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1. La religion dans la chanson

La formule de Lasswell (1948), c’est-à-dire qui dit quoi, comment, à qui, et avec quel effet peut être d’une grande utilité afin d’expliquer un acte de communication effectué par l’entremise d’un média de masse. Le but de cet article étant de discuter certains liens existant entre la musique et la religion, nous aimerions l’appliquer à différentes chansons ayant comme contenu la religion afin d’en démontrer la pertinence analytique. En ce sens, considérons les chansons populaires de Cohen (Hallelujah, 1984), de Dubois (Si Dieu existe, 1996), de Hozier-Byrne (Take Me to Church, 2014) et de Lennon (God, 1970).

Selon Lasswell (1948), derrière chacune de ces chansons figure un émetteur (dans le cas présent un chanteur populaire) qui parle de religion. Les auteurs de ces compositions musicales émettent tous un message à propos de la religion, message qui diffère d’un interprète à l’autre. Par exemple, Lennon affirme dans sa chanson que Dieu est un concept, tandis que Dubois se questionne dans la sienne à propos du lien entre Dieu et la mort. Par la suite, les messages à caractère religieux qui figurent dans ce genre d’oeuvre musicale sont transmis à l’aide de médias comme la radio, la télévision ou Internet à des admirateurs qui réagissent en achetant ou non ce produit culturel (Morling et Lamoreaux 2008), l’élevant potentiellement au rang de numéro 1 d’un palmarès comme ce fut le cas pour la chanson de Hozier-Byrne[1]. Dans de rares instances, l’effet de la diffusion d’une chanson populaire ayant pour thème la religion dépasse celui d’être le numéro 1 d’un palmarès. Un cas de figure est celui de Cohen dont la chanson a été reprise par d’autres interprètes de renommée internationale comme Bon Jovi ou Céline Dion. Elle est d’ailleurs devenue « un classique » et a été qualifiée d’hymne à la paix lorsque K. D. Lang la chanta lors de la cérémonie de clôture des Jeux olympiques d’hiver de Vancouver en 2010[2].

Intimement liée à l’approche de Lasswell (1948) est l’analyse de contenu, une méthode de recherche couramment employée afin de décrire les éléments de sa formule. Elle est d’ailleurs une pratique méthodologique très populaire lorsqu’il est question d’étudier les paroles de chansons populaires (Falardeau et Perreault 2014). Shoemaker et Reese (1996) notent aussi que son utilisation est tributaire de l’hypothèse de travail qui anime le chercheur, soit de comprendre l’effet du message ou d’entrevoir le message comme un reflet de la culture d’un groupe donné. Une des entreprises scientifiques les plus intéressantes en matière d’analyse de contenu de chansons religieuses qui appuie cette affirmation est celle de Woods et Walrath (2007). Dans le cadre de cet ouvrage collectif, le contenu des 77 chansons les plus populaires de 1989 à 2005 du genre Christian Worship Music a été étudié par l’entremise de sept analyses de contenu, et ce, à l’aide de la communication, de la psychologie, de la sociologie et de la théologie. À titre de précision, les chansons de ce corpus sont celles utilisées lors de la messe du dimanche aux États-Unis.

La double utilisation de l’analyse de contenu notée par Shoemaker et Reese (1996) en recherche nous rappelle que la communication présente deux aspects, soit le contenu (les informations retrouvées dans le message) et la relation (la manière dont on doit comprendre l’information, l’ordre de la relation). Selon Watzlawick et al. (1967), il est essentiel d’étudier le contenu de paroles de chansons en fonction du contexte de relation qui prévaut. D’un point de vue communicationnel, rappelons que lorsque des interprètes musicaux envoient différents messages à propos de la religion dans l’espace public (Habermas 1987), le lien social est consolidé et/ou fragmenté (Perreault et Laplante 2014). À ce propos, en affirmant que Dieu est un concept, Lennon incite ceux qui écoutent sa chanson à entrer en relation entre eux en discutant de la véracité de cette affirmation. La conséquence de cette discussion est que son point de vue résonne auprès des auditeurs qui souscrivent à sa vision de la religion, tandis que l’inverse est vrai pour ceux qui n’y souscrivent pas. En affirmant que les Beatles étaient devenus plus populaires que Jésus (Cleave 1966), John Lennon avait d’ailleurs engendré ce genre de discussion aux États-Unis.

Cette exemplification théorique pointe vers la nécessité de se pencher sur l’association existant entre le contenu religieux de paroles de chansons et le contexte relationnel qui le sous-tend. Remarquons que lorsque l’on examine la littérature scientifique consacrée à cette question, deux tendances relationnelles semblent corréler avec le contenu des paroles de chansons ayant pour thème la religion, soit les perspectives intragroupe et intergroupe. D’un point de vue intragroupe, Radwan (2004) explique que la chanson Shine (une pièce de musique chrétienne contemporaine) permet à des adolescents de définir leur identité religieuse. Mary Gill (1990), quant à elle, analyse les chansons d’Amy Grant, la reine du gospel, afin de déterminer si le contenu de celles-ci reflète des principes chrétiens traditionnels. Un travail similaire a aussi été entrepris par Falardeau et Perreault (2014) à l’aide d’un corpus de 65 numéros 1 du palmarès américain Christian Songs de 2003 à 2011. Les résultats de cette dernière étude démontrent que la musique rock chrétienne semble être un reflet de l’individualisme aux États-Unis.

D’un point de vue intergroupe, Dovring (1954-1955) confirme qu’une analyse de contenu des chansons de Zion (un recueil de 90 hymnes religieuses publiées en Suède en 1743) effectuée au xviiie siècle a mis en relation deux identités sociales distinctes, soit celle de l’Église luthérienne et celle de l’Église morave. Plus récemment, Moberg (2012), dans sa recension des écrits à propos du rock heavy metal, suggère que les thèmes identifiés dans les paroles de chansons de ce genre comme le satanisme s’opposent à une vision socialement valorisée de la religion. Finalement, l’étude du Black Sacred Music démontre l’importance d’étudier cet acte de communication par l’entremise de son contenu et la relation qui en découle (Hamilton et al. 2013). À cet effet, le contenu de ces chansons traite, entre autres, d’espoir et de libération de l’homme noir (voir aussi Hatch 2002).

Il est à noter que les deux tendances relationnelles qui se dégagent des analyses de contenu des chansons comportant des messages religieux peuvent être revues à la lumière de l’identité religieuse. Comme le mentionnent Nelson et Woods (2011), étant relationnelle, l’identité religieuse d’un groupe peut s’étudier avec l’aide des différents messages transmis par les médias. Dans cette optique, le sens partagé des messages que l’on retrouve dans les paroles de chansons qui traitent de la religion (Messner et al. 2007) ou l’adhérence aux mêmes représentations sociales par rapport à la religion (Moscovici 1991) permet aux personnes qui écoutent ce type de chansons de se catégoriser en tant que membre d’un groupe et d’évaluer qui est effectivement membre de leur groupe. Cette catégorisation permet aussi d’éliminer les différences individuelles, créant ainsi deux grands groupes, « eux » contre « nous ». L’identité sociale d’un individu découle de ce travail cognitif et s’active par le contexte intergroupe qui prévaut. Des conséquences sociales négatives peuvent même en résulter selon la polarisation intergroupe qui s’ensuit (Tajfel et Turner 1986).

En guise de résumé, l’analyse de contenu s’est avérée pour plusieurs chercheurs une méthode de recherche fort utile afin de déceler les messages à caractère religieux qui se retrouvent dans les paroles de chansons et les médias en général (Nelson et Woods 2011). Elle a aussi permis aux scientifiques qui l’ont adoptée de démontrer que les paroles de chansons contiennent des référents religieux qui sont des indicateurs de construits socialement partagés comme la culture, l’identité ou les valeurs d’un groupe.

2. Problématique de recherche : l’hymne national comme vecteur de contenu religieux

De la chanson populaire à celle provenant d’un genre indéniablement religieux, plusieurs sortes de chansons ont fait l’objet d’une analyse de contenu de leurs paroles à propos de la religion. Les hymnes nationaux ne font pas exception à cette règle. Étudiés à l’aide de différentes disciplines scientifiques telles la communication, l’histoire, la musicologie et la psychologie, les hymnes nationaux ont suscité différentes classifications afin de les cataloguer. Par exemple, Maugendre (1996) propose dans son analyse historique et musicale des hymnes nationaux de l’Europe qu’il est possible de les classifier[3] comme étant militaires, un hommage à un souverain, une invocation à la nature, une exaltation d’une caractéristique propre à une nation comme son histoire ou d’inspiration populaire ou religieuse (voir aussi à ce sujet Cloet et al. 2013).

Dans son analyse de 195 hymnes nationaux, Cara (2004) abonde dans le même sens que Maugendre (1996). L’auteur explique lui aussi que la religion est, entre autres, un des thèmes que l’on retrouve le plus souvent dans les hymnes nationaux. Pour ce journaliste, l’hymne national impose des valeurs communes et permet aux citoyens de se définir et de s’identifier à la nation. Les hymnes nationaux semblent donc jouer un rôle symbolique important auprès des citoyens (Merriam 1964) et peuvent être considérés comme un reflet de la culture ou de l’identité nationale d’un pays (Cerulo 1995). À cet effet, Guèvremont, Perreault et Taylor (2016) ont démontré que l’expression des valeurs culturelles de Schwartz (1999), dans les paroles des hymnes nationaux, diffère d’un pays à l’autre. Leur analyse de contenu a d’ailleurs permis de déterminer que le conservatisme est la valeur culturelle de Schwartz (1999) la plus présente dans les paroles d’hymnes nationaux du monde. Comme le conservatisme est associé à la religion (Gorsuch 1988) et que le système religieux en place dans un pays a été invoqué comme expliquant les valeurs retrouvées dans les hymnes nationaux par Guèvremont et ses collègues (2016), il semble donc important de cerner plus précisément comment l’identité religieuse d’un pays se décline, et ce, à partir des relations présentes dans ce type de chansons.

Comme nous l’avons mentionné plus haut, différents contextes relationnels prévalent lorsque l’on examine les paroles de chansons ayant pour message la religion. À titre de rappel, notre recension des écrits indique que ces contextes peuvent être le reflet d’une dynamique intragroupe ou intergroupe. Pourtant, le contenu religieux de toutes les chansons des différentes analyses de contenu que nous avons recensé semble aussi être le reflet d’une interaction parasociale (Giles 2002). À titre de précision, une interaction parasociale implique qu’une personne (ou un groupe de personnes) ait une relation par l’entremise des médias avec une personne qu’elle n’a jamais rencontrée. Cette personne peut exister (lecteur de nouvelles) ou non (superhéros d’une bande dessinée). Appliquée à notre objet d’étude, chaque fois qu’un citoyen d’un pays chante ou interagit avec l’hymne national, une relation parasociale se crée avec Dieu, du moins lorsqu’il est présent dans les paroles (Auter et Lane 1999). Cette relation permet donc aux citoyens de construire leur identité religieuse et, de notre point de vue, d’affirmer que celle-ci se résume à plus qu’une simple relation intragroupe ou intergroupe. Le but de cette étude est donc d’étudier les paroles des hymnes nationaux par l’entremise des messages émis à propos de la religion afin d’y dresser le portrait des relations qui existent au sein des paroles d’hymnes nationaux.

3. Méthode

Nous avons analysé la version anglophone de chacun des hymnes nationaux (N=195[4]) tirés de l’ouvrage de Bristow (2006), intitulé National Anthems of the World. L’utilisation de cette source d’information se justifie par le fait que les hymnes nationaux étaient dans une langue que nous pouvions comprendre et analyser et qu’elle avait aussi servi à analyser les valeurs exprimées dans les paroles de ceux-ci (Guèvremont et al. 2016). La codification des paroles a donc été réalisée de manière à obtenir un consensus entre deux codeurs. Nous nous sommes attardés à l’aspect religieux des hymnes, c’est-à-dire si un hymne référait directement à une entité religieuse (telle God ou Lord), s’il comportait plutôt des connotations religieuses (telles les actions de prier ou de bénir) ou si les paroles de l’hymne n’évoquaient en rien des aspects religieux. Ce premier codage qualitatif était similaire à celui de Livengood et Ledoux Book (2004). Nous avons aussi croisé ces données avec la religion la plus pratiquée dans chaque pays, et ce, à l’aide du rapport du Pew Research Center[5]. Par la suite, nous avons procédé à un deuxième codage qualitatif, puisque nous avons constaté que les paroles des hymnes nationaux faisaient état, entre autres, de relations avec le pays et Dieu.

Puis, dans le but d’affiner davantage nos résultats, nous avons analysé les thématiques véhiculées dans les paroles des 195 hymnes de manière inductive à partir de la dichotomie présence ou non de Dieu dans les paroles de ce type de chansons. Cela nous a permis de cerner davantage la complexité des thématiques véhiculées dans les paroles (Blais et Martineau 2006), et ce, à l’égard de deux relations parasociales. En effet, à cette étape, nous avons effectué une « lecture détaillée des données brutes pour faire émerger des catégories » (Blais et Martineau 2006, 3).

4. Résultats et Discussion

Cette partie de notre article se subdivise en quatre sections. Dans la première section est présenté le portait quantitatif de notre stratégie initiale de codage. Dans la deuxième section, nous esquissons un portrait qualitatif des relations présentes dans l’ensemble des hymnes nationaux. Dans la troisième section, nous exhibons cinq catégories répertoriées dans les paroles des hymnes ne s’adressant pas à une entité religieuse (soit la patrie, le drapeau, l’histoire/le passé, les citoyens et la guerre) dans le but d’expliciter la relation parasociale existant entre une nation et ses citoyens. Finalement, en lien avec les hymnes dont les paroles s’adressent à Dieu, nous explicitons la nature des relations et les spécificités que revêt l’entité religieuse dans le cadre de ce type de chansons.

4.1 Le portrait quantitatif des hymnes nationaux

Quantitativement (voir le Tableau 1), notre codage initial nous permet de préciser que 47 % (91/195) des hymnes nationaux font spécifiquement référence à une entité religieuse, 19 % (38/195) d’entre eux comportent des connotations religieuses et 34 % (66/195) ne contiennent aucun référent religieux. Lorsque l’on croise ce codage avec la religion pratiquée dans un pays[6], il est aussi possible de remarquer que la mention d’une entité religieuse dans les hymnes nationaux est présente dans quasiment toutes les religions du monde. Aussi, d’un point de vue absolu, ce sont les pays « chrétiens » et « musulmans » qui parlent d’une entité suprême dans leurs paroles d’hymnes nationaux. Finalement, si l’on combine les deux rubriques (entité religieuse et connotations religieuses), nos résultats appuient les propos de Cara (2004) qui affirment que la religion est le thème le plus présent dans les hymnes nationaux.

Tableau 1

Croisement entre le contenu religieux des hymnes et la religion pratiquée dans un pays

Croisement entre le contenu religieux des hymnes et la religion pratiquée dans un pays

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Ces premiers résultats sont intéressants parce que l’analyse de contenu des paroles des hymnes nationaux confirme la présence d’une entité religieuse avec qui l’on peut avoir une relation parasociale au sein des textes de certains chants nationaux. Le résultat qu’aucun référent religieux ne soit présent dans certains hymnes nationaux est tout aussi intéressant, parce qu’il laisse présager que d’autres relations sont impliquées dans la construction de l’identité nationale. Cette interprétation semble plausible, étant donné les différents éléments qui caractérisent les classifications des hymnes nationaux (Cara 2004 ; Cloet et al. 2013 ; Maugendre 1996). Nous déclinerons celles-ci dans les prochaines sections.

4.2 Déclinaisons des relations présentes dans l’ensemble des hymnes nationaux

Chaque hymne national semble conçu de manière à parler spécifiquement à quelqu’un ou à quelque chose. En fait, quatre types de relations semblent être présents dans les paroles de ces chansons lorsque l’on examine celles-ci dans leur ensemble. Il apparaît que certains hymnes s’adressent à l’endogroupe, c’est-à-dire que l’hymne chanté par les citoyens s’adresse aux individus du pays concerné par l’hymne. Les paroles de l’hymne de la République démocratique du Congo, adopté officiellement en 1997, expriment cette idée : « Rise up Congolese, united in destiny […] Raise your heads, which were bent low for so long ». Dans cet extrait, il est possible de constater que l’hymne vise à unir les citoyens et à leur redonner confiance en eux. D’un autre côté, les paroles des hymnes nationaux sont également destinées à l’exogroupe, tels les autres pays et les citoyens de ces pays. Cet extrait : « The Lao people of all origins are equal, and will no longer allow imperialists and traitors to harm them. The entire people will safeguard the independence and the freedom of the Lao nation », tiré de l’hymne national du Laos (d’abord adopté en 1947, puis modifié en 1975) démontre cette façon de concevoir un hymne afin de raconter aux autres qui ils sont.

Nos interprétations laissent aussi entrevoir que des paroles d’hymnes nationaux s’adressent spécifiquement à la terre, à la patrie, à la nation. Dans ces hymnes, la beauté de la nature et de l’environnement est mise de l’avant, tout comme l’amour porté à la nation : « Australians all, let us rejoice […] We’ve golden soil and wealth for toil […] Our land abounds in Nature’s gifts of beauty rich and rare » (hymne national de l’Australie, adopté en 1984). L’accent est ainsi mis sur le pays lui-même et particulièrement sur la splendeur des éléments naturels. Enfin, les paroles des hymnes nationaux renvoient directement à une entité religieuse, prenant la forme, entre autres, de Dieu (God), du Seigneur (Lord), de Buddha (par exemple au Bhoutan), de celui mort sur la croix (en Colombie) et de Freya (la déesse de l’amour et de la beauté au Danemark).

Nous aimerions préciser que ce travail qualitatif effectué auprès de l’ensemble des hymnes nationaux indique que non pas une, mais bien deux relations parasociales sont présentes dans les hymnes nationaux. Bien que les chercheurs ayant étudié la religion dans les paroles de chansons n’aient pas explicitement fait référence au concept de relation parasociale, les travaux de Hamilton et ses collègues (2013), ainsi que ceux de Falardeau et Perreault (2014) corroborent qu’il n’est pas surprenant d’en trouver une. Ce qui est inattendu est le fait que le pays soit anthropomorphisé dans ces oeuvres musicales (Epley et al. 2007). En l’humanisant, il est donc possible d’avoir une relation avec cet objet.

4.3 La relation parasociale avec le pays

Tout comme une personne, un pays semble posséder des qualités, des caractéristiques, des valeurs et des idéaux qui lui sont propres, ainsi qu’une histoire. Nos analyses révèlent cinq thématiques dans les paroles des hymnes nationaux où une entité religieuse n’est pas présente : la patrie, le drapeau, l’histoire/le passé, les citoyens et la guerre.

En lien avec la patrie, les paroles des hymnes nationaux font référence à sa beauté (Australie) et à son immortalité (Guinée-Bissau), mais aussi à l’allégeance (Autriche), à l’amour (France) et à la loyauté (Tunisie) envers celle-ci : « The oath of allegiance to you, our country, our much beloved Austria » (extrait tiré de l’hymne de l’Autriche, adopté en 1947). Nous avons également répertorié des idées se rapprochant davantage de l’importance des traditions (Éthiopie) et des façons de vivre (Qatar) dans cette nation. Enfin, des aspects plus près de la dévotion ont été soulevés : servir l’État (Ghana), prendre sa place dans la famille des nations (Érythrée) et se sacrifier pour la patrie (Émirats arabes unis).

Le drapeau est aussi une thématique qui est apparue lors de notre travail qualitatif. Souvent en lien avec la patrie, il revêt des indicateurs semblables, mais d’autres, distincts. Lorsqu’il est question du drapeau, son aspect physique peut être décrit (Bénin), telle l’explication de ses couleurs et symboles, mais il est également question de se battre pour que celui-ci ne soit pas humilié (Bolivie) ou de remercier ceux qui se sont sacrifiés pour lui (Arménie). Puis, le drapeau est considéré tel un emblème (Honduras) ou encore comme un symbole rappelant la douleur et les pertes du passé : « The flag which has cost us dear with extremes of thirst and pain » (hymne du Djibouti, adopté en 1977).

Le drapeau n’est pas le seul élément à référer au passé ou à l’histoire d’un pays et de ses habitants. Dans certains hymnes, les paroles réfèrent à des événements qui ont marqué la patrie et qui justifient aujourd’hui son existence. Notamment, l’esclavage est abordé : « Under a warlike menace of death, you broke your chains of slavery. No country deserves to be free if it is an indolent and servile slave » (extrait tiré de l’hymne national de la République dominicaine, composé en 1883). Un autre aspect lié au passé ou à l’histoire d’une nation est la référence aux ancêtres. Qu’il soit question des prouesses de ceux-ci (Bénin) ou du règne des monarques (Andorre), ils ont influé sur le présent de la patrie.

Dans les paroles des hymnes nationaux qui n’incluent pas un être suprême, on y présente aussi les citoyens actuels d’une nation et les idéaux à promouvoir. Entre autres, dans l’hymne du Sénégal, l’acceptation de tous est valorisée alors que l’unité, le respect et la dignité le sont davantage dans les paroles de l’hymne de la République centrafricaine. La famille et l’amitié (Bélarus) sont également des aspects abordés dans les textes, de même que l’importance de peupler la patrie (République démocratique du Congo, hymne adopté en 1997) : « Congo, our much loved country, we shall populate your land ». Enfin, l’éloge des citoyens est fait dans certains autres hymnes, tel celui du Portugal.

La thématique de la guerre a également été constatée dans les paroles de cette catégorie d’hymnes nationaux. Souvent évoquées pour mettre de l’avant les apports et les enjeux de celle-ci pour le pays, des idées de vengeance et de démonstration de pouvoir sont aussi partagées dans les paroles : « We are soldiers in revolt for truth and we have fought for our independence. When we spoke, nobody listened to us, so we have taken the noise of gunpowder as our rhythm and the sound of machine-guns as our melody » (extrait tiré de l’hymne de l’Algérie, adopté en 1963). Dans cet hymne, il est question pour les citoyens de l’Algérie de se faire entendre des autres nations et de souligner la révolte. Néanmoins, les hymnes traitant des apports et des enjeux de la guerre, ou du moins d’une bataille, laissent entendre qu’elle a été nécessaire pour la liberté d’une nation (Albanie), pour la paix (Angola), pour le bien-être des enfants (République démocratique du Congo), pour honorer les ancêtres (Albanie), pour le progrès (Thaïlande), mais aussi pour la gloire (Argentine).

Dans ce portrait descriptif des éléments qui caractérisent le pays, il est évident que, dans les paroles des hymnes nationaux, des relations intragroupes et intergroupes sont enchevêtrées avec la relation entretenue avec le pays. Ce constat n’a rien d’étonnant si l’on considère que le territoire est la base de l’identité personnelle et collective (Picard 2008). Prêter allégeance à son drapeau, servir son pays ou se battre pour lui sont des indicateurs relationnels qui façonnent l’identité nationale des citoyens d’une manière intragroupe et intergroupe. D’ailleurs, cela explique pourquoi les citoyens sont prêts à défendre leur patrie. En somme, en la défendant, ils protègent leur identité et l’affichent clairement aux autres. Comme le mentionne Picard (2008, 88) : « nous sommes très attachés à nos propres représentations et nous supportons assez mal de les voir remises en question par les autres ».

Pourtant, ce chevauchement entre ces trois types de relations n’explique pas la forme que prend la relation parasociale entre les citoyens et leur pays dans les paroles de leur hymne national. Nous attaquerons cette question dans la prochaine section étant donné le parallèle que l’on peut faire entre la relation parasociale et Dieu, et que l’on retrouve dans les paroles d’hymnes nationaux qui incluent un être suprême dans celles-ci.

4.4 La relation parasociale avec une entité religieuse

Sans s’inscrire en rapport avec une entité religieuse, les paroles de certains hymnes nationaux comportent néanmoins des connotations liées à la religion dans leurs textes. À cet effet, nous avons remarqué que des termes, tels que « terre sacrée » et « autel » (Guatemala), « prêtre » (Roumanie), « foi », « saint » et « paradis » (Cambodge) et des actions telles que « prier » et « bénir » (Indonésie) sont présents dans les paroles des hymnes qui ne renvoient pas directement à un être suprême. Notamment, l’hymne de la Roumanie exprime que son armée est chrétienne. Dans le texte du Qatar, il est question de suivre le rayonnement des apôtres : « Track the footsteps of forefathers and the glow of apostles ». À l’inverse, certains hymnes s’attardent au fait de défier le mal, tel que dans les paroles de l’hymne du Sénégal » (hymne adopté en 1960) : « A people in its faith defying all evil ». La relation parasociale avec Dieu qui englobe le contenu de ces hymnes nationaux semble floue, ce qui fait en sorte qu’il est plus difficile de l’expliciter. Cette difficulté d’explicitation est peut-être due au fait que la relation parasociale avec l’être suprême dans ces pays est moins valorisée, mais cette hypothèse reste toutefois à vérifier.

D’un point de vue relationnel, nos interprétations des paroles des hymnes nationaux incluant une entité religieuse indiquent que les interactions avec elle se déclinent de plusieurs façons. Plusieurs « visages » sont attribués à une entité religieuse, parfois considérée comme au-dessus de tout et de tous, parfois comme un collaborateur ou un associé du pays et de ses citoyens.

Nous soulevons qu’une entité religieuse est considérée au-dessus de tout et de tous dans l’optique où les citoyens la considèrent de cette façon. La perception que renvoient les paroles des hymnes en est une de foi absolue. Ainsi, l’entité religieuse est un leader (Iran) et les citoyens, ses disciples : « Be a helper for God and censure what is forbidden » (Mauritanie, hymne adopté en 1960). Dans cet extrait, il n’est pas considéré de remettre en question ce que Dieu veut. Il est plutôt valorisé de suivre ce qu’il détermine comme étant bon pour les habitants du pays. Au Soudan et en Afghanistan, les citoyens se considèrent davantage comme une « armée de Dieu » prête à le suivre dans tous ses combats. L’être suprême est aussi un emblème (Maroc) au même titre que le sont la patrie et le roi.

De surcroît, il a été observé que les paroles des hymnes impliquent que l’entité religieuse a le contrôle absolu sur les citoyens et que ceux-ci lui seront fidèles en échange de protection : « Oh God of the valiant ! Take our rights and our life under your infinite protection » (extrait tiré de l’hymne d’Haïti, adopté en 1904). En ce sens, les demandes faites à l’entité religieuse ne sont pas à l’égard du pays ou de la terre, mais semblent plutôt provenir de supplications pour continuer à vivre. Au Tuvalu, il est aussi question du fait que Dieu est le Tout-Puissant qui gouverne du haut des cieux et aux États-Unis, les citoyens ont confiance en lui. Dans les deux cas, tous les citoyens partagent cette connaissance. L’entité religieuse semble ainsi servir à unifier les citoyens et à présenter une vision commune du pays.

Dans certains cas, le contenu de l’hymne national incluant une entité religieuse s’adresse aux compatriotes du même pays, aux individus des autres pays, ou encore à la terre, à la patrie. Les paroles affirment que l’être suprême est supérieur (Arabie saoudite) sans demander ou souhaiter que celui-ci intervienne : « God observed and accepted the sacrifice and that blood was the prolific seed of other heroes whom the world in astonishment saw » (extrait tiré de l’hymne de l’Équateur, adopté en 1948). Dans cet extrait, l’action passive de Dieu a tout de même engendré des répercussions, mais celui-ci n’a pas été sollicité spécifiquement. D’un point de vue plus actif, Dieu est perçu tel un créateur (Italie) pouvant maintenant bénir la terre natale et ses citoyens. En effet, en Hongrie, il est spécifiquement demandé à Dieu de bénir les Hongrois et Hongroises. Au Kenya (hymne adopté en 1963), la bénédiction de la terre et de la nation est plutôt sollicitée : « O God of all creation, bless this our land and nation ». Une demande similaire est faite dans les paroles de l’hymne national du Bostwana (hymne adopté en 1966) : « Blessed be this noble land, gift to us from God’s strong hand », ainsi que dans ceux de l’Afrique du Sud et de Fidji. Sous forme de prière, il apparaît aussi être souhaité que l’entité bénisse le pays (Corée du Sud) et rende grâce à la patrie (Gibraltar).

Dans les paroles de certains hymnes nationaux incluant une entité religieuse, nous avons remarqué qu’il est aussi demandé à celle-ci de protéger le pays : « God of our forefathers protect and bless for ever Marshall Island » (hymne des Îles Marshall, adopté en 1991). Une demande similaire est faite dans l’hymne national du Chad (hymne adopté en 1960) : « Oh my country, may God protect you ». Au Canada (hymne adopté en 1980), il est souhaité que Dieu protège la liberté et la gloire du pays : « God keep our land glorious and free ». Il peut aussi se faire protecteur du pays (Chad) ou des citoyens (Émirats arabes unis) ainsi que défendeur de la patrie : « God defend our free land from dissension, envy, hate and corruption » (Nouvelle-Zélande, hymne adopté en 1940). Dans ces cas, la conservation de la terre natale est priorisée au détriment des habitants, et il est demandé à l’entité religieuse d’user de son autorité pour aider le pays ou perpétuer ce qui est considéré comme bénéfique. Une variante de la demande de protection est celle émise par l’attribution de la caractéristique de bouclier à l’entité religieuse (Pays-Bas). Elle est sollicitée telle une gardienne et est même remerciée d’avoir joué ce rôle ; notamment de la protection qu’elle a offerte pendant les périodes difficiles qu’une nation a dû affronter (Norvège).

L’entité religieuse est aussi présentée comme étant une figure d’aide, et ce, pour plusieurs raisons. Entre autres, elle peut être un accompagnateur pour les citoyens lors de moments difficiles ou charnières (Saint-Kitts-et-Nevis). Dans le même sens, Dieu est un guide : « The Lord has been the people’s guide for the past three hundred years. With Him still on the people’s side we have no doubts or fears » (extrait tiré de l’hymne de la Barbade, adopté en 1966). Mais aussi, Dieu est le bout du chemin à atteindre (Bahamas) et, au Comores, une aide éternelle. Le Seigneur semble encourager les citoyens et leur donner confiance en eux-mêmes pour affronter toutes les situations se présentant à eux. Il apparaît aussi comme un sauveur (Brunéi Darussalam) et un « donneur ». Cette dernière spécificité s’apparente au fait de donner une terre à des individus (Burundi), la croyance que le Seigneur a donné la beauté de la terre, tel dans l’hymne national du Chili, mais aussi la grâce à Gibraltar.

Dans d’autres cas, les demandes d’aide faites à l’entité religieuse proviennent des citoyens et sont à leur égard. Par exemple, les citoyens demandent l’aide de l’être suprême pour que celui-ci les rende plus forts : « Give us strength, faith, loyalty, never failing, all enduring to defend her liberty » (Antigua-et-Barbuda, adopté en 1981). Il semble que dans les paroles de cette catégorie d’hymnes nationaux, la force de l’entité soit le secret de la loyauté des citoyens (Gambie). Les paroles de certains hymnes nationaux expriment une demande pour de la guidance et de l’aide aux futures générations, pour que celles-ci connaissent la vérité sur l’histoire du pays (Nigeria). Au Royaume-Uni, l’être suprême est sollicité afin de sauver la reine ou encore, tel que dans l’hymne du Tonga, d’entendre les prières des citoyens.

Ces différents visages de l’entité religieuse sont associés à différentes relations parasociales qui peuvent à leur tour permettre d’énoncer la signification d’une identité religieuse sous-jacente à un pays. Néanmoins, aux fins du principe de parcimonie scientifique, une analyse plus fine de nos résultats indique la présence d’une relation parasociale asymétrique complémentaire entre l’entité religieuse et les citoyens de différents pays. En d’autres mots, l’entité religieuse a plus de pouvoir que les citoyens, et l’entité religieuse et les citoyens se comportent d’une manière à justifier le comportement de l’autre. À cet effet, dans les paroles des hymnes nationaux, l’entité religieuse agit comme un père qui protège, conseille et récompense ses enfants. En retour, les citoyens (ses enfants) font des demandes à l’entité religieuse (DesCamp et Sweetser 2005).

Comme nous l’avions annoncé dans la section 4.3, notons que, tout comme pour l’entité religieuse, un cadre référentiel masculin est utilisé pour décrire la relation parasociale exprimée dans les paroles des hymnes nationaux entre le pays et ses citoyens. Nous croyons pertinent de soulever ce point dans cette section de notre article parce qu’il nous permet d’apporter des nuances à nos interprétations qualitatives présentées plus haut et de faire le lien avec les plus récentes. La première nuance a trait au mot fatherland qui semble caractériser 29 pays[7] comme un père dans les paroles des hymnes nationaux. Nous utilisons la formule « il semble » parce que, lorsque l’on traduit ce terme, il est possible de le faire par l’expression « mère patrie » en français. Il se peut donc que la traduction influence le sens de la relation que nous induisons à partir des paroles des hymnes nationaux[8]. En revanche, et ce, peu importe le genre du terme que l’on associe avec le mot pays, les paroles des hymnes nationaux suggèrent que la relation entre le pays et ses citoyens est asymétrique. Comme deuxième nuance à apporter à nos analyses antérieures, nous aimerions spécifier qu’a posteriori le type de relation parasociale proposé entre l’être suprême et les citoyens d’un pays semble s’appliquer aux hymnes nationaux avec des référents religieux sans mention de l’être suprême. Certains référents sont masculins (prêtre et apôtres) et certaines actions (bénir et prier) renvoient à l’aspect asymétrique et complémentaire de la relation. Une troisième nuance est qu’il se peut qu’un pays soit considéré comme une entité religieuse par ses citoyens et c’est pourquoi une telle relation parasociale apparaît dans les paroles de ce type d’hymne national. N’étant pas théologiens, nous admettons qu’un tel éclaircissement pourrait être réalisé dans une prochaine étude. La dernière nuance, quant à elle, se rapporte à l’interprétation que l’on fait du lien entre une entité religieuse et un pays. Si l’entité religieuse a bel et bien créé le monde, en exprimant une relation parasociale avec le pays dans les paroles des hymnes nationaux, une relation parasociale avec une entité religieuse est aussi exprimée indirectement. Cet argument pourrait donc expliquer la consonance asymétrique et parentale des deux relations parasociales.

Force est de constater qu’il est possible de voir que l’identité religieuse, construite à l’aide de relations parasociales, se consolide à travers des relations sociales. D’un point de vue intragroupe, il est important que ce que l’on dit dans les paroles des hymnes nationaux à propos de Dieu et les relations qui en découlent soient conformes à l’identité religieuse du pays. Comme le mentionne DesCamp et Sweetser (2005), l’important pour qu’une métaphore relative à une entité religieuse (Dieu dans leur cas) fonctionne est qu’elle fasse partie de la culture populaire. Pour qu’elle en fasse partie, elle doit être utilisée d’une manière récurrente afin de devenir une « monnaie culturelle ». Si ce n’est pas le cas, il devrait y avoir des pressions de la part des citoyens afin de changer le contenu. C’est d’ailleurs le cas au Canada où l’on se questionne à savoir si le mot Dieu dans la version anglophone de l’hymne national canadien a sa place[9]. D’un point de vue intergroupe, l’identité religieuse peut, quant à elle, se consolider, par exemple, lorsque l’on chante l’hymne national en présence des citoyens d’un pays qui ne partagent pas la même vision que celle esquissée dans les paroles de ce type de chansons.

Conclusion

Le fait que quatre types de relations (intragroupe, intergroupe, avec le pays et avec Dieu) soient présents dans les paroles des hymnes nationaux confirme que l’identité sociale se narre à travers les médias (László 2008 ; 2014). Certes, il faut mentionner que le nombre de relations trouvées est potentiellement tributaire de la longueur de l’hymne national ou de la traduction des hymnes, ceux-ci étant traduits en anglais. Néanmoins, nos résultats nous amènent à considérer la place de l’identité religieuse au sein de l’identité nationale. En lien avec la notion de représentation sociale, en est-elle le noyau central ou l’élément périphérique (Abric 1993 ; 2001) ? Dans le cas où l’hymne national d’un pays ne parle que de religion, elle fait probablement partie du noyau central de la représentation sociale de l’identité d’un pays. À titre de rappel, les représentations sociales offrent un cadre de référence à un groupe donné, cadre qui peut aider à cerner la culture d’un groupe (Laplante et al. 2014) et son comportement (Rateau et al. 2011). De futures études pourront aussi vérifier comment l’identité religieuse (et les relations parasociales qui la sous-tendent) est associée à la diversité religieuse d’un pays ou à des variables culturelles telles que le pouvoir, le collectivisme, l’évitement de l’incertitude et la masculinité (Hofstede 1984) afin d’en déterminer les corrélats.

Comme mot de la fin, nous aimerions terminer cet article en parlant de trois limites associées à notre étude, soit l’utilisation des données du Pew Research Center, la musique qui accompagne les paroles de leur hymne national et les modifications apportées aux hymnes nationaux par leur pays d’origine. À cet effet, il est nécessaire de signaler que les données du Pew Research Center permettant de préciser la religion pratiquée par un pays ne reflètent pas nécessairement la religion qui était la plus pratiquée au moment où l’hymne national a été écrit. Un deuxième facteur que nous n’avons pas considéré dans notre analyse des paroles des hymnes nationaux est la musique qui les accompagne. L’analyse de Maugendre (1996) nous rappelle que les hymnes nationaux sont un phénomène historique, composé à la fois de paroles et de musique. Il est donc possible qu’un hymne national ne fasse pas référence à la religion à l’aide de paroles, mais que d’un point de vue musical, sa mélodie soit conçue d’une manière religieuse. Finalement, dans certains hymnes nationaux, des parties ne sont pas chantées (voir à cet effet l’hymne national des États-Unis) ou ont été enlevées (voir à cet effet l’hymne national de l’Albanie). Nous croyons que de futures études devraient examiner ces modifications afin de documenter quel(s) élément(s) de l’identité nationale (drapeau, événement historique, nature, être suprême, etc.) ne figure(nt) pas dans les paroles de l’hymne.