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Introduction

À la suite du soulèvement populaire en Tunisie contre le régime de Ben Ali en décembre 2010, une vague de révoltes défiant les régimes autoritaires a traversé le monde arabe. La Tunisie, petit pays d’environ 11 millions d’habitants, relativement marginale dans les enjeux politiques de la région ANMO – englobant l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient –, a soudain beaucoup attiré l’attention des médias internationaux et des chercheurs en sciences sociales en tant que pays déclencheur des révoltes arabes ou « printemps arabes ». En effet, la révolution tunisienne a eu un effet domino dans l’ensemble de la région, encourageant les citoyens arabes des pays voisins à prendre massivement la rue pour demander à leurs propres leaders de quitter le pouvoir. Toutefois, après un élan démocratique à l’échelle régionale (Kaldor, 2011), les tentatives de démocratisation de plusieurs pays de la région ont dramatiquement échoué[1].

La Tunisie est, à l’heure actuelle, le seul pays de la région à avoir connu une transition démocratique réussie, bien que fragile. Des chercheurs ont démontré comment des facteurs internes ont contribué à la bonne marche de la transition démocratique : le rôle apolitique de l’armée (Anderson, 2011), la négociation et les compromis entre les partis politiques (Nachi, 2017), la modération du parti islamiste Ennahdha (Cavatorta & Merone, 2013), le rôle des réseaux sociaux (Breuer, Landman, & Farquhar, 2015), ou encore la contribution de la société civile (Martin, 2015; M’rad, 2015; Murphy, 2013). D’autres chercheurs ont analysé les mutations culturelles et sociales profondes que le pays a vécues depuis son ouverture démocratique (Allal & Geisser, 2018). Des études d’envergure sur les aspects internes de la transition démocratique tunisienne ont aidé à comprendre que certains facteurs ont été décisifs dans la réussite de la transition tunisienne.

Bien que les facteurs endogènes tels que la révolution et le processus de démocratisation en Tunisie soient souvent avancés comme facteurs explicatifs, j’ai jugé plausible que l’impact des influences extérieures ait aussi favorisé le processus de démocratisation. Ceci m’a conduit à mener mon projet doctoral sur le sujet, qui a débuté en 2016, d’autant que cette avenue n’était que peu documentée. Certains collègues experts du sujet étaient très sceptiques quant au potentiel d’une telle recherche et m’avertissaient des obstacles que je risquais de rencontrer, notamment celui de ne pas parvenir à collecter des données empiriques pertinentes. Mon directeur de recherche m’a cependant encouragé à poursuivre mes objectifs, car il avait vécu une situation similaire lors de sa recherche sur la dimension internationale de la transition démocratique algérienne (Cavatorta, 2009).

Il n’en demeure pas moins que poursuivre des recherches sur la dimension externe du processus de démocratisation dans un pays du monde arabe en train de vivre une transition et une ouverture sur le monde extérieur, après une longue période de répression, m’exposait à des difficultés d’ordre méthodologique. Si, d’un point de vue théorique, je disposais d’une littérature riche quant aux influences des acteurs internationaux sur le processus de démocratisation dans plusieurs régions du monde[2], étudier l’impact de ces influences externes dans le cas de la transition démocratique tunisienne demeurait complexe. En me lançant dans une étude pionnière, le premier défi consistait à identifier précisément des acteurs à recruter et à interviewer. Au lendemain de la révolution, la présence des certains acteurs internationaux était certes plus visible, mais il manquait des études systématiques sur les résultats de leur interaction avec les groupes nationaux. Parmi ces derniers, il était difficile de savoir lesquels avaient interagi avec des groupes internationaux avant la révolution. De même, la question de la répartition de l’aide internationale en leur faveur, après la chute du régime de Ben Ali, restait relativement peu connue et peu explorée par les chercheurs.

Par ailleurs, j’étais confronté à un deuxième défi : le processus de recrutement des informateurs, voire l’accès aux informateurs ciblés, tâche qui rencontrait des obstacles à cause de la spécificité du contexte Tunisien postrévolutionnaire. La facilité d’entrée des chercheurs en Tunisie, qui contraste avec la fermeture et les risques présentés par d’autres pays (Clark & Cavatorta, 2018; Glacius et al., 2017), présente à une situation paradoxale. Depuis la chute du régime de Ben Ali[3], le 14 janvier 2011, de nombreux chercheurs qualitatifs ont mené des enquêtes dans ce pays, et ce, sans risque particulier; ce contexte a conduit à ce que certains dirigeants politiques ou activistes civils soient très sollicités et imposent des « filtres » dans la sélection des demandes d’entrevue. Mon statut de chercheur universitaire occidental, européen et basé dans une université nord-américaine rendait par ailleurs plus ardue ma tâche, celle de savoir si des facteurs externes avaient contribué au succès de la transition. En général, pour des raisons historiques et culturelles liées au colonialisme, les interactions entre chercheurs occidentaux et sujets interrogés dans le monde arabe sont basées sur un faible niveau de confiance initiale (Tessler & Jamal, 2006), car certains répondants recrutés perçoivent le chercheur occidental comme invasif et « orientaliste » (Tessler, 2011).

Un troisième défi s’est posé dans la mesure où je me suis heurté à des enjeux liés à l’interaction avec les répondants. En recrutant les acteurs directement impliqués dans le processus, j’ai rencontré des informateurs qui donnaient des « récits très subjectifs », ce qui pouvait constituer un biais. Dans mon cas, cette subjectivité s’accentuait lorsque les participants nationaux percevaient que ma recherche tendait à réduire ou à repenser le rôle des acteurs internes à la chute du régime autoritaire et au succès de la démocratisation. Bien que la Tunisie postrévolutionnaire ne soit pas considérée comme une destination à risque, ma recherche de terrain devenait sensible dans la mesure où elle visait à proposer des lectures analytiques complémentaires à celles formulées au cours du processus révolutionnaire.

En s’appuyant sur mon expérience de recherche de terrain en Tunisie entre 2017 et 2019[4], cet article propose diverses stratégies susceptibles de conduire à une enquête qualitative sur la dimension internationale d’une transition démocratique dans un pays arabe. L’article porte sur le choix d’effectuer un préterrain afin de faciliter l’identification des acteurs et des répondants et d’améliorer l’accès à ces derniers lors du début de la recherche de terrain. Il dévoile par la suite des techniques mises en oeuvre pour améliorer le recrutement des participants à la recherche. La troisième section présente les stratégies méthodologiques employées afin de réduire le biais provenant des récits très subjectifs d’informateurs, notamment au cours des entretiens avec les Tunisiens.

Identifier les acteurs : l’importance du terrain exploratoire pour étudier le contexte international d’une transition

Après une période de préparation théorique sur le sujet de ma recherche et une étude approfondie de la littérature sur l’histoire politique du pays, j’ai commencé à réaliser que je ne disposais pas d’un portrait clair des acteurs internationaux influents et des dynamiques d’interaction qu’ils pouvaient avoir eues avec les acteurs nationaux. Conduire un terrain exploratoire me semblait dès lors primordial afin de commencer à identifier les acteurs internationaux impliqués dans le processus de transition démocratique et leurs partenaires tunisiens.

Bien que le terrain exploratoire soit une technique davantage pratiquée par les anthropologues et ancrée dans la tradition ethnographique, il s’avère très utile aussi pour la recherche du politiste en contexte sensible. Caine et ses collègues définissent le préterrain comme

l’ensemble des étapes formatrices de la recherche sur le terrain qui permettent l’exploration, la réflexivité, la créativité, l’échange mutuel et l’interaction grâce à l’établissement de relations de recherche avec les populations locales souvent avant le développement de protocoles de recherche et applications éthiques

Caine, Davison, & Stewart, 2009, p. 491

Le travail de préterrain peut en effet être considéré comme une activité qui accroît les liens et la compréhension de contextes complexes, aide comme outil de repositionnement pour poser des questions pendant la recherche et aide à accéder plus profondément aux expériences vécues des autres (Carrier, 2006). Une expérience de terrain préliminaire peut relier la théorie au contexte et à la pratique et, dans certains cas, donner un nouveau sens à la théorie (Douglas, 1994).

À l’occasion d’un atelier, Tunis Exchange, organisé dans la capitale du pays (Tunis) en janvier 2017, j’ai conduit un terrain exploratoire de 30 jours. Mon directeur de recherche m’avait fortement encouragé à postuler à cet atelier et à y participer, car certaines des personnalités les plus importantes de la Tunisie faisaient partie des intervenants. Cet atelier avait été clairement pensé pour faciliter l’accès des chercheurs et des journalistes étrangers au pays en leur permettant très rapidement de développer un réseau de contacts hétérogènes et de haute qualité. En effet, l’organisateur, Nicholas Noe, un analyste spécialisé dans la région, sélectionne deux fois par an un groupe d’environ 20 participants (la plupart sont chercheurs) et les exposent à deux semaines intensives de conférences et rencontres de groupes avec des dirigeants politiques tunisiens, des membres de la société civile, des journalistes et analystes locaux, des activistes, des syndicalistes et des dirigeants provenant du monde des entreprises. L’atelier m’a ainsi donné l’opportunité de discuter directement avec des personnalités de premier plan dans le contexte tunisien (acteurs politiques et économiques), qui pouvaient avoir une connaissance précise de mon sujet de recherche et, surtout, pouvaient me suggérer des pistes de recherche ou me fournir des contacts.

Bien que les deux semaines d’atelier se soient avérées peu fructueuses en matière de données empiriques – les diverses présentations portant plutôt sur l’actualité nationale du pays –, j’ai pu néanmoins identifier certains premiers groupes internationaux, des acteurs politiques et des activistes tunisiens qui pouvaient m’aider dans mes objectifs de recherche. Par exemple, en discutant de mes objectifs de recherche avec un membre de Inkifada (un journal de presse d’enquête tunisien très actif après la révolution), celui-ci m’a dit :

Votre sujet c’est très intéressant… aussi pour nous, parce qu’on ne connaît pas vraiment ces phénomènes. Franchement, je ne suis pas un connaisseur des interactions avec les acteurs externes, j’étais simplement un dentiste avant la révolution et je me suis impliqué dans INKIFADA qu’en 2013, mais je peux vous donner le contact d’une collègue qui collaborait souvent avec Freedom House entre 2005 et 2010.

Une fois le Tunis Exchange terminé, je suis resté dans la capitale deux semaines supplémentaires, car j’envisageais de discuter plus profondément, et dans un contexte moins formel, avec des chercheurs, des journalistes et des analystes politiques tunisiens. Pendant ces deux semaines, j’ai employé deux stratégies pour préparer ma collecte de données officielle, en prévision des contraintes liées à l’identification et au recrutement de mes informateurs. Premièrement, à travers des contacts fournis au préalable par mon directeur de recherche et grâce aux contacts donnés par certains intervenants de l’atelier, j’ai rencontré des Tunisiens, connaisseurs de l’histoire politique contemporaine de la Tunisie, notamment deux professeurs en science politique, deux journalistes blogueurs et un analyste politique tunisien.

Lors de ces interactions informelles, souvent autour d’un café, j’ai discuté de mon sujet d’étude et partagé mes hypothèses de recherche. La participation à l’atelier m’avait été bénéfique puisque je me sentais plus à l’aise pour conduire une conversation sur les thématiques que j’avais préalablement ciblées, au lieu d’écouter et de prendre passivement en note les propos de mes interlocuteurs. Lors de ce préterrain, je n’avais toutefois pas encore les outils appropriés pour procéder à la collecte officielle des données, même si je commençais à avoir une idée plus fine des interactions possibles à explorer entre les acteurs internationaux et nationaux. En effet, je n’avais alors ni canevas d’entrevue structuré ni même de certificat d’approbation du comité d’éthique qui m’aurait officiellement permis d’utiliser les données recueillies lors des entretiens au moment de la rédaction de ma thèse. Mes conversations étaient donc de nature exploratoire et visaient souvent à saisir la diversité des acteurs en jeu. Par exemple, pendant une conversation avec un professeur de science politique à l’Université de Carthage et fin connaisseur de l’histoire politique tunisienne, j’ai abordé la question des réseaux de plaidoyer internationaux actifs en Tunisie depuis 1990 et de leurs partenaires directs en Tunisie. À la fin de la discussion, j’avais une liste assez complète de ces réseaux en Tunisie, qui incluaient l’Organisation mondiale contre la torture (OMT), la Ligue internationale des droits de l’homme, Human Rights Watch, ou encore Amnesty International. Les conversations avec ces informateurs (deux professeurs, deux journalistes et un analyste politique) m’ont ainsi aidé à affiner ma compréhension des acteurs internationaux impliqués dans le processus de transition démocratique. Ils m’ont permis, par exemple, de percevoir l’implication majeure des fondations politiques allemandes dans le pays à partir des années 1990, qui se sont plus tard révélées un pilier central de ma recherche (Marzo, 2019b).

En parallèle, une deuxième stratégie, adoptée pendant les deux semaines restantes, a consisté à me créer un réseau de « contacts amicaux », spécialement avec des individus d’origine italienne (comme moi) qui travaillaient dans le domaine des relations internationales en Tunisie. Avant de débuter mon doctorat au Canada, j’avais eu des expériences professionnelles dans des organisations internationales, notamment dans le cadre d’un stage aux Nations Unies (en Allemagne) et dans le cadre de recherches au sein de l’Institut des affaires internationales et de l’European Council on Foreign Relations à Rome portant sur les enjeux politiques en Afrique du Nord.

J’ai donc demandé à d’anciens collègues experts du pays de m’introduire auprès de leurs contacts sur le terrain. Grâce à cela, j’ai pu rencontrer des Italiens qui travaillaient en Tunisie, par exemple le représentant de la coopération internationale à l’ambassade d’Italie à Tunis, un fonctionnaire italien qui travaillait pour les Nations Unies, des parlementaires italo-tunisiens qui venaient d’être élus dans la circonscription « Italiens de l’étranger » englobant la Tunisie, un dirigeant de la Croix-Rouge et une fonctionnaire de l’Union européenne. Dans la plupart des cas, ces rencontres visaient à établir des liens plutôt qu’à obtenir des informations sur mes recherches, voire à construire un réseau des contacts de confiance à mobiliser plus tard lors du processus de recrutement officiel. Cette stratégie visait à réduire les obstacles liés au recrutement des informateurs.

Une fois ciblés les informateurs à interviewer, obtenir des entretiens avec eux dans les pays de la région peut s’avérer relativement difficile, surtout si le sujet de recherche est relativement complexe comme le mien. La capacité de recruter certains informateurs et d’obtenir des entretiens est souvent proportionnelle aux réseaux et aux connaissances dont on bénéficie (Clark, 2018; Scoggins, 2014). Dans ma recherche de terrain, la mobilisation de réseaux construits au préalable s’est avérée essentielle pour faciliter l’accès aux informateurs. La section suivante présente les techniques spécifiques utilisées pour contourner les obstacles qui ont surgi lors du processus de recrutement des participants aux entretiens.

Le recrutement : la technique « boule de neige » et le rôle des intermédiaires ou « fixeurs »

Cinq mois après mon préterrain, j’étais de retour en Tunisie pour effectuer la première partie de mon terrain « officiel », entre mai et novembre 2017. Bien que le préterrain m’ait facilité l’accès à certains milieux politiques et civils et m’ait servi pour identifier des acteurs centraux dans ma recherche, le processus de recrutement demeurait un enjeu. En étudiant un phénomène tel que les influences externes dans un processus politique national, l’objectif de ma recherche visait à constituer un échantillon comprenant les principaux acteurs ayant participé aux événements. En même temps, parce que mes informateurs devaient être sélectionnés de façon non aléatoire et raisonnée (purposive sample), mon enquête ciblait une population difficile à joindre (Marpsat & Razafindratsima, 2010), à la fois non visible, méfiante et surexposée aux chercheurs.

À cet égard, j’ai choisi d’utiliser la technique de recrutement dite boule de neige (snowballing sampling) qui, comme le suggèrent plusieurs chercheurs, s’avère être un outil assez efficace quand la population à recruter n’est pas visible (Tansey, 2007) ou est « cachée » (Cohen & Arieti, 2011)[5]. Cette technique peut par contre contenir un biais dans le processus de recrutement, dans la mesure où les informateurs suggèrent souvent d’autres personnes partageant les mêmes caractéristiques et perspectives (Van Meter, 1990). Je me suis donc assuré que le groupe initial d’informateurs était suffisamment diversifié, tant du point de vue de leurs activités professionnelles que de leur origine géographique, pour que l’échantillon me permette d’aborder deux choses : 1) la diversité des acteurs qui ont joué un rôle dans le tournant politique vécu par la Tunisie; 2) l’influence des acteurs internationaux au regard des réseaux créés par les acteurs nationaux et de la politique de la communauté internationale (États, organisations internationales gouvernementales, organisations internationales non gouvernementales). C’est ainsi que les premiers entretiens ont été menés auprès d’un membre d’une organisation régionale des droits de l’homme, d’un responsable d’une fondation politique allemand, d’un délégué de l’Union européenne et d’un diplomate américain qui avait travaillé en Tunisie.

Lorsqu’une transition démocratique se produit, les acteurs nationaux sont plus réticents à reconnaître les apports des acteurs internationaux dans la transition (Schmitter, 1996). J’ai alors choisi de commencer les entrevues semi-dirigées auprès des acteurs internationaux, non seulement dans le but de dresser un portrait plus clair des interactions entre les acteurs internationaux et leurs partenaires nationaux, avant et après la révolution, mais aussi de me fournir une liste des groupes et acteurs nationaux pertinents pour continuer mon enquête. Il reste que la collecte de données est restée modeste à l’issue des toutes premières entrevues, car les informateurs étaient parfois des fonctionnaires vivant dans le pays depuis peu de temps et, par conséquent, ne connaissant pas assez les dynamiques politiques du pays. Je savais qu’en envoyant une demande d’entretien à des groupes internationaux opérant en Tunisie en 2017 pour poser des questions sur des interactions qui s’étaient souvent produites cinq ou dix ans auparavant, j’avais besoin de discuter avec des informateurs ayant une mémoire historique des faits et ayant vécu une expérience au moins pluriannuelle en Tunisie. En prévision de cela, mes courriels de recrutement incluaient, parmi les critères de sélection, le fait que les informateurs aient au moins cinq ans d’expérience professionnelle (pas forcément de présence sur le territoire) en Tunisie. Il reste que, dans un premier temps, j’ai rencontré des fonctionnaires en place, même si ceux-ci avaient moins cette mémoire longitudinale des faits dont j’avais besoin.

Ces rencontres se sont néanmoins révélées cruciales pour étoffer mon carnet d’adresses auprès d’acteurs ayant une connaissance plus directe et profonde du pays, et du sujet de ma recherche. C’est ainsi que, par exemple, lors d’une entrevue avec le fonctionnaire d’une fondation allemande en Tunisie, j’ai pu joindre ses prédécesseurs plus impliqués dans le processus de transition, qui avaient choisi de s’établir dans le pays pour leur retraite. La rencontre avec l’ancien directeur de la Fondation Friedrich Ebert a été d’un apport majeur pour ma recherche afin de mieux comprendre le rôle protecteur que certaines fondations allemandes avaient joué auprès des groupes tunisiens d’opposition avant la révolution.

De plus, souvent, des informateurs liés à l’international et directement impliqués dans les processus transitionnels m’indiquaient les noms précis des groupes et des individus tunisiens ayant entretenu une collaboration directe avec eux, tout en me fournissant des informations précieuses sur les dynamiques de l’interaction. Dans certains cas, il s’agissait de militants politiques, de journalistes ou de militants qui avaient coopéré plus ou moins clandestinement avec des acteurs étrangers avant la chute de Ben Ali. Dans d’autres cas, j’avais des informations sur des groupes politiques et civils qui avaient plutôt été aidés par la communauté internationale depuis la révolution. Mon objectif était de les rencontrer pour évaluer davantage le type de soutien, d’accompagnement, dont ils avaient bénéficié de la part des partenaires internationaux.

Toutefois, pour parvenir à interviewer certains informateurs tunisiens, la technique du recrutement par boule de neige s’est révélée moins efficace que pour le recrutement des acteurs internationaux. J’ai été, en réalité, confronté à des difficultés de recrutement quand j’ai essayé de rejoindre un militant politique tunisien qui s’était rangé du côté du régime, ou un individu qui avait eu des relations avec les ambassades étrangères occidentales durant les dernières années de Ben Ali, ou encore un blogueur qui avait obtenu une formation à l’étranger pour contourner la censure imposée par le régime. Parce qu’ils sont souvent très sollicités par les médias et les chercheurs, mais aussi méfiants à l’égard de certains analystes qui proposent des raccourcis pour expliquer des situations et des enjeux complexes, je ne recevais aucune réponse malgré mes demandes répétées d’entrevue par courriel ou message téléphonique. Bien que la liberté d’expression individuelle soit en croissance et que s’opère une meilleure confiance interpersonnelle à la suite de la révolution, contrairement à ce qui est observé dans la région (Jamal, 2007; Mekouar, 2014), le niveau de confiance envers les étrangers et l’intérêt à interagir avec ces derniers sur des sujets sensibles demeure faible. Un chercheur qui arrive de l’étranger et mène une recherche liée aux relations internationales du pays peut être perçu comme un journaliste ou un « espion » voulant faire un reportage sur le pays et en dresser un tableau négatif.

C’est alors que j’ai dû avoir recours à des intermédiaires, d’autant qu’au fil des discussions avec des collègues et des amis sur le terrain, j’ai compris que les itinéraires d’individus évoluent et donnent à voir un contexte changeant, des logiques d’affiliation, de réseautage, diversifiées et flexibles. Les intermédiaires ou « fixeurs » apparaissaient comme des figures importantes « de points de connexion au sein de systèmes et de relations complexes »[6] [traduction libre] (Lewis & Mosse, 2006, p. 12), voire des figures essentielles, afin de comprendre les « règles du jeu » locales dans un contexte complexe (Schiltz & Büscher, 2018), d’obtenir des informations et de bénéficier de contacts autrement inaccessibles (Hoffmann, 2014). Très souvent, pour obtenir un entretien, j’avais besoin de mobiliser un contact « de confiance » qui connaissait bien l’informateur ciblé et qui agissait comme intermédiaire afin d’expliquer au préalable les contours de ma recherche, de préciser mon identité, mon parcours et mon professionnalisme, et de rendre compte de mes bonnes relations avec le fixeur lui-même pour fixer un rendez-vous. Grâce à des intermédiaires qui étaient proches du milieu des informateurs ciblés, j’ai ainsi réussi à interviewer des activistes tunisiens ayant eu, selon mes fixeurs, des interactions avec des diplomates américains et des groupes de promotion de la démocratie étrangers avant la révolution.

Par ailleurs, pour réussir à rejoindre des répondants « difficiles » ou très sollicités, il ne s’agit pas seulement d’obtenir l’entretien grâce à l’intervention du contact, le chercheur doit de plus être proactif dans l’approche du répondant, préférablement par téléphone (approche commune dans le pays). Ainsi, lorsque je recevais la confirmation que l’entretien m’était accordé, je demandais la permission de téléphoner au potentiel informateur afin de confirmer le lieu du rendez-vous. J’évaluais aussi son niveau de disponibilité à parler d’un sujet sensible, susceptible d’impliquer des questions liées à des épisodes émotionnels ou risqués relativement forts. Cependant, et malgré ces précautions, j’ai rencontré certains problèmes pour gagner la confiance de certains informateurs. Ce fut par exemple le cas lors d’un entretien avec un militant politique central pour ma recherche. À la suite de son emprisonnement par Ben Ali, le procès judiciaire de cet enquêté avait été surveillé par les diplomates américains et sa famille protégée par l’ambassade américaine. Or, après avoir obtenu une interview grâce à un ami tunisien (en 2019, après diverses tentatives vaines d’approches), j’obtenais un lieu de rendez-vous dans un café du quartier El Kram de Tunis. Après vingt minutes d’attente, scrutant la clientèle du café pour essayer de repérer mon informateur (j’avais vu des photographies de lui en ligne), un homme s’est finalement approché de moi et a entamé la discussion ainsi :

Bonjour, Monsieur Marzo?! Excusez-moi, mais j’ai l’habitude d’observer la personne qui veut me parler pendant quelques minutes. Il est important pour moi de comprendre à qui je transfère des informations. J’ai été interviewé par des dizaines de journalistes étrangers, tous sujets confondus, surtout depuis que j’ai formé mon parti politique. Vous êtes peut-être le deuxième ou le troisième chercheur qui par contre me demande un entretien sur ma relation avec les Américains. Ce thème a été le résultat de grandes spéculations et mystifications, j’aime donc observer mon interlocuteur. Excusez-moi, mais après tout, vous êtes amis avec X et X n’a que de bons amis. On peut commencer, je vais essayer de vous être utile.

Lors de certaines entrevues avec des informateurs nationaux, ceux-ci peuvent demeurer méfiants envers un chercheur étranger et être réticents à répondre à certaines questions. Expliquer minutieusement le but de ma recherche avant de démarrer l’entretien, souligner l’anonymat total des informations, m’introduire en tant que chercheur universitaire en parlant de mon expérience en Tunisie et des activités extra-professionnelles que j’y menais, telles que l’apprentissage du dialecte tunisien local ou l’implication dans des groupes sportifs à Tunis, a aidé à réduire la méfiance de mes informateurs tunisiens. L’identification progressive des informateurs et leur accessibilité se sont améliorées grâce à mes techniques d’approche et de réseautage. J’étais néanmoins confronté à un autre biais : la subjectivité dans les récits des informateurs nationaux.

Réduire la subjectivée des récits pendant les entrevues : la « triangulation progressive » des données

En Tunisie, où le processus de transition démocratique est assez récent – le pays vit présentement la consolidation de la démocratisation –, l’avantage des entrevues est de pouvoir interroger des témoins des événements en question (Clark, 2018; Mosley, 2015). Mais cet avantage peut se révéler une épée à double tranchant. Bien que les entrevues restent la meilleure stratégie pour connaître la vision et l’interprétation d’un groupe de personnes sur un événement ou une série d’événements, ou leurs actions passées ou envisagées (Aberbach & Rockman, 2002), le risque demeure élevé de rencontrer des informateurs qui veulent surtout raconter leurs expériences vécues, leurs combats, leurs actions, leurs prises de position et ainsi mettre en exergue leur rôle prépondérant dans un contexte d’effondrement d’un régime autoritaire et d’émergence d’un processus de transition démocratique (Katzenstein & Keohane, 2007) d’une part, et réduire l’importance de l’assistance internationale dans ce même processus d’autre part. Schmitter (1996) observe en effet que les élites de la transition « sont incitées à minimiser le rôle des acteurs extérieurs et l’impact des forces internationales » (p. 26). Or mon objectif était d’analyser non seulement le type d’échanges entre les acteurs internationaux (membres d’organisations internationales gouvernementales et non gouvernementales, diplomates étrangers, lobbyistes) et leurs partenaires nationaux (membres de la société civile, diplomates nationaux, activistes politiques et responsables politiques), mais aussi de voir comment cette coopération avait favorisé la transition démocratique tunisienne.

Lors de mes entrevues en Tunisie, j’ai opté pour la technique de triangulation afin d’améliorer la validité de l’information collectée. Tout d’abord, avant d’entreprendre les entrevues semi-dirigées, j’avais analysé une série de documents sur l’assistance au processus transitionnel tunisien publiés par certains groupes internationaux. Les documents et autres sources d’archive peuvent fournir des comptes rendus détaillés pour donner de la substance aux entrevues (Berry 2002). Cette analyse m’a été utile pour déterminer les tendances générales et les objectifs communs en matière de coopération des acteurs internationaux, et parfois m’informait sur les façons dont les partenaires locaux recevaient et évaluaient l’assistance. Cela m’a aussi permis de suivre l’évolution des différentes formes d’assistance internationale, en soulignant les avancées décisives et l’évolution des priorités tout au long du processus de transition démocratique, dimension très importante de ma recherche. J’ai analysé des rapports officiels des Nations Unies, de l’Union européenne ou des ONG internationales que j’ambitionnais d’approcher au fil de mon terrain d’enquête.

J’ai choisi de poursuivre mon analyse documentaire en parallèle aux entrevues afin de trianguler les informations et de confirmer, au fur et à mesure, la validité de certaines réponses. À cet égard, en mobilisant mes contacts, j’ai aussi réussi à obtenir des documents de travail de certaines organisations (rapport d’évaluation de partenariats, commentaires et notes) qui n’avaient pas été utilisés auparavant par la communauté scientifique. Ainsi, en promettant de ne pas faire circuler les documents, j’ai eu accès à un éventail de sources inédites, tout en montrant les forces et les faiblesses de la coopération entre les acteurs internationaux et les partenaires nationaux.

Le fait de construire progressivement l’information en passant par des acteurs internationaux impliqués en Tunisie et par la collecte de documents donne la possibilité de recentrer les conversations menées avec les acteurs nationaux. Opter pour des entretiens semi-dirigés m’a été précieux dans la mesure où cette technique laisse une certaine liberté de propos aux informateurs, permet d’entamer un dialogue avec l’informateur (Savoie-Zac, 2009), de procéder à des relances, de recentrer la discussion au fil des échanges et donc, dans le cadre de ma recherche, d’insister sur les interactions et de limiter la narration d’éléments trop subjectifs (Kapiszewski, MacLean, & Benjamin, 2015).

Un informateur tunisien a, par exemple, absolument tenu à souligner ceci : « La révolution c’est nous, nous avons abattu le régime, les états étrangers étaient alignés avec Ben Ali. » Mais plus je l’exposais à des questions issues d’informations détaillées, obtenues dans mes entrevues avec les acteurs étrangers ou par des sources documentaires, plus l’informateur faisait ressortir les volets de coopération avec des groupes étrangers : « Oui, c’est vrai, l’ambassadeur américain X nous a soutenus beaucoup dans cet épisode ». La triangulation m’a ainsi permis de vivifier la mémoire de certains informateurs, de les faire réagir sur des faits précis et d’animer nos échanges. Ce type d’échanges m’a permis progressivement d’approcher la réalité du processus démocratique sous toutes ses facettes et de replacer le rôle de chaque type d’acteurs.

Le cas contraire s’est aussi vérifié, car d’autres informateurs tunisiens ont eu tendance à exagérer le poids de la coopération avec des groupes étrangers, car ils bénéficiaient probablement d’un soutien logistique et économique. Parfois, je recevais des opinions extrêmement positives sur l’impact de l’assistance internationale parce que l’informateur craignait que j’aie pu signaler ses commentaires négatifs au partenaire international et des implications potentielles sur leur partenariat.

Par ailleurs, pour minimiser le biais provenant des récits subjectifs, la chronologie de mes entretiens a été stratégiquement divisée en trois phases, en utilisant aussi des critères bien définis concernant la formulation des questions et les sujets à traiter. Au début de ma recherche, mes questions étaient moins directes pour obtenir des informations générales, tandis qu’au fur et à mesure que la recherche progressait et que mes données triangulées devenaient plus précises, les questions étaient plus incisives. Dans les premiers entretiens avec des membres d’organisations internationales, mon but était de comprendre les informations de base du partenariat avec les groupes nationaux : le volume d’aide, la technique de coopération, les priorités d’action, l’évolution au fil du temps, le retour des partenariats sur des projets complétés, le bilan et les idées pour de futurs projets. Le canevas d’entrevue était construit stratégiquement pour ne pas interroger directement les informateurs sur l’impact de leur travail sur la chute du régime et sur certains acquis de la révolution. Mes questions n’abordaient pas ouvertement des enjeux sensibles, car certains groupes internationaux, telles les ONG américaines (Freedom House, National Democratic Institute et National Endowment for Democracy), ont peu intérêt à apparaître comme des « facilitateurs » de la transition démocratique, car ce profil peut compromettre leur travail dans des contextes autoritaires dans lesquels ils disposent d’une marge de manoeuvre très étroite.

Pour interviewer les informateurs nationaux, j’ai toujours alterné des questions sur l’opinion générale des répondants sur la transition démocratique du pays ou sur le rôle de leur organisation au sein du processus – moins intéressantes pour ma recherche – et des questions portant plutôt sur l’objectif crucial de la recherche, comme l’interaction directe de l’interviewé – et/ou de son organisation ou de son parti politique – avec des partenaires internationaux. Cette technique a eu l’avantage de minimiser l’impression que la recherche visait à réduire la contribution des groupes nationaux au processus de démocratisation. De plus, afin d’accroître la validité des réponses clés, j’ai employé des questions contre-factuelles qui répétaient les questions à différents moments de l’entrevue. En guise d’exemple, après avoir posé une question directe aux répondants tunisiens : « Comment évaluez-vous l’engagement (l’assistance, la formation, l’aide financière, l’expertise, le plaidoyer) des acteurs internationaux au cours du processus électoral depuis la révolution? Expliquez pourquoi », je la faisais suivre plus tard par une série de questions contre-factuelles pour revenir sur la réponse :

En admettant que l’assistance internationale au cours du processus électoral (la surveillance des scrutins, les formations, la communication) ait été absente :

a) Est-ce que la Tunisie aurait eu des élections compétitives en 2014?
b) Est-ce que les acteurs tunisiens (partis politiques, institutions et organisations nationales) auraient été en mesure d’appliquer les lois et pratiques électorales?
c) Est-ce que les tentatives de fraudes électorales ou les pratiques non démocratiques auraient augmenté?

Cela a produit des réponses parfois contradictoires me permettant de discuter plus en détail avec les informateurs qui nuançaient souvent leurs réponses initiales. Un informateur de l’Association tunisienne pour l’intégrité et la démocratie des élections (ATIDE) avait initialement répondu, avec peu d’enthousiasme, sur le rôle de l’assistance internationale, mettant en évidence des éléments de complexité générale de la coopération internationale en tant que telle. Avec les questions contre-factuelles, il a ensuite expliqué qu’il considérait que l’aide reçue de l’étranger avait été cruciale pour son ONG. À une question précise sur l’impact de l’assistance internationale après la révolution, il répondait :

On n’avait pas beaucoup d’experts surtout en 2011, 2012 et 2013. Les organisations internationales partenaires ont apporté beaucoup de soutien à la société civile quant aux mécanismes et aux plans de travail et pour tous les aspects qui s’intéressent aux élections et tout le processus électoral. Je crois enfin que sans l’assistance financière notre association, comme beaucoup d’autres, aurait fermé ses portes. […] Surtout des années 2011 à 2014, ces acteurs internationaux ont beaucoup coopéré avec la société civile et les partis politiques et l’assemblée constituante.

Avec le matériel récolté auprès des groupes nationaux, j’ai mené une deuxième série d’entretiens avec des informateurs internationaux déjà interviewés. Cette démarche visait à trianguler davantage les informations obtenues auprès des informateurs nationaux. La triangulation progressive des informations entre deux catégories d’acteurs pour lesquels on veut mesurer l’impact d’une « coopération complexe » s’est révélée très efficace (Flick, 2002; Wilson, 2014). Cette stratégie m’a permis d’identifier les dynamiques de ces interactions entre les deux types d’acteurs ciblés, leurs logiques, leurs évolutions et le poids des acteurs internationaux pour proposer une lecture nuancée du processus de transition politique, et ce, sous un angle peu couvert dans la littérature (Marzo, 2019a, 2019b).

Conclusion

En m’appuyant sur mon expérience de terrain en Tunisie, j’ai fourni des stratégies pour optimiser les étapes méthodologiques d’une recherche qualitative sur le contexte international d’une transition démocratique dans la région MENA. Bien que l’effondrement d’un régime autoritaire déclenche une ouverture du pays aux chercheurs qui souhaitent analyser des enjeux sociaux et politiques, le terrain demeure sensible, surtout par rapport à certains sujets liés aux influences extérieures dans le processus de transition démocratique.

Trois aspects méthodologiques compliquent la recherche de terrain sur les influences extérieures d’une transition démocratique. Tout d’abord, pour identifier la population à interroger, il est très précieux de mener un préterrain, surtout si la recherche est réalisée dans les années qui suivent le début du processus. Un bon préterrain qui construit un réseau de contacts et facilite l’identification de certains groupes de recherche intéressants n’épuise cependant pas les obstacles que présentent les recherches sur le contexte international d’une transition démocratique.

Le processus de recrutement de certains informateurs reste de plus compliqué en raison de la surexposition de la Tunisie aux chercheurs et de la difficulté d’approcher un objet de recherche qui vise à revisiter et compléter le récit de la révolution nationale. En raison du faible niveau de confiance envers les chercheurs étrangers, j’ai donc dû alterner la technique boule de neige, plus utile pour les informateurs internationaux, et la mobilisation effective des intermédiaires ou « fixeurs » pour la plupart des informateurs nationaux. La méthode boule de neige avec un éventail d’acteurs initiaux relativement grand et « hétérogène » obtenu lors d’un préterrain augmente considérablement la capacité de rejoindre des acteurs peu visibles, mais importants. Ces derniers ont été essentiels pour obtenir des entretiens avec certains des principaux acteurs nationaux tunisiens, souvent très sollicités par les chercheurs sur le terrain. De plus, la présentation directe de mon profil et de mes recherches à l’informateur ciblé par un intermédiaire influent auprès de son réseau ou milieu a servi à canaliser les soupçons à propos des objectifs potentiellement non explicités, jetant les bases d’un entretien de qualité. Enfin, pour limiter la subjectivité dans la narration lors de l’interaction, la triangulation des entrevues s’est aussi révélée être une stratégie assez gagnante.