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À l’automne 2017, un partenariat a vu le jour entre deux chercheuses et un chercheur universitaires, deux représentantes de maisons d’aide et d’hébergement, ainsi qu’une collaboratrice à l’international, dans l’objectif d’étudier les pratiques d’intervention dans ces maisons qui accueillent des femmes victimes de violence conjugale au Québec. Ces pratiques n’avaient jamais été évaluées à grande échelle, d’où l’importance de la démarche.

De manière générale, notre projet consiste à étudier dans quelle mesure les femmes victimes de violence conjugale reprennent du pouvoir sur leur sécurité pendant un séjour en maison d’aide et d’hébergement. Le concept de « reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité » a été introduit dans la littérature par une équipe de chercheuses américaines (Goodman et autres 2015) précisément pour examiner les pratiques en matière de violence conjugale. Or, si intéressant et pertinent soit-il, ce concept demeure méconnu du monde francophone. Devant l’absence de littérature en français sur la question, notre équipe de recherche a convenu de documenter la perspective d’intervenantes en maison d’aide et d’hébergement sur le sujet.

Pour ce faire, notre équipe a mené quatre groupes de discussion (focus group) auprès d’un échantillon de dix-huit participantes. Ces groupes de discussion devaient permettre de mieux saisir les pratiques d’intervention qui, selon les intervenantes, influeraient positivement sur la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité pendant un séjour. Les résultats générés par ces entretiens nous ont permis d’émettre trois hypothèses concernant les pratiques axées sur la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité, et ce, en contexte québécois. Ces hypothèses sont présentées dans la section « Discussion » du présent article.

Notre article est divisé en quatre sections. La première porte sur les pratiques d’intervention en maison d’aide et d’hébergement, et détaille le concept de reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité. La deuxième section met en lumière la démarche méthodologique et le cadre théorique privilégiés par l’équipe. Les résultats, divisés en huit grands thèmes, sont présentés dans la troisième section de notre article. Ces résultats sont ensuite mis en relation avec leurs implications méthodologiques et pratiques dans la quatrième section.

Problématique

Les maisons d’aide et d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale se veulent des milieux de vie où les femmes peuvent échapper à l’emprise de leur conjoint violent, avec ou sans leurs enfants, pour recevoir divers services liés à leur situation de violence. Au Québec, la majorité de ces ressources sont membres de l’une ou l’autre des deux grandes associations provinciales : le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale (RMFVVC) et la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF). Ces maisons accueillent femmes et enfants qui fuient une situation de violence conjugale, outre qu’elles offrent une gamme de services externes.

Que recherchent les femmes en se tournant vers ces ressources? Une importante étude menée aux États-Unis sur une cohorte de 565 femmes en maison d’aide et d’hébergement a mis en lumière le fait que leurs principaux besoins sont liés à la sécurité (ex. : scénario de protection), à la recherche d’information (ex. : comprendre la violence conjugale), au bien-être et au réseautage (ex. : counseling), aux démarches avec les ressources de la communauté (ex. : logement, transport, garderie) et à toute question relative à leurs enfants (ex. : éducation) (Sullivan et Virden 2017). Dans une recherche similaire auprès d’un échantillon de 368 Canadiennes ayant séjourné en maison d’aide et d’hébergement, les participantes ont nommé comme principaux besoins le « soutien moral ou [l]e counseling offert par le personnel [de la maison] (81 %), suivi de près par un lieu sécuritaire où demeurer (80 %), des conseils pour faire baisser le stress et la colère (73 %), pour améliorer l’estime de soi (71 %) et l’aiguillage pour trouver un logement (71 %) » (Tutty 2006 : xiii-xiv).

Les pratiques d’intervention au sein de ces ressources sont de différents ordres. Certaines sont davantage formelles, notamment lorsqu’elles impliquent un programme ou une intervention précise qui s’offre à même les maisons d’aide et d’hébergement. Au Québec, plusieurs maisons offrent des programmes spécifiques, par exemple des ateliers sur l’estime de soi ou des groupes thématiques sur la dévictimisation, ou ont mis au point des outils pour guider le processus d’intervention auprès des femmes comme la grille d’évaluation et pistes d’intervention (GEPI), qui est utilisée dans bon nombre de maisons du RMFVVC[1]. D’autres pratiques relèvent plutôt du domaine de l’informel, par exemple lorsque les intervenantes encouragent les femmes hébergées à mettre en commun leur vécu ou à participer à des activités dans une optique de changement social (Côté 2018).

Si de nombreuses pratiques formelles et informelles ciblent évidemment la sécurité des femmes en rapport avec leur situation de violence conjugale (Sullivan et autres 2018; Tutty 2015), les intervenantes offrent également un ensemble de services pour aider les femmes à reprendre du pouvoir dans différentes sphères de leur vie en fonction de leurs besoins précis, notamment des consultations individuelles, de l’aiguillage vers différentes ressources, de l’accompagnement dans les démarches légales, un appui à la recherche d’un logement ou la défense de leurs droits. Peu importe la manière dont s’actualisent ces pratiques féministes en matière de violence conjugale, les notions de « sécurité » et de « reprise du pouvoir » sont centrales dans le processus d’intervention (Côté 2018; Nnawulezi, Sullivan et Hacskaylo 2019).

Reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité

Assurer la sécurité des femmes et favoriser la reprise du pouvoir sur leur vie : voilà deux principes féministes qui guident les pratiques d’intervention en maison d’aide et d’hébergement. Or, étudier les pratiques sous l’angle de ces concepts pris individuellement pose certains enjeux en matière d’évaluation. D’une part, et pour paraphraser la réflexion de Lisa A. Goodman, Kristie A. Thomas et Deborah Heimel (2015 : 5), les intervenantes n’ont que peu de contrôle sur la violence que peut exercer un conjoint ou un ex-conjoint. En effet, évaluer si une femme est ou non en sécurité en dira peu sur la qualité des services reçus. Par exemple, une femme qui a reçu d’excellents services peut tout de même continuer d’être violentée après sa séparation de son conjoint. D’autre part, la reprise du pouvoir – concept aux contours flous – fluctue avec les sphères de la vie d’une femme. Par exemple, une femme dont le conjoint est violent peut avoir un faible niveau de reprise du pouvoir dans sa sphère familiale, mais jouir d’un haut niveau de reprise du pouvoir dans un milieu de travail où elle excelle.

L’imbrication des deux concepts pallie ces problèmes : la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité (safety-related empowerment) évalue dans quelle mesure une femme reprend du pouvoir dans la sphère de sa vie liée à la sécurité, notamment lorsqu’elle reçoit des services spécialisés en matière de violence conjugale. Ce double concept ainsi que l’échelle psychométrique qui le mesure (MOVERS) ont été conçus par une équipe de chercheuses américaines, puis validés auprès d’un échantillon de 230 femmes (Goodman et autres 2015). L’échelle a ensuite été traduite et soumise à un échantillon de 189 femmes au Québec (Côté et autres 2021b) : elle cible « dans quelle mesure une [femme] dispose de ressources internes dans ses démarches pour assurer sa sécurité, sait se prévaloir de l’aide disponible et croit que ses démarches pour assurer sa sécurité ne lui créeront pas d’autres problèmes tout aussi difficiles » (Goodman, Thomas et Heimel 2015 : 5; traduction libre). En somme, plus une femme croit en ses habiletés d’assurer sa sécurité, plus elle estime que le soutien est à sa disposition et accessible dans sa communauté et moins elle envisage que des difficultés pourraient survenir dans ses démarches pour être en sécurité, plus son sentiment de reprise du pouvoir sur sa sécurité sera élevé.

Quelques recherches se sont intéressées aux pratiques associées à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité. Deux d’entre elles, portant sur des échantillons de 255 femmes et de 177 femmes qui recevaient des services en matière de violence conjugale aux États-Unis, ont mis en évidence que des pratiques définies par les femmes ou centrées sur celles-ci (survivor-defined or survivor-centered) seraient positivement associées à deux des trois dimensions de la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité, à savoir les ressources internes et le soutien perçu (Goodman et autres 2016b; Cattaneo et autres 2021). Les pratiques centrées sur les femmes sont celles qui s’actualisent en partenariat avec celles-ci et se concentrent sur leurs objectifs et leurs besoins (Goodman et autres 2016b). Une autre recherche, qui comportait un échantillon de 370 femmes recevant des services en matière de violence conjugale dans cinq États américains, a permis de constater qu’une solide alliance entre la femme et son intervenante est associée à une réduction des symptômes dépressifs et post-traumatiques, notamment grâce à la reprise du pouvoir de cette femme sur sa sécurité (Goodman et autres 2016a).

Enfin, une recherche s’est intéressée aux caractéristiques organisationnelles d’un organisme offrant de l’hébergement (housing organization) et des services aux femmes victimes de violence conjugale ou sexuelle, de torture ou de trafic sexuel. Des entretiens avec 33 femmes ont révélé que les principes de souveraineté, de reprise du pouvoir, de responsabilité, de partenariat, de compassion, d’intégrité et de recentrage (re-centering) seraient positivement associés à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité dans un contexte d’hébergement (Nnawulezi, Sullivan et Hacskaylo 2019). À notre connaissance, une seule étude s’est appuyée sur un devis pré-test et post-test pour mesurer la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité au moment d’un séjour en maison d’aide et d’hébergement. Menée par l’équipe de Cris M. Sullivan (2018), cette étude repose sur un échantillon de 57 femmes de l’Ohio ayant séjourné en maison d’aide et d’hébergement pour au moins 14 jours. Elle démontre que les pratiques sensibles aux traumatismes (trauma-informed) seraient positivement associées à une reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité.

Cependant, toutes ces recherches ont été menées aux États-Unis et concernent des programmes et des services différents de ceux que les maisons d’aide et d’hébergement québécoises offrent. Nous ignorons donc si les principes féministes guidant les intervenantes dans ces maisons au Québec (Corbeil et Marchand 2010; Côté 2018) sont associés à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité.

Considérant l’absence de données empiriques sur le sujet au Québec, notre équipe de recherche veut répondre à la question suivante : quelles pratiques d’intervention contribuent à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité pendant un séjour en maison d’aide et d’hébergement selon la perspective d’intervenantes dans le domaine?

Démarche méthodologique

Notre étude a été financée par le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) et a reçu l’approbation du Comité d’éthique de l’Université Laurentienne. Elle est guidée par une démarche partenariale et féministe (Courcy et autres 2019; Goodman et autres 2017) qui met l’accent, entre autres aspects, sur la solidité d’un partenariat entre les intervenantes des milieux de pratique et des chercheuses universitaires. La rétroaction des femmes qui ont reçu des services en maison d’aide et d’hébergement a également été sollicitée à différentes étapes du projet (Côté et autres 2021a). Par ailleurs, notre équipe est particulièrement attentive à la dimension genrée de la violence conjugale, problématique qui touche principalement les femmes (OMS 2021), et souhaite poser un regard féministe sur les pratiques en maison d’aide et d’hébergement. Ultimement, nous voulons soutenir les intervenantes dans leur travail et renforcer la reprise du pouvoir des femmes victimes de violence conjugale.

Recrutement et échantillon

Pour notre étude, la méthode du groupe de discussion a été retenue. Nous avons ainsi pu explorer une thématique peu connue en recueillant le point de vue d’expertes sur le sujet (Desrosiers et Larivière 2014). Pour ce faire, quatre entretiens ont été menés dans quatre régions administratives du Québec auprès de dix-huit intervenantes en maison d’aide et d’hébergement. La majorité des participantes (n = 13) occupaient un poste en intervention de jour, de soir ou de nuit, alors que trois d’entre elles occupaient plutôt des postes spécifiques : une intervenante jeunesse (n = 1), une intervenante mère-enfant (n = 1) et une intervenante pour le volet « sensibilisation » (n = 1). Deux participantes avaient un poste de gestion et de représentation[2]. Quatorze (n = 14) intervenantes travaillaient en maison d’aide et d’hébergement à temps plein; trois (n = 3), à temps partiel; et une, (n = 1) sur appel. Leur nombre d’années d’expérience variait de 3 mois à 25 ans (moyenne = 7,63; écart type = 8,11).

Méthode de collecte et d’analyse des données

Les groupes de discussion se sont déroulés entre janvier et juin 2020. L’un d’entre eux s’est tenu en présentiel, et les trois autres, par vidéoconférence vu les mesures de distanciation physique liées à la pandémie de COVID-19. Un guide d’entretien semi-dirigé a été élaboré par l’équipe. Divisé en trois grands thèmes, il a permis d’encadrer la discussion : les pratiques associées à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité en maison d’aide et d’hébergement; les facteurs externes influant sur la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité; et les enjeux et les défis relatifs à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité.

Chaque entretien a duré de 50 à 90 minutes et a été enregistré puis transcrit intégralement par trois assistantes de recherche. La chercheuse principale (Isabelle Côté) a réécouté et vérifié chacune des transcriptions par souci d’exactitude. Deux assistantes de recherche se sont ensuite familiarisées avec les transcriptions et ont codé intégralement deux des quatre entrevues. Une séance d’entente interjuge entre les deux assistantes et la chercheuse principale a permis de finaliser la grille de codification où huit grands thèmes associés aux pratiques d’intervention ont émergé inductivement des entretiens. Les quatre entretiens ont ensuite été codés en utilisant cette grille, puis l’analyse thématique de contenu (Braun et Clarke 2006) a fait ressortir les sous-thèmes au coeur de chacun des thèmes principaux.

Notons que seuls les résultats portant sur les pratiques d’intervention (thème 1 du guide d’entretien) seront présentés ci-dessous.

Limites de l’étude

Notre étude comporte certaines limites, qui méritent d’être soulignées. D’abord, les données ne peuvent être généralisées à l’ensemble des pratiques en maison d’aide et d’hébergement, d’autant plus que les participantes travaillaient dans des maisons se situant dans quatre régions du Québec. En ce sens, outre pour le nombre d’années d’expérience des participantes, l’échantillon est relativement peu diversifié.

Par ailleurs, le concept de « reprise du pouvoir sur la sécurité » n’est pas bien connu ni intégré dans le milieu francophone. Si on l’a expliqué aux participantes avant les entretiens, elles n’ont toutefois pas eu le temps d’approfondir leurs réflexions individuelles et collectives sur le concept. Comme les recherches sur le sujet sont encore à l’étape d’émergence, nos résultats doivent donc être considérés comme exploratoires et générateurs d’une première série d’hypothèses, qui devra ultérieurement faire l’objet de recherches plus approfondies.

Enfin, nous devons souligner les limites des entretiens réalisés par vidéoconférence. Bien que l’utilisation de la technologie ait permis la poursuite de la recherche en contexte de pandémie, un groupe de discussion en vidéoconférence demeure inévitablement moins convivial qu’en présentiel et peut limiter les participantes dans leur partage d’expérience. Plus encore, dans l’un des groupes, les participantes portaient un masque, et l’une d’entre elles avait même une visière. Ces éléments limitaient nettement la capacité de la chercheuse principale à saisir les réactions non verbales du groupe. Les biais potentiels de cette dernière limite sont cependant minimaux puisque les participantes discutaient de leurs pratiques et non d’un sujet sensible ou lié à leur vécu personnel.

Résultats

De l’analyse des résultats émergent huit thèmes relatifs aux pratiques qui, selon les participantes, contribuent à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité lors d’un séjour en maison d’aide et d’hébergement : 1) accueil; 2) sécurité; 3) défense des droits; 4) conscientisation; 5) entraide et solidarité; 6) adaptation; 7) autonomie; 8) bien-être. Chaque thème sera ici exploré en détail.

Offrir un accueil de qualité

Pour plusieurs participantes, l’accueil constitue l’un des éléments clés de la reprise de pouvoir des femmes sur leur sécurité pendant leur séjour. Ces intervenantes font état de l’importance d’un accueil rassurant, chaleureux, apaisant et libre de jugement où les femmes sont entendues, crues et validées dans leur expérience de violence conjugale. Bien accueillir les femmes pourrait ainsi avoir d’abord un effet direct sur leur reprise du pouvoir sur leur sécurité, mais également des retombées indirectes. En effet, un accueil de qualité favorise la création d’une alliance entre les femmes et les intervenantes, alliance potentiellement bénéfique pour la suite. L’importance de l’accueil est d’ailleurs soulevée par quelques participantes, dont celle-ci :

Je pense qu’une des choses qui est fondamentale, et que toutes les femmes nomment, c’est le non-jugement. Être accueillie sans jugement, c’est ce qui permet souvent [selon ce qu’elles nous disent], de créer l’alliance éventuellement avec nous.

Participante 15

Rehausser le sentiment de sécurité

Un thème qui émerge des propos des participantes concerne le sentiment de sécurité pendant le séjour. Plus les femmes se sentent en sécurité en maison d’aide et d’hébergement, plus elles sont en mesure de reprendre du pouvoir sur leur sécurité. Concrètement, renforcer le sentiment de sécurité des femmes s’effectue, d’une part, à travers une attitude rassurante et l’offre d’explications précises quant à la sécurité et à la confidentialité des lieux (dispositifs de sécurité), et ce, dès l’accueil. D’autre part, une transmission juste d’informations permet aux femmes d’assurer leur sécurité à l’intérieur[3] comme à l’extérieur de la maison d’aide et d’hébergement. Même si leurs besoins sont variés en matière de sécurité, plus les femmes sont rassurées, plus elles peuvent généralement relâcher leur vigilance et profiter d’un moment de répit pendant leur séjour. Cette participante en discute :

De pouvoir dormir, relâcher leur vigilance parce que, quand elles sont chez elles [...] elles savent que visiblement le conjoint peut entrer. Des fois, ils ont même la clé. C’est impossible, elles sont toujours en hypervigilance [...] Fait qu’elles savent qu’en maison d’hébergement ces problèmes-là ne se poseront pas.

Participante 10

Soutenir et accompagner les femmes dans la défense de leurs droits

Les participantes ont explicitement indiqué l’importance de l’accompagnement et du soutien offerts aux femmes comme élément central de leurs pratiques. Si plusieurs exemples ont été mentionnés en cours d’entretiens, l’analyse des données révèle que soutenir et accompagner les femmes dans la défense de leurs droits contribuerait à la reprise du pouvoir sur leur sécurité. Cette défense se matérialise par deux types de pratiques en maison d’aide et d’hébergement. La première informe les femmes de leurs droits (liés au logement, au processus judiciaire, à la protection de la jeunesse, aux mesures de sécurité, aux manières de porter plainte, etc.) qu’elles pourront ainsi reconnaître et défendre. Mieux connaître ses droits conférerait du pouvoir aux femmes, comme l’explique cette participante :

Quand les femmes connaissent leurs droits, quand elles savent qu’elles peuvent briser leur bail et qu’une loi [...] les protège. Quand elles savent qu’elles peuvent porter plainte ou pas, quand elles savent qu’elles ont le droit de ne pas aller porter les enfants à monsieur. La connaissance, ça donne énormément de pouvoir.

Participante 17

Au-delà du partage d’informations, les intervenantes assistent également les femmes dans la défense de leurs droits. Elles préparent ces dernières aux rencontres avec les différentes instances du système judiciaire et social comme les avocats, la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) ou les corps policiers; en plus, elles les accompagnent et les soutiennent dans ces rencontres. La participante suivante offre un exemple éloquent de l’importance de ce type d’accompagnement :

Souvent, les femmes ne comprennent pas pantoute qu’est-ce qui leur est reproché, parce que si on pense à la protection de la jeunesse ou, dans un langage plus juridique, avec l’avocate ou à la cour, ça va vite, c’est dans un langage assez hermétique. Fait que de s’assurer de la compréhension de la femme […] Quand tu sais… c’est du pouvoir aussi… T’as du pouvoir de comprendre et tu as du pouvoir d’agir aussi... Les femmes ne peuvent pas agir quand elles comprennent même pas ce qui leur est reproché ou qu’est-ce qui se passe. Fait que de les accompagner dans toutes leurs démarches comme ça, quand elles le souhaitent.

Participante 15

Une participante comprend la dimension collective de la défense de droits comme une source de reprise du pouvoir chez les femmes :

Récemment, les femmes en maison ont rencontré madame la députée. Un moment donné, elles ont rencontré monsieur le maire. Ça, là, le fait de rencontrer ces gens-là et de nommer leurs besoins, de le dire, qu’elles [soient] écoutées, tu sais, c’est entendu, puis il y a des gens qui font des choses […] Ça, c’est de l’empowerment important parce qu’elles savent qu’elles peuvent : « J’ai le droit, j’ai une voix, faut que je m’en serve. »

Participante 9

Les participantes sont généralement d’avis que toute pratique d’intervention visant, d’une part, à amener les femmes à connaître et à défendre leurs droits et, d’autre part, à encourager activement ces dernières à se mobiliser pour faire valoir leurs droits en société contribuerait à une reprise de pouvoir sur leur sécurité.

Conscientiser les femmes à la dimension collective et structurelle de la violence conjugale

Selon les participantes, les pratiques d’intervention en vue de conscientiser les femmes à la dimension collective et structurelle de la violence conjugale contribueraient à une reprise du pouvoir sur leur sécurité au fil du séjour. Cette conscientisation s’actualise à travers des discussions individuelles et de groupe autour de la violence conjugale et de son ancrage dans les inégalités sociales entre hommes et femmes. Les intervenantes abordent donc différents sujets avec les femmes : le cycle de la violence, les stratégies employées par les agresseurs, la socialisation, la (dé)victimisation, le processus de reprise du pouvoir, les conséquences de la violence sur les femmes et les enfants, etc. Ce faisant, les femmes en viennent à mieux comprendre leur situation et peuvent progressivement se déresponsabiliser de la violence qu’elles ont subie. Les propos de deux participantes l’illustrent bien :

Dans les interventions qui ont de l’impact, […] on nomme aux femmes que la violence conjugale, c’est l’intention de […] monsieur, c’est pas nécessairement parce qu’elles ont un problème de santé mentale, parce qu’elles consomment […], c’est pas parce qu’il était fatigué, etc. Il a l’intention de faire vivre de la violence. Quand elles comprennent tout ça, c’est vraiment puissant, l’effet que ça a chez elles.

Participante 17

Fait que toute la déresponsabilisation de la femme, mais la responsabilisation de l’agresseur. Parce que ça, c’est fondamental. Les femmes se sentent responsables, se sentent coupables, croient que c’est elles qui sont responsables de toute la violence qu’elles subissent, elles et les enfants. Fait que de travailler à déconstruire ça, puis à responsabiliser l’agresseur, bien là, c’est tout un changement de pensée […] Fait qu’on essaie de faire ce pont-là. Puis, moi, je pense que ça contribue énormément à la reprise de pouvoir des femmes.

Participante 15

Toujours pour conscientiser les femmes, certaines participantes soulèvent l’importance de faire des liens entre les situations de vie de différentes femmes, tant dans les interventions individuelles que de groupes. Cette pratique permet aux femmes de comprendre qu’elles ne sont pas seules à vivre de la violence conjugale et qu’un avenir où les choses s’amélioreront pour elles et leurs enfants est envisageable.

Valoriser l’entraide et la solidarité

Des pratiques valorisant l’entraide et la solidarité ont également émergé des résultats de notre étude. L’entraide concerne le soutien mutuel que les femmes peuvent s’offrir pendant et après leur séjour, alors que la solidarité englobe les pratiques permettant aux femmes de développer un sentiment d’appartenance avec les autres résidentes, les encourageant à s’allier dans l’objectif ultime de contribuer au changement social. Les intervenantes peuvent encourager la création de liens entre les femmes pendant leur séjour, le soutien mutuel, le partage de vécus et la participation à diverses activités. Ces pratiques s’actualisent formellement, par exemple en intervention de groupe, ainsi qu’informellement, comme le mentionnent deux participantes :

Elles échangent souvent en cuisine surtout; quand elles vont fumer dehors, on remarque ça, aussi. C’est un lieu [où] les femmes c’est sûr [que] ça les unit. Elles racontent leurs histoires, chacune, puis elles se créent des liens entre elles.

Participante 10

Des rencontres de groupes, c’est très, très puissant […] et ça, ça donne énormément de pouvoir aux femmes parce qu’elles ne sont pas isolées. C’est pas une situation qui est juste à elle, c’est un problème social. Elle est pas toute seule, il y a plein d’autre monde qui vit la même affaire. Il y a juste le prénom du conjoint, souvent, qui change, puis pour elle, c’est rassurant parce qu’elle voit qu’elle est rendue là, elle s’en sort. Tu sais […] l’union fait la force.

Participante 9

Des pratiques axées sur l’entraide et la solidarité peuvent contribuer à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité en leur offrant la possibilité de créer des liens jusqu’à potentiellement rebâtir un réseau de soutien qui leur sera bénéfique pendant et après leur séjour. En outre, ces liens permettent aux femmes de situer leur vécu dans un contexte plus global et les poussent parfois vers des actions concrètes pour lutter contre la violence conjugale, ce qui contribuerait à la reprise du pouvoir sur leur sécurité.

Considérer les besoins des femmes et adapter ses pratiques en conséquence

Un autre thème ressortant des données est l’importance de considérer les besoins spécifiques de chaque femme et d’adapter ses pratiques en conséquence. Les participantes reconnaissent que les femmes n’ont pas les mêmes besoins ni la même trajectoire avant leur arrivée en maison d’aide et d’hébergement. Cela est d’autant plus vrai si on considère que les femmes vivent différentes problématiques en parallèle liées, notamment, à la consommation, à la santé mentale, à la pauvreté, à l’itinérance ou à la précarité d’un statut migratoire. Les intervenantes doivent donc faire preuve d’ouverture et d’une capacité à moduler leurs pratiques en fonction des besoins et des objectifs prioritaires de chaque femme. C’est ainsi que les femmes visées pourront poursuivre des objectifs atteignables et constater qu’elles peuvent cheminer :

C’est beaucoup plus valorisant de dire : « OK, ça, je suis capable de le faire en une semaine ou en deux semaines, tu sais, c’est un objectif qui est atteignable et réalisable pour moi. » C’est valorisant, puis c’est comme ça, aussi, que tu reprends du pouvoir aussi […] avec les priorités.

Participante 18

Alors que certaines femmes arrivent à la maison d’aide et d’hébergement en situation de crise et ont besoin de soutien pour répondre à leurs besoins de base et à leur sécurité immédiate, d’autres femmes ont déjà fait une partie du cheminement et sont en mesure de se projeter dans l’avenir. Pour une participante, une certaine forme de reprise du pouvoir s’opère dès le moment où une femme arrive en maison d’aide et d’hébergement, peu importe si elle est guidée par un besoin de sécurité immédiate, une recherche d’outils afin de mieux comprendre sa situation ou un désir de prendre du recul :

Ce qui est certain, par contre, c’est qu’à l’arrivée d’une femme la reprise de pouvoir est toujours là, dans le fond. Ça va dépendre de son background, d’où elle est rendue.

Participante 13

Selon les participantes, les femmes reprendront davantage de pouvoir sur leur sécurité si elles se sentent considérées pendant leur séjour et que les pratiques répondent à leurs besoins spécifiques, tout en respectant leurs capacités personnelles et leur rythme. L’importance de s’adapter aux femmes, plutôt que l’inverse, devient ainsi une pratique à préconiser durant le séjour.

Reconnaître et promouvoir l’autonomie des femmes

Au dire des participantes, des pratiques qui misent sur l’autonomie contribueraient elles aussi à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité, à la fois pendant le séjour en maison d’aide et d’hébergement et à plus long terme. Différentes pratiques visent donc à amener les femmes à croire en leurs capacités dans divers aspects de leur vie et à mettre en application les nouvelles habiletés acquises pendant leur séjour. Pour ce faire, les intervenantes doivent appliquer le principe de reconnaissance du potentiel, des compétences et des capacités des femmes (Corbeil et Marchand 2010) en valorisant les stratégies qu’elles ont elles-mêmes mises en place dans le passé pour survivre au contexte de violence conjugale. Les femmes sont donc à même de réaliser qu’elles possèdent certaines habiletés, sur lesquelles et grâce auxquelles elles peuvent bâtir. Les intervenantes estiment d’ailleurs avoir un rôle à jouer dans ce processus, notamment en renforçant les efforts fournis par les femmes pour faire face à la violence :

C’est vraiment de reconnaître que, dans cette situation-là, toutes ses stratégies de protection ont porté fruit, parce que ça lui a sûrement permis de survivre. Puis ça, ça lui donne la force de continuer puis de voir qu’elle peut, qu’elle a pris des moyens, qu’elle est capable de prendre des moyens adaptés à sa situation.

Participante 11

La reconnaissance de l’autonomie des femmes se traduit par un travail en alliance. Certaines participantes expliquent que, dans leurs interactions avec les femmes, elles préfèrent soulever des éléments de réflexion plutôt que de fournir des réponses. Les femmes peuvent ainsi générer leurs propres réponses en fonction de leurs besoins et de leurs réalités :

Dans nos interventions, il faut l’amener à ça, ce n’est pas de lui mettre les mots dans la bouche, c’est d’amener les questions pour qu’elle-même se questionne et trouve ses réponses.

Participante 12

Puis on lui dit souvent « Qu’est-ce que t’en penses? » Pas des « pourquoi », mais [des] « Toi, comment tu vois ça? » C’est d’amener la femme à prendre ses décisions.

Participante 10

Dans une optique de promotion de l’autonomie des femmes, les intervenantes les outillent au mieux pendant leur séjour et les informent des ressources et des services à leur disposition. Certaines femmes ont plusieurs besoins qui sont soit directement liés à la situation de violence conjugale[4], par exemple la prise en charge des traumas, soit plutôt indirectement, comme une régularisation de leur statut migratoire. De savoir qu’il existe des ressources et des services pour les appuyer et qu’elles pourront obtenir de l’aide dans leurs démarches pourrait contribuer à rehausser la reprise du pouvoir sur leur sécurité pendant le séjour. À cet égard, les intervenantes doivent, entre autres, créer des ponts vers certains services spécialisés :

Fait que de leur donner accès à des services peut-être plus spécialisés, qui vont les aider à assurer leur sécurité […], de les identifier avec elles puis d’essayer de pister [chaque femme] pour qu’elle puisse avoir l’aide, de lui construire un peu un filet de services autour d’elle puis un certain réseau social, aussi, à travers les organismes communautaires. Fait que d’essayer de l’aider à naviguer à travers ça pour le post-hébergement, aussi.

Participante 15

Favoriser un sentiment de bien-être dans la maison

Enfin, plusieurs participantes ont mentionné, explicitement ou implicitement, l’importance pour les femmes de vivre dans un milieu calme, paisible, chaleureux et sans violence où l’on prône le non-jugement et la transparence. À leur avis, plus les femmes se sentent bien pendant leur séjour, plus elles seront capables de reprendre du pouvoir sur leur sécurité. Une participante souligne ceci :

Puis aussi de savoir que c’est un lieu sans violence, ça les rassure beaucoup, de savoir que tout le monde se parle sur un bon ton […] De savoir qu’on est un lieu [où] on maintient ça, c’est rassurant pour elles aussi.

Participante 16

Discussion

Comme nous l’avons mentionné plus haut, les groupes de discussion avaient comme objectif d’explorer les éléments qui, selon des intervenantes, contribuent à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité pendant un séjour en maison d’aide et d’hébergement. Les huit thèmes qui ont émergé des résultats nous ont permis de générer trois hypothèses, qui seront testées dans la prochaine phase de notre étude. Celle-ci étudiera les retombées des pratiques d’intervention sur la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité.

La première hypothèse proposée veut que : plus une femme reçoit des services centrés sur ses besoins, plus elle reprendra du pouvoir sur sa sécurité pendant son séjour en maison d’aide etd’hébergement. Cette hypothèse s’appuie sur les thèmes 6 (adaptation) et 7 (autonomie) de notre étude. Des pratiques centrées sur les femmes seraient associées à une meilleure perception, par ces dernières, de leur capacité à assurer leur propre sécurité (ressources internes) et à obtenir du soutien pour rester en sécurité (soutien perçu). Ces pratiques touchent donc deux des trois dimensions de la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité (Goodman et autres 2016b). Par ailleurs, plus les femmes reçoivent des services qui répondent à leurs besoins pendant leur séjour (sécurité, information, soutien et aiguillage, ressources communautaires, enfants), plus elles sont optimistes quant à l’avenir au moment de quitter la maison d’aide et d’hébergement (Sullivan et Virden 2017). Les femmes apprécient également l’aide reçue pour favoriser leur indépendance financière, élément clé dans leur processus de séparation conjugale (Brown et autres 2005). Si les femmes démontrent une appréciation de ces dimensions des pratiques, nous ignorons toutefois si ces dernières permettent réellement une reprise du pouvoir sur la sécurité pendant un séjour en maison d’aide et d’hébergement. Notre première hypothèse mériterait donc d’être testée pour être confirmée ou non.

La deuxième hypothèse proposée soutient que plus une femme apprécie la qualité des services reçus, plus elle reprendra du pouvoir sur sa sécurité pendant son séjour en maison d’aide etd’hébergement. Cette hypothèse s’appuie sur les thèmes 1 (accueil), 2 (sécurité) et 8 (bien-être) de notre étude. Les maisons d’hébergement sont des lieux qui permettent aux femmes d’être en sécurité, notamment par la réduction de risques d’incidents violents (Messing et autres 2017). À cet égard, une vaste étude canadienne sur une cohorte de 368 femmes recevant des services en maison d’hébergement a dévoilé que 80 % d’entre elles recherchent d’abord et avant tout un endroit sécuritaire au moment de faire une demande d’hébergement (Tutty 2006). Au-delà de cette recherche de sécurité, les femmes veulent aussi se sentir à l’aise pendant leur séjour dans un climat convivial, chaleureux et dénué de violence (Hughes 2017). Une fois encore, nous savons que le fait de se sentir bien et en sécurité pendant un séjour est particulièrement apprécié des femmes, mais nous ignorons si les pratiques favorisant ce climat permettent réellement une reprise du pouvoir sur sa sécurité. C’est précisément ce que la deuxième hypothèse permettra de tester.

La troisième hypothèse proposée est la suivante : plus une femme reçoit des services ancrés dans la perspective féministe, plus elle reprendra du pouvoir sur sa sécurité pendant son séjour en maison d’hébergement. Cette hypothèse s’appuie sur les thèmes 3 (défense des droits), 4 (conscientisation) et 5 (entraide et solidarité) de notre étude. La défense des droits, fondamentale dans les pratiques privilégiées en maison d’aide et d’hébergement, se manifeste à travers différentes stratégies des intervenantes (Frenette 2017). Il en va de même pour la conscientisation, qui constitue l’un des objectifs de l’intervention féministe au Québec (Corbeil et Marchand 2010). Une récente étude américaine sur un échantillon de 98 femmes recevant des services en maison d’aide et d’hébergement a mis en lumière la corrélation entre les pratiques axées sur la conscientisation et l’augmentation du sentiment d’auto-efficacité des femmes, c’est-à-dire leur croyance en leurs capacités d’atteindre des objectifs (McGirr et Sullivan 2017). Quant à la solidarité, c’est une des valeurs fondamentales régulant les pratiques des maisons d’aide et d’hébergement, et ce, depuis leur naissance au milieu des années 70 (Côté 2018). Les liens que les femmes peuvent créer entre elles pendant leur séjour ainsi que le partage de leurs expériences de violence conjugale (Bowstead 2019; Few 2005) font naître une solidarité qui peut, dans certaines circonstances, les amener à s’allier dans une lutte contre les injustices qu’elles subissent (Côté 2018). Si importantes soient-elles, ces trois dimensions des pratiques n’ont, à notre connaissance, pas été mises en rapport avec la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité. C’est ce que la troisième hypothèse cherchera à mesurer.

Conclusion

Nous avons présenté dans les pages qui précèdent les résultats d’une recherche menée auprès de dix-huit intervenantes dans quatre maisons d’aide et d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale au Québec, par l’entremise de groupes de discussion. L’analyse thématique de contenu a révélé que huit dimensions des pratiques permettraient, selon les participantes, de contribuer à la reprise du pouvoir des femmes sur leur sécurité pendant un séjour en maison d’aide et d’hébergement. Ces résultats ont, en outre, permis de générer trois hypothèses, décrites plus haut, que nous testerons dans la prochaine phase de notre étude.

Nous tenons à souligner que les maisons d’aide et d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale constituent des ressources essentielles en vue d’assurer la sécurité des femmes et de les appuyer dans leur reprise du pouvoir. Nous savons encore bien peu de choses de l’effet des pratiques d’intervention sur les femmes qui séjournent au sein de ces ressources. Étudier plus attentivement ces pratiques permettra de faire avancer les connaissances dans le domaine, ainsi que mettre en lumière le travail des intervenantes en maison d’aide et d’hébergement au Québec de même que ses retombées sur les femmes victimes de violence conjugale.