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Pour remédier à l’échec scolaire, l’organisation du travail scolaire a fait place à des réformes proposant différentes approches. Les réformes actuelles des pays francophones de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) misent sur l’approche socioconstructiviste pour développer des compétences. Au-delà des contenus des programmes, l’organisation scolaire est questionnée. Cet ouvrage arrive à point pour alimenter la réflexion sur les enjeux des réformes du point de vue des adeptes du socioconstructivisme.

Les travaux de ce collectif traitent de l’organisation du travail scolaire sans prétendre que celle-ci permettrait de résoudre tous les problèmes de l’école. D’entrée de jeu, ils précisent leur posture : voir comment se réorganisent le travail des élèves et celui des enseignants lorsque les cycles d’apprentissage […] pour mieux lutter contre l’échec scolaire (p. 9). Percevant l’organisation actuelle de l’école comme héritée, ancrée dans l’histoire, les auteurs la jugent responsable de l’exclusion ou de l’échec scolaire et présentent des changements en éducation, décrivant et conceptualisant les pratiques de gestion de classe et de pilotage de systèmes éducatifs. Deux chapitres de l’ouvrage sont consacrés au socioconstructivisme. Muller reconnaît que la construction d’un référentiel socioconstructiviste nécessite un travail de réflexions théoriques et épistémologiques inspirées des pratiques enseignantes (p. 119). Portante considère que la prise de pouvoir des élèves au sein de l’institution scolaire permet le développement du leadership des enseignants et la transformation de leur pratique (p. 183). Pasquier formule une mise en garde : que l’organisation du travail ne vire pas au cauchemar pour les élèves (p. 204), et Rham explique que la réorganisation du travail scolaire est une démarche exigeante (p. 247), alors que Barthassat note qu’un projet d’établissement peut être un marché de dupes dans un système qui n’est pas vraiment décentralisé (p. 305). Archambault, Chouinard et Richer rappellent que l’accompagnement professionnel et l’appui de la direction d’établissement demeurent essentiels au développement professionnel des enseignants (p. 226). Cependant, le rôle essentiel des chefs d’établissement n’est pas déterminé de manière assez précise. Mané et Lessard soulignent l’importance de la dimension cognitive et de la transmission des savoirs (p. 334) et la nécessaire formation des conseillers pédagogiques accompagnant les enseignants (p. 335). De son côté, Benetti perçoit que l’organisation du travail est un enjeu de pouvoir susceptible de remise en question (p. 402) et Perrenoud affirme que considérer l’organisation du travail comme une variable changeable reste à faire en éducation (p. 425). En conclusion de l’ouvrage, Maulini et Gather Thurler ouvrent la voie à la poursuite de travaux de recherche dans cette direction en reconnaissant que : C’est parce que nos désirs ne font pas la réalité que la pratique et la recherche en éducation ont […] un travail commun à organiser (p. 437).

Selon nous, cet ouvrage collectif a produit une explication valable et intéressante de l’insuccès persistant des réformes en éducation. Pour cette raison, il mérite d’être lu, car il contribue aussi à la construction d’outils nécessaires, tant au développement du rapport à l’organisation du travail enseignant qu’à son ouverture sur une dimension collective de l’organisation du travail scolaire.