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Introduction

« La paternité passe d’abord “ par la tête ” » (Delaisi de Parseval, 1981 : 14) rappelle la psychanalyse, soulignant par là qu’elle n’est pas une donnée purement biologique, mais représente bien plus un construit culturel. Au fil de l’histoire et selon les sociétés à l’intérieur desquelles elle s’est inscrite, elle a pris différentes formes et rempli diverses fonctions. À cet égard, adoptant une perspective sociojuridique, certains auteurs, surtout en Europe, font de l’histoire des pères celle de « l’effritement de sa toute-puissance », le déclin de son autorité – scellé, entre autres, par le passage de l’affirmation de la puissance maritale à celle de l’autorité paternelle, puis au partage de l’autorité parentale (Castelain-Meunier, 1997 ; Hurstel, 1996 ; Delumeau et Roche 1990). D’autres auteurs, cette fois-ci surtout en Amérique du Nord, s’intéressent plutôt aux transformations de la conception du rôle paternel (Lamb, 1995 ; Bozett et Hanson, 1991 ; Bronstein et Pape Cowan, 1988 ; Chiland, 1983) et s’entendent pour reconnaître trois modèles associés à trois grandes périodes historiques. Le premier modèle est celui du père conçu comme guide moral et formateur, dont l’idéal-type a été le « père colonial américain » (Rotondo, 1985) ou, en Europe, le « patriarche rural » (Castelain-Meunier, 2002). Le deuxième modèle, qui émerge avec la révolution industrielle, est celui du père chef de famille, qui pourvoit aux besoins des siens par son rôle économique. Le troisième modèle, apparaissant à partir des années 1960, se caractérise par la complexité de plus en plus grande du rôle paternel : il ne suffit plus d’être un bon travailleur pour être un « bon père de famille », il faut aussi être un modèle pour son fils. L’accent va alors être mis sur l’importance des pères dans le développement psychoaffectif des enfants. À partir des années 1980 va s’ajouter à ces dimensions l’importance du « paternage » au quotidien : un père doit « s’impliquer[1]  » envers son enfant et dans sa famille, c’est-à-dire être un père qui, à l’image de la mère, est capable à la fois de prodiguer de l’affection, d’être présent dans les tâches éducatives (aide aux devoirs, etc.) et les soins quotidiens (bains, etc.), de même que dans « l’administration » des affaires familiales (planification des rendez-vous chez le médecin, le dentiste, organisation des vacances, etc.).

Quelques résultats d’études sur l’implication paternelle

Mais qu’en est-il dans les faits ? Les pères sont-ils réceptifs aux discours sur l’implication ? Et si oui, comment s’impliquent-ils ? Que recouvre la fonction paternelle ? Les recherches effectuées depuis une vingtaine d’années sur la paternité ont apporté quelques réponses à ces questions. Dans le champ de la psychologie notamment, on a voulu mesurer le degré d’implication des pères (Atkinson, 1987 ; Benokraitis, 1985) puis mettre au jour les déterminants de l’implication paternelle (Volling et Belsky, 1991 ; Russel, 1982). Pourquoi des pères participent-ils activement aux tâches quotidiennes associées aux soins de leur enfant, alors que d’autres y participent peu ou pas du tout ? Pourquoi un bon nombre de pères ne commencent-ils à s’intéresser à leur enfant que lorsqu’il atteint l’âge scolaire ? Bien qu’il n’existe toujours pas de consensus clair sur cette question des déterminants, divers facteurs d’ordre à la fois socioculturel, familial, conjugal et personnel ont été pointés comme étant susceptibles de jouer un rôle, selon certaines combinaisons, sur le mode et le degré d’implication du père : ses représentations des rapports entre les sexes, de la famille et du rôle paternel (Crouter et al., 1987) ; son sentiment de compétence ou d’incompétence parentale (McBride, 1989) ; son rapport à son propre père (Barnett et Baruch, 1987) ; l’âge et le sexe de son ou ses enfants ; la qualité de la relation conjugale (Perry-Jenkins et Crouter, 1990) ; le statut d’emploi de la conjointe (Benokraitis, 1985) ; son rapport au travail, etc. Dans le champ de la sociologie, les études ont plutôt cherché à donner la parole aux pères afin de dégager leurs propres définitions (Dycke et Saucier 1999 ; Dienhart, 1998 ; Delaisi de Parseval, 1981 ; Ferrand, 1981). Ainsi en a-t-il été de nos propres recherches menées, il y a quelques années, auprès de pères québécois issus de divers milieux sociaux (Quéniart, 2002a ; Fournier et Quéniart, 1994). Nous faisions d’abord, comme d’autres, le constat d’une pluralité de conceptions et de pratiques paternelles chez les pères, pluralité dont nous avons voulu rendre compte par une typologie. En fait, trois « manières d’être père », trois façons d’envisager et de vivre sa paternité ont été dégagées[2]. La première, désignée comme une paternité « familialiste », tournée vers la famille, regroupe des hommes pour qui la notion de père équivaut à celle de « père de famille » et renvoie à la seule fonction de pourvoyeur et de protecteur. Ces pères ont une vision très stéréotypée des rapports à l’intérieur de la famille, chacun y ayant une place et un rôle bien déterminés : à la mère, toutes les tâches associées à la satisfaction des besoins quotidiens des enfants et au bon fonctionnement de la famille, et ce, même dans les situations où, comme lui, elle travaille à l’extérieur ; au père, l’autorité et la discipline. La relation père-enfant n’a pas une vie indépendante, elle n’a d’existence et de sens que dans le contexte des activités familiales. Une deuxième forme de paternité a émergé, nommée parfois « nouvelle paternité », que nous avions pour notre part qualifiée de « paternité tournée vers l’enfant ». Pour ces hommes, être père, c’est être un parent, c’est-à-dire quelqu’un dont la responsabilité est d’abord à l’égard de l’enfant et non de la famille. C’est la dimension expressive de leurs pratiques qui est centrale pour eux, qui les définit comme père. Si le rôle de pourvoyeur est aussi présent, il est perçu comme incombant autant au père qu’à la mère et ne structure pas leurs représentations de la paternité comme telle. Celle-ci est plutôt décrite en termes de présence, de proximité avec l’enfant. Une troisième forme de paternité s’est également dégagée de ces recherches : une paternité faite de tensions entre, d’une part, des représentations plutôt « nouvelles » (proximité-présence) et des pratiques plutôt traditionnelles (division sexuelle des tâches entre la mère et le père, dimension du pourvoi attribué principalement au père). Nous l’avions qualifiée de « paternité flottante ». Pour ces pères, la paternité est plus un « état » objectif qu’une expérience intériorisée. Ces pères se sentent responsables de l’enfant, mais s’impliquent peu, concrètement, envers lui, ou, en tout cas, de manière inconstante. Ils se définissent eux-mêmes comme écartelés entre leurs rôles de père et de pourvoyeur, comme s’il y avait une impossibilité à assumer les deux fonctions. Leur travail occupe une place fondamentale dans leur vie, de même que leur vie sociale, qu’ils voudraient « comme avant » les enfants.

Qu’en est-il 10 ans plus tard ? Retrouve-t-on ces mêmes trois « modèles » de paternité ? Les choses ont-elles changé ? Pour répondre à ces questions, il nous a paru intéressant de nous tourner vers les jeunes pères, postulant que si changement il y avait eu, nous en retrouverions les manifestations dans les pratiques de cette nouvelle génération. Profitant des premiers résultats d’une recherche qualitative en cours qui portait plus généralement sur l’expérience de la parentalité à un jeune âge, nous avons « relu » les entrevues déjà effectuées dans la perspective d’une interrogation sur les changements dans la paternité.

Aspects méthodologiques de la recherche

La recherche[3] entreprise porte plus précisément sur l’expérience parentale de jeunes pères et de jeunes mères. Nous nous proposons d’analyser la place et le sens que prennent la paternité et la maternité dans la vie des jeunes, entre autres dans la transition vers l’âge adulte. Pour ce faire, nous avons opté, sur le plan méthodologique, pour l’approche qualitative de la théorisation ancrée[4] qui est appropriée dans le cas de phénomènes ou de groupes sociaux peu étudiés. Des entrevues en profondeur ont été menées auprès de jeunes pères et de jeunes mères provenant de divers milieux sociaux et ayant eu leur premier enfant avant l’âge de 25 ans.

Sélection et caractéristiques des répondants

En ce qui a trait au volet sur la paternité, l’échantillon se compose de 32 jeunes pères, qui ont été recrutés, sur une base volontaire, par le biais de diverses sources : annonces dans les journaux, dans les associations étudiantes, dans les écoles pour « raccrocheurs », dans les garderies, et conformément à la théorisation ancrée, les critères de sélection de l’échantillon ont été la diversité des situations en termes conjugal (mariée, conjoint de fait, séparé), parental (père de un ou plusieurs enfants, etc.) et socioprofessionnel (au travail, à la maison, aux études, etc.). Les seuls critères auxquels devaient satisfaire tous les jeunes étaient d’avoir moins de 25 ans et d’être un père d’au moins un enfant, âgé d’un an ou plus.

Les répondants sont âgés de 19 à 25 ans au moment de l’entrevue et ont eu leur premier enfant entre 17 et 24 ans, la moyenne étant de 21,4 ans. Quinze d’entre eux ont un diplôme d’études secondaires ou une scolarité moindre (4e secondaire), sept ont un diplôme d’études collégiales ou d’études professionnelles, sept un baccalauréat, un détient un certificat universitaire et deux poursuivent actuellement leurs études de maîtrise. Ils ont des revenus personnels variant de moins de 12 000 $ à plus de 40 000 $, 12 d’entre eux gagnant 15 000 $ et moins, quatre d’entre eux gagnant plus de 30 000 $, les 16 autres ayant un revenu entre 15 000 $ et 30 000 $. Vingt-trois sont des travailleurs dont 14 à temps plein et 3 à temps partiel ; 6 combinent travail et études ; 5 sont des étudiants à temps plein ; 4 sont prestataires de la sécurité du revenu. Deux des pères interviewés avait deux enfants au moment de l’entretien. Cinq autres sont pères d’un enfant et en attendaient un second au moment de l’entrevue. Deux autres hommes sont membres d’une famille recomposée autour de la mère qui avait un enfant d’une union antérieure ; dans les deux cas, un second enfant est né de leur union. Les 23 autres pères ont un seul enfant. Trois pères sont séparés de leur conjointe et un quatrième n’a jamais cohabité avec elle ; et dans tous ces cas, ils ont la garde partagée de l’enfant. Les autres vivent en couple ; 8 sont mariés et 20 vivent en union libre.

Réalisation et analyse des entrevues

Les entrevues, d’une durée moyenne de 90 minutes, ont eu lieu à nos bureaux à l’université pour les deux tiers, au domicile des jeunes pour les autres. Un guide d’entrevue a été élaboré, comportant les principaux thèmes suivants : le contexte de la venue de l’enfant, les liens avec la famille d’origine, le rapport des jeunes pères à leur enfant et à la famille (représentations, pratiques quotidiennes), la place de leur vie personnelle et de couple, de leur vie professionnelle et de leur vie sociale. Toutes les entrevues ont été enregistrées puis retranscrites intégralement et soumises à une analyse qualitative de contenu comportant les étapes suivantes : 1) l’analyse verticale (contenu d’une entrevue) consistant à repérer et à coder les thèmes et sous-thèmes, à dégager les éléments organisateurs du récit, à effectuer des regroupements en catégories et à élaborer des hypothèses ; 2) l’analyse transversale (comparaison des entrevues) visant à comparer les contenus des discours des jeunes pères selon les variables indépendantes pertinentes (situation conjugale, occupation, etc.), à vérifier les hypothèses de travail, notamment par la recherche de cas négatifs et à raffiner les catégories créées.

Résultats

Dans ce texte, nous nous proposons de faire état de certaines dimensions de l’expérience paternelle de jeunes hommes afin de répondre aux deux questions suivantes : En quoi consiste leur paternité (à quelles dimensions renvoie-t-elle) ? Comment fonctionne la répartition des tâches et des rôles parentaux avec la conjointe ? Peut-on constater des changements en regard de l’étude effectuée il y a dix ans ?

Être père aujourd’hui, cela consiste en quoi ?

Un père, c’est une présence quotidienne

À la question, « Être père, cela consiste en quoi ? », la présence auprès de l’enfant est revenue comme un leitmotiv chez tous les jeunes hommes interrogés, présence dans et par le jeu mais aussi dans les « soins de base », bref, présence au quotidien :

Un père, à mon avis, c’est quelqu’un avec qui tu peux partager des affaires. C’est quelqu’un qui est présent, qui vit avec l’enfant, qui est là pour l’épauler, qui joue beaucoup avec. Un jeu vidéo, ça n’achète pas la présence d’un père, c’est ça que je pense. (Alexis, 19 ans, un enfant de 8 mois, 4e secondaire.)

Ça demande énormément d’amour et d’attention. Concrètement, c’est tout le temps être là, tout le temps avoir l’attention, pis du contact. Si tu ne le vois pas de la semaine, je crois pas à ça. Je pense qu’il faut que ton enfant apprenne à te connaître autant que toi t’apprends à le connaître, pis ça, ben ça se fait à tous les jours, pis ça se fait au quotidien, pis tout le temps rester disponible, garder une certaine présence tout le temps. (Charles, 19 ans, un enfant d’un an, DES, travailleur dans une usine de plastique.)

La présence à l’enfant, c’est aussi une proximité relationnelle, affective, qui s’exprime parfois autour de simples moments de tendresse :

Quand elle, elle a le goût d’écouter la télé, ce n’est pas parce qu’elle a le goût d’écouter la télé que je vais faire du ménage pendant ce temps-là, je peux aller m’écraser avec, m’asseoir avec pourquoi pas. L’émission est plate, ce n’est pas grave, je me ferme les yeux, elle s’accote sur moi, je relaxe puis je suis avec. (Mathieu, 24 ans, baccalauréat, un enfant de trois ans, travailleur).

Cependant, au quotidien, ce désir d’être présent se concrétise de diverses façons. Pour certains, leur présence auprès de l’enfant se limite, tout comme celle de leur conjointe d’ailleurs, aux soirs et aux fins de semaine, et ce, en raison de l’emploi du temps chargé. On mise alors davantage sur la qualité de la relation et sur la présence d’une « bonne gardienne » ou « d’une garderie qui donne à l’enfant autant de tendresse qu’on pourrait lui donner, nous ». Pour d’autres, cet impératif de la présence a entraîné des changements radicaux dans leur univers professionnel afin d’être plus disponibles : remise en question des plans de carrières à l’étranger, choix d’un travail à temps partiel ou à horaires plus flexibles :

Les six premiers mois, je m’en suis pas occupé beaucoup je veux dire je m’en occupais le soir, je travaillais comme soixante-dix heures par semaine, j’étais dans la construction. C’est difficile, donc j’ai arrêté pis j’ai fait un cours d’agent d’immeuble. C’est payant, c’est valorisant comme travail et les horaires sont flexibles. Justement, pour aller chez le médecin l’après-midi, ben ça je peux y aller, je peux toujours me libérer. Il y a personne de plus disponible que moi, tu comprends-tu ? (William 22 ans, un enfant de 3 ans, DEP, agent d’immeuble.)

Un père, c’est un guide

Être père, c’est aussi, pour beaucoup de jeunes interrogés, être un guide, un « formateur » auprès de l’enfant :

Moi, je pense qu’un père, c’est quelqu’un qui est là, qui les aide à leur développement […] puis en leur offrant le plus de possibilités pour qu’ils puissent connaître la vie aussi de leur propre vision, qu’ils peuvent se faire eux autres mêmes leur propre image du monde qui les entoure. Leur donner finalement les meilleurs outils que tu peux faire pour qu’ils puissent se développer. (Benoît, 24 ans, deux enfants de 2 ans et 2 mois, certificat universitaire, travailleur en garderie et étudiant).

Le rôle d’un parent, c’est de doter l’enfant, pas de lui imposer, mais de lui inculquer une certaine valeur, pis de cultiver son imagination. (Richard, 24 ans, un enfant de 2 ans, DEC, étudiant à temps plein.)

Le père se voit comme un phare pour l’enfant, indiquant les chemins possibles, sans pour autant lui tracer la voie. Cette vision est d’ailleurs congruente avec les qualités mêmes qui sont, selon eux, à développer chez l’enfant, pour son évolution progressive en société, soit la confiance, l’autonomie, la capacité de choisir. Autrement dit, il semble ressortir du discours des jeunes pères que pour se mouvoir confortablement dans un monde marqué par l’autonomie et l’individualisation des parcours de vie, l’enfant doit au préalable apprendre à opérer des sélections. Voici ce qui définit la tâche du père : l’accompagner dans ces sélections, être présent lors de dilemmes décisionnels, inculquer l’idée de responsabilité. Le père apparaît donc comme un référent pour son enfant, un phare se voulant visible pour l’ensemble de sa vie, sans pour autant orienter son trajet.

On sent ainsi, dans beaucoup d’entrevues, un mouvement de distanciation avec l’autorité à l’intérieur de la famille. En fait, même si les pères apparaissent comme ceux qui, à l’intérieur du couple parental, semblent appliquer davantage l’autorité[5], ce serait plutôt par dépit : soit qu’ils se jugent « trop impulsifs », pas assez outillés pour intervenir lors des crises de l’enfant (« impatients » ont dit plusieurs), soit qu’ils le font parce qu’ils considèrent leur conjointe « trop permissive ». Néanmoins, quelle qu’en soit la cause, cette attitude ne concorde aucunement avec leur idéal paternel. Au demeurant, la discipline pure et dure n’apparaît pas non plus être constitutive de leur pratique paternelle : elle semble plutôt être utilisée de façon occasionnelle et doit toujours être justifiable. Certains en effet ont exprimé le souhait de se départir de façons de faire qu’ils disent avoir acquises dans leur premier cercle de socialisation, soit leur famille d’origine. Plus spécifiquement, leur propre père sera parfois considéré comme un contre-modèle, et ce non pas pour l’ensemble de leur pratique paternelle, mais plutôt en ce qui concerne la gestion de l’autorité.

Cependant, s’il y a un abaissement de l’autorité, cela ne signifie en rien son effacement complet ; il n’est pas apparu lors des entrevues qu’il y ait abdication des pères devant le recours à l’autorité ou que celle-ci se soit dissoute sous le poids des droits attribués à l’enfance. Il s’agit en fait d’en user s’il y a lieu mais de façon dosée et tout en favorisant au préalable l’usage de la parole entre les parties en litige. Une relation basée sur la communication vient également conforter un espoir que plusieurs ont exprimé, soit celui de préserver à long terme la proximité émotionnelle avec l’enfant.

Un père, c’est quelqu’un sur qui tu peux compter

Par ailleurs, pour plusieurs jeunes interrogés, la paternité est vécue comme un processus de prise de responsabilités. C’est notamment le cas de ceux pour qui la venue de l’enfant n’était pas prévue[6]. L’expression « être responsable » recouvre pour eux plusieurs sens – qui correspondent bien à la polysémie même de ce terme qui a des connotations à la fois morales, juridiques et philosophiques. Tout d’abord, elle renvoie à son sens premier, courant, d’« obligation faite à une personne de répondre de ses actes du fait du rôle, des charges qu’elle doit assumer et d’en supporter toutes les conséquences ». Être responsable, c’est ainsi, une fois l’enfant né, accepter d’en assumer la charge financièrement, en changeant de travail ou en retournant étudier. C’est donc « se prendre en main », dira l’un d’eux, car « un petit être dépend maintenant de soi pour vivre ». Autrement dit, prendre ses responsabilités, se projeter dans l’avenir, avoir une vision à long terme de ce qu’implique la venue d’un enfant dans leur vie, et c’est d’ailleurs pourquoi certains sont amenés à faire des changements de carrière :

À l’hôpital, c’est très émotif, fais que t’es comme dans un bain émotif, pis dès que tu sors de l’hôpital, pis que tu es avec l’enfant, là, la vie quotidienne commence, il faut toute réorganiser. Il faut se trouver un emploi assez payant […] pour pouvoir vivre à trois, il faut que tu fasses une pièce de plus, t’achètes du linge, des couches, des biberons, et ci et ça. […] (Samuel, 23 ans, un enfant de 4 ans, séparé, DES, prestataire de la sécurité du revenu.)

Avant qu’elle me dise qu’elle était enceinte, j’avais commencé un DEC de trois ans en théâtre, mais c’est ça, étant donné que le théâtre c’est rien de garanti comme revenu, moi, j’aurais vécu de ça, mais il faut que tu penses au travail plus tard. Je me suis trouvé quelque chose d’autre, que j’aimais aussi pis que c’est ben payant, pour tout de suite je travaille dans le plastique pis je me suis inscrit pour l’automne en technologie de la maintenance industrielle. (Charles, 19 ans, un enfant d’un an, DES, travailleur dans une usine de plastique.)

Disons que ça a tout remis en question. On voit toujours sa vie d’une certaine façon et quand il y a un enfant qui arrive, ça défait un peu les plans. On pensait partir deux fois en voyage, on pensait rester dans un petit appartement, pis aussi faire nos études plus rapidement, en finir rapidement avec la maîtrise. […] À partir du moment où on a appris ça, on s’est mis aux études à temps partiel parce qu’il fallait qu’on travaille beaucoup plus pour ramasser de l’argent. (Adam 25 ans, un enfant d’un an, baccalauréat, assistant de recherche à l’université et étudiant.)

Chez ceux dont la grossesse était planifiée, les plus scolarisés et les plus âgés de l’échantillon, on retrouve aussi cette dimension de la responsabilité comme capacité à se projeter dans l’avenir. Ils insistent cependant moins sur les responsabilités financières futures que sur la dimension affective de leur responsabilité, comme l’exprime bien ce père quand il dit : « j’ai réalisé que tout d’un coup, tu comptes officiellement pour quelqu’un, ou plutôt, non pas que tu comptes pour quelqu’un, mais qu’il y a quelqu’un qui dépend de toi » (Richard, 24 ans, un enfant d’un an, DEC, étudiant temps plein). Autrement dit, être père, c’est aussi une prise de conscience de soi comme étant un « autrui significatif » pour quelqu’un de dépendant ou de fragile.

Pour clore cette section qui visait à dégager ce que recouvre la paternité pour les jeunes pères, on peut dire que les choses semblent donc avoir changé du point de vue des représentations du rôle paternel si l’on se reporte à la typologie établie il y a 10 ans. En effet, les jeunes pères adhèrent tous à la deuxième vision de la paternité que nous avions dégagée, soit celle caractérisée essentiellement par une relation de proximité, un lien personnel avec l’enfant, non médiatisée par la conjointe.

Comment sont répartis les tâches et les rôles parentaux dans le couple ?

Mais les choses ont-elles également changé du point de vue de la répartition des tâches parentales et domestiques entre le père et la mère ? Y a-t-il une répartition égalitaire ou équitable, non basée sur le genre, entre le père et la mère, comme nous pouvions le constater chez les pères adhérant à cette vision de la paternité dans la première typologie ? Avant de répondre à cette question, il nous semblait important de faire état des situations « objectives » dans lesquelles se retrouvent les jeunes couples quant au travail. Or, ce ne fut pas chose facile, en comparaison de la recherche effectuée il y a 10 ans, dans la mesure où les jeunes pères vivent toutes sortes d’arrangements en termes de conciliation famille-emploi, arrangements qui souvent sont temporaires, contextuels. Ainsi, mais sans entrer dans les détails, nous avons pu dégager, chez nos répondants, les situations suivantes : 1) les deux parents sont salariés[7] – les deux travaillent à temps plein ou à temps partiel (notamment lorsqu’ils sont tous deux aux études), l’un travaille à temps plein et l’autre à temps partiel ou il y a alternance entre les deux selon les circonstances (arrivée d’un second enfant, retour aux études, etc.) ; 2) le père est salarié, la mère est à la maison (soit en congé de maternité, soit par choix), le père est salarié, la mère étudie à temps plein, le père étudie à temps plein, la mère est salariée ou les deux étudient. À ces situations correspondent aussi divers arrangements « financiers » : mères à la maison ou pères aux études qui reçoivent des prestations de la sécurité du revenu ou des prêts et bourses, cohabitation des deux jeunes parents avec la famille d’origine en l’absence de revenus, cohabitation de la mère avec ses parents, père seul en appartement pour des raisons économiques, etc.

En ce qui a trait à la répartition des tâches domestique et de celles liées aux soins aux enfants de même qu’aux rôles qui incombent à chacun des membres du couple parental[8], deux modèles ont pu être dégagés du discours des jeunes pères interrogés, et notamment de la description qu’ils nous faisaient de leur journée type[9]. Le premier, nommé « modèle partenarial », est très majoritaire[10]. Le second, qualifié de « modèle inégalitaire », regroupe les pères les plus jeunes et les moins scolarisés de l’échantillon, mais se subdivise en deux sous-modèles, soit « le modèle traditionnel du pourvoyeur et de la ménagère » et « le traditionnel revu et corrigé ».

Le père et la mère comme partenaires parentaux

Chez les couples du premier modèle, dit de partenariat, il y a absence de spécialisation sexuelle entre le père et la mère tant en ce qui a trait à l’enfant (soins, jeux, présence) qu’en ce qui concerne la vie quotidienne dans la maison (tâches domestiques). La distribution semble s’effectuer d’elle-même, selon la disponibilité de chacun, selon un arrangement strictement fonctionnel ou, encore, selon les goûts de chacun :

On fait pas mal tous les deux tout, il n’y a pas grand-chose que je ne sais pas à propos d’elle et il n’y a pas grand-chose que ma conjointe non plus ne sait pas. Quand un est pas là, l’autre est capable de combler correctement tout ce qu’il faut. Mais c’est sûr que c’est difficile question temps de se voir, moi pis ma conjointe, parce qu’on travaille tous les deux… (Charles, DES, 19 ans, un enfant d’un an, travailleur dans une usine de plastique.)

Comme là ma conjointe, par exemple, elle est remplaçante dans son travail donc, l’été, elle travaille plus, tant mieux, moi je travaille moins. Donc, pendant la semaine l’été je vais avoir toutes mes journées de disponibles, je vais travailler le soir fait que je vais pouvoir passer toutes mes journées à jouer avec elle ou à faire mes trucs en dehors des activités dans la maison, comme faire le ménage je veux dire ce genre de choses-là. […] Une journée type dans l’année… ça dépend… si je suis en fin de session puis que je travaille trente heures puis qu’elle cette semaine-là elle travaille huit heures, c’est la logique du temps. C’est pas parce que c’est elle la femme puis moi le gars, c’est plus la logique du temps qui joue. C’est sûr que c’est elle qui va être plus à la maison puis ça va être elle à ce moment-là. Mais cet été elle va travailler à temps plein, et là c’est le contraire, moi, j’aurai plus d’école je vais juste avoir à travailler mes dix heures semaine, et c’est moi qui reste à la maison qui s’occupe de la petite finalement et du reste. (Louis, 26 ans, un enfant, baccalauréat, agent de sécurité et étudiant.)

Ainsi s’observe une alternance homme-femme dans le rôle parental si l’un des deux a plus de travail pendant une certaine période ou encore une présence simultanée. On peut parler dans ce cas de « partenaires parentaux interchangeables » (Dienhart, 1998), de « couple parental » (Hurstel 1996) pour décrire la relation entre les conjoints, car celle-ci est sous le signe de la complémentarité ; elle se construit et se négocie à travers la communication. L’autre apparaît d’ailleurs comme un partenaire qui permet d’élargir sa perspective (« on se donne des trucs », dira l’un d’eux), ou d’amoindrir les angoisses ou les questionnements que suscite l’expérience parentale au quotidien. De plus, la paternité ne s’articule pas ici en prenant la conjointe mère comme référent, comme modèle à imiter ; elle se construit plutôt au jour le jour à travers des échanges entre les deux parents. Il est cependant intéressant de noter qu’à l’intérieur de certains couples qu’on pourrait qualifier d’égalitaires pour la répartition des tâches liées à la vie domestique et à l’éducation de l’enfant, une « sous-dimension » de la fonction de pourvoyeur semble demeurer opérante : l’administration des ressources financières à l’intérieur de l’entité familiale. Quelques répondants, en plus de participer pleinement à l’ensemble des facettes que recèlent les rapports sociaux, affirment s’occuper du budget du ménage, gérer les finances de la famille. Cependant, précisent-ils, leur conjointe est toujours consultée, laissant apparaître la négociation comme nécessaire, soulignant du même coup l’importance du compromis à l’intérieur de la conjugalité contemporaine.

Le pourvoyeur et la ménagère : à chacun sa place

Chez quelques couples, c’est le modèle traditionnel du pourvoyeur et de la ménagère qui domine, modèle hérité, rappelons-le, des années 1950-1960 alors que très peu de femmes avaient accès au marché du travail. Lorsque les jeunes pères décrivent une journée type, ce qui ressort, c’est que leurs conjointes ont un rôle de ménagère à temps plein, notamment en ce qui concerne le travail domestique quotidien, et ce qu’elles soient sur le marché du travail ou non :

Ben là je participe plus à peu près à aucune tâche, je veux dire, je ne la fais pas manger parce que quand je me lève c’est déjà fait, je ne lui donne pas son bain parce que je pars trop tôt pour travailler, fait que dans le fond tout ce que je fais avec c’est jouer avec puis essayer de passer un petit peu de bon temps avec, la gâter un peu. Fait que je ne fais plus aucune tâche ingrate si on veut. […] Mais c’est ça moi, le jeudi, je lui transfère 320, 330 piasses, dépendant des semaines puis elle s’arrange avec, je ne sais pas comment elle le répartit. (David, 25 ans, DES, un enfant et un à venir, travailleur de nuit en usine et étudiant.)

Quand on est les deux là dans une journée, je joue avec, je m’en occupe. Quand on parle de changement de couches pis ces affaires-là, la faire manger, c’est ma blonde, moi, je joue beaucoup avec. Mais, j’essaie d’en prendre un peu plus, j’essaie de donner à manger, pour pas que la petite soit habituée à juste jouer avec moi. (Alexis, 19 ans, un enfant de 8 mois, prestataire de la sécurité du revenu et étudiant raccrocheur.)

De plus, la relation père-enfant est médiatisée par la mère pour tout ce qui concerne les soins et l’éducation au quotidien. Il est cependant deux « domaines d’activités » dans lequel les pères prennent eux-mêmes l’initiative, c’est, d’une part, celui du jeu avec l’enfant, notamment du jeu d’extérieur (sports, etc.) et, d’autre part, celui de l’autorité. Les différences entre le rôle paternel et le rôle maternel sont justifiées par la « nature » même de l’homme et de la femme, le premier étant peu doué, peu compétent pour les choses domestiques, la femme ayant au contraire « l’instinct maternel », étant plus apte à s’occuper des enfants, car plus patiente, plus douce, etc. Signalons que tous ces pères croient que leur rôle, tout en étant différent de celui de leur conjointe, n’en est pas moins important pour la famille.

Le pourvoyeur et la ménagère… revu et corrigé

Chez d’autres répondants, la division des tâches est inégale, mais surtout en ce qui a trait au travail domestique, les pères ayant plutôt en ce domaine un rôle d’« aide à la conjointe », faisant peu preuve d’autonomie en cette matière, si ce n’est pour les tâches traditionnellement masculines (automobile, pelletage de la neige, etc.). Pour ce qui est des soins aux enfants, cependant, il y un partage qui tend vers l’égalité, les pères s’acquittant tout autant que la mère des soins de base quotidiens, tel le bain, et étant disponibles autant pour jouer que pour aller aux rendez-vous chez le médecin par exemple.

Je travaille, je pars à cinq heures et je rentre vers cinq heures et demie, fait que jusqu’à temps qu’elle se couche, je m’occupe d’elle, je lui donne son bain, je sors, je l’amène au parc, je fais beaucoup de jeux. (Simon, 19 ans, un enfant d’un an, 4e secondaire, travailleur dans une usine de colle industrielle.)

Avec le petit, c’est moitié-moitié. Je m’en occupe, vraiment autant. Je lui donne son bain, je fais à souper, je vais patiner avec, je vais jouer avec lui […] Dans la maison, heu, elle en fait un petit peu plus, mais en même temps, moi je m’occupe de la voiture, du duplex, on s’obstine toujours là-dessus sur qui en fait plus, mais comme la maison, moi, je fais jamais le lavage, mais je fais la vaisselle, mais elle en fait plus. (William, 22 ans, un enfant de 3 ans, DEP, agent d’immeuble.)

Pour certains, c’est essentiellement le travail qui expliquerait leur peu d’implication dans les tâches domestiques, car « ne pouvant tout faire, on préfère s’occuper du petit, car ça passe vite, pis tu te réveilles et ton enfant est grand et il a pas connu son père », une vision des choses qui correspond bien à leur conception du rôle paternel que nous avons décrite plus haut. À cet égard, leur propre expérience de fils dont le père était peu présent agit comme un contre-modèle. Mais surtout, pour tous, ce n’est pas tant le genre mais bien le contexte et les priorités « de l’heure » ou encore les choix qu’ils ont faits, qui déterminent la répartition des tâches et des rôles :

Elle s’occupe de toute la maison parce qu’elle ne travaille pas, mais comme la fin de semaine, ou comme cette semaine où je suis en vacances, là, on arrive à l’heure du dîner pis moi je donne à manger à la petite, pis tout […] On a fait des choix, donc ça faisait que je devais retourner aux études pour me trouver un travail plus payant qui lui permettrait à elle de pouvoir rester à la maison avec les enfants et ainsi d’éviter de payer les garderies qui équivaut quasiment à un salaire. Elle, elle a d’autres projets, elle veut faire de l’ébénisterie, s’équiper, travailler à la maison, avoir un atelier, vendre des meubles, des trucs comme ça. Elle a d’autres projets, mais toujours dans l’optique où le revenu principal c’est moi qui l’amènerais. Ç’aurait pu être le contraire, ç’aurait facilement pu être le contraire, on aurait pu dire aussi c’est moi qui va rester à la maison, mais ça ne lui tentait pas, elle préférait rester à la maison, ça été le choix qu’on a fait. (Joël, 25 ans, un enfant d’un an, étudiant temps plein.)

Cette répartition peut donc changer avec le temps, par exemple si la conjointe retourne sur le marché du travail ou si les deux parents décident de ne travailler qu’à temps partiel.

Conclusion

Les choses ont-elles changé depuis 10 ans en matière de conceptions et de pratiques paternelles ? Telle était la question que nous posions au début de cet article et à laquelle nous pouvons répondre par l’affirmative suivant les résultats de notre recherche. Celle-ci montre en effet que l’expérience parentale ne se présente plus sous forme d’un modèle légué par la tradition, mais apparaît plutôt tel un arrangement à construire, voire à conquérir au quotidien, et ce en collaboration avec l’autre parent. Les rôles ne semblent pas préétablis, les obligeant donc à construire eux-mêmes leur identité de père – et de mères. À cet égard, les représentations de ce qu’est un père ou une mère semblent effectivement en train de changer. Les jeunes pères s’attribuent un rôle à multiples facettes, se traduisant dans des pratiques parentales axées sur la complémentarité et le partage des tâches pour la plupart. De plus, pour la grande majorité de ceux que nous avons rencontrés, la paternité est une expérience qui, tout comme la maternité, demande à la fois une présence au quotidien et une projection dans l’avenir ; elle est aussi faite de moments de tendresse, de soins, d’éducation au sens strict et surtout de partage avec la conjointe. On retrouve peu de jeunes pères adhérant à une vision « familialiste » de la paternité, marquée par une division stricte des rôles entre le père et la mère et par une définition du père comme pourvoyeur économique seulement. Cette paternité relationnelle, de proximité, est à mettre en relation avec les changements vécus dans la « culture masculine » qui tend à s’éloigner :

[…] des masques qui accompagnaient l’affirmation de la virilité et sommait l’homme de blinder son corps et sa sensibilité derrière des rôles publics, au nom du devoir-être masculin. La culture du sujet qui désormais valorise plus l’intime, représente aussi une valeur montante chez les hommes jeunes, qui conçoivent davantage de s’affirmer désormais de manière autonome dans le privé et dans une paternité de proximité.

Castelain-Meunier, 2002 : 153-154

Par ailleurs, si plusieurs jeunes ont abordé la dimension de la nécessité du « travail pour faire vivre la famille », c’est comme une des responsabilités qui découlent de l’arrivée d’un enfant dans leur vie de jeunes et non comme un élément essentiel à la structuration de leur identité paternelle. C’est surtout une responsabilité qui n’est pas le propre du père. Pour ces jeunes pères, voir à subvenir aux besoins de la famille fait donc partie des obligations, des nécessités de tout parent, père ou mère, mais ne constitue pas ce qui les définit comme père, contrairement aux hommes des générations précédentes. À l’inverse même, diront certains, le travail ne doit pas prendre trop de place :

Avant on disait le père ça amène le pain dans la maison. Asteure, c’est plus vraiment ça, c’est pas mal partagé. Un père qui travaille trop. Qui n’est pas là pour ses enfants, ben, je ne trouve pas que c’est bien. […] Un père, c’est quelqu’un qui travaille, mais qui est là aussi pour son enfant, pour le voir, pour l’écouter s’il a besoin de parler, ses petits problèmes. (Alexis, 19 ans, 4e secondaire, un enfant d’un an, étudiant raccrocheur et prestataire de la sécurité du revenu.)

Autrement dit, pour les jeunes pères que nous avons interrogés, l’implication professionnelle est examinée en regard même de l’implication auprès de l’enfant ; elle serait pour ainsi dire « en compétition » avec la nécessité d’être présent auprès de l’enfant, ce qui dénote des changements par rapport aux générations précédentes, au moins en ce qui a trait aux aspirations et aux normes en matière de paternité.