour de la machine à café ou sur reddit, il voit naître des théories et des espoirs pour la suite du récit. Cet instant réunit les deux conditions qui, selon Henry Jenkins dans une entrevue donnée à Shulman (2019), permettent la naissance des fandoms (terme utilisé pour désigner les communautés de fans s’articulant autour d’un objet culturel donné) : la fascination et la frustration. Fascination à savoir comment les conflits et les événements se développeront dans le prochain épisode ou à mesurer les décalages interprétatifs avec les autres fans. Frustration de devoir attendre – voire que d’autres puissent visionner l’épisode avant nous[1] – ou frustration de voir ces espoirs déçus. Dans le temps aménagé par l’intervalle sériel, la communauté s’agrandit et se complexifie. La série Sherlock de la BBC exemplifie se phénomène avec ses longs hiatus entre les saisons ayant provoqué un foisonnement de théories de fans, de spéculations et de création de contenu fanique (fanfiction, fanart, etc.). Cette dynamique s’applique évidemment à l’ensemble des œuvres sérielles autant télévisuelles que transmédiatiques ; l’exemple de la série Sherlock n’est qu’un écho contemporain du phénomène collectif s’étant produit à l’époque de Conan Doyle[2].

L’émergence des nouvelles plateformes de distribution et de consommation d’œuvres télévisuelles et cinématographiques comme Netflix, Hulu ou Prime Video influence d’autant plus les processus de consommation et de production. Bien que plusieurs séries télévisées paraissent toujours hebdomadairement[3], certaines sont toutefois rendues disponibles dans leur entièreté le même jour, favorisant la systématisation de la pratique du visionnement en rafale (binge-watching). Une pratique qui, à son tour, exige aux créateurs et créatrices de repenser la manière dont ils ou elles écrivent les scénarios télévisuels. La masse des produits culturels disponibles, couplée à l’impossibilité évidente de ne pouvoir consommer l’entièreté de cette masse, a pour conséquence l’élargissement des intervalles entre le moment de parution et le moment d’écoute.

Pour se parer des divulgâcheurs engendrés par les décalages de l’intervalle sériel, les communautés se munissent d’un code d’honneur basé sur la systématisation de l’avertissement : les spoilers alerts. La notion de « spoiler » n’est pas propre au contemporain puisque sa signification change en fonction des contextes et des communautés, j’y reviendrai. La présence insistante de ces spoilers alerts en révèle beaucoup au sujet de nos pratiques de spectature des œuvres sérielles. Qu’est-ce que nos réactions face aux divulgâcheurs révèlent sur la manière dont nous idéalisons le processus spectatoral des œuvres sérielles, plus particulièrement des productions populaires ? Qu’est-ce que cet idéal révèle sur nos identités multiples de fans, de consommateurs ou consommatrices, et de chercheurs ou chercheuses ? La pratique de l’avertissement s’est infiltrée jusque dans les cercles académiques, notamment lors de certains colloques étudiant des œuvres issues de la culture populaire. Comment s’actualise la négociation de ces deux impératifs en apparence incompatibles : l’analyse en profondeur de textes[4] et l’occultation de certains éléments fictifs clés pour la compréhension de l’œuvre dans son ensemble. L’étude de l’intervalle sériel permet de s’interroger sur la réception pragmatique, plus précisément sur notre posture interprétative lors de la réception des œuvres et sur ce qui la conditionne, sur les processus de création de communautés et les subjectivités imaginées qui les accompagnent. Dans le cadre de cet article, j’analyserai les types de lecture qui s’articule autour de la notion de « spoiler » afin de dégager en quoi cette pratique est révélatrice d’une hybridation de plusieurs postures identitaires, plus particulièrement de la posture aca-fan qui fait s’entremêler les subjectivités académiques et fans.

Dans l’œil de celui ou celle qui le regarde

La notion de « divulgâcheur » comporte son lot d’ambiguïtés, rendant sa définition problématique. Jonathan Gray et Jason Mittel, dans leur analyse des communautés entourant la série Lost (2007), proposent une définition pragmatique du terme : pour eux, le spoiler est dans l’œil de celui ou celle qui le regarde. Ainsi, c’est l’interprète qui détermine, de manière très subjective et idiosyncrasique, ce qu’il ou elle définit comme spoiler. Il peut s’agir d’éléments d’intrigue qui dévoilent la fin du texte, de la mort de certains personnages, des revirements de situation ou plot twists surprenants. Certains fans considèrent les previews d’épisodes à venir, ou les previously on au début d’un épisode d’une série télé comme des spoilers. Le casting d’un acteur ou la fuite prématurée ou non désirée d’un scénario ou même la pub d’une gamme de jouets ou de produits dérivés peuvent aussi potentiellement constituer des spoilers.

Ainsi, l’utilisation des avertissements, la notion même de divulgâcheur et la réaction qu’elle provoque chez un spectateur ou une spectatrice seraient symptomatiques d’un certain type d’expérience de l’objet influencée par différents facteurs.

J’entends par « expérience » « le fait d’éprouver personnellement quelque chose » (Antidote 9) ; l’« [a]cte d’éprouver, d’avoir éprouvé. […] Faire l’expérience d’une chose, la ressentir, l’éprouver » (Littré, littre.org). Faire l’expérience d’un texte est par conséquent un acte personnel, subjectif, mais mobilisant un ensemble de processus interprétatifs réglés en fonction de l’objet dont je fais l’expérience. Le spoiler peut donc « ruiner », si l’on se réfère à son étymologie, des textes qui possèdent une forme particulière de narration – très souvent sérielle, bien que ce ne soit pas toujours le cas. Certains genres fictifs (comme le policier, ou le suspense) et certaines formes de récits (comme la nouvelle et sa chute surprenante) offrent un risque plus important que le plaisir de lecture soit divulgâché par la connaissance de certains éléments du récit préalable à la première lecture. Bien que le texte détermine une partie de son processus interprétatif, fuir ou vouloir se protéger des spoilers sous-entend un investissement cognitif et affectif considérable dans l’œuvre que je lis ou que je regarde.

Ainsi, notre attitude vis-à-vis les spoilers soulève des questions qui touchent à la fois à la compréhension du texte, aux fonctions thymiques du récit (le suspense, la curiosité et la surprise, selon Raphaël Baroni (2007))[5], au pouvoir immersif de la fiction, aux enjeux entourant des communautés de fans et qui nous poussent même à devoir réévaluer la définition que nous donnons à la notion de texte. Pourquoi, donc, avons-nous peur des spoilers ? Et devrait-on avoir peur des spoilers ?

En révélant des informations clés sur le récit à consommer, il ruinerait, selon la croyance populaire, l’ordre de saisi voulu de la narration, ou pour le dire autrement, ce qu’on imagine comme étant la manière idéale de lire le texte : sans aucune connaissance préalable de l’histoire qui sera consommée. Or, les thèses de Bertrand Gervais sur les modes de réception réfutent rapidement l’utopie d’une première lecture : chaque texte est palimpseste, traversé de conventions qui le précèdent, inspiré de schémas narratifs construits par des milliers d’années de transmission de récits. Selon lui, il n’existe pas « de première lecture, de lecture spontanée, parce que nous sommes toujours déjà en train de lire, il n’y a pas non plus de première lecture qui serait une origine, aussi radicale et dense que le Big Bang. » (2007, 34). Plus encore, la réécriture et l’adaptation dominent le paysage culturel populaire contemporain. Pourtant, la volonté de fuir les spoilers suggère une posture ouverte à la surprise, ouverte à la découverte des rebondissements réservés par le récit.

Lecture et relecture : un enjeu identitaire

Il est d’intérêt de se pencher un instant sur les dynamiques qu’impose la lecture du texte divulgâché ou non divulgâché. Les études de Matei Calinescu (1993) sur la relecture suggèrent en ce sens que la première lecture est habituellement un processus diachroniquement linéaire ― qu’on pourrait comparer à la notion de lecture en progression telle que Bertrand Gervais la définit, c’est-à-dire un mouvement de lecture qui s’intéresse à comprendre les éléments du texte et qui adopte le protocole institué par le contrat de lecture[6] (2006). Calinescu suggère la possibilité d’effectuer une « double-lecture », l’équivalent d’une relecture, au moment de la première expérience du texte qui serait facilitée par une connaissance préalable des éléments de l’intrigue, donc par la connaissance des spoilers. Les études psychologiques sur le sujet[7] ainsi que les sondages effectués dans les communautés de fans étudiées par Henry Jenkins ([2006] 2013), Jonathan Gray et Jason Mittel (2007) confirment l’hypothèse de Calinescu au sujet du lien entre la connaissance des spoilers et une meilleure compréhension du texte lors de la première lecture. En effet, certains fans chercheraient volontairement ces informations clés de manière à opérer une lecture plus approfondie de l’œuvre, j’y reviendrai.

Calinescu associe ce dernier type de relecture aux critiques et aux universitaires dont l’expertise dans le domaine leur permet d’analyser la construction de l’œuvre et d’identifier ses éléments méta-réflexifs ou intertextuels au moment de la première lecture. À l’inverse, il associe le « plaisir naïf de la première lecture linéaire et curieuse » aux « happy ordinary reader » (1993, 19). Or, selon Bertrand Gervais, les deux économies de l’acte de lecture – la lecture en progression, mentionnée précédemment, et la lecture en compréhension qui renverse le rapport de subordination au texte dans le but d’effectuer une lecture d’acquisition des éléments du texte, d’en faire une interprétation (2006) – sont deux opérations indissociables et ne constituent pas nécessairement deux moments distincts de la lecture et ce, peu importe l’expertise académique (ou non) du lecteur ou de la lectrice.

On serait prompt à associer, d’une part, la posture des fans ou celle du grand public (moins fan) – qui cherchent à éviter les spoilers, qui s’organisent en communauté et qui développent des techniques de partage et de critique des œuvres visant à séparer les espaces de discussions avec et sans spoilers – avec le « plaisir naïf de la première lecture » et, de l’autre, la posture des critiques – qui s’intéressent peu de se protéger des divulgâcheurs et qui priorisent une analyse et une appréciation de l’œuvre dans son ensemble sans amputer la narration de sa fin, quitte à révéler des mystères et des surprises – avec la lecture en profondeur. Pour ces derniers, l’argument de l’étude du médium, de la qualité de l’exécution relaierait alors, dans leurs discours, la fiction et l’investissement affectif au second plan.

Or, les recherches sur le sujet révèlent que ces deux postures ne seraient pas aussi nettement dissociées. Compréhension du texte et plaisir de lecture, bien qu’ils puissent être interreliés corrélativement, doivent être considérés distinctement lorsqu’on parle d’expérience du texte puisqu’il existe une pratique de fans qui consomment des spoilers (notamment au sein des communautés étudiées par Jonathan Gray, Jason Mittel (2007) et Henry Jenkins ([2006] 2013), ce qui nous pousse à étendre la définition du texte en prenant en compte ses usages paratextuels par les communautés en ligne. Les fans de spoilers consomment ainsi le texte comme un jeu et le plaisir de l’expérience leur vient en grande partie à travers l’expérience collective de cette « chasse aux trésors » et pas le biais de l’interaction avec les autres membres de la communauté. Ainsi, les spoilers font éclater les frontières du texte telles qu’elles se conçoivent dans les théories plus « linéaires » de la lecture empirique[8]. Parallèlement, il existe une posture critique qui veut composer avec les contraintes des divulgâcheurs, mais qui valorise tout autant l’analyse en profondeur du texte. Au sein des cercles académiques et critiques, s’observent des manières de négocier le plaisir « naïf » de la première lecture et la critique, tout en considérant l’expérience de la tension narrative (pour se référer aux thèses de Raphaël Baroni (2007) donc le plaisir du suspense, de la curiosité et de la surprise dans les analyses postérieures. Nous effectuons, certes, des analyses « incomplètes », utilisons des spoiler alerts qui encouragent des écoutes différées de communications de colloques ou des lectures d’articles retardées postérieurement à la consommation du texte traité dans l’analyse afin de se laisser aller au plaisir de la première lecture.

Pourquoi alors, lire ou regarder « pour la première fois », vivre les surprises, les plot twists, succomber volontairement aux subterfuges, aux mensonges des narrations trompeuses ? Pourquoi lire « dans le bon ordre » et vivre la « tension narrative » (Baroni 2007) telle que le texte voulait nous la faire vivre ? Lorsque je suis la mécanique du texte, lorsque je m’inscris en rouage de la machine interprétative du texte ou, autrement dit, lorsque j’essaie de me mettre dans les souliers de son Lecteur Modèle, pour reprendre le concept d’Umberto Eco ([1979] 1985), je désire faire une expérience qui est celle des fans, du moins celle que j’effectue lorsque je suis fan. Cette volonté personnelle d’éviter les spoilers dériverait ainsi d’une démarche auto-ethnographique où je fais l’expérience de la nouveauté que je considère comme une expérience « authentiquement » fan, puisque cette expérience m’offre une meilleure compréhension de l’objet que je consomme et de la relation que j’entretiens avec celui-ci.

Aca-fan : identité, communauté, interprétation

La réaction adoptée face aux divulgâcheurs en révèle donc moins au sujet du travail d’interprétation du texte que de la posture qu’elle sous-tend. Pour le dire autrement, il s’agit moins de découvrir si, cognitivement ou affectivement, les spoilers augmentent ou non le plaisir relié à la première lecture, mais plutôt à savoir ce que l’animosité envers les divulgâcheurs, les implications charriées par ce type de discours ainsi que les stratégies utilisées pour négocier la critique et le plaisir du texte révèle sur une certaine posture académique et sur l’idée que nous nous faisons d’une expérience « authentique ».

Or, il existe plusieurs manières d’être fans, comme le révèlent les études sur ces communautés, et fuir les spoilers n’est qu’une manière parmi d’autres de consommer les textes. La volonté de s’en préserver et de faire l’expérience d’une première fois sans connaissance préalable de l’intrigue provoque par conséquent une certaine posture d’abandon affectif par rapport à l’objet, une certaine posture désignée par le terme « aca-fan ».

C’est dans l’ouvrage Fan Cultures (2002) que Matt Hills définit les aca-fans comme une posture hybride qui négocie deux points de vue, deux approches radicalement différentes des objets populaires. Cette bipartition première, analogue à la première bipartition effectuée précédemment entre la critique et les fans, participe à l’instauration de discours reproduisant des dualismes moraux – comme les nomme Matt Hills (2002) –, c’est-à-dire une tendance à homogénéiser les groupes qui serviront de repoussoirs lors de la construction d’une identité.

On assiste à une marginalisation mutuelle des deux positions : l’une valorisée, l’autre délégitimée. Ces discours antinomiques se structurent, selon Hills, à partir d’une « subjectivité imaginée » (imagined subjectivity), c’est-à-dire une version idéalisée d’une subjectivité qui ne correspond en rien au sujet empirique et qui permet d’établir et de maintenir une communauté ainsi que le système de valeurs qui lui est associé (2002). La subjectivité imaginée accorde en ce sens une importance aux traits d’une communauté donnée – l’identité universitaire, par exemple, valorise le sujet rationnel, objectif et l’argumentation, la persuasion (tout en dépréciant ceux des groupes se situant à l’extérieur) dans ce cas-ci, la passion et l’engagement émotionnel des fans. L’approche ethnographique et autoethnographique constitue en ce sens une tentative d’allier l’expérience fan vécue à la critique universitaire. La posture aca-fan nécessite alors d’embrasser les contradictions propres à ce point de vue hybride variant nécessairement en fonction des usages des chercheurs et des chercheuses.

La construction de l’identité aca-fan s’effectue ainsi à partir d’une subjectivité imaginée qui rassemble nécessairement des individus en collectivité dans l’opposition à un Autre servant de repoussoir. Le regroupement sous-tend un double mouvement. Le premier désigne la construction et la consolidation de la collectivité qui s’assemble autour d’une certaine subjectivité imaginée (et en opposition avec une autre). Plus qu’une subjectivité imaginée, on pourrait parler alors, pour reprendre le terme de Benedict Anderson, de « communautés imaginées » (1983). Le partage du plaisir du texte et, plus généralement, de l’appréciation constitue une dynamique essentielle à la formation de la communauté et à sa consolidation. Intervient ici, dans la formation de l’identité aca-fan une dimension fortement socio-affective au sens où l’individu bâtit son identité à travers son expérience affective partagée avec une communauté ayant vécu une expérience similaire (ou, à tout le moins, recherchant cette expérience similaire).

Le second mouvement est celui de l’interprétation des œuvres en fonction de la communauté dans laquelle l’interprète s’inscrit, donc la communauté interprétative, pour reprendre le concept de Stanley Fish (1982), qui dirige et influence la réception des textes. Par conséquent, l’interprétation pragmatique du texte s’effectue en fonction d’expériences affectives partagées et similaires. À ce point de vue, il serait pertinent de se méfier de nos habitudes de lecture et de se retourner parfois pour observer ce qui se cache dans leurs angles morts.

La construction identitaire du groupe aca-fan qui fuit les spoilers (dans le but conscient ou inconscient d’effectuer l’expérience de la nouveauté et de lire le texte « dans l’ordre où il était destiné ») s’organise par conséquent en fonction d’une expérience affective et cognitive particulière. Les recherches psychologiques sur l’effet des divulgâcheurs sur le plaisir du texte – plus spécifiquement les études menées Benjamin K. Johnson et Judith E. Rosenbaum (2016) – font intervenir dans l’appréciation du texte l’évaluation du besoin individuel de cognition et du besoin d’affect (need for cognition, need for affect), c’est-à-dire, respectivement, la marge de plaisir qu’une personne ressent lorsqu’elle prend part au processus de compréhension des éléments de l’histoire et au défi intellectuel, et le plaisir à ressentir des émotions fortes. Brièvement, les conclusions montrent que les individus au besoin de cognition et d’affect élevés préfèrent les histoires non divulgâchées.

Figure 1

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Ainsi, c’est le plaisir du texte, dérivé de l’expérience de la tension narrative et ses éléments intrinsèques tel qu’étudié par Raphaël Baroni (2007), le suspense, la curiosité et la surprise, qui forme un des traits définitoires d’une certaine identité aca-fan. Lorsqu’on s’aventure du côté des théories sur l’acte de lecture de Bertrand Gervais (2007) et l’acte de spectature (Lefevbre 2007), celles-ci font intervenir le concept de figure pour tenter de définir le processus d’appropriation singulier du texte. Les chercheurs s’interrogent alors sur la manière dont les œuvres marquent nos imaginaires, comment finissent-elles par s’amalgamer à nos vies, à nos souvenirs, et comment nous nous approprions les fictions. La figure prend forme lorsque je suis captée, lorsque je suis surprise par ces histoires. Or, pour qu’elles me saisissent et pour qu’elles deviennent figure, je dois me rendre disponible à cette rencontre. La posture aca-fan, celle qui fuit les spoilers et qui désire éprouver la nouveauté narrative, s’ouvre aisément à ces rencontres fortuites, à la surprise de se voir happer par la fiction et à s’abandonner pour se laisser contaminer, se laisser transformer par l’expérience du texte.