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Chaque année, à Montréal, près de 8 000 mères immigrantes donnent naissance à un nouveau-né, ce qui correspond à près de 36 % des naissances depuis 1995 (Statistique Canada, recensement 1996). Ce nouveau-né grandira et se développera au sein d'une famille qui a vécu les hauts et les bas de cette expérience particulière qu'est l'immigration, marquée par des événements de départ quelquefois difficiles et suivant le parcours parfois sinueux de l'installation dans un nouveau pays. Autant d'inconnues à négocier dans un même élan.

Néanmoins, on peut croire que la vulnérabilité des mères immigrantes au cours des premières années de leur installation est comparable à celle des mères considérées comme étant à risque en général, c'est-à-dire des femmes qui risquent de donner naissance à des bébés prématurés ou de poids insuffisant ou de connaître des difficultés d'attachement envers leur enfant. Ces risques se manifestent par des difficultés d'ordre psychosocial, par la précarité financière, la détresse psychologique ou encore l'isolement. Mais la source de ces difficultés est-elle la même? Soulignons à cet effet que les taux de prématurité et d'insuffisance de poids montrent peu ou pas de différences significatives entre les familles en général et les familles immigrantes (DSP, 1996)[1]. Or, les observations de Doucet et collab. (1991) laissent croire que ces taux devraient être plus bas chez les mères immigrantes, puisque leurs habitudes de vie constituent dans l'ensemble des facteurs de protection et que très peu de répondantes ayant participé à leur étude présentaient des comportements jugés à risque pendant leur grossesse et pendant l'allaitement (tabac, alcool, drogue, etc.). Cela nous amène à regarder du côté des circonstances migratoires qui peuvent entraîner un isolement social perturbant les capacités de maternage (Heneman et collab., 1994; Battaglini et collab., 1997; Stork, 1989; Sabatier, 1989), une pauvreté circonstancielle qui a un impact important sur l'organisation familiale et les rôles traditionnels homme-femme (Dinh et collab., dans Waxler-Morrison et collab., 1990) et une fragilisation de l'état de santé psychologique due à des événements prémigratoires troublants ou à l'adaptation à un nouvel environnement social et culturel (Beiser et collab., 1988; Moro, 1992).

Si la vulnérabilité des mères immigrantes est en effet ancrée dans le contexte et dans les événements associés à leur parcours migratoire (Guberman et collab., 1993; Hopper et collab., 1998), deux questions s'imposent : quelles sont les circonstances particulières à cette expérience qui peuvent rendre ces mères plus vulnérables et comment les reconnaître? La référence aux programmes intégrés de soins de santé en périnatalité[2] pose problème aux intervenants qui ne disposent à l'heure actuelle d'aucun critère reconnu pour soutenir leur interprétation de la vulnérabilité de ces mères. Ces programmes interviennent sur les plans social, psychologique et sanitaire et visent à prévenir l'apparition de problèmes spécifiques comme les retards de croissance intra-utérine, la prématurité, la négligence parentale et les problèmes d'attachement mère-enfant (ministère de la Santé et des Services sociaux, 1996). Ces programmes offrent globalement une évaluation et un soutien nutritionnel, des suppléments alimentaires, une éducation sanitaire, un soutien psychosocial, un soutien au développement de la relation parent-enfant, de l'aide à domicile et du dépannage. Lorsque c'est possible, des équipes multidisciplinaires composées d'infirmières, de travailleurs sociaux, de diététistes, de médecins, de psychologues et d'auxiliaires familiales assurent ces services. Contrairement aux services universels, ces derniers sont sélectifs et amènent les professionnels de la santé à déterminer, à l'aide de critères spécifiques, quelle clientèle doit y avoir accès en priorité. Ce processus décisionnel est notamment soutenu par des critères généraux d'une vulnérabilité associée à des caractéristiques du milieu comme l'isolement géographique ou le niveau socioéconomique du quartier, mais aussi à des caractéristiques propres à la personne, comme l'âge au moment de la grossesse, la scolarité, le revenu et la monoparentalité, certains comportements sanitaires, la santé physique et psychologique. Les facteurs et les critères associés à l'expérience migratoire demeurent absents de ces caractéristiques.

Dans le contexte actuel, le processus par lequel une mère immigrante est considérée comme vulnérable, puis dirigée vers un service de périnatalité relève d'une démarche complexe où l'intervenante fait appel à des méthodes formelles de sélection et, pour compléter, à son expérience, à son intuition et à ses connaissances. L'interprétation de la vulnérabilité des mères immigrantes repose largement sur cette partie informelle qui permet de cerner un problème, d'établir des besoins, de définir le type de service approprié et, enfin, de « référer » ou non. Cette démarche décisionnelle se déroule dans un contexte où diverses influences agissent sur le jugement des intervenantes, dont la mission et les préoccupations financières de l'organisme, les limites matérielles ou humaines et divers courants de pensée. Le premier aboutissement de ce processus est l'inclusion ou l'exclusion d'une mère de l'un de ces programmes.

C'est notamment pour documenter les facteurs de vulnérabilité associés à l'expérience migratoire durant la période périnatale et éventuellement pour soutenir ce processus décisionnel qu'une étude a été entreprise en 1998 (Battaglini et collab., 2000). Le présent article propose une synthèse des résultats de cette étude combinant les perceptions complémentaires des intervenantes du milieu et des mères elles-mêmes. Nous croyons qu'à l'intersection de la perception des intervenantes et des mères sur leur propre vulnérabilité se trouve un ensemble d'indices pour l'adéquation des services à leurs besoins. L'étude auprès des mères a permis de documenter les relations entre diverses trajectoires migratoires et un ensemble de conditions de vie parentales, tandis que par l'étude auprès des intervenantes on a pu saisir leur sensibilité à la réalité de ces mères ainsi que la place de cette expérience dans leur processus décisionnel. Par conditions de vie parentales nous entendons le contexte dans lequel les mères exercent leur rôle parental, c'est-à-dire leur situation économique, sociale et familiale, leur santé physique et émotive, l'utilisation et l'accessibilité des services et le soutien paternel, autant de dimensions susceptibles d'être affectées par des événements et des circonstances associés à l'expérience migratoire.

Méthodologie et population à l'étude

Cette étude exploratoire s'est déroulée de 1998 à 2000 en deux étapes complémentaires. La première a porté sur 91 mères immigrantes ayant un bébé âgé de 3 à 12 mois. Les entrevues ont été enregistrées et elles étaient d'une durée moyenne de deux heures. La moitié des répondantes étaient des mères primipares, alors que les autres avaient eu un ou plusieurs enfants avant d'émigrer. Elles étaient toutes établies au Québec depuis moins de six ans. L'étude s'est notamment penchée sur huit dimensions d'analyse : le statut, le réseau social et familial, l'état de santé global, le contexte prémigratoire et postmigratoire, les conceptions parentales et le profil sociodémographique. Pour chacune de ces dimensions, des questions ouvertes ont permis d'explorer différents aspects liés à l'intégration, c'est-à-dire aux changements qu'implique le passage de la société d'origine à la société d'accueil en fonction d'expériences concrètes (soutien, situation économique, accouchement, services, logement, etc.).

Près de la moitié des répondantes étaient arrivées au Québec parrainées par l'entremise du programme de réunification familiale (46/91), 18 étaient indépendantes et les autres, 27 au total, avaient le statut de réfugié ou étaient en attente de statut. La diversité ethnique et culturelle de l'échantillon reflète bien la composition des territoires des CLSC partenaires[3] (39 pays d'origine, 23 langues maternelles). Notons également que près de la moitié des répondantes ont un niveau de scolarité secondaire ou moindre (43/91), que 18 ont atteint le niveau collégial et 29 le niveau universitaire[4]. Parmi ces dernières, 17 ont fait des démarches pour obtenir une équivalence de diplôme et seulement sept l'ont obtenue, une situation qui est similaire pour leur conjoint (11 sur 31 ont obtenu une équivalence). Aussi y a-t-il un certain nivellement des conditions de vie, puisque l'immigration efface, en quelque sorte, les avantages qu'auraient pu procurer la scolarité, l'expérience professionnelle ou encore le statut social.

Le second volet de l'étude s'est déroulé à l'intérieur de groupes de discussion avec la participation d'intervenantes de CLSC et d'organismes communautaires oeuvrant en périnatalité. Il visait à saisir les facteurs qui les amènent à diriger ou non vers la ressource appropriée une mère jugée vulnérable. Trois rencontres ont eu lieu, regroupant chaque fois entre 6 et 8 intervenantes, pour un total de 19. Celles-ci étaient amenées à discuter de cas et à se prononcer sur les critères qui à leurs yeux pouvaient justifier une « référence ». Les intervenantes recrutées pour participer à ces rencontres avaient une expérience en milieu pluriethnique. Des 19 participantes, 14 viennent de CLSC et 5, d'organismes communautaires. Treize d'entre elles sont d'origine canadienne et six sont d'origine étrangère (Afrique [1], Proche-Orient [1], Antilles et Caraïbes [2] et Amérique du Sud [2]). Neuf des participantes sont infirmières, cinq sont travailleuses sociales et cinq sont préposées en relations humaines. Plusieurs (neuf) ont de six à dix ans d'expérience et huit en ont plus de dix. Sur le plan de la scolarité, 16 intervenantes ont fait des études universitaires; parmi elles, quatre ont obtenu une maîtrise. Huit sont âgées de 26 à 35 ans, huit de 36 à 45 ans et trois de plus de 46 ans. L'échantillon n'est pas représentatif de la population d'intervenants, mais il comporte l'avantage d'être diversifié sur les plans social et professionnel, ce qui a sans nul doute permis de recueillir des commentaires sous des angles différents.

Immigration et maternité, rupture ou continuité?

On oublie facilement que les mères immigrantes vivent deux expériences fondatrices presque simultanément, celles de l'immigration et de la maternité. Elles accueillent un nouvel enfant dans leur vie tout en ayant elles-mêmes à s'intégrer à une nouvelle société. En fait, pour mieux saisir la résultante de ces deux expériences, plusieurs questions se posent : Pourquoi ont-elles quitté leur pays? Comment vivent-elles leur arrivée au Québec, leur maternité et l'évolution familiale? Les réponses à ces questions fournissent des pistes pour l'interprétation de la vulnérabilité de ces femmes et de leurs besoins.

De toute évidence, les conséquences de l'immigration ne sont pas équivalentes pour toutes les mères. Pour certaines, immigrer et fonder une famille se présentent comme une seule et même chose : un projet de vie. Elles immigrent aussi dans le cadre d'un projet, volontairement, et souvent pour suivre leur conjoint. Dans la présente étude, ces dernières étaient dans l'ensemble parrainées ou indépendantes à leur arrivée; elles étaient aussi plus scolarisées (études collégiales, universitaires), plus jeunes (25 ans et moins) et avaient des connaissances en anglais ou en français. Il s'agit là d'un éventail de facteurs susceptibles de favoriser leur intégration à plus long terme (voir Piché, 1995, pour les facteurs facilitant l'intégration).

Pour d'autres, le départ s'est vécu dans des conditions plus difficiles à oublier : « Les conditions de mon pays ne sont pas bonnes. Ma vie était en danger, les policiers cherchaient mon père, ils ont tué ma mère, ils m'ont violée. » Ce type de récit qui fait allusion à des conditions de départ difficiles marquées par la guerre et la persécution est souvent celui de mères réfugiées ou en attente de statut. Une des caractéristiques propres à ces mères est l'aspect involontaire de leur expérience migratoire. La plupart ont quitté leur pays d'origine par nécessité et, par conséquent, ont vécu leur expérience migratoire comme une rupture. Dans cette étude, d'ailleurs, les mères qui répondent à ce profil ont quitté leur pays plus âgées (30 ans et plus), peu scolarisées (secondaire ou moins), souvent sans connaître ni le français ni l'anglais et avec un ou plusieurs enfants. Il n'est pas rare qu'elles aient vécu une séparation familiale, laissant derrière elles conjoint et enfant(s). Plusieurs ont également émigré alors qu'elles avaient déjà un ou plusieurs enfants, ce qui illustre davantage l'ampleur de cette rupture. Par extension, il est apparu qu'émigrer avec un enfant peut représenter une solution à un problème urgent plutôt qu'un projet planifié de longue date.

En somme, les trajectoires migratoires des personnes qui ont participé à l'étude reflètent aussi une trajectoire familiale. Pour certaines, ces deux événements s'inscrivent en continuité, c'est-à-dire émigrer et fonder une famille. Pour d'autres, au contraire, ils s'inscrivent dans leur vie comme une rupture lorsqu'elles ont quitté involontairement leur pays et leur famille.

Contexte d'intervention auprès des mères immigrantes

Les intervenantes rencontrées se sont montrées très sensibles aux circonstances migratoires qui peuvent affecter les mères : « Il faut à la fois les accueillir dans ce qu'elles ont été et dans ce qu'elles sont maintenant… leur permettre de recoudre des identités qui sont peut-être effilochées. » Pourtant, l'interprétation de la vulnérabilité et la prise de décision sont apparues comme des processus quasi indépendants, la décision pour un suivi reposant bien souvent sur des critères différents. En conséquence, certaines décisions peuvent sembler paradoxales, puisque les critères évoqués par les intervenantes pour interpréter la vulnérabilité ne sont pas toujours les mêmes que ceux retenus pour justifier un suivi. Le processus décisionnel des intervenantes, mais surtout leur évaluation de la vulnérabilité reposent donc sur des facteurs absents des grilles usuelles d'évaluation. Une mère qui a vécu un traumatisme prémigratoire et qui présente des signes évidents de réactions post-traumatiques pourra alors être retenue pour un suivi non pas pour ces faits observés, mais en fonction d'autres critères généraux reconnus. En somme, tant que cette partie du processus décisionnel demeure implicite, il sera difficile de reconnaître les besoins véritables de ces mères.

Dans cet article, les dimensions liées aux conditions de vie parentales et migratoires retenues lors de l'étude sont décrites successivement selon deux angles de vue, celui des intervenantes rencontrées lors de l'étude, puis celui des mères immigrantes. Cela permettra, en fin d'article, de saisir les convergences et les divergences entre ces deux perspectives par une brève analyse comparative.

Circonstances migratoires et conditions de vie parentales

Les réseaux de soutien

La migration, comme le soulignent de nombreuses études, tend à isoler les individus des sources d'aide traditionnelles et parfois à aggraver la situation des femmes sur qui repose la responsabilité de la santé et même du bonheur des enfants et de la famille. La place d'une personne immigrante dans un réseau détermine largement son accès à des ressources et à du soutien. Cela est d'autant plus déterminant durant la période périnatale, période au cours de laquelle les besoins sur les plans matériel, social et moral sont grandissants et où les mères voient leur mobilité réduite et leur isolement s'accroître, surtout celles qui ont déjà un enfant.

L'étude des réseaux et de leur organisation peut s'avérer particulièrement complexe, en particulier lorsqu'il est question de populations immigrantes, car il s'agit de formation ou de reconstruction des réseaux, un processus parfois difficile et long où il faut repartir de zéro. Dans les discussions de groupe, les intervenantes ont démontré une compréhension intuitive des pertes qui découlent de l'immigration, notamment sur les plans social et affectif. À leurs yeux, l'immigration isole de certaines formes d'aide qui font défaut durant la période périnatale : « Dans ces cultures-là les femmes ont leur réseau, leur rituel à la naissance. [La mère] est traitée comme une reine. Certaines femmes font des dépressions à cause de ça. Ça me manquerait à moi aussi. »

Par ailleurs, plusieurs notent que la présence des proches n'est pas nécessairement garante d'une aide additionnelle. Dans certains cas, elle sera même un fardeau économique s'il faut soutenir des membres de la famille. Une mère immigrante et son conjoint peuvent avoir des responsabilités spécifiques à l'égard de leur famille élargie présente au pays lorsqu'ils sont engagés dans des démarches d'accueil de soutien et de parrainage. Pour les intervenantes, donc, le soutien qu'aura une mère immigrante et la qualité de ce soutien dépendent des relations entre les membres du réseau : qui aide qui et de quelle façon? Bref, la présence de la famille élargie n'étant pas une garantie de soutien, plusieurs questions utiles sont proposées : La mère a-t-elle les ressources pour faire face à sa situation? Y a-t-il partage des tâches à la maison? Le mari est-il présent? S'il est absent, quelles conséquences cela peut-il avoir sur l'état émotif et sur l'aide disponible? S'il est présent, verra-t-il à pallier l'absence du réseau féminin?

Le soutien durant la période périnatale

Pour bon nombre de mères immigrantes, si elles retrouvent parfois frères, tantes, oncles ou cousins à leur arrivée au Québec, dans le cadre de cette étude il est rare que ces retrouvailles aient concerné plus d'une dizaine de personnes. En de tels cas, le tissu social se rebâtit tant bien que mal par de nouvelles possibilités, comme celles offertes par les contacts qu'elles établissent avec les intervenantes du réseau de la santé. Mais cette reconstruction en est-elle vraiment une? S'il semble que ces relations permettent de faire contrepoids au vide familial, rarement les mères immigrantes qui ont participé à l'étude ont-elles présenté un réseau équilibré de liens sociaux et familiaux. En fait, plus elles ont de la famille et moins leur réseau social est grand et, inversement, plus leur réseau social compte de membres et moins elles ont de la famille présente au pays d'adoption. Or, cette situation, cette répartition des membres du réseau détermine l'aide à laquelle les mères immigrantes ont accès durant la période périnatale.

Le soutien durant la période périnatale peut prendre plusieurs formes : aide instrumentale (soins du bébé, ménage, courses, etc.), matérielle, morale ou encore information sur les ressources, les institutions et la santé. Si les mères de notre échantillon apprécient davantage l'aide instrumentale, les autres formes d'aide ne sont pas pour autant négligeables. Toutefois, elles seront plus ou moins accessibles selon les personnes qui composent leur entourage. Un voisin, par exemple, n'offrira pas le même type d'aide qu'une soeur. Les réseaux des mères étant souvent déséquilibrés, celles-ci ont accès à certaines formes d'aide plutôt qu'à d'autres, selon le type de liens entretenu avec les personnes qui composent leurs réseaux. Aussi, par-delà la taille des réseaux, il importe de considérer leur composition pour évaluer la qualité potentielle du soutien. De fait, qui remplace les soeurs, la mère, les cousines et la belle-mère?

Le soutien instrumental est surtout offert par des femmes de la famille ou de la belle-famille et est peu disponible en leur absence. Le soutien matériel, quant à lui, est souvent offert par les professionnelles de la santé sous forme de dépannage alimentaire ou encore par des amies et des personnes du voisinage (prêts ou dons de vêtements et d'accessoires). Les mères peuvent obtenir un soutien moral auprès des professionnelles de la santé, des amies et des connaissances, mais elles se tournent plutôt du côté de leur conjoint pour en obtenir, et rarement du côté de leur belle-famille. Enfin, le soutien informatif est surtout offert par les professionnelles de la santé, qui jouent ainsi un rôle important pour l'intégration sociale des mères immigrantes. Néanmoins, un constat s'impose. Un réseau déséquilibré entre les amis, la famille, les connaissances ou les professionnelles comporte des manques en termes de soutien, ce qui était la situation de presque toutes les répondantes.

Tableau 1

Le soutien : principales différences entre le Québec et le pays d'origine d'après les mères immigrantes

Le soutien : principales différences entre le Québec et le pays d'origine d'après les mères immigrantes

Une même répondante pouvait mentionner plus d'un item. Le total du pourcentage est donc supérieur à 100 %.

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Parce que le réseau formé de la famille, des connaissances et des amis est rarement équilibré, les différentes formes d'aide auxquelles ont accès les mères immigrantes sont plus ou moins accessibles. Existe-t-il par ailleurs des mécanismes permettant d'atténuer les conséquences de cette situation ? À ce sujet, nous disent les mères répondantes, la présence du père et sa collaboration sont primordiales en contexte d'immigration.

Implication des pères

Le rôle du père semble prendre une signification nouvelle avec les circonstances qu'impose la migration. Aussi est-il approprié de se demander dans quelle mesure les rôles parentaux sont préservés ou se perpétuent en contexte d'immigration, et comment les pères immigrants s'impliquent dans un tel contexte.

Dans les groupes de discussion, les intervenantes ont envisagé la place des conjoints auprès de leur femme selon deux angles. D'abord, le conjoint compense-t-il l'absence de la famille en s'impliquant lui-même dans des tâches traditionnellement réservées aux femmes? À cet effet, les intervenantes n'attribuent pas d'emblée aux pères les lettres d'honneur de la bonne volonté et de la coopération. Ainsi, un homme peu présent en contexte d'immigration peut être jugé durement, et d'autant plus durement si l'on perçoit que cette absence a pour effet de vulnérabiliser la santé physique ou émotive de la mère : « Le système de vie ici nécessite une coopération de tout le monde, et le choix d'avoir immigré, ça implique ça aussi. »

Deuxièmement, lorsque le conjoint manifeste sa présence et son implication, l'appréciation de son comportement oscille entre deux perspectives : un homme qui répond à la place de sa femme, par exemple, sera vite perçu comme envahissant, voire contrôlant et surprotecteur. Mais ce même comportement est relativisé par d'autres intervenantes, qui y perçoivent plutôt des signes de soutien et de compassion à l'égard d'une mère qui peut avoir plus de difficulté à s'exprimer.

Aussi, les intervenantes sont partagées entre deux points de vue et demeurent ambivalentes quant à l'interprétation à donner au comportement du conjoint. En fait, les points de référence dont elles disposent maintiennent cette ambivalence, puisqu'il n'est pas rare que les couples immigrants qui se présentent à eux aient des valeurs différentes pour déterminer l'importance relative des rôles parentaux associés aux genres. Cela explique en partie la vision différente des mères immigrantes sur l'implication de leur conjoint.

Point de vue des mères sur l'implication de leur conjoint

Dans plusieurs des sociétés dont sont issus les nouveaux arrivants, les rôles traditionnels et la division sexuelle du travail peuvent être très marqués. Toutefois, le contexte d'immigration recadre ces normes culturelles à l'intérieur de ce que propose la société d'accueil et modifie ainsi l'implication des pères auprès de leur enfant et de leur conjointe. D'ailleurs, la plupart des mères immigrantes rencontrées estiment que leur conjoint s'implique auprès du bébé plus qu'il ne l’aurait fait dans le pays d'origine : « Là-bas, les maris n'aident pas leur femme. Ils sont toujours dehors. »

Tableau 2

L'implication de votre conjoint est-elle différente au Québec?

L'implication de votre conjoint est-elle différente au Québec?

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Pourquoi les conjoints s'impliquent-ils davantage? Entre autres choses, ont mentionné plusieurs répondantes, ils voient s'ouvrir un espace d'implication qui avant n'était pas disponible, puisque traditionnellement occupé par d'autres femmes qui désormais sont absentes. De surcroît, le père ne risque guère ici de s'exposer aux commentaires désobligeants de ses pairs dans des tâches qui sont reconnues comme étant des tâches de femmes : « Bien sûr, ici c'est différent. Là-bas, il lui serait interdit de m'aider. Ses parents se moqueraient de lui s'il le faisait. » En un mot, et bien que cela puisse paraître paradoxal, le contexte d'immigration et l'absence des proches semblent favoriser l'implication paternelle et, par conséquent, pallier partiellement certains manques que cette situation entraîne.

Conceptions parentales

Pour toute nouvelle mère, mettre au monde un enfant engendre doutes et incertitudes : Suis-je en mesure de prendre soin de mon enfant? Suis-je une bonne mère? Dois-je donner le sein ou le biberon? Les repères socioculturels sur les rôles parentaux peuvent être ébranlés si la nouvelle société reconnaît seulement en partie ce qu'une mère croit être bon et adapté pour son enfant, en matière d'éducation et de soins de santé. Comment les mères immigrantes vivent-elles ce passage du pays d'origine à la société québécoise? Se trouvent-elles soutenues dans leurs croyances et leurs façons de faire? Parce qu'elles donnent force conseils qui peuvent être favorables à la santé et au développement de l'enfant, l'apport des intervenantes est nécessaire. Cela dit, les mères et les intervenantes sont-elles sur la même longueur d'onde? Les mères immigrantes sont-elles disposées à intégrer dans leur vie les conseils des intervenantes?

À l'occasion des groupes de discussion, les intervenantes ne se sont pas prononcées sur les conceptions parentales. Est-ce à dire qu'elles ne perçoivent aucune différence entre la façon dont les mères immigrantes conçoivent la façon d'éduquer leurs enfants? Si cette question n'a pas été documentée du côté de l'intervention, elle s'avère pourtant déterminante pour les mères qui, dans certains cas, sont en désaccord avec la façon d'éduquer les enfants au Québec. Quels sont les principaux changements et difficultés qu'elles notent? Bref, dans quelle mesure les mères peuvent-elles poursuivre leur vie selon leurs choix et leur conception du monde ?

La maternité après l'immigration

Lors de l'étude, les répondantes ont pour la plupart estimé que les conditions d'installation au Québec ne représentaient pas une entrave à leur rôle parental. Et cela, indépendamment des conditions de vie parfois difficiles qu'elles relèvent, tels le faible revenu, le manque d'aide familiale, l'instabilité du statut et le peu de moments personnels de loisirs et de distraction. Souvent issues de société moins bien nanties, elles apprécient néanmoins les avantages matériels dont elles disposent ici, par exemple les accessoires disponibles pour le bébé (poussettes, biberons, couches, etc.). Ce gain ne compense pas facilement l'absence de la famille, qui représente aussi une perte en matière d'environnement stimulant pour le développement social de l'enfant : « Là-bas je serais entourée par la famille... Les enfants grandiraient dans une ambiance pleine d'amour et de chaleur humaine, ce qui n'est pas le cas ici. »

Plusieurs répondantes soutiennent que le Québec offre aux enfants de meilleures perspectives d'avenir, qu'il s'agit d'un pays sécuritaire où la personne est respectée. Cependant, elles se disent attristées devant l'individualisme et le peu d'importance qu'on accorde selon elles à la famille en Amérique du Nord. Elles observent au Canada un mode de vie axé sur la consommation et le travail, le coût élevé de la vie et le chômage. Certaines mères se sentent mal à l'aise vis-à-vis de la liberté ambiante, notamment en ce qui a trait à la liberté sexuelle.

Tableau 3

Élever leur enfant au Québec : gains et pertes

Élever leur enfant au Québec : gains et pertes

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Immigrer, disent les mères, c'est accepter de vivre pour un certain temps l'isolement et la solitude. Elles rappellent le contexte de la maternité, qui accroît le besoin de soutien et son absence. C'est aussi, disent-elles, éprouver de la difficulté à trouver du travail, à faire reconnaître ses compétences et à accéder à une situation financière satisfaisante. Les mères mentionnent également une difficulté à faire respecter par leurs enfants leur langue et leurs traditions; elles notent un éclatement de la famille et une perte d'autorité parentale, un laisser-faire des parents québécois, qui tolèrent le manque de respect de leurs enfants sans les corriger.

À la lumière des commentaires recueillis, la perception qu'ont les mères immigrantes des valeurs éducatives véhiculées au Québec peut être assez négative. Ce faisant, la crédibilité des intervenantes et des conseils qu'elles offrent peut être affectée par cette perception plutôt négative, qu'elle soit fondée ou non.

État émotif en période périnatale

La plupart des études tendent à démontrer que certaines expériences migratoires peuvent affecter l'état émotif et que les femmes sont généralement plus affectées par cette expérience que les hommes (Beiser et collab., 1988; Hopper et Khan, 1998). La spécificité de la situation des femmes immigrantes soutient ces observations à plusieurs égards : leur trajectoire migratoire (souvent parrainées, plus dépendantes), les raisons d'immigration (pour être avec le conjoint, pour fuir, etc.) et la dislocation de leur réseau de soutien. De façon générale, les résultats de cette étude appuient ces observations, mais pour la période périnatale, une période déterminante pour la santé de l'enfant et de la mère, pour l'équilibre familial et le développement de l'attachement mère-enfant. De toute évidence, la migration et la maternité se croisent ici à une intersection où la fragilité émotive apparaît comme un facteur de vulnérabilité. Mais quelles sont les modalités de cette fragilité émotive, quelles en sont les raisons?

Dans les groupes de discussion, les intervenantes se sont montrées généralement sensibles à certains symptômes de l'état émotif qu'elles savent être associés à l'immigration. Par l'observation, parfois plus que par des questions, elles disent pouvoir saisir plusieurs difficultés sous-jacentes. Si elles tiennent compte des conditions de vie actuelles des mères immigrantes, les intervenantes associent facilement à un traumatisme prémigratoire un état émotif qui paraît fragilisé. Elles s'intéressent donc tout particulièrement au parcours et aux circonstances migratoires de la nouvelle arrivante : « […] est-ce qu'il y a eu un événement traumatique avant, le bébé est-il de son mari, est-ce qu'il y a eu viol, des choses comme ça? »

Les intervenantes sont également très conscientes de l'isolement dont souffrent ces mères en période périnatale et de l'impact de cette situation sur leur état émotif. Intuitivement, elles savent que ce n'est pas pareil, que leurs difficultés ne sont pas en tout point analogues à celles des femmes d'ici et que souvent elles prennent ancrage dans les aléas associés aux réalités migratoires : la perte de soutien, les événements marquants, les conditions de vie, etc.

Principales difficultés émotives des mères immigrantes

Les manifestations de détresse les plus fréquentes chez les répondantes lors de l'étude étaient associées à la solitude et à la tristesse[5]. Ces manifestations, cependant, semblaient plutôt ponctuelles et en lien avec le processus d'intégration. En effet, une grande partie des mères ont dit se sentir confiantes face à ce que l'avenir leur réserve, ce qui porte à croire que leur état de fragilité émotive est lié aux expériences récentes et que ces difficultés se résorberont avec le temps, du moins à leurs yeux. D'autres, cependant, sont plus affectées, notamment les mères multipares qui, dans cette étude, réunissent de nombreux signes perturbateurs : perte d'appétit, insomnie, anxiété, culpabilité et perte d'estime de soi.

Néanmoins, ce n'est pas tant le fait d'être multipare qui importe que l'ensemble des caractéristiques accompagnant cette situation chez les mères immigrantes. Rappelons simplement que les mères multipares qui ont participé à l'étude présentent une trajectoire migratoire marquant une rupture dans leur vie, tant physique que sociale et symbolique.

D'ailleurs, conscientes des changements opérés dans leur vie, plusieurs attribuent leur fragilité émotive à l'expérience migratoire, aux ruptures familiales, aux difficultés d'adaptation, particulièrement à cette période cruciale de leur vie où se rencontrent migration et maternité. L'absence de leurs proches et particulièrement de leur mère se fait sentir et affecte leur état émotif. Et celles qui ont connu des circonstances de départ difficiles gardent à l'esprit ces événements qui alimentent doute, insécurité et inquiétude.

Tableau 4

Causes attribuées à leur état émotif par les répondantes

Causes attribuées à leur état émotif par les répondantes

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Aussi, certaines circonstances migratoires peuvent vulnérabiliser les mères immigrantes sur le plan émotionnel lorsqu'elles représentent une rupture sociale et familiale et qu'elles s'accompagnent d'incertitudes (quant au statut, quant au fait de revoir la famille, etc.) et d'instabilité (adaptation, précarité). À cela s'ajoute l'expérience prémigratoire qui parfois peut rendre vulnérables émotivement celles qui ont été témoins de conflits dans leur pays d'origine. Par ailleurs, la nouveauté de la situation peut aussi constituer une forme de protection pour certaines qui s'accrochent plutôt à l'avenir et à leurs espoirs. Les expériences passées, traumatisantes ou non, peuvent également représenter une force nouvelle. Il ne faut pas perdre de vue que plusieurs ont émigré dans l'espoir d'améliorer leur situation de vie en général, et que cet espoir perdure généralement pendant les premières années d'immigration et peut souvent se traduire par une très grande motivation, par un désir de réussite et d'amélioration générale des conditions de vie.

Santé physique

Avec l'immigration, plusieurs changements de l'état de santé sont perceptibles. Peu importe si ces changements perçus sont positifs ou négatifs, souvent ils sont attribués par les répondantes à certaines circonstances migratoires. Comment ces femmes perçoivent-elles leur état de santé depuis leur arrivée au Québec? Et que peut-on dire sur l'état des nouveau-nés, voire de certains facteurs de risque tels que les naissances de petits poids ou de prématurés?

Pour les intervenantes, l'évaluation de l'état de santé physique des mères immigrantes se fait comme pour toutes les mères, selon les indices courants du dépistage des troubles et des problèmes, généralement réalisé par des infirmières qualifiées. Les problèmes spécifiques, comme un retard de croissance intra-utérin, la fatigue de la mère ou encore une plaie de césarienne infectée, sont pris en charge selon les modes d'intervention usuels. En fait, ces difficultés de santé physique apparaissent comme des critères de référence beaucoup plus clairs que toute analyse ou évaluation de la situation sociale, économique ou psychologique d'une mère.

La santé des mères immigrantes

La plupart des mères estiment que leur état de santé est stable depuis leur immigration, bien que certaines aient perçu soit une amélioration, soit une détérioration. Dans les deux cas, elles attribuent ces changements à la migration. Parmi celles qui disent se porter moins bien, l'une d'entre elles, une mère du Burundi, mentionne que « c'est à cause du stress. Parce qu'on s'inquiète pour nos familles, parce que c'est difficile pour le travail, parce que je n'ai pas beaucoup d'aide pour le bébé, tout ça fait que je suis plus faible. » Plusieurs mères expliquent ainsi la détérioration de leur état de santé par l'absence de la famille, mais aussi par le climat, par de nouvelles allergies ou encore par les changements alimentaires.

Tableau 5

Changement dans l'état de santé : raisons invoquées par les mères immigrantes

Changement dans l'état de santé : raisons invoquées par les mères immigrantes

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Cette détérioration de l'état de santé de ces mères, autant physique qu'émotive, gravite autour d'une trajectoire migratoire commune, soit celle de personnes qui ont immigré de façon involontaire et qui vivent une plus grande instabilité liée à leur situation familiale et économique.

Plus précisément, si la plupart des répondantes ont mené leur grossesse à terme, quelques-unes ont donné naissance à un bébé prématuré ou de poids insuffisant (moins de 2500 grammes), et cela dans une proportion presque équivalente à ce qu'on trouve dans le reste de la population montréalaise (autour de 6 % entre 1995 et 1997; MSSS, Fichiers des naissances, 1992 à 1997). Par ailleurs, le tiers des répondantes ont présenté des problèmes de santé en cours de grossesse : diabète de grossesse, hypertension ou anémie. Y a-t-il un lien entre ces risques à la naissance et les circonstances migratoires? Peut-être. Les résultats de l'étude permettent de remarquer que les mères présentant ces problèmes, y compris la prématurité et les bébés de poids insuffisant, sont pour la plupart des mères multipares qui ont déjà eu des enfants dans leur pays d'origine et dont l'immigration résulte d'une obligation plutôt que d'un choix.

Habitudes de vie

L'expérience migratoire s'accompagne inévitablement de changements d'habitudes qui parfois sont profitables, parfois non. Les migrantes sont placées dans un nouvel environnement physique et subissent des influences différentes (influences professionnelles, médias, voisins, etc.) qui les incitent à vivre des changements qui ne sont pas toujours désirés. Les habitudes de vie ayant une influence sur la santé, on peut mettre en cause les changements auxquels ces mères auront été soumises. En effet, ces habitudes relatives par exemple à l'hygiène ou à l'alimentation varient souvent d'un pays à l’autre, d'un individu à l'autre.

De toute évidence, les intervenantes qui ont participé à l'étude savaient que les mères immigrantes pouvaient avoir des habitudes différentes en ce qui concerne la santé et le développement de l'enfant. Mais l'immigration, disent-elles, peut également amener des changements dans ces habitudes de vie. Certaines relèvent d'ailleurs que les nouvelles arrivantes tendent à offrir le biberon, qu'elles jugent plus moderne que le sein. D'autres mentionnent aussi, pour ce qui est de l'hygiène et de l'alimentation, qu'on doit tenir compte de la réalité de la famille immigrante, comprendre que les normes et les standards varient considérablement d'une société à l'autre et voir à ne pas trop insister sur les normes canadiennes. Ainsi, selon ces intervenantes, il convient de vérifier si les nouvelles arrivantes sont informées de toutes les possibilités en matière d'alimentation et de santé afin, disent-elles, de pouvoir faire un choix éclairé.

Habitudes de vie des mères immigrantes

Les habitudes de vie des mères immigrantes sont reconnues comme bonnes pour la croissance et le développement du bébé. Ces mères se nourrissent en général d'aliments sains, utilisant en particulier moins de produits usinés. De même, leur consommation de stimulants (café, alcool, thé) et autres drogues est souvent moins élevée qu'au sein de la population québécoise en général, laquelle cumule davantage d'habitudes considérées comme étant à risque (Doucet et collab., 1991). Les résultats de la présente étude vont dans le même sens : aucune des mères rencontrées, ou presque, ne consommait de stimulant, de produits du tabac ou autres.

Par ailleurs, en ce qui a trait à l'alimentation du bébé, il ne fait aucun doute qu'aux yeux des répondantes le lait maternel est supérieur aux préparations lactées pour assurer le bon développement du bébé. Pourtant, ce ne sont pas toutes les mères qui offrent d'abord le sein et en exclusivité. Plusieurs nourrissent leur bébé au biberon ou encore offrent un allaitement mixte, alternant entre le sein et le biberon. Les mères qui donnent le biberon choisissent ce mode d'allaitement parce qu'il s'avère être une solution de rechange valable à l'allaitement maternel lorsque celui-ci est difficile à adopter. Ainsi, les mères qui donnent le biberon, ou qui alternent entre le sein et le biberon, disent se sentir trop épuisées ou stressées pour faire autrement.

Celles qui ont d'emblée introduit le biberon ou qui ont cessé de donner le sein disent, pour la plupart, que l'alimentation du bébé aurait été différente dans leur pays d'origine. Plusieurs rapportent qu'elles auraient pu allaiter si elles avaient eu le soutien de leur famille ou si elles avaient été sous l'effet d'un moins grand stress. Pour d'autres, notamment celles qui ont opté pour l'allaitement maternel, les conditions d'allaitement auraient été les mêmes dans le pays d'origine, mais peut-être plus stressantes et plus difficiles, étant donné les conditions de vie qui y règnent. Donc, dans certains cas, l'immigration entrave le maintien des habitudes d'allaitement et, dans d'autres cas, elle offre plus de facilité et permet de les maintenir. En somme, lorsque le biberon est donné, c'est toujours ou presque par obligation, l'allaitement étant perçu comme favorable, comme le souligne cette mère : « Dans de bonnes conditions chez moi, j'aurais eu moins de stress, alors j'aurais sûrement eu plus de lait, j'aurais allaité plus longtemps. »

Utilisation des services de santé

Avec l'accouchement et l'arrivée du nouveau-né, le recours aux services de santé est bien sûr inévitable. Qu'il s'agisse des services hospitaliers, cliniques ou encore de services plus spécifiques en périnatalité, leur utilisation par les mères immigrantes variera selon leurs besoins et leurs connaissances. Si certains services sont ouverts à tous, d'autres sont sélectifs, comme les banques alimentaires, les suivis individualisés et le marrainage. L'accessibilité de ces services, leur capacité à répondre aux besoins des mères et de leur enfant et, à l'occasion, de contrer la faiblesse des réseaux de soutien constituent des facteurs qui peuvent avoir un impact sur l'état de santé et la vulnérabilité. Mais, au-delà de ces programmes, dans quelle mesure les services de santé sont-ils utilisés? Et quelle perception en ont les mères ?

L'expérience de l'accouchement et des soins de santé au Québec

Si la plupart perçoivent des gains relativement à la qualité des soins et à l'accessibilité du système de santé, d'autres tempèrent cette appréciation et disent que les services ici sont plus froids, plus anonymes, que l'attente est longue et qu'elles ne se sentent pas toujours respectées dans leurs valeurs. Néanmoins, selon les expériences dans leur pays d'origine, les répondantes vacillent entre gains et pertes. Une mère mexicaine exprime ainsi sa satisfaction : « Oui, c'est bien ici, parce que là-bas les soins médicaux ne sont pas bons, ils ne sont pas gentils et quand on accouche on doit sortir après deux heures et aller à la maison. »

La perception des services québécois est influencée par les expériences antérieures, par les services auxquels les mères avaient accès dans leur pays d'origine. Ainsi, certaines mères éprouvent des déceptions, alors que d'autres qui ont quitté une situation plus précaire apprécient davantage ce que leur offre le système de santé au Québec.

Participation aux services de périnatalité

En général, les mères qui ont participé à l'étude apprécient beaucoup les activités et les services de périnatalité offerts par les CLSC. Elles sont satisfaites et, dans certains cas, changent leur façon de faire avec leur enfant. Certaines disent participer pour apprendre de nouvelles choses, alors que d'autres avouent participer simplement parce qu'elles ont été dirigées vers ces services. Elles l'ont d'ailleurs été à l'initiative d'un professionnel de la santé qui les aura jugées vulnérables.

Tableau 6

Comparaison entre les soins reçus ici et dans le pays d'origine au moment de l'accouchement

Comparaison entre les soins reçus ici et dans le pays d'origine au moment de l'accouchement

Une même répondante pouvait mentionner plus d'un item. Le total du pourcentage est donc supérieur à 100 %.

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Si la plupart apprécient ces activités et les services de santé en général, d'autres y rencontrent des difficultés et certaines n'y ont pas vraiment accès. Les difficultés mentionnées concernent bien sûr la communication. Les unes soulignent avoir de la difficulté à comprendre les explications et les autres se plaignent de l'absence de dialogue avec des médecins, qui parlent trop peu. Néanmoins, très peu ont dit subir de la discrimination ou du racisme, bien que toutes n'aient pas un accès égal aux mêmes activités. Par exemple, les mères qui parlent français ont plus facilement accès aux cours prénataux. De leur côté, les mères allophones semblent plutôt bénéficier des services de distribution alimentaire. Le besoin de parler une langue commune au sein de ces activités explique en partie la participation plus grande de mères qui peuvent s'exprimer en français. Enfin, il est apparu que les mères, ou leur conjoint, qui ont vécu une déqualification professionnelle sont celles qui ont le moins bénéficié des services intégrés en périnatalité. Il semblerait que les caractéristiques associées à leur déqualification, la scolarité et l'expérience de travail notamment, ont fait en sorte que leur vulnérabilité a été sous-estimée.

La prise en considération des circonstances migratoires

Par des questions spécifiques se situant en dehors des cadres habituels de leur pratique, les intervenantes savent mettre en perspective la réalité des mères immigrantes. Elles ne cessent de recadrer leur perception à la lumière du parcours migratoire. Elles s'informent tout autant des événements antérieurs à la migration, possiblement traumatisants, que des jalons du parcours, des séjours en camps de réfugiés que de la situation de vie ici (séparation familiale, adaptation, réseau, isolement). La multitude de facteurs pris en compte dans leur interprétation de la vulnérabilité témoigne d'une sensibilité toute particulière aux difficultés associées aux parcours migratoires. La complexité de l'expérience de la mère est ici intégrée dans l'interprétation, malgré le fait que les critères d'évaluation ne soient pas disponibles pour avaliser leurs perceptions.

Si la vulnérabilité est relativement bien saisie, les décisions de suivi ne concordent pas toujours avec les observations. Par exemple, on alléguera un problème d'ordre biomédical pour s'assurer d'une présence continue auprès d'une mère que l'on juge à risque d'un choc post-traumatique. La formation des intervenantes n'est pas étrangère à cette réaction, laquelle a surtout été observée chez les infirmières participant aux rencontres. Néanmoins, ces facteurs de risque propres aux mères immigrantes n'étant pas toujours reconnus officiellement et n'étant pas inscrits dans les outils de dépistage, ils ne sauraient être allégués pour justifier un suivi. Il s'agit en quelque sorte d'un problème de reconnaissance des circonstances migratoires qui est ainsi contourné par certaines intervenantes soucieuses d'offrir un service. Est-ce à dire que les perceptions des intervenantes convergent avec celles des mères elles-mêmes?

Convergences et divergences des points de vue

La comparaison des deux perspectives, celle des mères et celle des intervenantes, permet de renforcer certaines hypothèses en s'appuyant sur la convergence des points de vue ou, au contraire, d'émettre des mises en garde en s'appuyant cette fois sur la divergence de certains propos. En fait, les résultats de cette étude peuvent aider à confirmer, par certaines constatations, un savoir déjà présent chez des intervenantes expérimentées qui connaissent bien le contexte pluriethnique et peut-être à favoriser une reconnaissance plus formelle de celui-ci dans la pratique. Cela dit, là où il y a convergence entre les deux perspectives analysées, il est permis de cautionner ce savoir et éventuellement de le rendre explicite par l'entremise des outils d'évaluation disponibles.

Les principaux points de convergence se situent autour de la perception du parcours migratoire et de ses impacts. Les intervenantes se sont montrées très sensibles aux motifs d'immigration, lesquels permettent de mieux saisir les perspectives d'intégration et les séquelles laissées par les conflits armés dont certaines mères ont été témoins (viol, mort, etc.). L'étude auprès des mères tend à soutenir cette perception. Les raisons d'immigration y sont en effet apparues déterminantes pour la santé et pour les conditions de vie parentales. De fait, les mères qui ont quitté leur pays par obligation présentent un profil singulier, la plupart du temps associé au statut de réfugié ou de requérant de statut, de même qu'à la parité (multiparité). Ces catégories d'admission traduisent souvent un parcours migratoire difficile et susceptible d'avoir des conséquences sur les conditions parentales, tant sur le plan émotif, physique que socioéconomique.

Une autre convergence majeure concerne l'isolement. Les intervenantes ont démontré une compréhension très fine de ce phénomène, notamment parce qu'il reflète un faible réseau social et peu de soutien durant la période périnatale. De leur côté, les mères immigrantes ont clairement exprimé les conséquences de cet isolement sur leurs conditions de vie, et ce, autant sur le plan émotif que social. Rappelons que l'isolement se manifeste notamment par l'absence de contacts réels, tant sociaux que familiaux, et se concrétise par un manque de soutien. Il devient encore plus significatif aux yeux des mères lorsque les femmes sont absentes dans l'entourage, puisque ces dernières procurent un soutien mieux adapté à leurs besoins durant la période périnatale. Cette réalité, exprimée par les mères immigrantes et soulignée par les intervenantes, révèle une de leurs principales vulnérabilités dans la mesure où elle frappe la grande majorité de ces mères durant les premières années de leur intégration.

En ce qui concerne les divergences, l'une des principales porte sur la relation entre vulnérabilité et parité en contexte migratoire. Comme les intervenantes l'ont noté dans les groupes de discussion, il est légitime de penser que la multiparité peut représenter un atout, puisque la mère, forte de ses expériences antérieures, est prémunie contre certains facteurs de risque. Bien que cette interprétation soit juste en général, elle perd dans plusieurs cas ses assises en contexte migratoire, car elle traduit une réalité différente, un parcours différent.

L'étude a en effet permis de constater qu'avoir un ou plusieurs enfants au moment d'émigrer pouvait représenter un indice de vulnérabilité en soi. Si les mères primipares ont eu la possibilité de planifier simultanément un projet migratoire et un projet familial, les mères multipares, de leur côté, ont bien souvent vécu leur émigration comme une rupture personnelle et familiale. Cette distinction montre évidemment deux parcours fort différents. Aussi la parité mérite-t-elle d'être réinterprétée à la lumière de l'expérience migratoire et de ses conséquences. Le cas des mères ayant eu un bébé avant de quitter leur pays d'origine est très éclairant sur ce point. Soulignons simplement que ces femmes présentent un parcours parsemé d'expériences qui peuvent laisser des séquelles et maintenir un plus grand degré d'anxiété. De plus, les responsabilités d'une mère multipare, conjuguées au processus d'intégration lors de la période périnatale, peuvent accroître sa vulnérabilité sur plusieurs plans.

Les perceptions diffèrent également en ce qui a trait au conjoint et à son rôle. Facilement jugés par les intervenantes qui ont participé aux rencontres, notamment lorsque leur présence apparaît envahissante, les conjoints sont au contraire très appréciés par leur conjointe, lorsque, bien sûr, ils ont su ajuster leur implication à la situation particulière de l'immigration. En l'absence de réseaux, surtout familiaux, les conjoints vivent un contexte qui favorise leur implication et qui leur offre la possibilité de transgresser certaines normes qui habituellement gèrent la division sexuelle des tâches dans leur pays d'origine. Plusieurs mères ont d'ailleurs mentionné que jamais leur conjoint ne se serait autant impliqué dans leur pays d'origine, étant alors soumis au regard critique de leur famille. Bien évidemment, cette adaptation n'a permis de combler l'absence des réseaux naturels de soutien que de manière partielle, mais néanmoins utile dans la plupart des cas. En fait, l'absence de la famille suggère ici un effet paradoxal : elle constitue en soi un facteur de vulnérabilité, mais favorise un comportement parental favorable de la part du conjoint. Quoi qu'il en soit, il apparaît que le soutien du conjoint est important aux yeux des mères, que la famille soit présente ou non, et qu'il est certes pertinent de l'encourager lorsque c’est possible.

Notons aussi que les mères immigrantes ont tenu dans l'ensemble des propos assez négatifs sur la façon d'élever les enfants au Québec. Par contre, du côté des groupes d'intervenantes, ce sujet a été très peu abordé. Pourtant, la perception que les mères ont des valeurs éducatives risque d'influencer la crédibilité des conseils qui leur sont prodigués lors des activités en périnatalité. Qui plus est, les perceptions qu'ont les personnes immigrantes des valeurs véhiculées au sein des services peuvent représenter un obstacle important à l'accessibilité. Or, ces perceptions ne reflètent qu'une partie de la réalité. Elles puisent également leur source dans les stéréotypes et les préjugés qui circulent au sujet de la population québécoise, de même que sur les valeurs éducatives dominantes. Il apparaît donc pertinent d'informer et d'échanger sur les façons d'éduquer et d'élever les enfants, d'aider à mieux en comprendre les raisons et les enjeux sous-jacents et d'ainsi démystifier certains a priori.

Enfin, les intervenantes se sont montrées particulièrement sensibles en ce qui a trait à la déqualification professionnelle lors des entrevues. Par contre, l'étude auprès des mères immigrantes a plutôt permis de constater que les mères (et leur conjoint) les plus marquées par la déqualification n'avaient pas été redirigées par un professionnel de la santé et n'avaient pas été perçues comme potentiellement vulnérables. En conséquence, ces femmes représentent les répondantes qui ont le moins bénéficié des services de périnatalité offerts par les CLSC, bien que l'on trouve au sein de ce sous-groupe des cas de naissances prématurées, de bébés de petit poids et ayant des problèmes de santé. Peut-être que les caractéristiques propres à ces mères (scolarité, âge, capacité d'expression, expérience, habitudes, etc.) ont faussé l'interprétation de leur vulnérabilité et qu'il faut, pour les évaluer avec une plus grande justesse, tenir compte de leur réalité migratoire.

Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que la déqualification des unes et l'ascension sociale des autres nous ont amenés à constater un nivellement socioéconomique au sein de l'échantillon qui place la grande majorité des mères en situation de précarité économique. Ainsi, si la scolarité et l'expérience professionnelle peuvent être considérées comme des caractéristiques qui, à long terme, devraient améliorer les conditions de vie d'une personne, à court terme elles procurent fort peu d'avantages.

Enfin, si l'on considère que les circonstances migratoires peuvent affecter les conditions de vie parentales, et qu'il faut en tenir compte pour mieux évaluer la vulnérabilité des mères immigrantes, peut-être est-il préférable de demeurer vigilant devant l'influence de certains courants de pensée. Il en est ainsi du relativisme culturel. Bien qu'il s'agisse d'une influence incontournable, sinon au risque d'imposer des valeurs locales comme universelles, pour relativiser avec justesse il importe de très bien connaître la culture dont il est question. Or, il est impossible d'exiger d'une personne qu'elle acquière une expertise professionnelle sur chacune des cultures qu'elle est appelée à rencontrer au cours de son travail. Aussi, si l'interrogation relativiste doit être maintenue, pour ce qui est de la vulnérabilité des mères immigrantes, l'analyse des circonstances migratoires permet d'en éviter les effets paradoxaux qui empruntent trop souvent la forme d'un déterminisme culturel.

Conclusion

Cette recherche a permis de documenter les circonstances associées à l'expérience migratoire qui agissent comme facteurs de protection pendant la période périnatale ou qui, au contraire, affectent les conditions de vie et contribuent à un environnement défavorable pour l'expérience de la maternité. Certaines des observations de cette étude se sont avérées conformes aux observations d'études précédentes, notamment par rapport au parcours migratoire des personnes réfugiées ou en attente de statut et des effets des parcours sur l'état émotif et la santé (Chicoine et collab., 1997; Rousseau et collab., 1997; Renaud et collab., 2000). Par contre peu d'études avaient jusqu'à présent documenté la relation entre le parcours migratoire et le parcours familial (Vatz-Laaroussi, 1993). Il a ainsi été possible de mettre en évidence un certain nombre de facteurs de vulnérabilité qui dans ce contexte particulier sont associés à la parité, à la dynamique familiale, à l'ajustement du rôle paternel, au rôle ambigu des réseaux familiaux, à la déqualification et à l'importance des réseaux féminins. Il est également apparu que ces facteurs encore méconnus maintiennent une certaine incertitude lors du processus décisionnel qui vise à diriger ces mères vers des programmes adéquats en périnatalité.

L'analyse de ce processus décisionnel montre qu'un tel ajustement, qui permet de tenir compte de la vulnérabilité des mères immigrantes, est déjà à l'oeuvre dans le milieu et qu'il doit demeurer multidisciplinaire afin d'assurer la prise en compte des dimensions psychosociales relatives aux conditions de vie parentales. Il ressort en effet plus de convergences que de divergences entre la perspective des mères et celle des intervenantes. Là où il y a convergence, cela permet en quelque sorte de cautionner un savoir déjà présent dans le milieu de l'intervention auprès d'intervenantes expérimentées et familières du contexte pluriethnique. Par contre, les divergences nous rappellent qu'il existe toujours une méconnaissance et une non-reconnaissance des circonstances migratoires qui peuvent altérer les conditions de vie parentales. Une situation qui est susceptible de nuire à l'accessibilité de ces programmes pour les mères immigrantes.

Enfin, les limites inhérentes à cette étude exploratoire ne nous permettent pas de généraliser les résultats obtenus, mais nous incitent plutôt à regarder vers d'autres avenues de recherche, notamment dans le but de valider les facteurs de vulnérabilité relevés et pour produire des analyses comparatives entre la situation de mères d'origine québécoise et immigrantes.

Dans toute société où l'apport de l'immigration est important, surtout sur le plan de la natalité, il convient de s'intéresser aux expériences des femmes immigrantes dès le début de la maternité. Cette période charnière marque en effet le début de la transmission d'un héritage à toute une nouvelle génération d'enfants. Et cet héritage sera forgé de forces consolidées ou de faiblesses, au fur et à mesure que le soutien requis aura été disponible ou non, au moment critique où se cristallise le double ancrage migration et maternité. Tenir compte des facteurs de vulnérabilité associés aux circonstances migratoires permettra non seulement d'améliorer l'accessibilité aux programmes intégrés en périnatalité et d'éviter des inégalités en matière de santé pour les femmes immigrantes, mais aussi d'ajuster ces interventions en fonction de besoins sociaux et culturels.