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Promue en 2000 par le Partenariat mondial de l’eau, la gestion intégrée des ressources en eau (GIRE) a déjà fait l’objet de nombreuses publications et études scientifiques (Burton, 2001), (Gangbazo, 2004).

En effet, la gestion des ressources en eau est, aujourd’hui et partout dans le monde, une question centrale des politiques et stratégies de développement. Surtout que, au-delà du caractère précaire de l’eau et de sa qualité parfois douteuse dans certaines régions, nombre de sources d’eau présentent un défi supplémentaire à gérer du fait de leur caractère transfrontalier. De plus, l’importance de cette ressource, qui s’impose d’ailleurs comme incontournable, exige la nécessité d’en faire une gestion intégrant les défis auxquels elle et ses utilisateurs sont confrontés (pollution, raréfaction …). En Afrique subsaharienne, le défi est d’autant plus grand que, en plus des conditions climatiques souvent rudes pour les ressources en eau, les États sont relativement jeunes (la plupart ayant eu leur indépendance dans les années 1950-1970) et en plein développement, les institutions n’étant par ailleurs pas très expérimentées. C’est dans ce contexte que l’auteur se propose de faire une analyse de la GIRE et des politiques de développement en Afrique de l’Ouest.

L’ouvrage aborde un thème d’actualité dont l’intérêt n’est plus à démontrer. Le cas d’étude examiné est d’autant plus captivant que le besoin d’information quant à l’intégration de la GIRE et la gestion des ressources en eau de l’Afrique de l’Ouest est grand. Plusieurs publications ont certes traité de la gestion des ressources hydriques en Afrique, mais la littérature relative à la GIRE en rapport avec le développement socioéconomique du continent et les économies régionales spécifiques est encore très éparse et pauvre, d’où le grand intérêt et l’avantage de cette publication.

L’auteur met l’accent sur le poids des ressources en eau pour le développement et l’avenir de l’Afrique, tant sous des aspects politiques, économiques et environnementaux que sociaux. Il souligne également l’importance de la GIRE comme solution à la gestion des ressources en eau et à l’utilité d’une contextualisation du concept dans son application. Toutefois, même si la GIRE et ses pratiques en Afrique subsaharienne avaient été abordées par Frédéric Julien (2012), ce livre se démarque, car il propose une analyse des programmes et projets mis en oeuvre en Afrique de l’Ouest, qui visent et qui pourront favoriser une implantation de la GIRE, et donc une meilleure gestion des ressources en eau.

En effet, d’entrée de jeu, l’auteur souligne l’urgence d’une gestion intégrée des ressources en eau à travers la planète, et plus particulièrement en Afrique. Il introduit son propos en mettant en exergue la disparité qui existe entre la croissance démographique, le développement et la disponibilité des ressources en eau. Il insiste sur la dépendance de la sous-région de l’Afrique de l’Ouest à la maîtrise de l’eau pour son développement socioéconomique et pour la survie de ses populations. Il souligne également les initiatives et efforts mis en place à différentes échelles du globe pour favoriser une gestion intégrée des ressources ; efforts qui traduisent la prise de conscience quant à l’urgence de la situation.

Le premier chapitre offre une synthèse très intéressante des connaissances sur la vision de l’Organisation des Nations Unies (ONU) quant aux ressources naturelles, la GIRE et son évolution et surtout les initiatives collectives à travers le monde concernant les problématiques relatives à l’eau (p. 22-28). Au fil de son développement, l’auteur démontre bien l’importance de la GIRE dans les programmes et projets de développement mis en place par l’ONU et les organismes internationaux en Afrique de l’Ouest (chapitres II et IV). L’exposé synthétique des enjeux de l’eau (p. 29) et le développement sur la vision africaine de l’eau et le contexte économique en Afrique de l’Ouest (chapitre IV) permettent de comprendre les différents défis que doivent solutionner les politiques de développement en Afrique de l’Ouest. Bien plus qu’une approche de gestion des ressources en eau, la GIRE serait donc pour l’Afrique de l’Ouest un outil-clé de coopération, de croissance socioéconomique, de lutte contre la pauvreté et de préservation de l’environnement (p. 81).

Selon l’auteur, même si leur efficacité reste à confirmer, les politiques et stratégies de développement à toutes les échelles (donc aussi en Afrique de l’Ouest) ont suffisamment « impliqué » la GIRE comme « outil de réalisation des visions de développement » (p. 95). Certes, par son caractère multifonctionnel et multidimensionnel et par son importance irréfutable pour le développement social et économique, l’eau fait l’objet de nombreuses réflexions et est au coeur de plusieurs initiatives de développement (plans, programmes…) et débats politiques. Toutefois, les organismes de bassin, dont l’auteur ne fait ici qu’un survol très succinct, sont les organes par excellence qui oeuvrent tant au niveau national que régional pour la gestion durable des ressources en eau et donc pour la mise en oeuvre de la GIRE. Pour cette raison, ces organismes auraient dû avoir un peu plus de place dans l’exposé de l’auteur.

Avec un texte facile à lire et bien structuré, cet ouvrage aborde des thèmes assez particuliers. En effet, l’auteur ne propose pas une analyse par pays de la sous-région. Il s’intéresse tout au contraire à des éléments qui, selon ses observations, influencent ou pourraient influencer les politiques de développement et leur mise en oeuvre en Afrique de l’Ouest. Son développement est assez clair, mais surtout assez concis, ce qui pourrait prêter flanc à la critique. La concision est certes un réel avantage pour un ouvrage qui aborde une question aussi vaste, mais on pourrait reprocher à l’auteur de passer trop rapidement sur plusieurs points, surtout que les aspects théoriques et conceptuels sont très peu abordés.

Bien que l’ouvrage donne l’impression de s’adresser davantage à des praticiens, il présente le mérite de pouvoir être lu et compris tant par un profane que par un spécialiste du domaine. En 96 pages, l’auteur réussit à apporter des informations importantes sur la GIRE et sur le contexte ouest-africain. L’objectif de contribuer à la connaissance des politiques et stratégies de développement économique et social impliquant la GIRE en Afrique de l’Ouest (p. 10) est plutôt bien atteint même si le lecteur, particulièrement le scientifique, pourrait rester sur sa faim. En effet, l’ouvrage semble surtout vouloir faire l’éloge de la GIRE et en démontrer l’urgence, ce qui ne cadre pas tellement avec les attentes suscitées tant par le titre que par le préambule de l’ouvrage. Mais cela n’enlève rien à la pertinence, ni à l’intérêt de cette oeuvre.