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Imaginaire français en Amérique du NordGenèse d’un tourisme de distinction à Québec et la Nouvelle-Orléans : Note de recherche[Notice]

  • Martine Geronimi

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  • Martine Geronimi
    CELAT – Département d’études littéraires
    Université du Québec à Montréal
    C.P. 8888, succursale Centre-ville
    Montréal (Québec) H3C 3P8
    Canada

Le XIXe siècle a vu naître un tourisme de distinction dans ces deux lieux auréolés de prestige que sont Québec et la Nouvelle-Orléans. Cette période charnière de création d’un paysage touristique et urbain en Amérique est à l’origine de notre réflexion sur un espace convoité parce que dévoilé par les « faiseurs d’images », ces pionniers qui ont fabriqué une rhétorique mythologisante sur les lieux. Ces espaces urbains désirés sont porteurs d’imaginaires enchâssés dans une ambiance que les touristes recherchent sur place. Avec le temps, ces sites célèbres sont devenus des villes de mémoire collective. Notre analyse porte sur les guides touristiques du XIXe siècle vantant les charmes de ces deux villes de fondation française, devenues depuis lors des villes touristiques de grand renom. Ils sont intéressants pour leur genre littéraire et leurs illustrations. Ces guides offrent aux lecteurs un exemple, érigé par la suite en modèle, d’un discours promotionnel, valorisant des représentations symboliques du lieu en le transformant du même coup en un paysage désirable. La distance qui nous sépare de ces premiers écrits publicitaires du XIXe siècle est triple : le temps, l’espace et la langue. C’est à partir de notre XXIe siècle débutant que nous étudions ces guides avec nos référents culturels contemporains. Ces villes nous semblent éloignées dans l’espace puisque que nous sommes venue spécialement les étudier, en qualité de chercheure en provenance d’Europe. Enfin, la langue anglaise apporte une ultime distanciation puisque la majorité de notre corpus est en anglais, tant pour Québec que pour La Nouvelle-Orléans. Ce point de vue extérieur met en évidence les buts visés par les auteurs qui cherchent tout d’abord à convaincre de la beauté des lieux et de la nécessité de les connaître. Dans un deuxième temps, le tour de force des rédacteurs consiste à faire croire aux lecteurs, une fois arrivés sur place, qu’ils reconnaissent les lieux décrits. Cet art de persuader est associé à la notion de plaisir partagé ; l’éros associé aux lieux conduit le faiseur d’images sensible aux charmes de la ville à pousser le lecteur au plaisir de la découverte guidée. De lecteur séduit, il devient touriste. Il connaît ainsi le double plaisir de la représentation et de la reconnaissance du lieu découvert par un autre précurseur. Toutefois, cet art de persuader repose autant sur l’art de faire plaisir que sur le plaisir de mettre en images. C’est le plaisir de la narration, un ravissement d’ordre esthétique et abstrait qui se transmet au destinataire du message dans ce temps suspendu de la lecture. La publicité d’un lieu par le truchement du guide touristique repose sur une démonstration imagée du plaisir associé à la visite de ce lieu. Ces écrits doivent donc être convaincants et sont composés par leurs auteurs selon une forme laudative inscrite dans un présent narratif. Si bien que le rédacteur de guide du XIXe siècle nous semble la figure première de la parole sur la ville patrimoniale érigée en destination touristique. Dès 1829 à Québec et 1845 à la Nouvelle-Orléans, se vendaient des guides touristiques destinés à des voyageurs découvreurs (Geronimi 1999). Parmi ceux-ci, trois guides peuvent être considérés comme les tout premiers décrivant et dépeignant aux voyageurs la ville de Québec : celui de Bourne et Smillie de 1829, celui de Cockburn de 1831 et celui d’Hawkins de 1834. À la Nouvelle-Orléans, le guide précurseur incontesté est celui de Benjamin Norman de 1845. Nous porterons notre attention sur un guide qu’on pourrait qualifier d’archétype des cicérones du XIXe siècle à Québec : le guide de G. Bourne et de J. Smillie, dont …

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