Abstracts
Résumé
Que tout commerce épistolaire repose sur une pragmatique du don, sur un geste qui, parce que sans garantie de retour, engendre une dette permanente entre les partenaires de l'échange, c'est ce que suggère la lettre de Saint-Denys Garneau écrite à Sainte-Catherine-de-Portneuf le 30 décembre 1932. Là, l'épistolier s'adonne à une intense activité comptable qui a pour effet de conférer à son offrande une valeur inestimable. La présente étude propose de replacer cette pratique du don épistolaire dans le contexte discursif du Québec des années trente, à une époque où le système du don apparaît aux principaux doxographes comme une alternative à la morale utilitariste et à l'économie de marché qui ont précipité le Québec dans la Crise. Profondément engagé dans l'idéologie de son temps, Saint-Denys Garneau fait également figure d'usurier épistolaire, spéculant sur la logique corporatiste du don afin d'amorcer sa carrière d'écrivain.
Abstract
That all epistolary exchange is based on a pragmatic form of giving, on a gesture which, because there is no guarantee of any return, creates a permanent debt between the partners of the exchange — this is what is suggested by Saint-Denys Garneau in the letter written at Sainte-Catherine-de-Portneuf on December 30, 1932. The letter writer undertakes an intense accounting activity which confers a priceless quality on his offering. This article attempts to locate this practice of epistolary giving in the discursive context of Québec in the thirties, at a time when the gift system appeared to major doxographists as an alternative to the utilitarian morality and market economy that had pushed Québec into the Depression. Deeply engaged with the ideology of his time, Saint-Denys Garneau also appears as an epistolary usurer, speculating on the corporatist logic of the gift in order to launch his own writing career.
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