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Piette Albert, 2011, Fondements à une anthropologie des hommes. Paris, Éditions Hermann, coll. Société et pensées, 208 p., bibliogr[Notice]

  • Bauvarie Mounga Ndounkeu

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  • Bauvarie Mounga Ndounkeu
    Faculté des arts, lettres et sciences humaines, Université de Yaoundé I, Yaoundé, Cameroun

Albert Piette s’interroge, dans cet ouvrage, sur le fondement réel de l’anthropologie comme science. Il part du constat qu’il persiste un flou entre les objectifs de l’anthropologie, de la sociologie et de l’ethnologie. Cet ouvrage se présente donc comme un livre théorique sur les fondements d’une anthropologie. Pour cela, Piette essaye d’établir clairement ce que sont la sociologie et l’ethnologie pour ensuite mieux circonscrire le champ d’action et les bases de l’anthropologie. L’acte sociologique débute par la sélection de l’objet d’analyse, un objet qui soit caractéristique, dont il est exigé de respecter, quelle que soit la méthode employée, un ou plusieurs éléments de la vie sociale. Piette s’appuie sur la vision de plusieurs auteurs pour mieux expliciter l’acte sociologique. Bourdieu souligne surtout les stratégies possibles de l’individu à partir de ses dispositions acquises socialement. Pour Weber, la sociologie est une science qui envisage d’appréhender l’activité sociale par interprétation. À en croire Piette, l’ethnographe veut contempler, comprendre, puis dépeindre le comportement réel dans ses particularités et ses différences, qui vont jusqu’à insérer le non-dit, l’anodin, le banal. Il s’intéresse à deux conceptions en particulier : celles de Malinowski et de Goffman. Le premier privilégie l’option culturaliste. Pour lui, le détail n’est représentable que s’il est intégré dans une dimension typique de la société ou de la culture. L’ethnographe doit insister sur la spécificité des caractères culturels et mentaux des indigènes. Et pour décrire ces caractères, l’ethnographe doit trier ce qui participe de la pertinence ou de la non-pertinence de la cérémonie à laquelle prennent part les indigènes. Aux méthodes de l’observation au sens strict, Malinowski avait déjà ajouté le recensement, les statistiques, la généalogie. Le but de l’ethnographie, selon Malinowski, « est bien de faire connaître une culture par la mise en évidence de ses propriétés qui la distinguent des autres cultures » (p. 50). En outre, sur le terrain, Malinowski conseille au chercheur de ne pas se mélanger aux indigènes. Goffman préconise, pour sa part, l’option interactionniste. Il recommande au chercheur de se couper de sa vie habituelle et de reconstruire un nouveau réseau de relations jusqu’à subir des affronts s’il le faut, tout en étant stratégique dans sa façon de négocier de nouvelles relations sociales. Il souligne qu’il procède sans technique d’enregistrement et qu’il se laisse guider par les faits avant de passer au cadrage conceptuel identificateur de régularités. Ce que vise Goffman, c’est bien l’homme interactionnel pur, découvert en dehors de tout contexte socioculturel, selon des situations variées. La sociologie et l’ethnologie s’intéressent donc aux choses collectives. Elles visent à faire partager et rendre pertinente la vie des groupes, alors que la spécificité de l’anthropologie est d’explorer les existences qui vivent dans ces groupes. L’anthropologie veut regarder de près les individus, les individus séparés. L’objectif de l’anthropologie empirique est de saisir des individus dans leurs variations et leurs différences jusqu’aux détails sans importance des perceptions, des gestes, des pensées, des objets et des différents êtres en présence. Piette affirme que « regarder l’homme et le tenir jusqu’au bout de l’écriture : c’est donc le travail de l’anthropologue et de la phénoménograhie » (p. 93). L’ambition de l’anthropologie empirique est de saisir et de penser les détails, non pas comme synonymes simplement du concret de la vie, mais également constitués des restes. La phénoménographie observe les moindres détails, les minimas, c’est-à-dire les comportements attendus qui renvoient souvent moins à leur accomplissement en cours qu’à l’intention ou à la décision antérieure de les accomplir. Par ailleurs, Piette présente l’anthropologie comme une ontologie existentiale. C’est donc une science qui, outre l’individu humain, a pour but de repérer, de regarder, de …