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Répertoire de toutes les connaissances humaines dont la consultation est prescrite après l’apparition de la moindre interrogation, hydre des temps modernes où derrière chaque faute « abattue » s’en révèlent dix autres, c’est bien souvent selon ce diptyque manichéen que l’encyclopédie libre de la Wikimedia Foundation, Wikipédia, nous est présentée. Mais derrière cette opposition de principe se cache une réalité plus complexe qui mérite amplement l’attention des responsables des services et des centres d’archives en quête de visibilité pour les documents dont ils ont la charge.

Constamment placé, durant ces dernières années, dans le classement des dix sites Internet les plus consultés au monde, Wikipédia est le « projet » de la Wikimedia Foundation ayant connu le succès le plus rapide et le plus important. Créée en 2001, l’encyclopédie libre peut, en 2017, se targuer de disposer de plus de 30 millions d’articles rédigés dans 290 langues. De nos jours, Wikipédia est consultée par « près de 500 millions de visiteurs » en provenance du monde entier (Wikipédia, 2017a).

Autre plateforme wiki ayant rapidement su acquérir une importante renommée, Wikimedia Commons est une médiathèque contenant l’ensemble des documents iconographiques, sonores et visuels diffusés sur les différents projets de la Wikimedia Foundation. En 2017, ce sont 37 millions d’images, 760 000 fichiers audio et plus de 100 000 documents vidéo qui sont disponibles à l’exploitation par tous. L’ensemble des images servant à illustrer les articles sur Wikipédia est issu de Commons.

Une grande partie de ce succès a été rendu possible grâce à la volonté de la Wikimedia Foundation de rapidement mobiliser, à partir de l’année 2011, des GLAM (acronyme anglais pour Galleries, Libraries, Archives and Museums) particulièrement prestigieux, tels que le British Museum, le château de Versailles ou encore la National Archives and Records Administration (NARA) des États-Unis, afin que ces derniers améliorent le contenu de l’encyclopédie libre et puissent diffuser des images sur Commons et des ouvrages sur Wikisource. Cette mobilisation des institutions culturelles, souvent aidées par des bénévoles de l’univers wiki, permet de réagir aux critiques concernant le manque d’exactitude du contenu des articles de l’encyclopédie, tout en offrant une visibilité inédite et importante aux musées, aux bibliothèques et aux centres d’archives ainsi mis en valeur.

Mais derrière les chiffres, qui ont de quoi faire tourner la tête à plus d’un, se cache une réalité particulièrement complexe. L’univers wiki est avant tout une communauté, un monde, parfois déroutant, qu’il faut savoir maîtriser si l’on souhaite tirer pleinement parti des nombreuses ressources mises à sa disposition. Un service ou un centre d’archives qui désire modifier des articles ou diffuser des images sur Commons doit connaître un minimum de règles, sous peine de voir son travail être réduit à néant par une communauté particulièrement à cheval sur les principes qu’elle établit pour améliorer la qualité des contenus. Ainsi, derrière les faramineux nombres de visionnements promis à l’horizon se cache un parcours initiatique parfois difficile à entreprendre si l’on est peu préparé.

Cet article vise à présenter les bases permettant à un service ou à un centre d’archives de mieux comprendre non seulement les possibilités, mais également l’investissement nécessaire à l’exploitation des principaux projets de la Wikimedia Foundation. Débutant par une présentation générale de cette dernière, ce texte introduit les trois principaux projets pouvant servir à la diffusion et à l’exploitation des archives (Wikipédia, Wikimedia Commons et Wikisource). À travers des exemples concrets de réalisations internationales, il présente les projets qu’un service ou un centre d’archives peut envisager d’effectuer. Ce texte introduit également les principes de base qu’une institution doit garder à l’esprit lorsqu’elle réalise sa page GLAM, véritable site Internet intégré dans les différents projets wikis et qui assure une visibilité du projet auprès de la communauté wikipédienne. Finalement, nous concluons en présentant un argumentaire relativement à la stratégie d’investissement qu’un service ou un centre d’archives doit songer à effectuer s’il envisage d’exploiter les principaux projets de la Wikimedia Foundation.

1. Bienvenue dans l’univers de la WikimEdia Foundation

L’univers wiki est particulièrement vaste. Plus précisément, il est constitué de quatorze projets. Ceux-ci, aux propriétés différentes, sont tous régis par leur propre communauté. Il est probable que les lecteurs de ce texte aient tous déjà voyagé, parfois sans le savoir, dans plusieurs de ces projets. Afin de mieux saisir les occasions que nous offrent les principaux sites de la Wikimedia Foundation, il est nécessaire d’introduire plus spécifiquement ces derniers.

1.1. La Wikimedia Foundation

À l’origine se trouve un homme : Jimmy Wales. Cofondateur de Wikipédia, Wales décide, le 20 juin 2003 (Machefert, 2014, p. 2), de créer une société à but non lucratif ayant pour objectif d’assurer la supervision, l’hébergement et le perfectionnement de ses projets. Dans son règlement, la Wikimedia Foundation déclare qu’elle a pour finalité d’encourager les habitants du monde entier à collecter et à diffuser du contenu éducatif sous licence libre (ou se trouvant dans le domaine public) afin de disséminer le savoir mondial (Wikimedia Foundation, 2007).

La fondation affirme également vouloir vivre et rester indépendante grâce aux dons de ses usagers. Parmi ces derniers, on retrouve le groupe caritatif de Virgin (gros donateur de 2007), ainsi que Google qui a effectué un don de deux millions de dollars en 2010 (Noisette, 2010). Selon son rapport pour l’année 2017 (du 1er juillet 2016 au 30 juin 2017), la Wikimedia Foundation a reçu pas moins de 91 242 418 dollars de revenus et de dons pour 69 136 758 dollars de dépenses (Wikimedia Foundation, 2017).

Dans le but d’étendre ses projets à l’ensemble de la planète, la Wikimedia Foundation soutient la création de groupes nationaux qu’elle nomme « chapitres locaux ». Ces derniers, qui n’ont aucun pouvoir sur les projets de la fondation, sont actuellement au nombre de 34 (Wikipédia, 2017b). Parmi ces chapitres, on trouve ceux de la France, de la Suisse, du Portugal et aussi celui du Canada. Ce dernier, créé en 2011, collabore activement avec plusieurs institutions canadiennes telles que Bibliothèque et Archives nationales du Québec (première collaboration GLAM au Canada).

La Wikimedia Foundation supervise plusieurs projets. Ces derniers sont au nombre de quatorze :

  • Wikipédia : projet d’encyclopédie universelle ;

  • Méta-wiki : wiki consacré à la gestion des projets Wikimédia ;

  • Wikitionnaire : dictionnaire et thésaurus participatifs. Ce projet a pour objectif d’offrir une définition à tous les mots dans toutes les langues ;

  • Wikiquote : recueil collaboratif de citations ;

  • Wikibooks : compilation d’ouvrages à caractère pédagogique ;

  • Wikisource : recueil de textes dans le domaine public ;

  • Wikimedia Commons : bibliothèque contenant les images, les vidéos et les documents sonores se trouvant sur les articles de Wikipédia ;

  • Wikinews : site d’informations ;

  • Wikispecies : répertoire recensant toutes les espèces vivantes ;

  • Wikimania : conférence annuelle et internationale rassemblant les collaborateurs aux projets de la Wikimedia Foundation ;

  • Wikiversity : projet de création et d’utilisation de contenus et processus pédagogiques gratuit et pour tous les âges ;

  • Wikivoyage : guide de voyage ;

  • Wikidata : base de données suivant les standards du Web des données (Wikipédia, 2017b).

Parmi l’ensemble de ces mondes qui constitue l’univers wiki, ceux de Wikipédia, de Wikimedia Commons, et de Wikisource disposent d’un fort potentiel concernant la diffusion et l’exploitation des archives.

1.2. Wikipédia : une encyclopédie universelle connue mondialement

C’est le 15 janvier 2001 que Jimmy Wales et Larry Sanger, devenu depuis l’un des plus grands critiques du projet, décident de fonder Wikipédia (Schwartz, 2015). Véritable plateforme multilingue, l’encyclopédie, qui pouvait déjà se targuer, en 2011, de disposer de vingt millions d’articles produits dans plus de 270 langues (Savary, 2012, p. 140), déclare aujourd’hui en contenir pas moins de 30 000 000 rédigés en 290 langues. En moyenne, ce sont plus de 8 000 articles qui sont rédigés toutes les 24 heures. Actuellement, il existe près de 1 900 000 articles rédigés en français (Wikipédia, 2017c).

Dans un esprit de collaboration communautaire, n’importe quel individu peut rédiger ou corriger le contenu d’un article. Cependant, la disposition d’un compte wiki permet un meilleur suivi des éventuelles modifications ou corrections effectuées par les collaborateurs (modérateurs de l’encyclopédie). Ces derniers ont, avec le temps, développé une profonde méfiance vis-à-vis de ceux qui modifient Wikipédia en s’identifiant avec uniquement leur adresse IP.

De nos jours, l’usager dispose de deux moyens lui permettant de modifier le contenu d’un article. En cliquant sur l’onglet « modifier », disposé au-dessus de la grande majorité des textes, l’utilisateur arrive sur une page « WYSIWG » (What you see is what you get – en français : « tel affichage, tel résultat ») ouvrant l’article comme sur un programme de traitement de texte (Figure 1). La modification de la publication s’effectue alors tout simplement en modifiant le texte. La seconde méthode, plus ancienne, demande à l’usager de modifier directement le code de la page (Figure 2). Pour cela, l’utilisateur doit apprendre et savoir utiliser la syntaxe utilisée par la Wikimedia Foundation (Léauthier, 2014). Même si cette méthode peut être enrichissante pour les personnes intéressées à l’utilisation d’un code, son apprentissage est plus long et le besoin de disposer d’une aide externe issue de la communauté wikipédienne est plus grand.

Figure 1

Page de modification WYSIWIG de l’article sur BAnQ.

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Biblioth%C3%A8que_et_Archives_nationales_du_Qu%C3%A9bec?veaction=edit

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Figure 2

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Forte de ses millions d’articles déjà rédigés, l’encyclopédie ne cherche plus seulement à multiplier leur nombre, mais également à en améliorer la qualité afin de répondre aux nombreuses critiques concernant la pertinence de son contenu (Chiriac, 2015). La communauté wikipédienne se dote continuellement de règlements toujours plus stricts afin d’encadrer le style d’écriture des collaborateurs. Des robots ont rapidement été conçus afin de détecter toute modification malveillante. De plus, la communauté invite les nouveaux participants à suivre une phase d’apprentissage en ligne avant toute création ou modification d’article (Chiriac, 2015).

Parallèlement à cet encadrement, qui vise à rendre son encyclopédie plus « fréquentable », la communauté wikipédienne et la Wikimedia Foundation effectuent en 2011 le choix de solliciter la participation des académiciens, des universités et des institutions culturelles. Cette année marque un tournant dans l’histoire de l’encyclopédie et plusieurs institutions culturelles vont, principalement entre 2011 et 2014, annoncer l’établissement de partenariats entre eux et le groupe Wikimédia de leur pays.

Une bonne partie de ces conventions ne concernent pas uniquement Wikipédia, mais également le répertoire d’images, de vidéos et de sons de la Wikimedia Foundation : Wikimedia Commons.

1.3. Wikemedia Commons : une médiathèque au service de la communauté

Wikimedia Commons est officiellement lancée au mois de septembre 2004. Son objectif principal est de constituer un répertoire d’images, de sons et de vidéos en contenu libre et facilement exploitable (Savary, 2012). Tous les documents consultables sur les plateformes wikis sont disposés sur Wikimedia Commons. L’ensemble des usagers doit pouvoir librement et gratuitement modifier, copier et réutiliser les fichiers en respect des règlements inscrits dans les descriptions de ces derniers (Wikimedia Commons, 2017c). Cette ressource de documents, qui contenait 11,4 millions d’images en 2011 (Savary, 2012), disposait, le 11 juin 2017, de pas moins de 38 379 223 images (principalement au format JPEG [91,76 % des images]), 1 140 723 dessins vectoriels, 781 146 fichiers sonores et 104 072 fichiers vidéo (Wikimedia Commons, 2017a). Ces chiffres sont en continuelle croissance.

Contrairement à Wikipédia, la personne qui souhaite importer des fichiers doit obligatoirement disposer d’un compte et se connecter. Une fois le compte créé, le versement d’image est relativement simple et bien expliqué. La connexion par le biais d’un compte est nécessaire, car elle assure un suivi des créateurs des fichiers dans un milieu où le droit d’auteur est important. La thématique du droit à l’exploitation des fichiers est omniprésente sur Commons et la communauté ne cesse de rappeler les règles aux différents utilisateurs. Ce souci du droit étant également important pour nous, archivistes, il est donc primordial de s’attarder plus longuement à cette thématique.

1.3.1. Le droit d’auteur et Wikimedia Commons : une liberté d’exploitation des fichiers

Sur la page consacrée à la réutilisation du contenu hors Wikimedia Commons des documents qui s’y trouvent, la Wikimedia Foundation rappelle qu’elle ne dispose de droits que sur très peu des contenus placés sur ses différents projets (Wikimedia Commons, 2017d). En effet, la fondation ne s’octroie pas de droits sur les fichiers diffusés sur ses plateformes par les usagers.

Avant toute chose, il est important de signaler que certaines règles de Wikimedia Commons peuvent parfois être obscures ou contradictoires. S’il se trouve dans une situation de doute, l’archiviste responsable doit impérativement communiquer avec la communauté wikimédienne afin de ne pas voir son travail être supprimé à la suite d’une mauvaise application du règlement.

Wikimedia Commons n’accepte que les fichiers sous licence libre ou se trouvant dans le domaine public (Wikimedia Commons, 2017e). La licence libre reconnaît quatre libertés (droits) fondamentales accordées à l’usager d’un programme ou d’un fichier :

  1. usage de l’oeuvre ;

  2. étude de l’oeuvre pour en comprendre le fonctionnement ou l’adapter à ses besoins ;

  3. modification (amélioration, extension, transformation) ou incorporation de l’oeuvre en une oeuvre dérivée ;

  4. redistribution de l’oeuvre, c’est-à-dire sa diffusion à d’autres usagers, y compris commercialement. (Wikipédia, 2017e)

Il est important de noter que pour les éléments 2 à 4 de la citation ci-dessus (qui correspondent aux libertés 1 à 3 de la Free Software Foundation), le code source du programme utilisé ou l’origine du document modifié et/ou simplement partagé doit être constamment signalé (Jurispédia, 2017). On trouve ces droits et ces principes de signalisation du document d’origine dans les deux licences « Creative Commons » acceptées par Wikimedia Commons, à savoir les licences « CC BY » (Creative Commons Attribution) et « CC BY-SA » (Creative Commons Attribution-ShareAlike) qui autorisent la modification et le partage du fichier d’origine (modifié ou non, commercialement ou non). Le CC BY est le « devoir à l’attribution ». Avec cette licence, l’utilisateur du document peut « distribuer, remixer, arranger, et adapter » l’oeuvre originale, même à des fins commerciales. Il doit cependant reconnaître la création originale en citant le nom du créateur (Creative Commons, s. d.a). C’est le contrat le plus souple proposé par Creative Commons (Creative Commons, s. d.b). Le CC BY-SA demande à ce que le fichier modifié ou créé à partir du document original soit diffusé dans les mêmes conditions que ce dernier. Théoriquement, une personne qui aurait modifié le document d’origine ne pourrait pas ajouter une autre licence, comme la « NonCommercial » (NC), à sa nouvelle création. Le nouveau document sera alors diffusé sous la même licence que le document original. Le CC BY-SA peut ainsi limiter la commercialisation d’une image modifiée par une personne tierce, car cette dernière devra, en plus de signaler l’origine du document modifié qu’elle commercialise, à nouveau diffuser sa création en CC BY-SA et donc gratuitement. Au vu de ce qui précède, il est plus que recommandé à n’importe quel service ou centre d’archives de diffuser ses documents en CC BY-SA.

Le principe de traçabilité du document d’origine apparaît très distinctement lors de la consultation des images sur Wikimedia Commons. Par exemple, l’image de ce buste de Louis XIV (Figure 3) a été modifiée avec l’ajout d’un fond noir à partir d’une photographie originale prise dans le château de Versailles. Cette image modifiée dispose d’une description et d’un lien permettant de retrouver l’image originale (Figure 4).

Figure 3

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Figure 4

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Il est important de signaler que la licence NonCommercial (NC) de Creative Commons, qui interdit la commercialisation de l’oeuvre d’origine, qu’elle soit modifiée ou non, n’est pas autorisée par Wikimedia Commons. Ce principe est rappelé à plusieurs reprises sur la page « À propos des licences » de la médiathèque de la Wikimedia Foundation. Une fois encore, les images diffusées sur Wikimedia Commons doivent pouvoir être librement transformées, diffusées et commercialisées. Cependant, un auteur peut choisir de diffuser sur Commons une image de moins bonne qualité tout en se préservant des droits plus stricts sur une version haute définition qu’il préserverait sur une autre plateforme comme son site personnel. Cette possibilité est actuellement sujette à discussion au sein de la communauté wikipédienne qui s’interroge non seulement sur le caractère légal, mais également moral de cette option (Wikimedia, 2017e).

En résumé, et comme le montre la citation ci-dessous, la Wikimedia Foundation demande aux utilisateurs de Wikimedia Commons de s’assurer que les fichiers qu’ils mettent en ligne soient issus du domaine public ou soient libres de droits. La licence liée au fichier prescrit plus spécifiquement ceci :

  • La republication et la distribution doivent être autorisées ;

  • La publication de travaux dérivés doit être autorisée ;

  • L’utilisation commerciale doit être autorisée ;

  • La licence doit être perpétuelle (sans date d’expiration) et non révocable ;

  • La référence aux auteurs-contributeurs peut être requise. (Obligatoire si l’auteur du fichier d’origine revendique son droit à l’attribution lors de son choix de licence) ;

  • La publication des travaux dérivés sous la même licence peut être requise ;

  • L’utilisation de formats de fichier libres de restrictions numériques (DRM) peut être requise. (Wikimedia Commons, 2017e).

1.4. Wikisource : une bibliothèque numérique et multilingue

Disposant de plus de 240 000 textes librement consultables et téléchargeables, Wikisource, créée le 24 novembre 2003, est la bibliothèque numérique de la Wikimedia Foundation (Wikisource, 2017a).

Contrairement aux articles sur Wikipédia, il existe une certaine protection des transcriptions effectuées sur Wikisource. Ainsi, les textes relus par plusieurs collaborateurs responsables ne peuvent être modifiés que par des personnes disposant d’un compte wiki. Les autres individus peuvent néanmoins signaler les erreurs constatées dans la transcription grâce à une page spécialement consacrée à cet effet (Wikipédia, 2017f).

Quand on dispose des accès suffisants, la modification des transcriptions se fait facilement. Ainsi, sur la page de l’oeuvre que l’on souhaite modifier, il suffit de cliquer sur l’onglet « modifier » pour arriver sur un écran similaire à celui d’un traitement de texte.

Se disant soucieux de la fiabilité des textes diffusés, Wikisource propose à ses usagers une série d’icônes indiquant le niveau d’avancement de l’édition de l’oeuvre et donc de sa fiabilité (Wikisource, 2017a). Ces pourcentages d’édition sont indiqués pour tous les textes et se trouvent dans l’onglet « texte ». Le lecteur est également instruit de la fiabilité de la transcription qu’il consulte par un court texte situé au-dessus de cette dernière (Figure 5).

Wikisource accepte autant les imprimés que les manuscrits et les documents d’archives. Il est donc possible de lire les pages du manuscrit La Chanson de Roland détenu par la bibliothèque de l’Université d’Oxford. Pour chaque page, une transcription du texte en latin est proposée aux usagers. Actuellement, ces transcriptions n’ont pas été corrigées par un collaborateur de Wikisource et l’usager est clairement avisé de cette situation (Figure 5).

Figure 5

Transcription de la page 26V du manuscrit La Chanson de Roland.

Source : https://fr.wikisource.org/wiki/Page:La_Chanson_de_Roland_-_MS_Oxford.djvu/52

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Que ce soit pour les manuscrits, les documents officiels ou pour les livres, l’usager peut choisir de lire soit la transcription seule, soit la transcription placée à côté de la page originale du document d’où elle provient. Les images illustrant les transcriptions et les ouvrages numérisés sont des fichiers se trouvant sur Wikimedia Commons. À titre d’exemple, l’ouvrage détenu par BAnQ 350 recettes de cuisine de Jeanne Anctil est entièrement numérisé et diffusé grâce à Wikimedia Commons.

Pour les documents d’archives, le principe reste le même. L’usager a le choix de lire uniquement la transcription (Figure 6) ou de consulter cette dernière parallèlement au document original (Figure 7). Les exemples sont tirés du projet GLAM des archives nationales des États-Unis, la NARA.

Wikisource accepte les formats PNG, GIF, JPEG ou encore TIFF. Cependant, les ouvrages ou les documents disposant de plusieurs pages doivent être au format DjVu ou PDF (Wikisource, 2015). Le format DjVu est moins lourd que le PDF et il maintient une qualité d’image similaire à celle-ci.

Figure 6

Transcription d’un message envoyé par Churchill au président Roosevelt.

Source : https://en.wikisource.org/wiki/Winston_Churchill_to_Franklin_D._Roosevelt_(November_23,_1940)

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Figure 7

Transcription d’un message de Churchill à Roosevelt et document original.

Source : https://en.wikisource.org/wiki/Page%3AWinston_Churchill_to_Franklin_D._Roosevelt_-_NARA_-_194815.jpg

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Concernant la recherche de texte, l’usager a la possibilité de l’effectuer soit par choix d’auteur, soit par le biais de « Portails thématiques » proposés sur la page principale de Wikisource.

Finalement, tous les travaux sur Wikisource doivent être dans le domaine public ou sous la licence Creative Commons, CC BY-SA. L’usager peut donc utiliser et partager le texte (modifié ou non, commercialement ou non), mais il doit signaler le fichier d’origine, indiquer si ce dernier a été modifié et partager le fichier modifié et/ou simplement diffusé sous la même licence. Cette licence concerne autant les travaux originaux que les transcriptions et les traductions se trouvant sur Wikisource (Wikisource, 2017b). Les droits de contribution de l’éditeur doivent également être sous licence libre (GFDL).

2. Les projets GLAM-WIKI : quand la qualité passe par une collaboration entre les institutions culturelles et l’univers Wiki

L’année 2011 fut source d’inquiétudes pour la Wikimedia Foundation qui a vu le nombre de consultations de l’encyclopédie Wikipédia décroître à cause des lourdes critiques qui lui étaient adressées relativement au manque d’exactitude de son contenu (Chiriac, 2015, p. 161). Devant cette situation, la fondation a cherché à améliorer la teneur de son encyclopédie en établissant un maximum d’accords avec les GLAM.

Les projets GLAM-WIKI ont pour objectifs de « diffuser la culture et la connaissance » et de soutenir les projets de diffusion des GLAM en mettant en ligne, sous licence libre, les fichiers issus de la numérisation des biens ou des documents détenus par ces derniers (Wikipédia, 2017g). La Wikimedia Foundation et ses chapitres locaux proposent différents types de partenariats s’adaptant aux besoins spécifiques de chaque GLAM (Wikimedia, 2011). La totalité des partenariats connus s’est toujours concrétisée par l’envoi d’un ou de plusieurs wikipédiens au sein de l’institution culturelle signataire. Selon Wikipédia, les wikipédiens se définissent comme « les personnes identifiées par un nom d’utilisateur, qui écrivent et éditent les articles de Wikipédia » (Wikipédia, 2017i).

Il existe plusieurs manières d’accueillir des wikipédiens.

2.1. Le wikipédien en résidence (WiR) : un pont entre le GLAM et la communauté wiki

Le wikipédien en résidence (WiR – Wikipedian in Residence) est, dans la vaste majorité des cas, issu du groupe Wikimédia local et agit comme médiateur entre le GLAM et la communauté des différents projets wikis. Le WiR mandaté par la convention peut accomplir différentes tâches comme photographier ou numériser des documents, modifier certains articles sur Wikipédia, verser différents types de fichiers sur Wikimedia Commons et sensibiliser les membres du personnel à l’utilisation des différents projets de la Wikimedia Foundation (Rey-Bellet, 2015, p. 11). Le wikipédien a l’obligation de connaître les codes et le fonctionnement de la communauté wiki pour aider le GLAM à les respecter. Cette connaissance des us et coutumes wikipédiens évite des désagréments comme la destruction de données par la communauté.

De manière générale, le wikipédien en résidence est rémunéré, mais peut aussi être bénévole, et a pour vocation de rester au sein du GLAM afin de s’intégrer au personnel. La durée du séjour au GLAM peut s’étendre sur quelques semaines comme sur plusieurs années (Wikimedia Outreach, 2017). Selon une étude, 65 % des WiR ont moins de trente ans, mais plus de 88 % ont plus de trois années d’expérience au sein des projets de la Wikimedia Foundation. Sur l’ensemble des WiR, seulement 15 % ont reçu une formation en sciences de l’information ou muséale (Rey-Bellet, 2015, p. 11). Cette situation s’explique par le fait que les groupes locaux de la Wikimedia Foundation souhaitent avant tout que le wikipédien mobilisé soit intégré au sein de la communauté wiki et sache principalement de quelle manière utiliser les outils mis à la disposition des utilisateurs des différents projets wikis.

Plusieurs GLAM ont choisi d’accueillir un WiR chez eux. Les exemples présentés ci-dessous sont les plus représentatifs de ce type de collaboration.

2.1.1. En Angleterre

Le British Museum est souvent considéré comme étant le premier GLAM à avoir fait appel à un WiR. Cette aventure débute peu de temps après que Liam Wyatt, un wikipédien australien, s’interroge sur les possibilités d’établir un partenariat similaire à celui des artistes en résidence, mais concernant un ou plusieurs wikipédiens. Après une conférence en Australie, Liam Wyatt défend son projet auprès du British Museum, qui accepte de l’accueillir (Wikimedia Commons, 2017f). Durant le mois de juin 2010, Wyatt établit un lien entre la communauté wikipédienne anglaise et le musée. Grâce au travail du wikipédien australien, 40 volontaires choisissent de rédiger sur Wikipédia plusieurs articles relatifs aux objets détenus par la vénérable institution (Ellis, 2014, p. 8). Ces articles gagnent l’estime du public et deviennent très rapidement plus consultés que le site Internet officiel du British Museum (Savary, 2012). Parallèlement à la rédaction d’articles, la communauté se mobilise sur Wikimedia Commons et le nombre de photographies immortalisant les objets du musée augmente drastiquement totalisant 3 194 images placées sur Wikimedia Commons en août 2010. Cet engouement créé par Liam Wyatt perdure dans le temps et la catégorie d’images en lien avec la collection du British Museum continue de croître. De nos jours, plus de 14 700 images et photographies sont répertoriées au sein de ce groupe. Une bonne partie de ces dernières proviennent de bénévoles venus immortaliser les objets exposés par le musée. Certaines de ces images ont servi à l’illustration de différents articles.

2.1.2. Aux États-Unis

Aux États-Unis, NARA a également décidé d’accueillir un WiR. Créée en 1934, NARA a pour mission d’assurer la préservation des documents produits par le gouvernement américain (Ferriero, 2011). En 2011, les dépôts des archives nationales contenaient 12 milliards de feuilles de papier, 18 millions de plans et de dessins architecturaux, des kilomètres d’enregistrements vidéo, 40 millions de photographies, 55 000 objets et 5,3 milliards de documents électroniques (Ferriero, 2011). À cette époque, l’objectif principal pour l’institution était de trouver un moyen permettant de diffuser une partie de ces précieux documents à une grande portion de la population américaine. La collaboration avec Wikipédia débute avec l’accueil de Dominic McDevitt-Parks, premier wikipédien en résidence dans un centre d’archives (Ferriero, 2011). McDevitt-Parks dispose d’une formation en histoire ainsi qu’en gestion des archives reçue au Simmons College de Boston (MaryKing, 2011). Lors de son embauche, le wikipédien a déjà rédigé des articles sur Wikipédia consacrés à l’histoire latino-américaine. Il est alors connu et reconnu par la communauté wiki (Rein, 2011).

Très rapidement, le wikipédien organise des rencontres virtuelles et physiques afin d’inciter les usagers à collaborer à la diffusion d’articles et de contenus concernant la collection du centre d’archives américain. Dominic McDevitt-Parks conçoit également des projets de diffusion inédits comme le Today’s Document qui vise à mettre de l’avant un document détenu par NARA. Grâce à ses contacts, McDevitt-Parks obtient le droit de diffuser l’image du premier Afro-Américain recruté par les Marines sur la page principale de Wikipédia. Cette intervention a permis aux archives nationales d’inviter les usagers de l’encyclopédie à se renseigner sur cette photo et à produire des articles consacrés à la déségrégation raciale dans le corps des Marines (Ferriero, 2011). Cette image militaire a été vue par des millions de personnes dans le monde. Ainsi, parallèlement au maintien de son site Internet qui permet la recherche d’images, d’individus et de documents textuels, vidéo et sonores, NARA diffuse des documents iconographiques sur Wikimedia Commons et contribue à l’enrichissement d’articles sur Wikipédia. Ces derniers sont alors nettement plus consultés que les publications mises à disposition sur le site officiel de l’institution.

Une fois les plateformes Wikipédia et Wikimedia Commons maîtrisées, le centre d’archives décide d’investir Wikisource et de lancer un vaste projet de transcription de documents déclassifiés. Il est possible de citer en exemple la transcription par la communauté wikisourcienne d’une partie de la correspondance de Franklin D. Roosevelt. Des rapports officiels ou encore des propositions d’amendements sont également soumis à la transcription (Wikisource, 2017c).

Une fois sa contribution comme WiR terminée, Dominic McDevitt-Parks a été recruté par NARA comme spécialiste. En 2014, le site Web des archives nationales américaines cumulait 20 millions de visionnements alors que l’ensemble des articles de Wikipédia utilisant des documents en provenance de l’institution était consulté plus d’un milliard de fois (Cohen, 2014).

2.1.3. En France

Le mardi 15 février 2011, Wikimédia France et le château de Versailles annoncent un partenariat ayant pour but d’alimenter et d’améliorer les informations relatives au château sur les différents projets de la Wikimedia Foundation (AFP, 2011). Cette collaboration se concrétise par l’accueil, durant six mois, d’un wikimédien ayant pour objectif principal de coordonner, en collaboration avec les conservateurs et les autres membres du personnel du château, le transfert de fichiers et de données sur Wikimedia Commons et sur Wikipédia. Le château souhaite assurer le transfert de photographies, ainsi que de vidéos présentant les richesses du palais (Hübe, 2011). Durant cette collaboration, plusieurs wikipédiens, sollicités par le WiR, produisent des articles particulièrement bien notés par la communauté et 2 305 fichiers sont diffusés sur Wikimedia Commons (Machefert, 2014).

Le partenariat entre le château de Versailles et Wikimédia France a également permis la numérisation et le versement sur Wikimedia Commons de certains livres se trouvant dans la bibliothèque de conservation du château afin d’être transcrits sur Wikisource (Wikisource, 2017c).

2.2. Appel à des wikipédiens non-résidents : des projets d’envergure

Il n’est pas obligatoire de disposer d’un wikipédien en résidence pour lancer des projets d’envergure. De nombreuses institutions culturelles ont su utiliser les différentes plateformes proposées par la Wikimedia Foundation grâce à l’aide de bénévoles venus ponctuellement aider leur personnel. Il est possible de citer plusieurs exemples de collaboration ayant obtenu d’excellents résultats.

2.2.1. En France

En juin 2013, les Archives nationales de France formalisent un partenariat avec Wikimédia France. Dans le texte de la convention, les Archives nationales prennent plusieurs engagements comme ceux de sensibiliser les membres de son personnel et de ses équipes scientifiques au fonctionnement des projets de la Wikimedia Foundation, et aussi d’organiser des ateliers d’écriture en collaboration avec des wikimédiens (Magnien et Wikimédia France, 2013, p. 2-3). Durant deux ans, plusieurs bénévoles vont effectuer la modification de 923 articles en lien avec l’institution et les documents qu’elle préserve. Cinq téléversements de 30 à 60 documents sont également réalisés sur Wikimedia Commons (Roset, 2015). Parallèlement à ces interventions, quatre ateliers d’écriture, visant à enseigner aux agents des Archives nationales les moyens de contribuer aux projets wikis, sont donnés par des wikimédiens bénévoles. Entre 2013 et 2015, les bénévoles de Wikimédia France assurent la modification des articles, la diffusion des fichiers sur Wikimedia Commons (à partir de choix de documents effectués par les archivistes) et la formation des membres du personnel afin de permettre à ces derniers d’utiliser les outils de la Wikimedia Foundation. Le 3 novembre 2015, les Archives nationales, satisfaites de leurs deux années de collaboration avec Wikimédia France, renouvellent leur convention avec comme nouvel objectif d’investir d’autres plateformes telles Wikisource (Roset, 2015).

2.2.2. Au Canada

C’est au cours de l’été 2013 que Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) décide d’investir Wikipédia et Wikimedia Commons. Avant de commencer le transfert de documents, BAnQ réalise une page GLAM où elle annonce sa volonté de contribuer aux projets de la Wikimedia Foundation (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 62).

Le projet d’exploitation des plateformes de la Wikimedia Foundation par BAnQ est divisé en plusieurs volets. Le premier consiste à ajouter sur Wikipédia une courte phrase et un hyperlien au sein de 800 articles francophones afin de signaler à la communauté wiki la présence d’un fonds portant sur le contenu des textes modifiés. Cette modification des articles s’effectue donc en deux temps. Elle commence par l’ajout d’une phrase dans le texte signalant la présence du fonds à BAnQ et continue par la création d’un lien, dans la zone de référence de l’article, menant directement à la notice du fonds sur Pistard. À la fin de ce premier volet, un quart des fonds répertoriés par BAnQ ont donné lieu à une intervention sur Wikipédia (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 66).

En février 2014, le deuxième volet du projet démarre avec l’organisation d’évènements similaires aux Edit-a-thons britanniques : Mardi, c’est Wiki. L’objectif est de former les usagers de BAnQ, grâce à l’aide de wikipédiens bénévoles et de certains membres du personnel, à utiliser les principaux outils de la Wikimedia Foundation. Cette formation est donnée en collaboration avec Wikimédia Canada, et avec la participation de la Fondation Lionel-Groulx et de l’Association francophone pour le savoir (Acfas) (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 64).

Le troisième volet, appelé Projet Poirier, débute durant l’été 2014. L’objectif principal consiste à ce que les membres de la communauté wiki exploitent les centaines de photographies que BAnQ verse sur Wikimedia Commons. Les 21 000 photos numérisées du fonds Conrad Poirier proposent une diversité de thématiques qui facilite leur exploitation sur plusieurs articles de Wikipédia. Plusieurs critères de sélection des photographies sont établis par les archivistes responsables. En plus d’être dans le domaine public, les images doivent illustrer des rues, des édifices, des cérémonies, des évènements, des activités sportives et des personnalités suffisamment importants pour assurer leur exploitation dans l’encyclopédie libre (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 71). Dès le début de la campagne de diffusion, une catégorie nommée BAnQ-Projet Poirier est créée sur Commons afin d’y regrouper toutes les images diffusées. Grâce aux connaissances de Benoit Rochon, alors président de Wikimédia Canada, BAnQ arrive à créer un modèle de Wikicode appelé BAnQ-image. Ce code permet de répéter automatiquement certaines données descriptives des images lors de la saisie et offre également la possibilité de modifier les champs visibles par les usagers dans la zone descriptive de l’image sur Commons. En utilisant son code, BAnQ choisit de tourner le dos à l’assistant d’importation des images de Wikimedia Commons pour se lancer directement dans l’usage du formulaire simple qui demande à l’utilisateur de connaître et d’utiliser le codage wiki. Le formulaire est la seule méthode qui permet de copier-coller le code BAnQ-image. Grâce à l’établissement d’un guide, les étudiants et les stagiaires peuvent facilement rajouter des images sur Commons tout en utilisant le code wiki de l’institution (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 69). L’avancement du programme de diffusion est signalé en temps réel sur la page GLAM de BAnQ.

Les images diffusées dans le cadre du Projet Poirier ont été utilisées dans 1 017 articles rédigés dans 127 langues. Ces articles ont été consultés plus de 29,5 millions de fois en un an. Les 130 articles illustrant l’annonce de la capitulation de l’Allemagne, pour lesquels des images issues du fonds Poirier ont été utilisées, ont été consultés huit millions de fois en un an (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 74).

Finalement, le quatrième volet du projet de diffusion de BAnQ est lancé durant l’automne 2014 et invite les wikisourciens à effectuer la transcription d’ouvrages anciens et de documents d’archives en respectant le droit d’auteur et les règles de la communauté (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 65). En 2015, 140 titres sont versés sur Wikisource et 39 transcriptions ont été effectuées et validées. Pas moins de 75 membres de la communauté wikisourcienne ont été mobilisés (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 76).

Dans leur article, Boudreau, Daveau et Giuliano affirment qu’il a souvent fallu expliquer le bien-fondé de leurs démarches à une communauté wiki qui ignore les possibilités d’exploitation qu’offrent les documents d’archives (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 67). Il est donc important pour le service ou le centre d’archives de prendre le temps de communiquer avec la communauté au sujet des objectifs de son programme d’exploitation des plateformes wikis. La production d’une page GLAM devient, dans ce cas, une nécessité.

3. Disposer d’une page GLAM : un outil et une vitrine pour l’institution

La modification d’articles sur Wikipédia et l’ajout de fichiers sur Wikimedia Commons ne suffisent pas à assurer une visibilité des documents et de l’institution. En effet, il est capital pour cette dernière de disposer d’une page GLAM. Pouvant prendre la forme d’un petit site Internet, la page GLAM évolue au sein même de la structure des différents projets wikis et constitue à la fois un outil et une vitrine pour l’institution.

3.1. La page GLAM comme outil

Dans la majorité des cas étudiés, la page GLAM sert principalement à établir la liste de l’ensemble des actions que l’institution souhaite réaliser sur les différents projets de la Wikimedia Foundation. L’établissement de ces listes, qui se doivent d’être maintenues à jour afin de présenter l’évolution du projet d’exploitation des plateformes wikis par le GLAM, constitue un moyen simple et efficace pour mobiliser la communauté (Figure 8).

Figure 8

Liste des tâches pour lesquelles le Children’s Museum of Indianapolis demande l’aide de la communauté.

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Wikipedia:GLAM/The_Children%27s_Museum_of_Indianapolis/Volunteer

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La représentation des tâches à effectuer peut prendre plusieurs formes comme celle de la simple liste à puces, tout comme celle d’un tableau plus ou moins développé (Figure 9).

Figure 9

Ouvrages diffusés par la BNF et pour lesquels des transcriptions ont été demandées. On remarque que le taux de fiabilité de la reconnaissance optique de caractères (OCR – Optical Character Recognition) est signalé.

Source : https://fr.wikisource.org/wiki/Wikisource:Partenariats/Biblioth%C3%A8que_nationale_de_France/Liste_de_textes_fournis

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Un autre moyen de communication à prendre en considération sur une page GLAM est le volet discussion. Toujours situé en haut à gauche dans la structure même du site Wikipédia ou Wikimedia Commons, l’onglet discussion permet de communiquer avec la communauté, de régler d’éventuels litiges et de donner son opinion lors de débats (Figure 10).

Figure 10

Position du volet discussion sur la page GLAM de BAnQ. L’onglet discussion, placé dans la structure même du site Wikipédia qui héberge la page GLAM, est toujours situé au même endroit.

Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Wikip%C3%A9dia:BAnQ

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L’onglet discussion peut également servir à décréter certaines priorités dans le traitement des tâches à accomplir. Les discussions peuvent être laissées libres et le GLAM peut choisir de n’effectuer aucun traitement ou structuration de ces dernières. Cependant, il est fortement recommandé, surtout si le projet rencontre un engouement populaire, de structurer cette page grâce à l’ajout d’un sommaire des discussions afin que l’institution et les usagers se retrouvent facilement dans le fil des débats et puissent automatiquement sélectionner celui qu’ils cherchent (Figure 11). La réalisation d’un sommaire est très simple. Il s’effectue automatiquement dès que la page dispose d’au moins quatre sections et sous-sections (titres et sous-titres). Le sommaire se place automatiquement en haut à gauche de la page (Wikipédia, 2017k). Si le GLAM décide de disposer d’une table des matières dès le début, soit avant les quatre titres et sous-titres, il devra obligatoirement écrire « FORCETOC » dans le code de la page. Comme certaines discussions peuvent s’étendre sous un seul titre, il arrive parfois que ces dernières empêchent les usagers de remarquer la présence d’un autre débat placé en dessous. Dans ce cas précis, il peut être intéressant d’utiliser ce code. Si le GLAM fait le choix de supprimer le sommaire automatique, ce qui est hautement déconseillé, il devra écrire, toujours dans le code, « NOTOC » (Wikipédia, 2017k). Un moteur de recherche exécutant de la recherche en plein texte dans les messages est également proposé par certaines institutions.

Compte tenu de l’importance des discussions lors de l’accomplissement d’un projet GLAM, certaines institutions, comme NARA, n’hésitent pas à intégrer le volet discussion dans le menu même de leur page GLAM.

Figure 11

Index des discussions se trouvant sur la page GLAM des archives nationales américaines (NARA).

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Wikipedia_talk:GLAM/National_Archives_and_Records_Administration#Analysis_on_quality

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Comme les pages GLAM sont intégrées dans les projets Wikipédia, Wikimedia Commons et/ou Wikisource, il est permis à tout le monde de modifier le code des différentes pages de la page GLAM (Figure 12). Cependant, comme pour les articles sur Wikipédia, des collaborateurs surveillent toutes modifications malveillantes et l’onglet historique, situé en haut à droite de la page GLAM, permet de revenir au contenu de cette dernière avant modification. Cette fonctionnalité peut inquiéter, mais elle peut aussi être perçue comme une chance. En effet, dans le cas où l’institution disposerait de listes des tâches à accomplir, les wikipédiens mobilisés pourraient directement inscrire ce qu’ils ont réalisé afin d’assurer un suivi en direct de l’avancement du projet.

Figure 12

Onglet de modification permettant de changer le contenu de la page GLAM de BAnQ.

Source : https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Wikip%C3%A9dia:BAnQ&action=history

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Il est important de comprendre que ces fonctionnalités, comme l’onglet discussion ou historique, sont une arme à double tranchant. En effet, une page GLAM qui ne serait pas ou peu mise à jour apparaîtra comme telle pour tous les usagers. À titre d’exemple, l’auteur de cet article a pu constater qu’une bonne partie des projets GLAM-WIKI est terminée et que les pages GLAM consultées n’ont plus été mises à jour depuis les années 2012-2013.

Finalement, une page GLAM peut également servir d’agenda permettant à l’institution de dater l’organisation d’évènements culturels concernant directement le projet de diffusion. Si le GLAM décide de se lancer dans l’organisation d’Edit-a-thons, il est important de signaler l’évènement de manière à ce que la communauté et les autres personnes qui seraient intéressées par une telle entreprise puissent en prendre connaissance.

3.2. La page GLAM comme vitrine

La page GLAM est la façade qu’un usager intéressé par le projet verra en premier. Il est donc primordial que cette dernière soit particulièrement bien structurée, agréable à consulter et pratique. Le style de la page GLAM peut ressembler à celui d’une simple page Wikipédia (Figure 13) ou à une construction plus avancée prenant la forme d’un site Internet (Figure 14).

Figure 13

Page Glam de la Société d’histoire d’Indiana.

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Wikipedia:GLAM/Indiana_Historical_Society

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Figure 14

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Dans le cas de la page de BAnQ, l’usager dispose d’un menu lui permettant de sélectionner les projets en lien avec les différentes plateformes de la Wikimedia Foundation (Wikisource, Wikimedia Commons et Wikipédia). L’usager retrouve très facilement ses repères et constate que Bibliothèque et Archives nationales du Québec dispose d’une page GLAM de bonne facture reprenant les codes de fonctionnement qu’il est en droit de s’attendre à retrouver sur un site Internet performant. Cependant, tout n’est pas parfait. Comme dit précédemment, les pages GLAM sont intégrées sur les différentes plateformes wikis. Elles constituent alors des sites dans les sites. L’usager voyage très facilement d’une page Wikipédia à une autre située sur Wikisource. De ce fait, il est possible que l’utilisateur peu habitué aux pages GLAM se perde rapidement. Il est donc important que ces dernières soient bien conçues et réalisées. Dans le cas de la page GLAM de BAnQ, il apparaît très clairement que les concepteurs ont perçu ce problème. Le logo BAnQ situé en haut à gauche de l’ensemble des différentes pages de la page GLAM (Figure 14) permet à l’usager de revenir sur la page principale du GLAM.

Ce problème de circulation entre les différentes pages Wikipédia, Wikimedia Commons et Wikisource a également été perçu comme une difficulté par NARA. En guise de solution, l’institution a conçu, sous le menu figurant en haut de chaque page, un sous-menu permettant de revenir à tout moment aux pages Wikipédia, Wikimedia Commons et Wikisource du projet (Figure 15).

Figure 15

Sous-menu externe permettant de revenir aux différents projets wikis pour le GLAM des National Archives.

Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Wikipedia:GLAM/National_Archives_and_Records_Administration

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Malheureusement, cette idée, particulièrement judicieuse, n’est actuellement pas proposée sur la page Wikisource de NARA. Il est fort probable que cette situation soit due au fait que cette page isolée ne propose pas un menu menant à plusieurs fenêtres wikisourciennes comme c’est le cas pour les pages Wikipédia et Wikimedia Commons du projet GLAM. Le carré disposant des trois logos est intégré au code du menu et l’absence de ce dernier entraîne celle du carré.

Une institution culturelle doit aussi s’assurer, lorsqu’elle conçoit sa page, de proposer un petit texte récapitulatif des objectifs généraux de son projet de diffusion sur, au minimum, la page principale de sa page GLAM. Comme nous l’avons mentionné précédemment, cette dernière est la première source d’information que l’usager rencontre lorsqu’il s’intéresse au projet en général. Il est donc important que les données décrivant ce dernier, ses ambitions et son étendue soient visibles au premier coup d’oeil. De plus, compte tenu du problème décrit ci-dessus, concernant la possibilité de se perdre entre les pages des différents projets de la Wikimedia Foundation, il serait plus que judicieux de produire un texte introductif spécifique à chacune de ces plateformes et d’y inclure un lien menant constamment à la page principale du projet. Ce procédé est particulièrement bien appliqué sur les différentes fenêtres de la page GLAM de NARA, qui commencent toujours par un texte explicatif adapté à chacun des projets de la Wikimedia Foundation (Wikipédia, Wikimedia Commons et Wikisource).

Parallèlement à tout cela, il est toujours souhaitable de donner l’adresse, tout comme le lien vers le compte personnel Wikipédia, de la personne responsable de la page GLAM et/ou du projet de diffusion en général. En effet, il est contre-productif qu’un usager ne sache pas qui questionner lorsqu’il souhaite directement s’adresser à un responsable sans passer par l’onglet discussion dont le contenu est visible par tout le monde.

Un dernier élément à aborder est la mise en valeur des images que le GLAM versera sur Commons. Il est important de comprendre que de verser des fichiers sur Commons ne constitue pas l’étape finale du processus. En effet, afin de favoriser un nombre important de visionnements, il est capital que les images ou les documents sonores diffusés soient exploités. Pour ce faire, il faut que l’institution culturelle signale tout versement d’images et mette de l’avant celles qu’elle pense intégrables au sein de différents articles. Alors que les listes et les tableaux sont utiles pour énumérer les tâches à faire, ou lister les oeuvres à transcrire, il est important de représenter les images numérisées sous une forme plus stylisée. À titre d’exemple, le Smithsonian Institution Archives propose sur sa page Wikimedia Commons un système particulièrement efficace de repérage des documents numérisés par catégorie (Figure 16). L’usager clique sur la catégorie qui l’intéresse et tombe directement sur les images qu’il peut exploiter (Figure 17). Ce style de représentation est également repris par la très vaste majorité des GLAM et est une solution de base proposée par la Wikimedia Foundation. Il est donc capital de bien choisir les catégories, quitte à laisser, parfois, la communauté les choisir. C’est ce que les archives nationales américaines ont décidé de faire.

Figure 16

Sous-catégorie des images déposées par les archives du Smithsonian.

Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Smithsonian_Institution_Archives

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Figure 17

Exemple d’images mises à la disposition des usagers par le Smithsonian aux usagers sur Wikimedia Commons.

Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Science_Service_collection_at_the_Smithsonian_Institution_Archives

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En résumé, il est important de bien réfléchir à la structure que l’on souhaite donner à sa page GLAM. L’institution est libre de décider du style, du contenu et de l’ordre des informations données, mais les principes de base exposés ci-dessus doivent être, au minimum, respectés. De plus, il appartiendra au GLAM de décider de l’ampleur de sa page.

Les images et les observations précédentes sont toutes effectuées à partir de pages GLAM prenant une forme similaire à un site Internet. Cependant, toutes les institutions ne font pas ce choix : certaines se sont contentées d’une seule page sur Wikimédia, Wikisource ou Wikipédia. Ce choix est défini par l’ampleur du projet de diffusion. À titre d’exemple, la BNF, qui n’a principalement effectué que des transcriptions, a pu se contenter d’une page sur Wikisource. Ce choix de la page unique ne convient cependant plus si le GLAM décide de se lancer dans plusieurs projets de la Wikimedia Foundation. En effet, dans ce cas-là, il sera capital que l’institution reproduise ce que BAnQ ou NARA ont effectué en regroupant leurs différents projets Wikipédia, Wikimedia Commons et Wikisource sous une seule page GLAM.

4. Discussion : Quel projet GLAM-WIKI ?

4.1. Dans quel(s) projet(s) wiki(s) investir ?

Durant notre stage accompli en 2017 dans le cadre de notre maîtrise en sciences de l’information, nous avons réalisé une enquête auprès de 23 institutions culturelles ayant utilisé un ou plusieurs des projets de la Wikimedia Foundation. Six institutions issues de cinq pays différents ont pris la peine de répondre au questionnaire qui leur avait été soumis. Bien qu’elles recommandent l’exploitation de l’univers wiki, ces GLAM mettent en garde contre l’investissement financier et, surtout, en temps que peut exiger le projet. Il convient donc d’être stratégique lorsqu’il s’agit de se lancer dans un projet exploitant les ressources de la Wikimedia Foundation. Sauf si le GLAM arrive à se faire aider par une institution qui disposerait d’une expérience dans le domaine, nous déconseillons fortement de débuter par un projet qui engloberait directement les trois plateformes et invitons les personnes intéressées à réfléchir à un programme de diffusion moins vaste consacré aux projets Wikipédia et Wikimedia Commons, pour les raisons suivantes.

Premièrement, Wikipédia est le projet de la Wikimedia Foundation le plus connu et le plus utilisé dans le monde entier. Les textes produits et les images utilisées dans les articles engrangeront un important nombre de visionnements et apporteront une plus grande visibilité au service ou centre d’archives. Ce dernier peut exploiter Wikipédia en ajoutant des liens menant vers les différentes descriptions de ses fonds d’archives et/ou en participant directement à la production d’articles.

Deuxièmement, chaque projet de la Wikimedia Foundation demande un moment d’apprentissage plus ou moins important. Les membres du personnel du service d’archives participants devront se familiariser avec ces nouveaux outils. Il paraît donc plus judicieux de se focaliser sur ceux qui assureront un plus grand profit.

Troisièmement, Wikimedia Commons est la médiathèque de la Wikimedia Foundation. Les images, les sons, les vidéos, les documents d’archives et les ouvrages exploités dans les différents projets de la fondation sont tous versés dans cette plateforme. Quel que soit le choix que le GLAM effectue, pour peu qu’elle souhaite diffuser des images et/ou des ouvrages numérisés, elle devra passer par Wikimedia Commons.

Ainsi en prenant en considération la popularité de l’encyclopédie Wikipédia et le passage obligé par Wikimedia Commons, il paraît pertinent que le service ou le centre d’archives songe à un projet englobant, au minimum, ces deux plateformes si elle souhaite obtenir une certaine visibilité au sein de la communauté.

C’est par cette combinaison des deux principaux projets de la Wikimedia Foundation que la très grande majorité des institutions étudiées dans ce rapport ont débuté. On peut citer en exemple BAnQ (Boudreau, Daveau et Giuliano, 2016, p. 76), et également NARA et le British Museum. Il ne s’agit pas ici de déclarer un moratoire sur Wikisource, mais principalement de se laisser le temps d’investir la plateforme wiki la plus fréquentée dans le monde entier, l’encyclopédie Wikipédia, et de se familiariser avec celle qui sera, quel que soit le projet choisi, la plus utilisée par le GLAM lors de ses projets de diffusion, soit la Wikimedia Commons.

4.2. Quels documents diffuser sur Wikimedia Commons ?

Tant pour les ouvrages que pour les documents d’archives numérisés, il est capital que le service d’archives ne déverse pas en vrac l’ensemble des documents qu’il souhaite soumettre à la communauté. Une diffusion non réfléchie de ceux-ci entraînerait une perte d’énergie et risquerait d’étourdir la communauté. Une fois encore, dans le cas des archives numérisées, il est capital de cibler les images numériques pouvant potentiellement illustrer des articles sur Wikipédia.

Concernant la diffusion de photographies sur Commons, il existe deux écoles de pensée qui s’opposent. NARA, disposant d’un imposant personnel, diffuse une multitude d’images issues de différents fonds. Le versement des photographies est lourd, car l’institution ne peut pas systématiser le remplissage des champs descriptifs des images. L’autre école est représentée par BAnQ qui a fait le choix de sélectionner deux fonds au sein desquels les documents iconographies étaient déjà numérisés, décrits à la pièce et abordant une vaste diversité de thématiques.

Nous conseillons fortement aux services et aux centres d’archives de taille modeste de suivre la méthode adoptée par BAnQ et de choisir des fonds ou des collections proposant suffisamment d’images diverses et exploitables et, si possible, déjà numérisées. Cette manière de cibler des fonds ou des collections d’images numérisées et touchant un vaste éventail de sujets permettra au service de se doter d’une procédure facilitant la rédaction des notices descriptives pour chacune des images diffusées. Il est même envisageable de concevoir la systématisation d’une partie de celle-ci par la réalisation d’un code, similaire à BAnQ-image que les futurs diffuseurs de documents pourront copier et coller.

Finalement, il est bon de rappeler ce qui a été dit dans la section consacrée à Wikimedia Commons. Quel que soit le choix stratégique de diffusion que choisit le service ou le centre d’archives, il est important que ce dernier diffuse ses documents iconographiques sous la licence CC BY-SA. En effet, cette dernière permet que le transfert d’images modifiées par une personne tierce se fasse automatiquement sous la même licence et donc gratuitement, ce qui limite ainsi fortement la commercialisation de produits dérivés.

4.3. Une collaboration avec Wikimédia Canada et/ou BAnQ, une nécessité ?

Comme nous l’avons mentionné plus haut, l’exploitation des projets de l’univers wiki demande du temps et l’acquisition de nouvelles connaissances. Comme il serait particulièrement téméraire de voyager dans une région inconnue sans un minimum d’informations, il est fortement déconseillé, dans le contexte québécois, de se lancer dans un projet wiki sans prendre conseil auprès de Wikimédia Canada et/ou de BAnQ. Une grande partie des projets présentés dans cet article ont été rendus possibles grâce à l’aide de WiR ou de bénévoles issus de la communauté. Ces derniers ont été trouvés à travers le chapitre local de la Wikimedia Foundation. Wikimédia Canada compte sur plusieurs membres motivés, dont Benoit Rochon, qui ont grandement contribué au succès des interventions de BAnQ. Ainsi, dans le cas où un service ou un centre d’archives souhaiterait effectuer une exploitation d’un ou de plusieurs des projets wikis, il est recommandé de contacter, au minimum, Wikimédia Canada et BAnQ afin d’obtenir des recommandations permettant d’éviter certaines erreurs. À titre d’exemple, BAnQ pourrait expliquer ses précédentes démarches et répondre aux questions relatives à son investissement des projets de la Wikimedia Foundation.

4.4. Quelle procédure suivre ?

Quels que soient les choix effectués par le service ou le centre d’archives, il est important de respecter la procédure suivante :

  1. Identifier les projets de la Wikimedia Foundation dans lesquels le GLAM souhaite investir (Wikipédia, Wikimedia Commons et/ou Wikisource) ;

  2. Identifier les objectifs de diffusion du service, soit déterminer les images (documents d’archives, ouvrages) que l’on souhaite diffuser sur Wikimedia Commons et/ou choisir les articles à créer et à modifier sur Wikipédia et/ou déterminer les transcriptions à faire sur Wikisource ;

  3. Contacter Wikimédia Canada et/ou BAnQ pour obtenir des conseils concernant l’utilisation des outils de la Wikimedia Foundation, la réalisation de la structure de la page GLAM et la production d’une communication adressée à la communauté wikipédienne concernant le projet de diffusion ;

  4. Présenter régulièrement le contenu et l’avancement du projet de diffusion sur la page GLAM du service ou centre d’archives ;

  5. Surveiller et collaborer avec la communauté wiki.

Conclusion : des millions de visionnements en quelques clics ?

Avant de se lancer dans l’exploitation de différents projets de la Wikimedia Foundation, le GLAM doit effectuer des choix qui détermineront les difficultés rencontrées, mais également les solutions à exploiter. Il est important que le service ou le centre d’archives définisse clairement ses objectifs afin d’assurer une communication claire et cohérente avec la communauté wiki. Le GLAM peut diffuser les plus belles images de sa collection, mais l’exploitation de ces dernières sera assurément un échec si la communauté n’est pas avertie et mobilisée. Il est donc primordial de commencer tout projet d’envergure par la création d’un compte wiki et d’une page GLAM. Ces deux outils permettront au service ou au centre d’archives de communiquer et de présenter le projet à toutes les personnes intéressées. Par ailleurs, on ne saura trop insister sur la nécessité de participer aux débats qui occupent la communauté wiki.

Il est également important de bien choisir les plateformes Wikimedia que l’on souhaite exploiter. Chacune d’elles demande de passer par une phase d’apprentissage. Cette dernière, selon les GLAM contactés, ne peut se faire sans communiquer avec les bénévoles de Wikimédia Canada. L’objectif de ces bénévoles est d’apprendre aux membres du personnel des institutions culturelles à être autonomes. L’institution ne doit donc pas hésiter à faire le premier pas.

Il est également important que les personnes responsables sachent proportionner leurs projets à leurs capacités. La diffusion de documents du Commons est chronophage. Il est donc essentiel de diffuser des images dont l’exploitation au sein d’articles Wikipédia est assurée. Cela nécessite du temps pour identifier les articles concernés par les photographies diffusées et également pour mobiliser la communauté afin qu’elles les exploitent.

Devant ces difficultés et ces nouvelles pratiques, il existe plusieurs solutions qui s’offrent aux services et aux centres d’archives du Québec. Premièrement, ils peuvent proposer des collaborations avec Wikimédia Canada et avec des partenaires québécois comme BAnQ. Ces partenariats pourraient aller du simple échange, comme le transfert d’une marche à suivre qui explique la façon de diffuser des documents sur Wikimedia Commons, à des partenariats plus importants, tels que l’organisation de diffusions simultanées de documents lors de grands évènements.

Si le service disposait déjà de documents numérisés, le transfert de ces derniers sur Commons s’effectuerait plus rapidement. Cependant, l’institution ne doit pas perdre de vue qu’il est capital de sélectionner des images pouvant être reprises dans des articles. Contrairement à Flickr, c’est l’exploitation du document qui assure sa visibilité. Le GLAM a également tout intérêt à créer, dès la première diffusion sur Commons, une catégorie regroupant toutes ses images. Cela leur assurera une meilleure visibilité.

Ainsi, un service ou un centre d’archives dispose de plusieurs solutions et de nombreuses options pour investir dans les différents projets proposés par la Wikimedia Foundation. Il est certain que, quels que soient les choix qui seront faits, le GLAM devra apprivoiser un milieu qu’il ne maîtrise pas. Il y aura des erreurs, des incompréhensions et possiblement des difficultés avec la communauté wiki. Cependant, si les membres du service arrivent à gérer ces difficultés, ils offriront à leurs archives la possibilité d’être vues et exploitées par des millions d’usagers. Ainsi, comme l’affirme l’ensemble des GLAM que nous avons contactés, Wikipédia, Wikimedia Commons et Wikisource offrent aux services et centres d’archives du monde entier des occasions permettant de réaliser, et ce avec un fort succès, cette importante fonction de l’archivistique contemporaine qu’est la diffusion.