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Cet article propose une incursion dans un univers particulier, dans un quotidien dont les médias rapportent périodiquement des bribes mais dont, en fin de compte, on connaît peu de choses : le quotidien de personnes atteintes de troubles neurocognitifs majeurs (TNCM) (de type Alzheimer ou autre) à un stade avancé en centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD). Au Québec, parallèlement à la volonté politique de favoriser le maintien à domicile « le plus longtemps possible », les critères d’admission en CHSLD se sont resserrés au cours des dernières décennies de façon à accueillir des personnes qui présentent des pertes d’autonomie fonctionnelle de plus en plus sévères. Les résidents ont des besoins complexes, de multiples comorbidités et sont généralement admis en CHSLD en toute fin de parcours (CSSS 2016 : 2) ; la moitié (54 %) sont âgés de 85 ans et plus[1] et il ne s’écoule en moyenne qu’un peu plus de deux ans entre leur admission et leur décès (CSBE 2017). Alors que les besoins médicaux augmentent chez les résidents, divers acteurs ont identifié des lacunes importantes sur le plan des conditions de vie et de travail en CHSLD ainsi que des ratios de personnel insuffisants et une incapacité à répondre adéquatement aux besoins des résidents qui « s’apparente à de la maltraitance » (Protecteur du citoyen 2018 : 73). Rappelant les travaux autour du concept d’« institution totale » d’Erving Goffman (1961), de nombreux écrits soulignent les risques de dépersonnalisation et de déshumanisation liés au processus d’institutionnalisation des personnes âgées en perte d’autonomie (Loffeier 2015 ; Cable-Williams et Wilson 2017 ; Gjødsbøl et al. 2017).

Or, parmi ces résidents, ceux qui ont atteint les derniers stades d’évolution des TNCM apparaissent particulièrement vulnérables. Les troubles regroupés sous l’appellation TNCM, dont la maladie d’Alzheimer est le plus connu, ont en commun des pertes dégénératives sur le plan cognitif (mémoire, orientation, langage, etc.) et convergent vers un profil commun aux stades avancés, alors que la sévérité des pertes cognitives se traduit par une dégradation des capacités sur le plan fonctionnel (incapacité de répondre à ses besoins de base de façon autonome, perte des capacités motrices et de la communication, etc.). Parallèlement, il a été démontré que les TNCM entraînent une modification des attitudes des tiers à l’égard de la personne atteinte et que les représentations sociales de la maladie, construites autour de l’effritement identitaire et de la « perte de soi », comportent un risque de déshumanisation (Beard 2004 ; Pin Le Corre et al. 2009 ; Batra et al. 2016). Devant ce constat, le concept de « personhood », d’abord proposé par Tom Kitwood (1997), a été développé afin de réaffirmer le statut de « personne à part entière » des individus atteints de TNCM. Pourtant, bien que les risques de dépersonnalisation et de déshumanisation augmentent avec la progression de la maladie, l’articulation de ce concept et de la réalité des personnes ayant atteint le tout dernier stade d’évolution de la maladie reste ardue (O’Connor et al. 2007 ; Edvardsson et al. 2008 ; Caddell et Clare 2010).

Notre étude doctorale ethnographique (Soulières 2019) visait précisément à comprendre les formes d’actualisation du « personhood » dans le quotidien de résidents de CHSLD ayant atteint le dernier stade des TNCM. Or, la richesse de la démarche ethnographique, qui permet au chercheur de s’insérer dans une réalité autre et d’y découvrir des pans entiers de données inattendues, nous aura permis de comprendre qu’à ce stade de la maladie la question qui se pose n’est peut-être pas celle du statut de « personne », mais bien de celui de « vivant ». Les données mettent effectivement en lumière un rapport particulier à la mort et au mourir, souvent occulté, des réflexions en soins palliatifs : un mourir lent, sur plusieurs années, qui cadre difficilement avec les conceptions de la « bonne mort » qu’ont la majorité des acteurs (Kaufman 2006 ; Lemos Dekker 2018). Un mourir, enfin, qui suscite des réflexions nouvelles et des questionnements éthiques en lien avec un éventuel accès à l’aide médicale à mourir (AMM) pour les personnes inaptes.

Présentation de l’étude : une ethnographie du silence

Les données présentées ici sont tirées d’une étude ethnographique menée dans deux CHSLD publics de la région de Montréal sur une période de 18 mois (juin 2016 à novembre 2017[2]). Dans chacun des CHSLD, les infirmières responsables de deux unités de vie (total de quatre unités) ont identifié les résidents ayant atteint le dernier stade de la maladie (stade 7 de l’échelle de Reisberg[3] ou échelle de détérioration globale). Typiquement, ce stade implique une perte du langage et du vocabulaire intelligible, une perte importante de tonus musculaire (incapacité à se déplacer ou à se maintenir dans une position assise de façon autonome) et, éventuellement, une perte des expressions non verbales (disparition du sourire ou des contacts visuels francs) (Reisberg 1988). Les répondants — le plus souvent un enfant — de tous les résidents identifiés par les infirmières ont été approchés afin de consentir à la participation à l’étude. Au bout du compte, ce sont huit résidentes[4] qui ont pris part à l’étude, toutes âgées de plus de 85 ans et demeurant au CHSLD depuis quelques années (voir tableau 1).

Tableau I

Résidentes accompagnées

Résidentes accompagnées

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Évidemment, mener une étude auprès d’une population qui n’est plus en mesure de s’exprimer verbalement présente des défis méthodologiques singuliers (Bond et Corner 2001 ; Nygård 2006). Comment surmonter ce silence et produire des données qui s’approchent au plus près de la perspective de ces citoyennes dont la parole est devenue inaccessible ? D’une part, comme dans de nombreuses études dans le champ des TNCM, la collecte de données comprend des entretiens auprès de tiers impliqués dans le quotidien de ces résidentes : des entretiens avec des proches (n=7) des résidentes participantes, pour la plupart des enfants, mais aussi une soeur et une petite-fille ; des entretiens avec des membres du personnel (n=13) : 3 gestionnaires, 2 infirmières, 4 préposées aux bénéficiaires et 4 professionnelles (travailleuse sociale, récréologue, ergothérapeute, intervenante de fin de vie).

Mais la collecte tire d’abord sa richesse ethnographique d’un volet « observation participante » dans lequel la chercheure offrait un accompagnement individuel à chaque résidente participante. Ces accompagnements nous ont permis de faire un plongeon parfois vertigineux dans leur univers silencieux au moyen d’une simple présence bienveillante, la main déposée sur le bras ou l’épaule de la résidente assoupie ; d’une sortie dans la cour ou sur le balcon ; d’un massage des mains ; d’une aide à l’alimentation, etc. La plupart des participantes étaient grabataires ; certaines présentaient une incapacité à maintenir un contact visuel. Et pourtant les nombreuses heures passées auprès de ces résidentes ont donné à voir une individualité et permis d’apprendre à les connaître. Mme Beauchamp, par exemple, était toujours dans la même position, qu’elle soit au lit ou dans le fauteuil gériatrique : les yeux fermés, assoupie, la tête légèrement renversée sur le côté, les bras repliés sur le ventre (voir figure 1). Souvent, rien ne semblait pouvoir l’atteindre et elle dormait ainsi durant toute la durée de notre présence. Parfois, elle nous faisait un « cadeau », pour reprendre l’expression de sa fille : elle répondait à notre « ça va bien ? » par un « oui » très clair ou elle faisait un large sourire, bien qu’éphémère, au son de notre voix.

Fig. 1

Mme Beauchamp (4 juillet 2016)

Mme Beauchamp (4 juillet 2016)
Source : Maryse Soulières.

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Ces accompagnements ont permis de cumuler plus de 200 heures d’observation. Enfin, l’étude comprenait un volet photographique (66 photos approuvées pour publication par les proches). Au-delà d’une méthode de documentation visuelle du quotidien, ce volet se voulait une avenue alternative pour recueillir le témoignage de ces résidentes silencieuses. C’est à travers cette présence attentive, ces longues heures passées auprès d’elles à les examiner et à apprivoiser leur silence, à travers cette coexistence dans la langueur de leur quotidien que les analyses inductives des différentes sources de données ont pris leur sens. Ces données lèvent le voile sur un quotidien hors-norme, hors du temps, qui brouille les frontières entre la « vie » et la « mort ».

Troubles neurocognitifs majeurs en CHSLD : un mourir lent et drapé dans l’incertitude

Malgré l’insistance des politiques publiques sur le fait que les CHSLD se doivent d’être avant tout des « milieux de vie » pour les résidents, l’alourdissement de leur clientèle en fait de plus en plus, concrètement, des milieux de « fin de vie ». De fait, la mort fait intégralement partie du quotidien des CHSLD et les notes d’observation en font régulièrement état : la photo des résidents décédés à l’accueil, les « codes bleus[5] » annoncés à l’interphone, les employés qui s’annoncent le décès d’un résident… Le témoignage de cette professionnelle rend compte du brouillage qui s’opère entre l’institution de soins conçue comme un « milieu de vie » et celle qui s’approche davantage d’un milieu de soins palliatifs :

Il y a des gens qui nous arrivent en fin de vie. Après le transfert de l’hôpital, parfois un jour ou deux plus tard, ils décèdent… […] Dans le fond, on n’est pas une maison de soins palliatifs, on est un domicile où la personne poursuit son cheminement de vie, son histoire de vie, jusqu’à son dernier souffle. Mais dans ce domicile-là, on est conscient qu’une grande partie va décéder ici, en CHSLD.

Récemment, une étude rétrospective (post-décès) de près de 175 dossiers de résidents de CHSLD atteints de TNCM a en effet démontré que la vaste majorité n’a connu aucun transfert à l’hôpital au cours du dernier mois de vie (90 %) et que le décès survient presque exclusivement au sein même du CHSLD (97 %) (Bravo 2021). Paradoxalement, de nombreux auteurs constatent la relative absence des soins palliatifs pour les personnes atteintes de TNCM en CHSLD (Cable-Williams et Wilson 2017 ; Hunter et al. 2019). D’abord, parce que la plupart des acteurs concernés, incluant les professionnels et les proches, ont souvent de la difficulté à percevoir les TNCM comme étant une condition médicale relevant des soins palliatifs (ICIS 2018) ; ensuite, parce que la nature dégénérative de la maladie se traduit par une dégradation graduelle de l’état de santé de la personne, sans qu’un pronostic fiable ne puisse être estimé (ibid.) ; après des années de lente progression, la mort peut survenir très subitement en lien avec une problématique de santé aiguë (pneumonie ou problème cardiaque, par exemple) (Ollivet 2014). Cette trajectoire évolutive lente, qui s’étend sur de nombreuses années, cadre difficilement avec la trajectoire habituelle allant des « soins actifs » aux « soins palliatifs ». La définition de la « fin de vie » dans les TNCM est ainsi plus ardue, plus arbitraire. Certains auteurs proposent d’ailleurs le concept de « soins palliatifs chroniques » pour rendre compte de la philosophie de soins adaptée aux réalités des TNCM (Cable-Williams et Wilson 2017).

Cette idée de soins palliatifs chroniques rejoint l’essence de ce qui se dégage des témoignages des proches et des membres du personnel. Bien que l’étude menée ne portait pas a priori sur la fin de vie et qu’aucune question ne touchait spécifiquement à ce thème au cours des entretiens, ils ont tous, d’une façon ou d’une autre, parlé du sentiment d’être témoin d’un mourir qui s’étire dans le temps. Rappelons que dans le cas de la moitié des résidentes ayant participé à notre étude, plus de dix ans s’étaient écoulés entre notre rencontre et le diagnostic de TNCM ; pour Mme Cloutier, c’était plus de vingt ans… Les proches, surtout, mais aussi certains membres du personnel nous ont parlé de la souffrance due au fait d’être témoin de cette lente évolution de la maladie, sur les plans physique, fonctionnel et cognitif. En cela, les TNCM conduisent à une vie qui est pénible à accompagner et qui place les tiers face à des deuils perpétuels alors même que la personne est encore vivante (deuil blanc). Pour les acteurs rencontrés, le « mourir » de ces résidentes est indissociable de cette longue trajectoire qui les a menées, au moment de notre rencontre, à un quotidien dont les proches et le personnel peinent à faire sens.

Un quotidien « hors du temps », pauvre en contacts sociaux, qui perd son sens

Les observations réalisées ont permis de distinguer deux univers bien distincts au sein des CHSLD. D’abord, l’univers du personnel, surchargé, débordé, constamment affairé. Nous avons été témoin, chaque jour, d’un rythme de travail effréné : des préposées qui pressent le pas, qui courent et accourent dans les corridors ; des regards furtifs jetés sur la montre et des expressions de découragement lors de retard dans l’heure du bain ou du repas ; des sourires ou des bonjours lancés au passage à des résidents, sans pouvoir prendre le temps de s’arrêter… Parallèlement, l’univers des résidents se profile, totalement opposé à celui du personnel comme le serait le négatif d’une photographie. Un univers marqué, lui, par l’attente, la lenteur, parfois l’ennui. Ce clivage de tempo est tout particulièrement frappant pour les résidentes accompagnées qui se trouvent dans une situation d’autant plus précaire qu’elles sont complètement dépendantes sur le plan fonctionnel. Elles ne peuvent pas, comme d’autres résidents, se rendre au salon ou déambuler dans le corridor, discuter avec une voisine ou un visiteur. En dehors des épisodes de soins (repas, soins d’hygiène, prise de médication ou autres soins infirmiers, etc.), elles sont le plus souvent couchées, au lit. Quelques heures par jour, les résidentes sont installées dans leur fauteuil gériatrique[6]. Mais qu’elles soient au lit ou dans le fauteuil, dans la chambre ou dans une salle commune, on les trouve généralement endormies ou alors fixant le plafond. Incapables d’entrer verbalement en contact avec les autres, elles demeurent silencieuses et apparaissent coupées du monde. Un constat qui rejoint les réflexions de Alison Phinney et Catherine A. Chesla (2003 : 294), qui parlent du « corps qui devient silencieux dans l’absence d’activité » et d’une « sorte de vide alors que la personne devient moins impliquée dans le monde. » [Notre traduction.]

Le tout laisse une impression étrange, comme si la vie se déroulait maintenant en dehors d’elles, non seulement sans qu’elles y participent, mais sans qu’elles en fassent vraiment partie. Même lorsqu’elles se trouvent dans les espaces communs, pourtant propices aux contacts sociaux, ceux-ci se font rares. Il est vrai que nous avons été témoin de rencontres, de moments partagés selon une modalité non traditionnelle : le baiser du conjoint de Mme Veilleux, le sourire et la conversation à sens unique de la petite-fille de Mme Beauchamp, la main de l’infirmière sur l’épaule de M. Therrien, les mots compatissants d’une résidente pour Mme Lambert… Il ne s’agit pas ici de banaliser l’importance de ces interactions, mais plutôt de reconnaître qu’elles ne représentent finalement que de brefs éclats dans des journées autrement pauvres en liens sociaux significatifs. Les entrées de notre journal de bord font état de longues périodes, parfois plusieurs heures, sans que personne n’interagisse avec les résidentes accompagnées, même lorsqu’elles ont un moment d’éveil et d’intérêt pour leur environnement, comme dans l’extrait suivant : « [Mme Lambert] regardait en direction de la télévision ou parfois en direction de la fenêtre extérieure. Quand des préposées passaient dans le corridor, elle tournait la tête pour les regarder. Pendant les 60 premières minutes de ma présence, personne ne lui a adressé la parole. » (Notes d’observation, 12 septembre 2017.)

Dans le tourbillon des tâches à accomplir et des soins à prodiguer, le personnel risque en fait « d’oublier ceux qui oublient » : « Je sais que les gens ici font ce qu’ils peuvent. Mais quand t’en as dix autres à t’occuper, bien c’est ça… […] C’est la réalité des CHSLD… » (Fille de Mme Tremblay.) Ces résidentes silencieuses sont habillées, propres et nourries, elles ne demandent rien et, dès lors, ne sont plus prioritaires. Il ne s’agit pas ici de développer une analyse structurelle ou institutionnelle de ces manques, dont les impacts pour les résidents, notamment ceux atteints de TNCM, ont été traités ailleurs (Hyde et al. 2014 ; Hunter et al. 2016 ; Chaudhury et al. 2017 ; Kamavarapu et al. 2017). Il s’agit plutôt de saisir que ce quotidien « vide », comme figé dans le temps et en retrait du monde effréné qui l’entoure, contribue à la perte de sens que ressentent les différents acteurs qui en sont témoins. Que penser, en effet, de cette vie qui n’en est plus vraiment une, de ces résidentes qui ne reconnaissent plus leurs proches et sont progressivement coupées du monde, qui écoulent des journées toujours semblables dans une chambre ou un salon de CHSLD ?

Un brouillage du statut de « vivant »

Devant cette lente dégradation du corps et de l’esprit, devant cette existence en suspens, la majorité des acteurs rencontrés partagent leur inconfort, leur malaise profond par rapport à cette vie et à ce mourir qui s’étire et s’étiole. Des questionnements de nature ontologique surviennent chez les proches et le personnel. Est-ce que la personne que nous avons connue est toujours là quelque part ? Y a-t-il seulement encore une personne dans ce corps qui ne répond plus ? Ou alors, comme le suggèrent les représentations sociales entourant les TNCM dans les sociétés occidentales, la personne est-elle déjà morte en laissant « le corps derrière[7] » ? Face à ces interrogations, une minorité d’acteurs rencontrés insistent sur la permanence de la personne. Sur ce plan, nos données rejoignent une littérature grandissante qui met en relief la continuité de l’identité dans les TNCM, au-delà des pertes (Beard 2004 ; Surr 2006 ; Batra etal. 2016). La fille de Mme Beauchamp, par exemple, se concentre sur certains comportements qui se placent dans la continuité de la personnalité de sa mère : elle dépose ses mains sur ses cuisses lorsqu’elle est assise, comme elle le faisait dans sa chaise berçante à la maison ; elle fronce les sourcils et fait la moue lorsqu’on met du fixatif dans ses cheveux comme elle l’a toujours fait… Comme le dit la fille de Mme Beauchamp : « Je me dis : ma mère, c’est ma mère. Je suis toujours sa fille, peu importe qu’elle me reconnaisse ou pas. […] Ils ne peuvent peut-être pas dire : “C’est ma fille”, mais : “C’est une voix que je connais, des souvenirs”… »

Chez la majorité, cependant, on observe plutôt une difficulté, sinon une incapacité à se prononcer clairement quant à « ce qui reste » de la personne dans ces stades avancés de la maladie. Les témoignages se teintent d’ambivalence ; on note des contradictions, des hésitations dans le choix des mots, de longues pauses réflexives. Ils laissent entrevoir un certain « brouillage » du statut de ces résidentes, qui ne seraient plus tout à fait dans « notre monde » — celui des vivants, donc. La soeur de Mme Couture[8] parle d’une existence suspendue, « dans les limbes » ; la fille de Mme Lambert, d’une « bulle » à laquelle nous n’avons pas accès :

Pour moi, elle [n’]est pas morte, là. Mais elle est dans son monde. Elle est avec… [Pause.] Pour moi, elle est avec son âme. Elle est avec elle-même. Puis, ça va être de même jusqu’à sa fin de vie. Quand elle va être prête… elle va partir. Elle est dans son monde, elle est dans sa bulle. […] Qu’est-ce qu’il y a dans sa bulle… ? Ça, on ne le sait pas.

Fille de Mme Lambert

Ainsi, les témoignages recueillis permettent d’envisager le stade avancé des TNCM sous l’angle des théories anthropologiques entourant les rites de passage (voir notamment Van Gennep 1909, réédité en 1981). Utilisant différents termes, les proches et les membres du personnel expriment clairement le sentiment d’une entrée dans une sorte de zone liminaire entre la vie et la mort, où l’individu atteint ne possède plus vraiment son « statut de vivant » tout en n’étant pas encore décédé. Cette liminalité, difficile à articuler pour les différents acteurs, mais tout de même très présente dans leurs discours, ajoute au caractère mystérieux de la fin de vie des personnes atteintes de TNCM et à l’incompréhension exprimée face à celle-ci.

Une incertitude quant aux soins à offrir et aux décisions à prendre

Les proches et les membres du personnel ont exprimé le sentiment de se trouver face à une personne devenue, d’une certaine façon, inaccessible. Une personne qui est « dans sa bulle » et avec laquelle les formes de communication traditionnelles sont inopérantes. Or, lorsqu’une personne n’est plus en mesure de s’exprimer, de nommer ses besoins, comment savoir si elle est vraiment « bien » ? Une incertitude perpétuelle quant à l’état de confort de la personne et quant aux soins à lui offrir traverse de façon prégnante les données collectées dans le cadre de cette étude. Il arrive que, malgré l’absence de langage verbal, le corps puisse exprimer un message sans équivoque. Pensons par exemple à cette journée où, assise auprès de Mme Veilleux, dans sa chambre, nous avons vu son expression se métamorphoser subitement, son visage se colorant de rouge et se crispant pendant qu’elle gémissait, le corps tordu vers l’avant. L’infirmière appelée y voyait aussi des signes de douleur et elle lui a administré une médication en conséquence. De façon générale, cependant, les messages transmis par les résidentes ne sont pas aussi transparents, aussi clairs ou accessibles. De nombreux acteurs nous ont parlé de la subtilité des signaux auxquels il faut être attentif pour adapter les soins offerts : « C’est [à] des petites affaires qu’il faut faire attention ; être vigilant, être à l’affut. […] Il faut que tu connaisses bien ton résident pour remarquer la différence… » (Professionnelle.)

Lorsqu’il s’agit de déchiffrer les besoins de ces résidentes, il est donc toujours question d’un certain degré d’inférence, d’un processus de déchiffrage qu’il est difficile de valider concrètement et qui laisse place à des discordances d’interprétations. Dans le quotidien des CHSLD, auprès de ces résidentes pour qui toutes les décisions — même banales — doivent être prises, les occasions de désaccords se multiplient, que ce soit entre différents membres du personnel, entre ceux-ci et les proches ou entre les proches. Sur ce plan, nos échanges avec la fille de Mme Tremblay, alors que nous lui présentions les photographies de sa mère, sont révélateurs. Avec un plan rapproché du visage de Mme Tremblay (voir figure 2), nous pensions avoir su capter son regard calme et détendu, l’aura de sérénité ressentie lors de nos accompagnements auprès d’elle. Pourtant, sa fille a soupiré en voyant la photo et nous a spontanément demandé : « Elle a toujours l’air anxieuse, vous ne trouvez pas ? »

Fig. 2

Mme Tremblay (22 novembre 2016)

Mme Tremblay (22 novembre 2016)
Source : Maryse Soulières.

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Face à l’impossibilité que Mme Tremblay exprime elle-même si elle se sent sereine ou anxieuse, que faire de cette divergence d’interprétations ? Et peut-être, surtout, comment évaluer les soins à lui offrir ? Faudrait-il poursuivre sa médication contre l’anxiété comme le demande sa fille ou cesser les anxiolytiques comme le propose l’infirmière, qui n’identifie chez elle aucun symptôme d’anxiété ? Ce type de questionnement se décline pour chaque résidente, pour chaque soin, chaque jour. Alors que les incapacités des résidentes contraignent les proches et le personnel à faire les choix à leur place, ces derniers se trouvent constamment confrontés au mystère, à l’impossibilité de savoir avec certitude ce qui est le mieux pour la personne. Lorsqu’il est question de décisions importantes, sinon vitales, ces divergences d’interprétations posent d’importants dilemmes éthiques, comme le démontrent les données recueillies sur la question d’un éventuel accès à l’aide médicale à mourir pour les personnes inaptes.

Troubles neurocognitifs majeurs et rapports à la mort : discours des proches et des professionnels sur l’aide médicale à mourir

Les personnes qui gravitent quotidiennement autour de ces résidentes sont en somme les témoins impuissants d’un mourir lent, « à petit feu », d’un mourir qui semble parfois s’étirer inutilement en dérobant progressivement des pans entiers de la personne que l’on a connue. Un mourir qui, à force d’usure, en vient à provoquer une remise en question du statut de cette personne qui est « là » sans y être vraiment et sans qu’on ne sache comment assurer son confort. Après tout le chemin parcouru depuis le diagnostic, les proches et le personnel sont bien conscients de cette mort qui plane, bien qu’imprévisible. Ils expriment un rapport particulier à cette mort éventuelle, qui devient plus douce, presque accueillante, présentée comme une libération à la fois pour la personne elle-même et pour ses proches. Natashe Lemos Dekker (2018 : 326) parle d’une « permission de mourir » (« allowing someone to die ») qui serait accordée par les proches aux personnes atteintes de TNCM. Sans toujours assumer toute la portée de ces mots, c’est bien d’une mort attendue, sinon souhaitée, que les différents acteurs nous ont parlé.

Bien qu’aucune question d’entrevue ne concernait spécifiquement la fin de vie ou l’AMM, la majorité des proches et des membres du personnel ont spontanément abordé ces sujets délicats. De façon surprenante, il a été très peu question des différentes options accessibles actuellement pour accompagner ces résidentes vers la mort (cessation de la médication, par exemple). Cette attente, ce souhait de mort, comme une délivrance, ont plutôt mené à une réflexion sur l’AMM. Plusieurs ont partagé sans détour leur perception positive d’une révision des critères afin de permettre un accès à l’AMM — contrôlé, certes — aux personnes atteintes de TNCM majeurs :

[Si j’avais une baguette magique ?] Spontanément, moi, ce serait une loi permettant l’aide médicale à mourir pour ces gens. Oui. […] C’est comme… la mort ne vient pas. Puis on ne veut pas qu’elle arrive, comme société. On retarde, mais à quel prix de la qualité de vie ? 

Infirmière

Laissons-les partir dans la dignité… Qu’est-ce qu’on peut faire pour eux autres, quand ils sont vraiment en phase terminale, qu’on sait qu’il n’y aura pas de retour possible ?

Professionnelle

Nos données rejoignent en ce sens les conclusions de diverses études quant à la position généralement favorable des citoyens canadiens à un accès à l’AMM pour les personnes inaptes (Conseil des académies canadiennes 2018). Au Québec, une étude récente indique que 70 % des répondants sont favorables à la possibilité d’offrir l’AMM à des personnes au « stade terminal » de TNCM, qui présentent « des signes de détresse » et qui ont préalablement indiqué par écrit leur volonté d’obtenir l’AMM (demande anticipée) (Bravo et al. 2019 : 1079).

Offrant une contribution originale, la présente étude permet de recadrer les réflexions entourant l’AMM dans le contexte plus large du long mourir de ces résidentes. Nous reprendrons ici, en soulevant leurs limites et écueils, trois grandes thématiques, trois discours auxquels les répondants ont eu recours pour justifier leur vision favorable d’un accès à l’AMM pour les personnes inaptes atteintes de TNCM au stade avancé : 1) « Elle n’aurait pas voulu cette vie » ; 2) « Ce n’est plus une vie » ; 3) « Les proches sont trop souffrants ».

« Elle n’aurait pas voulu cette vie »

Que l’on renvoie à l’expression informelle de ses volontés ou, phénomène plus récent, à la possibilité de rédiger formellement des directives médicales anticipées, ce discours narratif se démarque par le fait qu’il s’ancre dans les désirs et les valeurs que la personne elle-même a exprimés au cours de sa vie. Le fils de Mme Cloutier, par exemple, indique que sa mère avait côtoyé de grands malades et affirmé qu’elle ne voulait pas elle-même devenir dépendante de son entourage, implorant « le bon Dieu » de « venir la chercher ».

Nous soulèverons ici deux pièges importants. D’abord, une étude de Béatrice Godwin et Hilary Waters (2009) menée auprès de personnes atteintes de TNCM aux stades légers/modérés concernant leurs volontés de fin de vie a démontré que, dans certains cas, il y avait un décalage, un changement entre ce qu’elles avaient pu exprimer plus tôt dans leur vie et ce qu’elles désiraient au moment de l’entrevue. Les auteures posent l’hypothèse que ces personnes, ayant appris à vivre avec la maladie, avaient modifié leur évaluation de ce qui était intolérable pour elles. On peut penser, en effet, que les demandes anticipées d’AMM sont construites autour de « situations de souffrance anticipée, qui peuvent ne pas refléter l’expérience vécue par la personne quand ces circonstances surviennent réellement » (Conseil des académies canadiennes 2018 : 57-58). Dans la mesure où la personne n’est plus capable de s’exprimer sur le sujet, comment savoir si les souhaits exprimés plus tôt dans sa vie reflètent encore sa réalité et sa volonté actuelles ? Après ces années tumultueuses et souvent anxiogènes, peut-on imaginer que ces résidentes aient pu trouver une certaine quiétude ?

Ensuite, cette affirmation masque l’incertitude et la dissension qui caractérisent, nous l’avons vu, cette trajectoire de fin de vie. Si des divergences d’opinions marquées, sinon des conflits, surviennent entre les membres d’une famille ou entre les proches et l’équipe soignante concernant le moment de cesser une médication ou de passer à l’alimentation en purée, la décision du moment d’exécuter la demande anticipée d’AMM risque tout autant, sinon davantage, de s’accompagner de tensions et de confrontations. Il a d’ailleurs été établi que, lorsqu’ils sont confrontés à des scénarios hypothétiques, les proches ne sont pas en mesure de bien évaluer les soins et traitements que voudrait recevoir la personne dans l’éventualité de TNCM sévères, et ce, même si les volontés de la personne ont été discutées préalablement (Bravo et al. 2018). En ce sens, même une légalisation des demandes anticipées d’AMM, que certains suggèrent, ne pourrait régler tous les dilemmes éthiques, cliniques et pratiques entourant l’AMM en contexte d’inaptitude. Les experts mettent plutôt en garde contre la création d’un « fardeau unique » pour les proches et les professionnels, celui d’évaluer si les « situations intolérables » identifiées par la personne rejoignent ou non la réalité vécue à un moment donné (Conseil des académies canadiennes 2018 : 76).

« Ce n’est plus une vie »

Cette deuxième thématique a été abordée, ou insinuée, par la grande majorité des répondants. Il est souvent ardu pour les tiers de déceler une « qualité de vie » décente dans le quotidien de ces résidentes et ils lâchent : « Ce n’est plus une vie » comme une évidence manifeste, comme un fait incontestable. L’aspect éminemment subjectif et interprétatif de la qualité de vie et du confort/de l’inconfort de la personne dans les stades avancés de la maladie, que nos données ont permis de mettre en lumière, se trouve ainsi complètement évacué. On peut se questionner sur ce que cette affirmation dissimule. D’abord, « ce n’est plus une vie » : pourquoi ? Peut-on affirmer que seule la maladie est en cause dans cette perte de qualité de vie ? Peut-on penser, par exemple, que des changements organisationnels dans les CHSLD pourraient améliorer la qualité de vie ? Un meilleur ratio personnel-résidents pourrait-il permettre davantage de contacts sociaux significatifs au quotidien ? Ensuite, « ce n’est plus une vie » : pour qui ? Nos données permettent de prendre la mesure des difficultés et des souffrances vécues par les proches et, dans une moindre mesure, par le personnel. Les extraits suivants montrent comment, inconsciemment, le discours « ce n’est plus une vie pour elle » se confond en réalité avec « ce n’est plus une vie pour nous » et est fortement ancré dans les propres valeurs des tiers :

Là, je trouve que c’est plus une vie pour elle. Bien, pour moi, ce ne serait pas une vie… Mais pour elle aussi, tu sais, comme elle était « peppée », puis tout ça, puis… tu sais, qu’elle magasinait, puis tout ça. Puis aujourd’hui la voir, puis plus rien, c’est… [Émotif.] C’est pas évident…

Fils de Mme Cloutier

Ce n’est pas une vie, là… ce n’est pas intéressant. Ce n’est pas intéressant pour elle, ce n’est pas intéressant pour nous autres… Non. Ça fait deux, trois ans que je dis ça…

Fils de Mme Lambert

Nous ne contestons aucunement la validité de ce discours, qui traversait d’ailleurs presque tous les témoignages recueillis. Dit autrement : à quoi sert de vivre dans les conditions quotidiennes décrites plus haut ? Si poser la question peut paraître légitime, il importe de se rappeler que les principales concernées, les personnes atteintes de TNCM elles-mêmes, ne sont plus en mesure de nous transmettre leur réponse. Dans ce contexte, il apparaît périlleux de normaliser ce discours et de l’accepter d’emblée comme étant représentatif de la réalité de toutes les personnes atteintes de TNCM demeurant dans un CHSLD. À quel point, en effet, ce discours narratif rend-il compte de la perspective de la personne ? Est-il surtout porté par les représentations collectives actuelles concernant les TNCM et les CHSLD, associés d’emblée à la déchéance, à la perte d’identité et à la mort sociale ? Se profile en réalité le risque d’une projection des perceptions et valeurs des différents acteurs, qui projettent « leurs propres peurs et inquiétudes sur la personne atteinte » (Gastmans et De Lepeleire 2010 : 82).

« Les proches sont trop souffrants »

Le troisième discours s’articule autour de la souffrance des proches. Éric Kiledjian (2014 : 7) montre comment celle-ci peut éventuellement « prendre la forme d’un désir de mort sur la personne malade ». Il va sans dire que cette souffrance, bien réelle et très présente dans les témoignages colligés, doit être non seulement reconnue, mais aussi accompagnée, soutenue, apaisée le plus possible. À ce titre, force est de constater que les services offerts aux proches par les CHSLD sont déficients. Aux prises avec des ressources humaines limitées qui leur permettent tout juste de répondre adéquatement aux besoins des résidents, il est difficilement envisageable d’assumer par surcroît des interventions de soutien auprès des proches. Or, à partir du moment où ces proches devraient prendre des décisions entourant l’AMM pour les résidents inaptes et que cette souffrance est mal canalisée ou soulagée, le risque est grand qu’elle soit projetée, même inconsciemment, et affecte l’évaluation de la qualité de vie de la personne atteinte de TNCM. Les témoignages recueillis indiquent également qu’il est difficile pour le personnel d’être témoin de cette souffrance et que cela peut influencer — indûment ? — les soins offerts aux résidents. L’exemple le plus frappant a été partagé par une professionnelle qui relatait une situation vécue auprès d’une famille dans un autre CHSLD où elle travaillait et les démarches éthiques ayant mené à l’arrêt de traitements vitaux (injections d’insuline) et au décès d’une dame atteinte de TNCM sévère. Présenté comme un « succès », ce récit n’a jamais fait mention de la souffrance de cette résidente elle-même, tout le discours étant centré sur la détresse du conjoint, complètement anéanti par la condition de son épouse :

La famille, ils sont TELLEMENT [avec emphase] souffrants de la voir comme ça… « Mais ça n’a pas de bon sens ! C’est un supplice ! C’est trop, on n’est pas capables de supporter ça, ça nous rentre dedans ! » […] C’était épouvantable. […] Si vous voyiez la détresse de cette famille-là, si vous voyiez la détresse des familles qu’on a, nous, constamment… On vit avec cette détresse-là tout le temps…

Professionnelle

Il s’agit donc non pas de nier cette souffrance, mais de prendre conscience de la concordance artificielle qui peut s’établir spontanément entre ce qui est désiré par les proches et ce qui est souhaitable pour la personne atteinte de TNCM. Lorsqu’il est question de la vie et de la mort d’une personne, il importe de rester attentif à cette possibilité, d’autant plus que la perspective de la personne atteinte de TNCM n’est plus accessible alors que celles des proches est exprimée clairement et de façon très émotive, déstabilisante, sinon insupportable.

Conclusion

Le malaise que provoque la réalité de ces résidentes, de ce mourir alternatif qui prend son temps et dans le cadre duquel l’individu semble s’estomper graduellement, traduit un rapport particulier de notre culture individualiste à la vie et à la mort. Dans un tel contexte social, alors que les acteurs en présence sont ambivalents quant à la valeur même de ces vies hors-norme, comment envisager des balises légales permettant un accès à l’AMM pour les personnes inaptes, au même titre que tous les autres citoyens, tout en assurant le plein respect de leurs droits malgré leur grande vulnérabilité ? Les réflexions actuelles entourant un éventuel accès à l’AMM pour les personnes inaptes au Québec doivent s’ancrer dans une prise en compte, dans une compréhension fine des réalités de la fin de vie des personnes atteintes de TNCM sévères, lesquelles demeurent pour la plupart dans un CHSLD. Une compréhension de ce quotidien pauvre en contacts sociaux qui se déroule dans une temporalité plus lente, presque figée ; de cette incertitude constante quant à l’interprétation des besoins de ces résidentes et aux soins à leur prodiguer, incertitude génératrice de multiples occasions de discordances et de conflits ; de cette perte de sens pour les tiers, témoins de cette fin de vie qui s’étiole et semble s’éterniser ; de ce passage dans une zone liminaire entre la vie et la mort, où le statut de « vivant » de ces résidentes devient parfois difficile à cerner, à expliciter, à justifier. C’est en prenant en considération ces réalités particulières à la fin de vie en contexte de TNCM en CHSLD que les différents discours construits par les tiers pour expliquer leur position favorable à l’AMM pour ces résidentes doivent être analysés.

Les réflexions collectives actuelles sur les plans social et éthique, stimulées dans le contexte québécois par l’éventualité d’un accès à l’AMM pour les personnes inaptes ainsi que par les constats alarmants quant à la situation en CHSLD amenés par la pandémie de COVID-19, révèlent un repositionnement, une mouvance des représentations sociales autour de ce mourir en contexte de TNCM majeurs en institution. On constate un intérêt renouvelé de la part de la population et des décideurs pour la fin de vie de ces citoyens âgés vulnérables, laissant présager une opportunité de changements sur les plans légaux et organisationnels. Nous osons espérer que ces changements tiendront compte des réalités particulières de ces résidents et sauront ainsi leur assurer une meilleure qualité de vie.