Comptes rendus

Sarah Carter, Aboriginal People and Colonizers of Western Canada to 1900. Toronto, University of Toronto Press, coll. Themes in Canadian Social History, 1999, ix + 195 p., carte, bibliogr., index.[Notice]

  • Paul Charest

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  • Paul Charest
    Département d’anthropologie
    Université Laval
    Sainte-Foy (Québec) G1K 2P7
    Canada

L’auteure de ce volume est historienne, mais sa démarche ethnohistorique présente une multiplicité de points de vue sur les événements passés, comme l’origine du peuplement de l’Amérique du Nord, la place des Autochtones dans la traite des fourrures, la place des femmes dans les sociétés autochtones. En apportant un regard critique sur les sources consultées (notamment les récits de supposées découvertes et explorations), elle veut présenter les Autochtones comme des « participants aux événements historiques ayant un certain con-trôle sur leur propre destinée » (p. 9) et non plus comme des agents passifs ou des victimes. Sa démarche de recherche s’appuie sur les deux approches distinguées par Bruce Trigger : a) le relativisme culturel — ou « l’approche romantique » — qui accorde aux croyances internes des cultures particulières un rôle prééminent en tant que déterminants du comportement humain » (p. 11) ; b) l’approche rationaliste selon laquelle « le comportement humain est modelé par les calculs de l’intérêt individuel qui sont uniformes d’une culture à l’autre » (ibid.). Sur un autre plan, politique celui-là, l’auteure affirme que le « but positif » de son ouvrage vise à rappeler que le territoire de l’Ouest canadien avait été conçu dans le passé comme une terre communautaire (« common ground ») dans l’espoir qu’il pourrait le redevenir dans le futur (p. 13). Comme l’indique le titre, le sujet principal du volume concerne les relations entre les peuples autochtones de l’ouest du Canada, y compris les Métis, et les colonisateurs des trois provinces des Prairies (Manitoba, Saskatchewan, Alberta). Cependant, comme la véritable colonisation n’a commencé qu’à partir de 1870, plusieurs chapitres du volume traitent du contexte général (géographique, écologique, préhistorique, ethnographique) des Plaines et des événements historiques qui ont précédé cette colonisation. Les trois premiers chapitres con-tiennent donc des informations fort bien résumées sur différents sujets et utiles pour des étudiants ou des personnes non versées dans les questions autochtones. La précolonisation des Plaines commence avec l’établissement des Métis le long de la rivière Rouge, la venue des missionnaires et de la Police Montée. Déjà une certaine hiérarchie sociale génératrice de tensions internes s’instaure. Par contre, la culture traditionnelle des Indiens des Plaines fondée sur la chasse au bison à cheval et le travail des peaux par les femmes se maintient malgré les épidémies réduisant les effectifs de la plupart des groupes, jusqu’à la quasi-disparition du bison au début des années 1880. Il s’ensuit une période de famine et de misères pour les groupes des Plaines qui facilite la mise en place d’une véritable colonisation dans les trois dernières décennies du 19e siècle. Selon les analyses de l’auteure, la colonisation fut essentiellement l’œuvre des poli-tiques fédérales (construction du chemin de fer transcanadien, allocation des terres des Prairies à des colons blancs, Loi sur les Indiens et traités) et des agents chargés de leur application, en particulier les agents des Affaires indiennes, la Police Montée et l’armée. Elle se fondait sur l’agriculture et l’élevage comme nouvelles activités économiques et sur la sédentarisation et la mise en réserve des Indiens nomades, anciens chasseurs de bisons ou trappeurs de la forêt boréale. La colonisation rencontre, cependant, plus de résistance chez les Métis déjà sédentarisés (soulèvements de 1869-1870 et de 1885), surtout en raison de la non-reconnaissance de leurs droits fonciers et politiques. En raison de l’effondrement de leur économie et, en conséquence, de leurs orga-nisations sociopolitiques traditionnelles, les Indiens des Plaines canadiennes se résignèrent, non sans quelques velléités d’opposition, à signer des traités et à être regroupés dans des réserves où l’agriculture et l’élevage devaient remplacer leur ancienne économie de chasse au bison. Certains d’entre …