Notes de lecture

Boucris, Luc, La scénographie : Guy-Claude François à l’oeuvre, Montpellier, L’Entretemps, 2009, 144 p., coll. « Ex Machina »[Notice]

  • Véronique Borboën

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  • Véronique Borboën
    Université du Québec à Montréal

Les ouvrages sur la scénographie contemporaine ne sont pas nombreux et ceux sur les scénographes le sont encore moins – d’où l’intérêt de cette publication de Luc Boucris, qui cherche à donner leur place aux études portant sur les enjeux des pratiques contemporaines de l’espace théâtral. Comme le précise l’auteur, il ne s’agit pas d’une monographie, mais plutôt d’une réflexion sur les façons d’appréhender l’imaginaire spatial contemporain : en effet, il affirme vouloir « comprendre ce que scénographier veut dire » (p. 117). Ainsi, l’itinéraire emblématique du scénographe Guy-Claude François illustre les différentes questions posées par la pratique de la scénographie contemporaine. Le travail de François est replacé dans le contexte particulier des années 1970, durant lesquelles on a cherché – et rien de moins – à réinventer le théâtre, ce qui comprenait déjà la volonté d’investir d’autres lieux pour échapper à l’institution. Ce mouvement voit l’émergence du personnage scénographe. François fait ainsi partie de ces scénographes du xxe siècle qui, à partir de la fin des années 1960, ont complètement renouvelé l’approche du lieu théâtral et l’organisation de l’espace scénique en lien étroit avec le metteur en scène et le travail des comédiens. Si on ne peut le dissocier ni du Théâtre du Soleil, ni de la Cartoucherie, ni de sa collaboration avec Ariane Mnouchkine – qui s’amorce dès 1968 – on ne peut oublier, non plus, qu’il a aussi travaillé avec d’autres metteurs en scène (comme Otomar Krejca et Jean-Claude Penchenat), des réalisateurs de cinéma (comme Bertrand Tavernier et James Ivory) ou des architectes (comme Renzo Piano). Cofondateur, avec Jean-Hugues Manoury, de la société Scène en 1988, il a conçu, en collaboration avec des architectes, plus d’une centaine de salles de spectacles et autres lieux d’exposition ou d’événements. Sa vision de la scénographie s’accorde de près avec celle de Luc Boucris, et c’est ensemble qu’ils en ont rédigé la définition qui figure dans Le dictionnaire encyclopédique du théâtre qu’a dirigé Michel Corvin : Si chaque spectacle est unique, les solutions proposées par François forment une sorte de manuel du parfait scénographe. Boucris utilise l’exemple de la pratique de François pour cerner la pratique de la scénographie contemporaine. Ce choix est judicieux et particulièrement intéressant en regard de la conception ouverte de la scénographie pratiquée par l’artiste. L’ouvrage propose quatre grands chapitres : « Le texte », « Les lieux », « Jouer avec l’espace » et « Interpréter l’espace ? » Chaque chapitre propose des pistes de réflexion sur la scénographie que Boucris décrit comme « cette pratique qui redonne de la souplesse aux espaces » (p. 18). Le texte reste le point de départ fondamental pour Boucris, qui refuse de l’opposer à la représentation, et qui affirme que tout spectacle repose sur un texte – même minimal –, y compris le théâtre sans paroles. Il commence par présenter d’une façon très détaillée les pièces et les personnages d’Anton Tchekhov, en particulier Les trois soeurs et Oncle Vania. Il s’attarde ensuite sur la collaboration de François avec le metteur en scène Otomar Krejca. Les approches scénographiques sont longuement détaillées et illustrées avec des croquis de travail et même des plans techniques comme des plans au sol et des élévations. Puis, le travail avec Mnouchkine est évoqué à travers les pièces Norodom Sihanouk, L’indiade, La ville parjure, Le tartuffe et le cycle Shakespeare. Boucris évoque « le vide splendide » (p. 45) et s’attache à nous faire comprendre ce que Mnouchkine veut dire lorsqu’elle demande au décor de voyager. Le volet cinéma est évoqué par le Molière de Mnouchkine et La passion Béatrice de …

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