Comptes rendus

Nash June C., Mayan Vision. The Quest for Autonomy in an Age of Globalization. New York et Londres, Routledge, 2001, 302 p., photogr., réf., index.[Notice]

  • Marie France Labrecque

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  • Marie France Labrecque
    Département d’anthropologie
    Université Laval
    Québec (Québec) G1K 7P4
    Canada

Voici un livre qui porte sur la vision maya certes, mais aussi sur la critique des modèles utilisés par les anthropologues pour parler du changement social et des mouvements indigènes. Les événements et les processus complexes qui ont lieu au Mexique sont une occasion pour l’auteure de remettre en question les approches anthropologiques. La perspective de June Nash, on le sait, combine l’ethnographie, l’approche critique et l’engagement avec les sujets de la recherche. La vision maya dont elle nous entretient dans ce livre est essentiellement celle des Mayas du Chiapas où elle a fait du terrain à la fin des années 1960 et où elle est retournée régulièrement à partir de 1987. Elle a donc été un témoin privilégié des changements qui se sont produits dans cet État du Mexique méridional, non seulement de la spectaculaire insurrection zapatiste, mais aussi et surtout de l’émergence du mouvement indigène de résistance qui l’a précédé et des développements qui ont suivi l’insurrection à ce jour. Un des objectifs du livre est justement de reconsidérer les modèles anthropologiques qui ont prévalu ces trente dernières années et de réitérer l’importance de faire une ethnographie de la globalité au sein même du local. Elle insiste sur « la globalisation du sujet de l’ethnologie ». Le sujet de ce livre est bien sûr le mouvement indigène chiapanèque et sa quête d’autonomie. L’auteure campe ce mouvement dans l’histoire tout en soulignant la lutte des indigènes pour leur survie en tant que groupe culturel distinct et tout en remettant en question le romantisme qui marque souvent les travaux portant sur cette question. Selon elle, si le romantisme et l’essentialisme qui y est rattaché prévalent, c’est que les ethnographes n’ont pas bien fait leur travail et n’ont pas su saisir le sens du discours universalisant utilisé par les indigènes dans le contexte de la globalisation. Elle en appelle donc à une observation plus pointue du monde en changement qui est aussi notre monde. Le parti-pris de June Nash dans ce livre est que les références pour l’action dans les sociétés indigènes émergent d’une logique et de prémisses culturelles distinctes de celles qui gouvernent le capitalisme international. Cela ne l’empêche pas de reconnaître les contradictions qui prévalent au sein de la communauté indigène. Cependant, le recours à l’histoire de sa subordination par l’action gouvernementale, plus spécifiquement à partir des années 1970 et surtout 1980, permet de montrer que les politiques indigénistes ont grandement contribué à ces contradictions. Le livre porte donc sur les mouvements sociaux indigènes tels que portés par les Mayas du Chiapas. Il est divisé en six chapitres dont le premier et le dernier sont voués aux modèles anthropologiques et à leur critique. Les autres chapitres s’organisent selon une trame essentiellement historique, surtout l’histoire récente, avec un accent particulier sur l’accélération que représente le mouvement zapatiste et ses suites. Ce qui ressort avec force du livre de Nash, ce sont les transformations de la communauté indigène dans le contexte national et international. Le rôle qu’a joué le Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI) dans cette transformation est examiné en détail sur le plan local, ainsi que l’émergence de la résistance aux modèles paternalistes tels que les a promus ce parti amalgamé au gouvernement pendant plus de soixante-dix ans. L’auteure relate également le rejet du contrôle exercé par les centres du pouvoir mexicain et qui s’est exprimé notamment au Chiapas par l’émergence de villages et de territoires autonomes. Les années 1980 ont été décisives, en ce sens que les communautés indigènes ont réussi à transcender les frontières de leur petite localité pour nourrir un mouvement de plus en plus vigoureux. La théologie …