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1. Introduction

Il est largement démontré que les pratiques des professionnels de l’enseignement et de la formation sont façonnées par les croyances qu’ils se constituent au fur et à mesure de leur vie à propos d’un ou de plusieurs savoirs (Boraita et Crahay, 2013; Hanin et al., 2020, 2022; Sénéchal, 2020; Therriault et al., 2020). Pour eux, la connaissance du «rapport à» de leurs apprenants peut être un levier d’enseignement ou de formation important (Barré-De Miniac, 2015; Blaser et al., 2015; Lafont-Terranova et Niwese, 2016) et influencer leurs choix pédagogiques et didactiques. Par «rapport à», nous entendons «la disposition d’un sujet pour un objet social […], historiquement construit, et pour sa mise en oeuvre dans sa vie personnelle, culturelle, sociale et professionnelle» (Chartrand et Prince, 2009, p. 320).

Jusqu’à présent, en didactique des langues, ce «rapport à» a princi-palement été étudié à travers l’écrit, l’intérêt étant de mettre en exergue sa valeur euristique (Schneuwly, 2008), à savoir «d’où vient le sens donné à l’activité d’écriture et comment se construit-il?» (p. 135). Documentée dans des écrits scientifiques essentiellement francophones, la notion de «rapport à l’écrit», sa modélisation et ses dimensions constitutives ont été déterminées de façon théorique, et n’ont pas, à notre connaissance, été mises à l’épreuve à l’aide d’études psychométriques pour valider le construit et sa dimensionnalité. Une telle clarification contribuerait à préciser les référents et à stabiliser le statut de cette notion. En ce qui concerne l’oral, il n’existe que très peu de travaux sur la question du «rapport à». Ce n’est que depuis très récemment que des recherches en didactique de l’oral se sont emparées du sujet didactique lui-même (Stordeur et al., sous presse). À notre connaissance, seule Sénéchal (2020) a proposé un premier rapprochement des dimensions du rapport à l’écrit vers le «rapport à l’oral».

C’est donc mus par cette volonté d’explicitation que nous avons voulu, dans un premier temps, développer un construit valide et fiable pour catégoriser et mesurer le «rapport à l’oral» des (futurs) enseignantes et enseignants et, dans un second temps, proposer des adaptations en vue de proposer un outil similaire pour des élèves. Ainsi, l’objectif de notre travail est de mettre au point une échelle psychométrique, entendue comme une manifestation de concepts latents; [mesurant] des comportements, des attitudes et des scénarios hypothétiques que nous nous attendons à voir exister en raison de notre compréhension théorique du monde, mais que nous ne pouvons pas évaluer directement (Boateng et al., 2018, p. 149). Par cette échelle, baptisée ÉRO (Échelle du Rapport à l’Oral), nous cherchons à modéliser le «rapport à l’oral» des (futures) personnes enseignantes[1] et ses dimensions constituantes. Il s’agit d’un projet d’envergure, d’une durée de trois ans, qui rassemble des expertises et des investigations provenant de Belgique, de France, du Québec, des Pays-Bas et de la Suisse romande.

Notre propos se structure donc en suivant les étapes de notre processus de recherche et non comme un article empirique classique. Ainsi, dans les lignes suivantes, nous présentons les grandes étapes du développement de notre échelle, à partir desquelles nous détaillons les résultats des premières étapes, soit la description préliminaire du domaine et des dimensions spécifiques, fondée sur une approche déductive puis inductive. Nous terminons en annonçant nos perspectives de travail, c’est-à-dire ce qui est prévu pour les étapes suivantes du projet.

2. Les étapes de la construction d’une Échelle du Rapport à l’Oral des enseignants

Selon Hinkin (1995), la création d’une échelle rigoureuse comporte trois grandes phases: le développement d’items, le développement de l’échelle et l’évaluation de l’échelle. Ces trois phases sont elles-mêmes découpées en plusieurs étapes. Suivant les recommandations complémentaires de Boateng et al. (2018), nous avons conçu un calendrier de recherche, détaillé dans le tableau 1. Les étapes rapportées dans ce texte sont en grisé.

Ainsi, la première phase consiste à développer les items de l’échelle. Cette phase comporte trois étapes qui sont présentées dans les sections suivantes:

  1. la description du domaine («le rapport à», l’oral);

  2. une démarche déductive prenant la forme d’une revue de la littérature qui met en évidence les aspects sur lesquels s’appuyer pour construire les items (le «rapport à l’écrit» et les liens/différences entre écrit et oral);

  3. une démarche inductive amenant à s’entretenir avec les destinataires de l’échelle (personnes enseignantes/formatrices) dans une optique d’exploration, complémentaire à la littérature.

Tableau 1

Phases et étapes de développement de ÉRO (Échelle du Rapport à l’Oral), sur la base des recommandations de Boateng et al. (2018)

Phases et étapes de développement de ÉRO (Échelle du Rapport à l’Oral), sur la base des recommandations de Boateng et al. (2018)

* Le développement de l’échelle passe par une validation nationale dans un premier temps pour ensuite être testée et validée internationalement. La première étape est réalisée dans le pays du porteur du projet, en Belgique.

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2.1 La description du domaine

Le domaine que nous souhaitons éclairer est le «rapport à l’oral». Nous synthétisons donc, dans cette section, ce que nous entendons par «oral» et par «rapport à».

2.1.1 L’oral

L’oral fait référence au «langage parlé, réalisé grâce à l’appareil phonatoire humain» (Dolz et Schneuwly, 2016, p. 51). Il comprend à la fois la production de discours oraux et la compréhension de ceux-ci (Colognesi et Deschepper, 2019; Garcia-Debanc, 2016). Il s’agit autant de discours en direct (conversation, débat, etc.) qu’en différé (enregistrement), en face à face ou à distance, monogérés (un seul locuteur prend la parole) ou polygérés (la parole est partagée) (Dumais, 2014; Grandaty, 2001). Des auteurs comme Garcia-Debanc (2016) soulignent que l’oral est protéiforme et proposent de l’aborder au pluriel afin de mieux envisager les différentes acceptions du terme «oral» ou même des variétés d’oraux (langues régionales, langue familière/soutenue/standard). Il existe donc une grande variété de situations de communication orale dont les paramètres dépendent du caractère plus ou moins intime, plus ou moins formel, plus ou moins planifié de la parole, du degré de liberté conféré aux énonciateurs, de leur nombre, et de l’aspect simultané ou non de la communication (Koch et Oesterreicher, 2001).

À l’école, l’oral prend deux principales formes (Lafontaine, 2007). Dans la première, la production orale a un caractère plus ou moins formel: il s’agit d’un oral souvent préparé, monogéré, où il peut y avoir eu des mises en pratique au préalable, occasionnant peu d’interactions entre les interlocuteurs et présentant une syntaxe proche de celle de l’écrit. Dans la deuxième, l’oral est plus ou moins informel et s’inscrit dans des situations interactives entre les personnes. Il est alors caractérisé par la spontanéité et la mobilisation des ressources langagières dans l’immédiateté. Lieu de l’expression et de la négociation, il présente une charge socioaffective forte et requiert «un comportement stratégique très différent de l’oral plus formel» (Lafontaine, 2007, p. 7). Ces deux formes d’oral, réalisées par l’entremise de la parole, sont désignées comme étant l’oral préparé et l’oral spontané (Dumais et al., 2018). Mais dans tous les cas, l’enjeu est de gérer des tâches langagières en fonction des buts discursifs et pragmatiques poursuivis (Colognesi et al., 2023; Dupont et Grandaty, 2018).

2.1.2 Le «rapport à»

Melin (2019) souligne que s’intéresser au «rapport à» invite à interroger le savoir à travers le sens qu’il a pour l’individu. Elle précise que «mettre en avant le rapport au savoir suppose de théoriser autrement la question du lien, qui cesse désormais d’être évident et nécessaire, entre le sujet et la connaissance» (p. 132). Ce lien est déterminé par «un ensemble de relations de sens, et donc de valeur, entre un individu et les processus ou produits du savoir » (Charlot, 1997, p. 93), inhérent à trois grandes dimensions:

  1. la dimension identitaire, qui est liée au vécu individuel du sujet vis-à-vis de l’objet et de son apprentissage;

  2. la dimension épistémique, liée aux connaissances sur l’objet/le savoir et à son apprentissage;

  3. la dimension sociale, qui est liée au vécu du sujet au sein d’une communauté vis-à-vis de l’objet (Charlot, 1997).

Par ailleurs, le rapport au savoir d’un individu ne peut s’envisager qu’en contexte (Reuter et al., 2013): il peut varier en fonction de l’espace dans lequel il est considéré (à la maison ou à l’école, par exemple), il n’est pas figé, il se construit et évolue dans le temps (Caillot, 2014; Charlot, 2006).

En didactique du français, c’est Barré-De Miniac (2000) qui a d’abord conceptualisé le «rapport à l’écriture». Elle le définit comme

l’ensemble des significations construites par le scripteur à propos de l’écriture, de son apprentissage et de ses usages. Significations singulières pour les uns, partagées par le groupe social pour d’autres, le groupe culturel pour d’autres encore. L’ensemble étant de toute manière retravaillé, réorganisé par un sujet unique, ce que désigne le singulier de l’expression rapport à.

Barré-De Miniac, 2000, p. 29

Elle en a dégagé quatre dimensions: l’intérêt pour l’écriture, les conceptions de l’écriture et de son apprentissage, les opinions et attitudes, la verbalisation.

D’autres auteurs, comme Chartrand et Blaser (2008), ont élargi cette notion au «rapport à l’écrit» pour considérer non seulement les pratiques d’écriture, mais aussi celles de lecture, et ce, au-delà de la discipline français. Le «rapport à l’écrit» est alors défini comme «une relation de sens et de signification (au sens vygotskien) entre un sujet singulier, mais aussi nécessairement culturel et social, et l’écrit dans toutes ses dimensions» (p. 111). Dans leur conceptualisation du rapport à l’écrit, Chartrand et Blaser ont étiqueté les dimensions de Barré-De Miniac en parlant de dimension affective, axiologique, et conceptuelle (ou idéelle). De plus, elles ont ajouté une dimension praxéologique, absente chez Barré-De Miniac qui «ne considère pas que les pratiques d’écriture font partie du rapport à l’écriture du sujet, pas plus que du sujet» (Chartrand et Blaser, 2008, p. 113).

Niwese et El Hajj (2020), pour leur part, proposent cinq dimensions qui intègrent différentes théorisations. Il s’agit des dimensions affective, conceptuelle, axiologique, praxéologique et métascriptuale.

Par ailleurs, Mercier et Dezutter (2012) insistent sur le double usage de ce rapport à la lecture/écriture, car ils estiment que la notion permet au personnel enseignant et de la formation de porter un regard critique sur les pratiques des élèves et sur ses propres pratiques, ainsi que sur les dispositifs et objets didactiques. En se fondant sur les travaux de Barré-De Miniac, Mercier et Dezutter distinguent, quant à eux, quatre dimensions, qu’ils considèrent comme constituantes du rapport à la lecture: l’investissement, la conception de l’objet et de son apprentissage, les options et attitudes, le mode de verbalisation. Ils réfèrent d’ailleurs à Émery-Bruneau (2011) qui définit le rapport à la lecture littéraire comme «l’ensemble diversifié de relations dynamiques qu’un sujet-lecteur situé entretient avec la lecture littéraire» (p. 37). Dans tous les cas, le «rapport à» est vu comme un ensemble de relations dynamiques.

2.2 Démarche déductive: revue de la littérature

Pour lier les concepts de «rapport à» et «oral» et déterminer les dimensions du «rapport à l’oral», nous avons d’abord réalisé une revue narrative de la littérature (Baumeister et Leary, 1997; Efron et Ravid, 2019) nous permettant de nous appuyer sur l’existant[2]. Aussi, nous avons étudié les dimensions du rapport à l’écrit et tenté de faire des rapprochements avec l’oral. Nous avons choisi de retenir les dimensions de Niwese et El Hajj (2020): dimension affective, conceptuelle, axiologique, praxéologique et métascripturale. Ceci, car elles actualisent les modèles initiaux du «rapport à l’écrit». En effet, elles s’appuient «d’une part, sur la théorisation française héritée de Barré-De Miniac (2000) et de Penloup (2000) et, d’autre part, sur celle du rapport à l’écrit des théoriciens québécois (Chartrand et Blaser, 2008)» (Colin et al., 2022, p. 132), tout en considérant la dimension «méta» dont on sait qu’elle a une importance majeure en éducation (voir par exemple Allix et al., 2023). Chaque dimension présentée ci-après suit une alternance écrit/oral.

2.2.1 La dimension affective

La dimension affective du «rapport à l’écrit» intègre les sentiments, les émotions, voire les passions entourant l’écrit. Pour Chartrand et Prince (2009), elle «se manifeste par l’investissement affectif en temps, en fréquence et en énergie que le sujet déploie en menant ces pratiques (dans différents contextes) et porte à ses produits (les genres de textes)» (p. 321). Cet investissement peut être caractérisé de deux façons: la force, qui constitue l’intensité de l’investissement; le type, qui «se réfère aux objets, c’est-à-dire aux situations d’écriture et aux types de textes sur lesquels se porte l’investissement plus ou moins fort des scripteurs» (Barré-De Miniac, 2002, p. 12). Chartrand et Prince (2009) qualifient la dimension affective de multifactorielle et, de fait, estiment qu’elle est imbriquée des autres dimensions du rapport à.

Les représentations qu’ont les personnes de l’écrit ont un effet sur la dimension affective (Chartrand et Prince, 2009) et jouent donc un rôle important dans le «rapport à» (Blaser et al., 2015) et l’investissement: par exemple, selon les représentations qu’elle a de l’écrit, une personne sera plus ou moins favorablement disposée à sa pratique. Inversement, ses expériences négatives ou positives relatives à l’écrit alimenteront la construction de ses représentations et transformeront son rapport à l’écrit.

Il semble que cette dimension prenne encore plus d’envergure pour un objet comme l’oral. En effet, la communication orale, de par la complexité de l’acte de production et de compréhension, et la multiplicité des procédures mobilisées lors de la prise ou de la réception de la parole, génère des émotions qui ont une influence forte sur la production (Maître de Pembroke, 2013). Ainsi, la compétence à communiquer oralement fait intervenir une sous-compétence de l’ordre de la régulation émotionnelle (Colognesi et Hanin, 2020; Dumais, 2014). Et le rôle prépondérant de la gestion du corps, du paraverbal et du non-verbal dans la prise de parole rend cette régulation émotionnelle essentielle (Dolz et Schneuwly, 2016; Dumais, 2014; Gagnon et Dolz, 2016).

2.2.2 La dimension conceptuelle

La dimension conceptuelle renvoie aux conceptions que peuvent avoir les personnes de l’écriture et de son apprentissage. Chartrand et Prince (2009) parlent de dimension «idéelle» qui renvoie «aux idées, aux conceptions, aux représentations que se fait le sujet de la place de l’écrit dans la société, de ses usages, de sa ou de ses fonctions dans l’apprentissage en général et, en particulier, dans l’apprentissage scolaire, voire dans chaque discipline scolaire» (p. 321). Dans le cadre de la formation, par exemple, on s’intéresse à l’évolution de ces conceptions pour examiner le passage de conceptions de sens commun aux conceptions scientifiques.

Concernant l’apprentissage de l’écrit, Lafont-Terranova et Colin (2002, 2006) mettent en exergue deux conceptions qui peuvent y être un frein. La première représentation est de croire que l’écriture se réduit à un codage, c’est-à-dire une simple technique de transcription d’une pensée élaborée. Cela peut alors empêcher de «considérer l’écrit comme un mode spécifique de pensée et d’accès à la connaissance» (Lebrun, 2007, p. 394). La deuxième représentation est de croire que l’écriture est un don. Il s’agit de penser qu’écrire ne relève pas de l’apprentissage ni d’un travail particulier, mais qu’on sait écrire ou qu’on ne sait pas. Lebrun (2007) estime que cette conception est «souvent l’héritage de la mythification des oeuvres littéraires dans l’enseignement traditionnel et génère un grand scepticisme par rapport à l’enseignement-apprentissage de l’écriture» (p. 394).

À ce sujet, des études comme celles de Colin (2014) ou de Colognesi et al. (2022) suggèrent que les enseignants du secondaire ont davantage une conception phrastique de l’écriture: ils conçoivent la maîtrise de la langue autour des questions orthographiques ou syntaxiques. En plus, ils conçoivent l’écrit comme un moyen de fixer des informations à retenir et comme un moyen d’évaluation de l’acquisition de connaissances.

Pour l’oral, la question des conceptions scientifiques afférentes pose un certain nombre de problèmes (Nonnon, 1999): quelles sont les compétences spécifiques à l’acquisition de compétences langagières orales? Qu’est-ce qui, par exemple, distingue les processus de compréhension de l’oral de ceux de l’écrit?

Et concernant l’apprentissage de l’oral, il s’avère que certaines conceptions peuvent l’entraver. Premièrement, la conception que l’oral ne s’apprend pas/ne s’enseigne pas dans le milieu scolaire et académique. Celle-ci peut venir du fait que les prises de parole sont liées à l’intime et à l’expression de soi; elles prennent vie dans la sphère familiale ou dans les relations amicales (Dupont et Grandaty, 2016; Gagnon, 2019; Schneuwly et Dolz, 2016). De ce fait, les tentatives d’enseigner l’oral peuvent être vécues comme des intrusions (Rispail, 1995). Mais ne pas faire évoluer cette représentation, c’est faire reposer uniquement sur la famille le développement de la compétence à communiquer oralement (Tricot et Roussel, 2016).

Deuxièmement, la conception que «bien parler» est un don peut aussi être suggérée. En effet, la description de l’oral diffusée par l’école repose sur des corpus qui ne reflètent pas l’ensemble de la diversité linguistique (Gadet et Guérin, 2008). De ce fait, «la langue parlée est explicitée [à l’école] à partir de critères et d’indicateurs propres à l’écrit qui la dévalorisent» (Gagnon et Benzitoun, 2020, p. 40) et l’utilisation de l’écrit comme norme de l’oral conduit à «considérer certaines spécificités légitimes de l’oral comme des erreurs ou des écarts à la norme» (Sénéchal, 2012, p. 22). Ce problème découle du fait que, contrairement à l’écrit normé pratiqué et ciblé, bien circonscrit dans les programmes scolaires, la langue parlée à exercer et à viser n’y est, elle, souvent pas définie finement: à quelle norme se référer pour corriger l’oral des élèves? Quelle structure serait-il préférable de préconiser, de corriger? Quel rôle jouent les représentations métalinguistiques dans l’identification et la correction des «erreurs»? (Surcouf et Gagnon, 2022).

Enfin, le développement langagier s’amorce à l’oral avant le début de la scolarité obligatoire et se poursuit à travers les sphères scolaire, familiale et sociale. Cette acquisition précoce et cette transversalité du langage oral peuvent induire l’idée que les élèves (si l’on fait abstraction des élèves allophones) maîtrisent globalement la communication orale et que, ce faisant, il importe de plutôt privilégier les tâches relevant de la seule responsabilité de l’école (Laparra, 2008).

2.2.3 La dimension axiologique

La dimension axiologique renvoie aux opinions, aux attitudes, aux valeurs et aux comportements que peuvent avoir les personnes par rapport à l’écrit (Niwese et El Hajj, 2020) et qui sont déterminés par les groupes sociaux auxquels appartiennent les individus-scripteurs (Barré-De Miniac, 1997).

Relativement aux travaux sur les avis et les attitudes des personnes vis-à-vis de l’oral, certaines études ont fait valoir l’importance des examens oraux ou l’admiration de certains grands orateurs (Gagnon, 2019) alors que d’autres remettent en question leur pertinence et misent plutôt sur des environnements d’apprentissage plus signifiants (des cours permettant de s’exprimer à l’oral par exemple) pour développer la compétence à communiquer oralement (Messier et al., 2022). Au Québec, les résultats de l’enquête par questionnaire menée dans le cadre de la recherche ÉLEF (État des lieux de l’enseignement du français) en 2008 montrent des avis quelque peu contradictoires à propos de l’oral: paradoxalement, si la communication orale est considérée comme l’activité la moins importante de la classe de français, tant par les enseignants que par les élèves interrogés, le personnel enseignant est plutôt en désaccord avec le fait que «de nos jours, il est plus important de savoir bien écrire que de savoir bien parler» (Sénéchal, 2012, p. 97).

Et concernant l’aspect social, le langage peut avoir la valeur d’un marqueur identitaire lié à une communauté d’appartenance. Ce faisant, pour l’oral, «toutes corrections et remarques linguistiques de la part des enseignants sont le plus souvent vécues comme remises en cause identitaires […], socialement agressives» (Bautier, 1997, p. 13). Cette réflexion intègre, selon le contexte sociolinguistique, une réflexion autour de la norme et des usages, des parlers valorisés ou non, des accents, etc. Par exemple, pour le français oral, la variété dont l’usage est généralement prôné pour son apprentissage comme langue seconde est le français hexagonal, qui ne correspond pas toujours à ce qui est en usage dans le contexte géographique. Les apprenants se voient donc induire l’idée que pour réussir dans la vie ils doivent nécessairement adopter cette variété de français oral. Par conséquent, ils sont à risque de ressentir une forme d’insécurité linguistique, surtout s’ils rencontrent des difficultés dans leurs relations interpersonnelles en raison d’une incapacité à adapter leur discours à la situation de communication, qu’elle soit formelle ou informelle (Beaulieu et Dupoint-Rochette, 2014).

2.2.4 La dimension praxéologique

La dimension praxéologique, qui n’apparaît pas dans les travaux de Barré-De Miniac, a été mise au jour par Chartrand et Blaser (2006, 2008) pour déterminer les liens qu’entretiennent les élèves avec l’écriture (ce qu’ils écrivent, où, de quelle manière et dans quel but). En effet, elle a «trait aux activités concrètes observables des sujets en matière d’écriture et de lecture: ce qu’ils lisent et écrivent, le moment, la manière, le contexte, la finalité» (Chartrand et Prince, 2009, p. 321). Cette dimension réfère également aux pratiques effectives d’enseignement et d’évaluation de la lecture et l’écriture (Blaser et al., 2015).

Colognesi et al. (2022), dans leur étude auprès de personnes enseignantes de sciences de la vie et de la terre et de français au secondaire en France, ont montré que ce qu’elles écrivent le plus, ce sont des documents de travail (supports de cours, documents administratifs) et des courriels, comme l’avaient déjà signalé Cros et al. (2009).

En ce qui concerne l’oral, il semble y avoir un manque de travaux sur ce plan. Il y a donc ici une invitation à explorer ce que disent et écoutent les personnes enseignantes en milieu professionnel, et ce, dans les différentes dimensions de leur socialisation au travail (Coppe et al., 2020), et pas uniquement en classe.

2.2.5 La dimension métascripturale

La dimension métascripturale a été ajoutée au modèle initial à la suite des travaux de Falardeau et Grégoire (2006) ainsi que de Niwese et Basile (2014) pour considérer les aspects liés à la métacognition qui amènent le scripteur à orienter ses actions, planifier son écrit, vérifier et corriger ce qu’il fait, évaluer sa production et le processus d’écriture (Colognesi et al, 2020).

Cette dimension renvoie donc aux verbalisations (Barré-De Miniac, 2000) que les personnes peuvent faire de leurs pratiques d’écriture, leur façon de parler de «leurs démarches d’écriture» (Falardeau et Grégoire, 2006, p. 35). Cette dimension a une importance majeure pour le développement des conceptions de l’écrit et de son apprentissage (Colognesi et Lucchini, 2016).

Puisque pour l’écrit, cette dimension réfère au métascriptural, pour l’oral, on parlera de la dimension métadiscursive. Celle-ci est donc liée aux métaconnaissances sur les processus, les démarches, les savoirs en jeu, etc. (Colin et al., 2022). Elle englobe l’activité métacognitive du sujet en l’invitant à verbaliser ses pratiques, sa démarche, ses choix, l’état de son travail, les difficultés qu’il rencontre et les décisions qu’il prend, etc. (Colognesi et Niwese, 2020).

L’exploration théorique réalisée ici nous donne à penser que les dimensions du rapport à l’écrit pourraient être transférées au rapport à l’oral. Cela sera consolidé dans nos prochaines étapes et synthétisé ensuite (voir figure 1).

2.3 Démarche inductive: entretiens exploratoires

Pour approfondir les dimensions préliminaires issues de notre revue narrative de la littérature, nous avons ensuite eu recours à une démarche inductive. Pour cela, nous avons mené sept entretiens auprès de personnes qui forment les enseignants en Belgique francophone. Ce public a été choisi, d’une part, car les formateurs sont enseignants eux-mêmes et dispensent des cours en lien avec l’oral (cinq enseignent «Maîtrise de la langue écrite et parlée»: SD, TC, CD, DG, MI; deux, «Technique de gestion de groupe et expression orale»: CH, AB; un «Didactique du français»: CE) et, d’autre part, car ils forment les futures personnes enseignantes du primaire. Nous avons donc pensé que leurs propos nous apporteraient une sensibilité particulière pour cette étape exploratoire en lien avec le rapport à l’oral de celles‑ci. Les entretiens ont été réalisés dans le cadre d’une prospection sur la place de l’enseignement et de l’évaluation de l’oral dans la formation des enseignants en Belgique francophone (voir Moncarey et al., sous presse).

Dans les entretiens semi-directifs, les participants ont été invités à parler de leur parcours, de ce qu’évoque l’oral pour eux, de ce qu’ils trouvent important par rapport à cela pour une personne qui enseigne, de la place de l’oral dans la formation, et à aborder comment ils envisagent l’oral dans leurs pratiques. Les entretiens ont duré en moyenne 45 minutes (34 min le plus court, 58 min le plus long). Tous les propos ont été retranscrits, ce qui correspond à un total de 48 895 mots. Une analyse de contenu (Miles et Huberman, 1994) y a été appliquée. Nous avons utilisé cinq catégories existantes (les dimensions du rapport à l’écrit), et avons pu faire émerger trois nouvelles composantes, présentées ci-après et illustrées par des verbatim emblématiques.

2.3.1 Une confirmation de l’existence des dimensions issues du rapport à l’écrit

Dans nos analyses, nous avons pu associer des verbatim aux cinq dimensions mentionnées supra, issues de la revue de la littérature: les dimensions affective, conceptuelle, axiologique, praxéologique et méta. On peut donc raisonnablement croire qu’elles pourront exister comme dimension de notre Échelle du Rapport à l’Oral.

Pour la dimension affective, on retrouve surtout des éléments liés à l’inconfort, au stress, à la panique qui peuvent se rapprocher des conditions dans lesquelles se passent les situations de communication, ou des projections que l’on peut en faire.

J’ai quand même beaucoup d’inconfort même personnel/je vais dire d’être devant un groupe/ça stresse

SD

Il y en a certains qui disaient justement/j’ai eu la chance de travailler dans un climat de confiance […] donc j’ai pu m’épanouir/et dans d’autres textes/c’était il y avait une atmosphère, un peu de moquerie à l’école secondaire donc je n’osais pas ouvrir la bouche

CH

C’est la seule chose qui est interdite/c’est rire des autres

CE

Pour la dimension conceptuelle, deux éléments apparaissent. Tout d’abord, le fait que l’oral soit complexe et transversal. Ensuite, l’idée que l’oral est lié au talent, s’entraîne plutôt que s’enseigne et que, quand on l’enseigne, ce sont les techniques qui sont envisagées en priorité.

Pour moi/l’oral/c’est quelque chose de très/très complexe

SD

L’oral/c’est un objet qui est vraiment transversal à la fois dans le métier d’instituteur/mais aussi dans la formation//en tout cas dans énormément de domaines de la vie

TC

On part d’une idée que l’oral/c’est lié un peu au talent

SD

Pour la dimension axiologique, une série d’opinions sur l’oral sont mises en évidence par les participants; ils soulignent que l’oral est utile pour donner son avis ou pour être performant à l’écrit.

Ce qui est important du côté linguistique/justement/éviter les erreurs de dire trois ziboux étaient sur un arbre/donc/il y a tout l’aspect normatif qui doit être un minimum présent/c’est un peu comme les fautes d’orthographe

MI

L’oral ça sert à mieux écrire aussi. je suis convaincue que c’est pour les apprentissages mêmes de grammaire et de conjugaison/avoir les choses dans l’oreille

CE

Pour la dimension praxéologique, il est question des activités de prise de parole et d’écoute, et notamment à l’intérieur de la classe.

Le temps de parole est détenu par le maître la plupart du temps/énormément/je ne demande pas qui veut parler/je m’organise pour que les étudiants parlent quasi tous

CE

En formation/souvent les groupes viennent présenter leur travail/ce sont de multiples occasions d’entraînement de l’oral/peut-être pas toujours d’apprentissage/mais parfois/il y a des apprentissages concernant l’oral

CH

Et pour la dimension métadiscursive, on voit comment elle peut être activée lors de moments de prise de recul sur les prises de parole, mais aussi lors de situations d’écoute.

Je guide la réflexion sur/pas seulement la gestion du groupe classe/mais aussi leurs compétences personnelles/donc aux étudiants en termes de communication non verbale et verbale/et là/je viens avec des éléments sur les paramètres de la voix

CH

2.3.2 Trois nouvelles composantes spécifiquement liées à l’oral

Trois nouvelles composantes semblent émerger de la phase inductive. Pour l’instant, nous les avons appelés «composantes», car elles nous semblent liées à des dimensions présentées plus haut, mais elles sont spécifiques à l’oral. Nos futures analyses permettront de déterminer si elles sont effectivement des composantes de dimensions existantes ou des dimensions à part entière.

Sur la base des verbatim, nous les avons nommées interactionnelle, identitaire et relationnelle. Pour nous aider à préciser chaque composante, nous avons adopté une démarche inductive déductive, faisant des allers-retours entre la recension des écrits et l’étude des propos recueillis.

La composante interactionnelle fait référence à la manière dont les individus envisagent les interactions les uns avec les autres au sein d’un contexte social ou communicationnel. Elle est caractéristique de l’oral et est liée à la situation de communication. Il s’agit aussi de saisir et se saisir des paramètres de la situation de communication pour s’y adapter, mais avec une certaine rapidité, puisque les interactions se font la plupart du temps en synchrone, ce qui demande des ajustements et des adaptations.

C’est sa capacité à adopter le langage adéquat vis-à-vis de son public/donc/je m’adresse à de futurs instits de primaire qui doivent pouvoir adapter leur langage en fonction/bien sûr de leur rôle social/ils sont dans une institution en tant qu’enseignants/et donc vis-à-vis de leurs élèves aussi/bien sûr/pas seulement vis-à-vis des adultes qui les entourent/mais quand je pense à l’adaptation/c’est par rapport au niveau de développement cognitif/langagier/donc de l’âge de leurs élèves/ils doivent pouvoir s’adapter en matière de lexique/de complexité des phrases, etc.

CH

La composante identitaire se rapporte à l’individu qui s’exprime avec cette idée que prendre la parole, c’est se dévoiler. Elle semble liée à la dimension affective, mais il ne s’agit plus seulement des émotions et de l’investissement dans l’activité, plutôt du fait que chaque prise de parole nous «expose» aux autres. À ce propos, Nonnon (1999) soutient qu’à l’oral on «met en jeu une façon de jouer son identité en se posant face à autrui» (p. 92). En plus, chaque situation d’écoute est entendue avec nos propres filtres, en fonction, justement, de notre identité.

L’oral/c’est parler de soi/moi je n’ai pas de problème pour parler devant les autres/mais je n’aime pas parler de moi/c’est comme ça/déjà, prendre la parole en public/sans même parler de soi/c’est quand même le faire/ton corps/ta tenue/tes attitudes/tout parle de toi

MI

Les autres me regardent/me voient/peuvent décoder des choses de moi/dans ma posture/mon regard/ma façon d’être/et même la tenue que j’ai choisie pour telle ou telle prestation orale

CE

Une autre composante qui ressort des analyses est celle que nous avons appelée relationnelle, terme repris de Vion (1999) qui propose un modèle d’approche relationnelle des interactions et des discours. Cette composante, qui pourrait être liée à la dimension praxéologique, comprend les aspects qui concourent à entrer en relation avec les autres et, spécifiquement pour les personnes enseignantes, à assurer une gestion du groupe, à assurer les médiations. Effectivement, «parler d’oral oblige alors à reconsidérer les modalités de gestion de la classe et de l’établissement, la distribution des rôles et le statut de la parole des élèves, le fonctionnement des groupes et du dialogue didactique, les modèles culturels et les valeurs véhiculées par les échanges» (Nonnon, 1999, p. 91).

Comme enseignant en termes de médiation de discussions de médiation de gestion de conflits au niveau des élèves/on utilise l’oral

CH

Pour établir une relation de la communication/il y a des aspects verbaux et non verbaux qui entrent en jeu

CE

Il y a beaucoup d’éléments du verbal et du non-verbal/mais on va dire de la communication orale/qui vont participer ou pas à une bonne gestion du groupe d’élèves

CH

3. Suites et perspectives

L’articulation d’une approche déductive (revue de la littérature) et inductive (entretiens avec des personnes qui forment des enseignants) nous aura permis de mettre en évidence que les cinq dimensions qui viennent des écrits existants semblent se retrouver dans le rapport à l’oral, auxquelles s’ajoutent trois composantes spécifiques pour l’oral qui ont émergé des entretiens. Ce premier travail correspond à la circonscription du domaine d’ÉRO. Ces hypothétiques dimensions/composantes étant maintenant définies, l’étape suivante pour finaliser la première phase (voir tableau 1) est la génération des items. Pour cette étape et les suivantes, nous avons fait le choix de considérer les trois composantes émergentes comme des dimensions à part entière, de manière à pouvoir vérifier empiriquement leur existence. Il n’est pas exclu qu’elles puissent se combiner avec des dimensions existantes en fonction des résultats des analyses futures. La figure 1 offre une vue d’ensemble de ces dimensions; elle a seulement l’ambition de faire un résumé de celles-ci, et non pas de montrer les liens ou les recoupements, ce qui serait prématuré. Dans la figure, les deux dimensions se trouvant entre les lignes pleines, mais qui sont séparées par une ligne pointillée, pourraient être amenées à être fusionnées (ou pas) en fonction de nos résultats.

Figure 1

Dimensions hypothétiques du rapport à l’oral

Dimensions hypothétiques du rapport à l’oral

-> See the list of figures

3.1 Finalisation de la première phase

Les items sont une déclinaison de chaque dimension en une série de questions/propositions qui permettent de saisir le plus objectivement possible les caractéristiques d’un individu sur la dimension visée (Boateng et al., 2018). Les traitements statistiques actuels, qui prennent en compte le caractère psychométrique des construits, requièrent un minimum de trois items par dimensions (Carpenter, 2018). Pour s’assurer d’obtenir une version finale d’une échelle qui respecte ce minimum, même si les opinions varient en ce qui concerne le nombre d’items minimal selon le nombre de dimensions hypothétiques affirmées ou présumées (Morgado et al., 2018), à la suite de Boateng et al. (2018), nous formulerons au moins six items par dimension.

Pour l’étape de génération des items, nous visons la formulation d’un minimum de 48 items (6 items pour chacune des 8 dimensions) qui s’inspirent de la revue de la littérature et des entretiens rapportés dans cet article. Ces items seront alors indépendamment évalués par cinq experts selon deux critères: (1) Est-ce que l’item permet de saisir objectivement une part de la dimension à laquelle il appartient? (2) Est-ce que l’item est formulé de manière claire et ne permettant qu’une seule interprétation? Les items n’obtenant pas un accord interjuge suffisant seront alors éliminés s’ils n’ont pas été estimés comme étant suffisamment liés à leur dimension ou reformulés s’ils ont été estimés peu clairs.

3.2 Perspectives pour les prochaines phases

Lorsque la première phase du développement de l’échelle sera aboutie, nous aurons donc à notre disposition une version non testée et non validée d’une liste d’items associée à huit hypothétiques dimensions. La deuxième phase de la procédure est alors le développement de l’échelle psychométrique à proprement parler. Un questionnaire comprenant l’ensemble des items sera alors distribué à 750 (futures) personnes enseignantes belges. Cette taille d’échantillon est supérieure au minimum conseillé pour cette phase (ratio item/répondants de 1:10) (Shanmugam et Marsh, 2015). Nous réaliserons des analyses factorielles exploratoires sur ces données qui nous permettront de 1) vérifier que nos dimensions hypothétiques ont du sens et 2) garder les items les plus pertinents pour les mesurer.

Une deuxième récolte de données sera ensuite prévue avec cette version de l’échelle raffinée. Nous visons alors 500 (futurs) enseignants et enseignantes belges, toujours en respect des critères d’échantillonnage susmentionnés. Cette deuxième récolte de données nous permettra de réaliser des analyses confirmatoires pour valider la structure factorielle de l’échelle et en vérifier la fiabilité intradimension (Boateng et al., 2018). Également, ces données nous permettront de vérifier la validité prédictive d’ÉRO.

Enfin, une troisième récolte de données sera prévue en Belgique francophone, en Suisse romande, en France et au Québec pour s’assurer qu’ÉRO représente un instrument psychométrique valide pour l’ensemble de ces contextes francophones. Cet objectif sera poursuivi en réalisant des analyses d’invariance de mesure (Schmitt et Kuljanin, 2008). Cette récolte permettra également d’étudier des questionnements empiriques quant aux différences existantes entre ces contextes nationaux.

En somme, outre l’intérêt de s’emparer méthodologiquement d’un concept, le «rapport à», pour le rendre plus opérationnel, cette échelle nous paraît un outil important pour l’apprentissage et l’enseignement de l’oral et pour la formation à son enseignement, en ce qu’elle permet d’expliciter les éléments qui participent au rapport à l’oral des élèves et des personnes enseignantes. Une meilleure connaissance du rapport à l’oral et de ses différentes dimensions permettra de déterminer plus facilement des pistes d’intervention personnalisées et mieux adaptées pour soutenir le développement de la compétence à communiquer oralement. Notre ambition d’adapter l’échelle pour les élèves, dans un second souffle du projet, va de pair avec notre volonté de prendre appui sur leur déjà-là pour construire des savoirs sur l’oral avec et à partir d’eux.