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Le droit de la consommation québécois connaît une évolution analogue à l’évolution de ce droit dans bien d’autres pays. Lors de son adoption, en 1866, le Code civil du Bas Canada est résolument un code du xixe siècle centré sur la propriété et véhiculant une philosophie fondée sur la liberté de commerce[1]. Dans ce contexte, fort peu d’espace est laissé à l’équilibre et à l’équité dans les contrats. Par exemple, la lésion entre majeurs n’est pas reconnue, même en matière de vente ou en matière de partage successoral, domaines où elle l’était traditionnellement. Le droit ne doit pas intervenir quant à l’équilibre du contrat, celui-ci étant garanti par le consentement des parties et la concurrence du marché. Cependant, cette idéologie, déjà à bien des égards contestable à l’époque, va se révéler de plus en plus décalée avec l’apparition ou l’aggravation de différents phénomènes tels que l’urbanisation et l’industrialisation[2], le développement du crédit à la consommation ou, encore, la prolifération des contrats de masse. Tout cela va intensifier les déséquilibres contractuels et rendre inévitables des modifications au droit des contrats pour assurer une certaine protection en faveur des contractants vulnérables.

Ces mesures vont connaître une éclosion fulgurante à partir des années 60. La première intervention d’envergure est l’adoption, en 1964, d’une loi concernant les contrats de crédit et ayant notamment pour objet de protéger les emprunteurs. Puis le législateur intervient dans des domaines spécifiques, en particulier l’assurance en 1974[3] et le bail résidentiel en 1973 et en 1979[4]. Ces interventions, tout comme la loi de 1964, se font à l’intérieur du Code civil mais, cette fois-ci, dans des secteurs particularisés.

C’est toutefois par la notion de contrat de consommation que le législateur interviendra de la manière la plus significative afin d’instiller une dose de protection dans le droit contractuel québécois. Le législateur adopte la première loi à ce sujet en 1971[5] touchant des secteurs très restreints — essentiellement les contrats impliquant un vendeur itinérant et les contrats de crédit — puis la seconde en 1978, la Loi sur la protection du consommateur[6] toujours en vigueur aujourd’hui. Si cette loi se distingue de celle de 1971 par son domaine d’application plus étendu, elle partage avec celle-ci, le fait de se situer à l’extérieur du Code civil, d’en être autonome et de déterminer elle-même son champ d’application. En ce sens, le droit de la consommation cultive sa spécificité quant au droit commun, situation que nous étudierons dans un premier temps (1). Cependant, depuis l’adoption de cette loi en 1978, la popularité du droit de la consommation et son importance pratique mettent paradoxalement à mal cette spécificité. Les frontières du droit de la consommation deviennent poreuses en raison de l’influence qu’il a eue sur le droit commun. Cela porte à se demander si ces frontières ne devraient pas être levées ou déplacées pour étendre l’effet protecteur du droit de la consommation. C’est ce que nous verrons dans un second temps (2).

1 La spécificité du droit des contrats de consommation

La nature du droit de la consommation divise la doctrine : est-ce un domaine autonome du droit ou une simple discipline spécifique du droit civil ? Il se dégage toutefois un consensus selon lequel le droit de la consommation se distingue par son rôle de protection du consommateur. Cette fonction serait, nous y reviendrons, particulière au consommateur en ce que celui-ci nécessite une protection plus active, voire plus énergique. C’est cette nécessité qui crée la spécificité du droit de la consommation, laquelle spécificité appelle des sources législatives distinctes (1.1) et un domaine d’application limité (1.2).

1.1 La spécificité normative : les sources de réglementation

L’inventaire, même partiel, des sources du droit de la consommation québécois n’est pas chose aisée. Ces sources se trouvent dans des lois spécifiques, d’une part, et dans le Code civil, d’autre part.

1.1.1 Législations spécifiques

Quelle que soit l’étendue attribuée au droit de la consommation (par exemple, le droit des assurances ou encore le louage résidentiel doit-il y figurer ?), le droit québécois compte un grand nombre de lois intéressant ce domaine, tout particulièrement en matière contractuelle. Le professeur Claude Masse a déjà évalué à 225 le nombre de lois ou de règlements canadiens et québécois se rapportant au droit de la consommation[7]. Mentionnons, à titre d’exemples, la Loi sur les agents de voyages[8], la Loi sur les arrangements préalables de services funéraires et de sépulture[9] ou encore la Loi sur le courtage immobilier[10]. Ces lois entendent protéger le consommateur dans des secteurs particuliers qui nécessitent une réglementation accrue. Ainsi, elles prévoient un contrôle administratif d’un secteur d’activité économique donné, autant qu’elles en encadrent les techniques contractuelles tant dans le contenu du contrat qu’en ce qui concerne sa forme ou sa force obligatoire (droit de dédit du client).

Cependant, la principale loi en matière de contrat de consommation demeure la Loi sur la protection du consommateur[11] adoptée en 1978 et dont l’avenir est actuellement discuté. Cette loi s’applique à tout « contrat conclu entre un consommateur et un commerçant dans le cours de son commerce et ayant pour objet un bien ou un service » (art. 2). Elle comporte des aspects pénaux, administratifs (création de l’Office de la protection du consommateur) et, essentiellement, civils. Dans ce dernier cas, cette loi établit un système à double niveau : d’abord une partie générale (art. 8-22), laquelle s’applique à tous les contrats soumis à la loi, sans distinction selon que leur objet porte sur un bien ou un service. C’est dans cette première partie, par exemple, qu’apparaît la sanction de la lésion en faveur du consommateur (art. 8) ; ensuite, cette loi prévoit une réglementation supplémentaire concernant certains contrats spécifiques tels que les garanties (qu’elles figurent dans un contrat de vente, de louage ou de service), les contrats de crédit, les contrats avec un vendeur itinérant, les contrats à distance — dont le lieu de la formation est réputé être à l’adresse du consommateur (art. 54.2) — ou encore les contrats de réparation d’automobile ou de motocyclette. L’article 261 L.p.c. prévoit que la Loi sur la protection du consommateur, dans tous ses aspects, est impérative, tandis que l’article 262 précise que, à moins de mention dans la loi, le consommateur ne peut renoncer à un droit que lui confère celle-ci. Il s’agit d’un ordre public de protection, sanctionné par la nullité relative[12].

1.1.2 Le Code civil du Québec

Le Québec a adopté en 1994 un nouveau code civil[13], remplaçant celui qui avait été adopté en 1866. Ce code renouvelé laisse une place non négligeable à la protection du contractant vulnérable et du consommateur en particulier, entendu dans un sens large. Il le fait dans des secteurs particuliers comme en matière de bail résidentiel ou d’achat d’un immeuble à usage d’habitation. Ces deux secteurs ne sont pas assujettis à la Loi sur la protection du consommateur et bénéficient donc d’une réglementation protectrice à l’intérieur du Code civil. Ils peuvent toutefois être rattachés au droit de la consommation dans un sens large.

Mais aussi, et surtout, le livre sur les obligations en général comprend la reconnaissance du contrat de consommation. Celui-ci est défini à l’article 1384 C.c.Q. et est soumis à un régime particulier, aux articles 1432, 1435 à 1437 (sur lesquels nous reviendrons), et à certaines autres règles plus ponctuelles, dont plusieurs en matière de droit international privé[14]. Cette reconnaissance est le résultat d’une vive controverse, qui a eu cours lors des travaux de réforme du Code civil, sur la place que devait occuper le droit de la consommation dans celui-ci. Dans un projet antérieur du Code, on proposait d’inclure la Loi sur la protection du consommateur dans un titre spécial de celui-ci. La doctrine s’y étant opposée, cette proposition a été retirée. Toutefois, pour affirmer le lien entre le Code civil et la Loi sur la protection du consommateur et parce que le code ne pouvait ignorer l’existence du droit de la consommation, il a été décidé d’y inclure des dispositions concernant le contrat de consommation. Ce résultat explique pourquoi il y a aujourd’hui un double corpus de droit de la consommation, ce qui est, à notre sens, la pire solution possible puisque, comme nous le verrons maintenant, le domaine d’application du contrat de consommation diverge entre la Loi sur la protection du consommateur et le Code civil.

1.2 La spécificité matérielle : le domaine d’application

Évidemment, la spécificité du droit de la consommation impose la détermination de l’espace que celui-ci doit occuper. Premier constat, la législation, que cela soit le Code civil ou la Loi sur la protection du consommateur, s’attache essentiellement au contrat de consommation et protège le consommateur partie à celui-ci. L’existence d’un tel contrat est donc, en général, requise. Deux exceptions peuvent toutefois être relevées où la relation de consommation existe même en l’absence de contrat.

C’est d’abord le cas des pratiques de commerce interdites[15]. La violation de l’une de ces dispositions peut donner lieu à une sanction pénale sans qu’il y ait de contrat. Il peut même, dans certains cas, y avoir sanction civile. Tel est le cas lorsque le commerçant annonce un produit qu’il ne possède pas en quantité suffisante afin de répondre à la demande du public, à moins d’indiquer cette quantité dans la publicité. Lorsqu’il viole ce devoir, le commerçant doit vendre, au prix annoncé, un produit de même nature et d’un prix coûtant égal ou supérieur (art. 231 L.p.c.). La relation de consommation existe également à l’extérieur de tout contrat en matière de responsabilité du vendeur ou du fabricant pour le défaut de sécurité, y compris le défaut d’information, d’un bien à l’égard du tiers utilisateur. Ce dernier, aux termes tant de l’article 1468 C.c.Q. que de l’article 53, al. 2 L.p.c., peut intenter une action alors qu’il n’est pas partie à un contrat. Mis à part ces cas particuliers, les dispositions impliquent l’existence d’un contrat de consommation. Celui-ci est défini à l’article 2 L.p.c. et à l’article 1384 C.c.Q.

1.2.1 Le contrat de consommation aux termes de la Loi sur la protection du consommateur

Aux termes de la Loi sur la protection du consommateur, le contrat de consommation se définit à la fois par l’identité des parties et par son objet. Pour ce qui est des parties, il doit unir un consommateur et un commerçant (le droit québécois ne connaît pas la notion de professionnel usitée en Europe) dans le cours des activités de son commerce. La notion de consommateur est elle-même définie à l’article 1 (e) L.p.c. comme « une personne physique, sauf un commerçant qui se procure un bien ou un service pour les fins de son commerce [l’italique est de nous] ». La Loi sur la protection du consommateur ne protège donc pas le commerçant contractant aux fins de son commerce, même s’il agit à l’extérieur de son champ de spécialisation. Elle écarte ainsi un arrêt de la Cour d’appel[16] qui, en vertu de l’ancienne loi, avait conclu qu’un commerçant qui faisait l’acquisition d’une caisse enregistreuse pour son commerce devait bénéficier de la protection de la loi. Quant à la notion de commerçant, la Loi sur la protection du consommateur n’en donne pas de définition. Il faut donc se référer à la théorie de la commercialité[17], avec ce qu’elle peut avoir de passéiste, qui écarte traditionnellement les agriculteurs, les artisans et les professionnels. La loi étend toutefois la notion de commerçant en soumettant à celle-ci les coopératives, le gouvernement et les organismes publics ainsi que les corporations à but non lucratif lorsqu’elles accomplissent des actes commerciaux[18].

En ce qui a trait à l’objet du contrat, celui-ci doit porter sur un bien ou un service, sans distinction. La notion de bien est définie à l’article 1 (d) comme étant, en principe, un bien meuble. La Loi sur la protection du consommateur ne s’applique que de manière exceptionnelle aux immeubles. C’est le cas, par exemple, en ce qui concerne les pratiques de commerce interdites (art. 6.1). Cette exclusion des biens immobiliers se voulait à l’origine temporaire en ce qu’il était projeté d’adopter une loi propre aux biens immobiliers[19], mais cette dernière n’est jamais venue. Aujourd’hui, le Code civil, aux articles 1785 à 1794, protège la personne physique qui acquiert d’un constructeur ou d’un promoteur un immeuble à usage d’habitation bâti ou à bâtir.

1.2.2 Le contrat de consommation aux termes du Code civil du Québec

Nous avons vu que, à l’issue du débat sur la question de savoir si la Loi sur la protection du consommateur devait être incluse dans le Code civil, il avait été décidé de maintenir la première à l’extérieur du second, mais de définir dans ce dernier le contrat de consommation (art. 1384 C.c.Q.)[20]. Si cette définition reprend plusieurs des éléments de la définition de la Loi sur la protection du consommateur, elle s’en éloigne sur certains points. Ainsi, tout comme dans la Loi sur la protection du consommateur, le consommateur se limite, dans le Code civil, à la personne physique et doit agir à des fins personnelles, familiales ou domestiques. Le législateur écarte donc, ici aussi, de la protection le professionnel qui agit hors de sa spécialité.

Par contre, la définition du Code civil s’éloigne de celle de la Loi sur la protection du consommateur en ce qu’elle ne se limite pas aux biens meubles et parce qu’elle ne fait plus référence à la notion de commerçant mais plutôt à celle d’entreprise. Cette notion, définie à l’article 1525 C.c.Q., est plus englobante et se caractérise par « l’exercice, par une ou plusieurs personnes, d’une activité économique organisée qu’elle soit ou non à caractère commercial, consistant dans la production ou la réalisation de biens, leur administration ou leur aliénation, ou dans la prestation de services ». À noter que cette définition, plus en phase avec la réalité économique moderne, n’exclut pas d’emblée les professionnels, les artisans et les agriculteurs. Elle ne repose pas, non plus, sur l’exigence d’une volonté spéculative[21]. L’activité doit toutefois s’inscrire dans la chaîne de production ou de consommation, ce qui écarte ainsi la production pour des besoins personnels[22]. Quant au caractère « organisé » de l’activité économique, la jurisprudence interprète ce critère plutôt largement. C’est ainsi qu’une personne seule, avec un plan d’affaires et une organisation matérielle minimale, peut être qualifiée d’« exploitant d’une entreprise ». Cela a été le cas pour un chauffeur de taxi[23], pour le propriétaire d’un immeuble à logements[24] ou encore pour un courtier en assurances[25].

À ce stade, la définition du contrat de consommation du Code civil semble donc significativement plus englobante que celle de la Loi sur la protection du consommateur. Cependant, un doute subsiste quant à cette éventuelle extension. En effet, l’article 1384 C.c.Q. précise que « [l]e contrat de consommation est le contrat dont le champ d’application est délimité par les lois relatives à la protection du consommateur [l’italique est de nous] ». Si ce renvoi s’explique historiquement par la volonté de créer un lien entre la Loi sur la protection du consommateur et le Code civil, il est actuellement l’objet de critiques et ne va pas sans présenter certaines difficultés. D’abord, quelles sont ces lois relatives à la protection du consommateur ? S’il est clair que cela ne se limite pas à la Loi sur la protection du consommateur, les limites de cette catégorie de lois sont floues. Un chapitre du Code civil, par exemple celui sur la vente d’immeuble à usage d’habitation, est-il touché par ce renvoi ? Certains le pensent, tandis que d’autres le nient[26]. Surtout, l’incertitude subsiste quant au rôle de ce renvoi. N’est-il, comme certains le croient[27], qu’une simple référence de style ou constitue-t-il une condition normative à part entière ? La question n’est pas sans importance puisque l’extension éventuelle du domaine du contrat de consommation pourrait être freinée s’il était nécessaire qu’un tel contrat soit déjà réglementé par une loi relative à la protection du consommateur. Ainsi, qu’en est-il, par exemple, du bail résidentiel ou du contrat d’assurance, qui ne sont pas soumis à la Loi sur la protection du consommateur et pour lesquels la doctrine tend à penser que les chapitres du Code civil ne constituent pas une loi relative à la protection du consommateur ? Si le renvoi est normatif, ces contrats ne pourront pas être qualifiés de contrat de consommation. À l’inverse, ils le pourront si ce renvoi est perçu comme une référence de style et que les autres conditions sont satisfaites.

La situation actuelle est donc sujette à critique tant parce que le domaine du contrat de consommation aux termes du Code civil est incertain que parce qu’il est possible pour un même contrat d’être qualifié de consommation aux termes du Code civil et de ne pas l’être aux termes de la Loi sur la protection du consommateur. Ce résultat est en réalité le pire possible, car il est risqué, à terme, de voir se développer de manière divergente deux corpus de droit de la consommation. Cela a peut-être été le cas en décembre 2006 lorsque le législateur a modifié la Loi sur la protection du consommateur afin d’interdire les clauses d’arbitrage présentes dans les contrats soumis à cette loi[28]. Ces clauses demeurent toutefois valides dans les contrats de consommation aux termes du Code civil. L’éclatement de l’unité de la notion du contrat de consommation risque de mettre à mal la spécificité de celui-ci et peut, à terme, mener à la dilution du droit contractuel de la consommation.

2 La dilution du droit des contrats de consommation

Nous entendons par dilution, non la disparition de la notion de contrat de consommation, mais son absorption par des notions ou des catégories autres. Ce phénomène peut être observé par l’influence qu’a eue le contrat de la consommation sur le droit commun (2.1) et par l’émergence de la notion de contrat d’adhésion, catégorie plus englobante mais ayant pour objet, elle aussi, la protection de la partie vulnérable (2.2).

2.1 L’insertion du droit des contrats de consommation dans le droit commun

Nous l’avons vu, le droit de la consommation québécois s’est édifié historiquement en marge du Code civil, par la Loi sur la protection du consommateur[29] principalement et, autour d’elle, par d’autres lois plus ponctuelles. Cet état de choses est régulièrement remis en question. Il l’a été lors de l’adoption du Code civil où a été discutée l’intégration de la Loi sur la protection du consommateur dans ce dernier. Il est présentement remis à l’ordre du jour alors que la question de la réforme du droit de la consommation et, éventuellement, la question de l’adoption d’un code de la consommation sont d’actualité.

Lors du processus de réforme du Code civil, il avait été proposé d’inclure l’ensemble des aspects civils de la Loi sur la protection du consommateur à l’intérieur du Code civil dans un titre troisième du livre des obligations, à la suite du titre sur les contrats nommés[30]. Cette proposition a été l’objet d’un important débat sur le lieu où devrait figurer la réglementation du contrat de consommation et, plus globalement, sur le lien qui unit le droit commun au droit spécifique du contrat de consommation[31]. Certains soutenaient, en faveur de l’intégration du droit de la consommation, que cela allait permettre de marquer les complémentarités, voire la dépendance, du droit de la consommation par rapport au droit commun. Aussi, d’autres soulignaient qu’il s’agirait là d’une reconnaissance de l’importance sociale de cette nouvelle discipline de même que la prise en considération du fait que le Code civil est, tout comme la Loi sur la protection du consommateur, maintenant fondé sur la protection des contractants les plus faibles[32]. Cela transparaît, par exemple, dans le fait que certaines règles protectrices existent indépendamment de la qualité des parties (c’est le cas de la sanction de la lésion en matière de contrat de prêt d’argent (art. 2332 C.c.Q.)).

À l’inverse, a été avancée à l’encontre de l’intégration du droit de la consommation dans le Code civil, essentiellement, la préservation de l’intégrité respective du Code et du droit de la consommation. On soulignait d’abord que la nature spécialisée, technique, détaillée et éphémère du droit de la consommation s’oppose à la nature pérenne et intemporelle du Code civil. Ensuite, on a fait valoir que l’intégration du droit de la consommation dans le Code civil risquerait à terme de ralentir son évolution et d’amoindrir son effet protecteur. Il aurait aussi pour effet de provoquer le morcellement de la discipline entre le Code civil, d’une part, et les lois particulières, d’autre part, lesquelles seraient maintenues à tout le moins pour les aspects pénal et administratif. La préservation de la Loi sur la protection du consommateur en un tout, sorte de minicode de la consommation, serait donc la façon la plus efficace de préserver le dynamisme et l’accessibilité de ce droit.

Nous avons vu que ce débat s’est conclu par le maintien de la Loi sur la protection du consommateur en marge du Code civil. Ce dernier a toutefois tenu compte de l’existence du droit de la consommation, et ce, en posant d’abord une définition et un régime, distincts de la loi, du contrat de consommation. Mais aussi, le Code civil a subi, à plusieurs égards, l’influence du droit de la consommation en important certaines solutions que celui-ci avait su élaborer en marge du droit commun. Sans aucunement prétendre à l’exhaustivité, nous citons l’article 1730 C.c.Q., lequel reconnaît à l’acquéreur un recours en vice caché contre le fabricant, ce qui étend à toute vente la règle de l’article 53 L.p.c. En outre, l’article 1785, en matière de contrat de vente d’immeuble à usage d’habitation dont l’acquéreur est une personne physique, reconnaît à l’acquéreur une faculté de dédit, ce qui reprend ainsi une technique présente à plusieurs reprises dans la loi. Mentionnons également la définition de la lésion à l’article 1406 C.c.Q., l’article 1468 C.c.Q. en matière de responsabilité à l’égard d’un tiers utilisateur d’un produit dangereux[33] ou, en matière d’hypothèque (art. 2778 C.c.Q.) et de vente à tempérament (art. 1749 C.c.Q.), l’exigence de soumettre la reprise en paiement d’un bien à l’autorisation du tribunal lorsque la partie en défaut a acquitté au moins la moitié de l’obligation totale[34].

Nous pourrions également mettre en évidence le rôle du droit de la consommation dans la « revivification[35] » du droit commun des contrats, en lui inspirant des techniques nouvelles, en faisant ressortir que la théorie générale n’était pas condamnée à l’immobilisme. En droit québécois, ce renouveau, connu en droit français sous l’angle du solidarisme contractuel source de l’obligation de transparence, de l’obligation de cohérence ou encore du principe de proportionnalité, s’est profilé par ce qui a été appelé la « nouvelle morale contractuelle » fondée sur la bonne foi (qui, absente de l’ancien Code civil, est maintenant prévue, entre autres, à l’article 1375 C.c.Q.), et originellement sur l’équité, qui a été à la base de la jurisprudence sur l’obligation d’information ou de loyauté[36]. Cependant, au-delà de ces différentes influences, le Code civil amorce peut-être un changement de paradigme au sujet de la protection des contractants vulnérables qui, à terme, remplacera peut-être, en partie à tout le moins, la protection du consommateur. Il s’agit de la reconnaissance du contrat d’adhésion.

2.2 L’émergence d’une spécificité élargie : le contrat d’adhésion

Le Code civil du Bas Canada, antérieur aux célèbres écrits de Saleilles, ne comportait évidemment rien à propos du contrat d’adhésion. C’est donc la jurisprudence et la doctrine qui vont entamer la prise en considération de ce phénomène. Ainsi, les tribunaux vont, surtout en matière d’assurance, interpréter le doute à l’encontre du stipulant et en faveur de l’adhérent[37]. Puis le législateur, en 1977, utilise pour la première fois la notion de contrat d’adhésion à l’article 55 de la Charte de la langue française[38], lequel exige que les contrats d’adhésion soient rédigés en français. Cependant, c’est lors de l’adoption du Code civil que le législateur reconnaît de manière générale cette notion en définissant le contrat d’adhésion comme tel et en lui donnant un régime propre.

2.2.1 La définition du contrat d’adhésion

L’article 1379 C.c.Q. définit le contrat d’adhésion comme celui dont « les stipulations essentielles qu’il comporte ont été imposées par l’une des parties ou rédigées par elle, pour son compte ou suivant ses instructions, et qu’elles ne pouvaient être librement discutées. Tout contrat qui n’est pas d’adhésion est de gré à gré. » Cette définition se caractérise d’abord par son laconisme. En effet, si un grand nombre de critères ont pu être proposés par la doctrine pour décrire le contrat d’adhésion — Carbonnier a même déjà écrit que c’était là une notion indéfinissable[39]—, le Code civil n’en retient que deux : l’imposition ou la rédaction unilatérale des clauses essentielles et l’impossibilité de les négocier.

En ce qui concerne d’abord la notion de stipulation essentielle, celle-ci ne peut être réduite qu’aux seuls éléments objectivement essentiels du contrat, tels le prix et l’objet vendu en matière de vente, lesquels éléments essentiels sont d’ailleurs, bien souvent, les seuls qui sont négociés, voire déterminés, par l’adhérent. Il convient donc de donner un sens large à ces stipulations essentielles[40] et de prendre en considération le sort de tout l’appareil normatif d’un contrat (ce que le droit européen nomme les « conditions générales »), par exemple, les clauses d’exclusion de garantie, de responsabilité, de défaut ou, en matière d’assurance, d’exclusion de risque. Ce sont ces clauses, en tant qu’ensemble, qui devront être examinées, le Code civil ayant retenu la notion de contrat d’adhésion plutôt que celle de clause d’adhésion. En réalité, le critère se rapproche plus de l’essentiel des stipulations que des stipulations essentielles.

En ce qui a trait ensuite à l’imposition ou à la rédaction unilatérale de ces clauses, elles s’infèrent des circonstances et, si elles ne posent généralement pas de grandes difficultés, deux remarques s’imposent. Premièrement, il est essentiel de rappeler que l’utilisation d’une forme standard de contrat n’implique pas à elle seule qu’il s’agit d’un contrat d’adhésion : l’utilisation d’un contrat type n’équivaut pas à un contrat d’adhésion s’il a pu faire l’objet de négociation. Deuxièmement, une difficulté oppose la doctrine et la jurisprudence concernant la qualification d’un contrat dont le contenu a été établi impérativement par une autorité administrative qui n’est pas partie au contrat[41], par exemple, les polices types d’assurance automobile rédigées par l’Autorité des marchés financiers. Certains soutiennent, en interprétant littéralement l’article 1379 C.c.Q., que de tels contrats ne peuvent être qualifiés d’adhésion puisque leur contenu n’a pas été imposé à une partie par l’autre, mais bien aux deux parties par un tiers[42]. D’autres[43], inspirés par la volonté de protection du législateur, mettent en évidence le fait que le contrat n’a pu être négocié par la partie vulnérable. Nous souscrivons plutôt à cette dernière opinion. S’il est vrai que, bien souvent, le contrat imposé par l’autorité administrative a initialement pour objet de protéger une des parties au contrat, ce qui rend ainsi le régime du contrat d’adhésion moins utile, il reste que, lorsque celui-ci peut être requis pour protéger la partie vulnérable au contrat, il n’y a pas de raison que cette partie ne bénéficie pas de la protection du Code civil. Cela est d’autant plus vrai que, bien souvent, ces contrats imposés ont été rédigés à la suite de représentations d’un secteur économique donné, voire par les membres de ce secteur, c’est-à-dire des représentants de la partie dominante au contrat.

Enfin, quant à l’impossibilité de négociation des stipulations essentielles, celle-ci doit se déterminer à partir d’un examen de l’ensemble des circonstances propres à chaque espèce[44], telles l’identité des parties, l’existence de solutions de rechange possibles au contrat ou la rapidité avec laquelle le contrat a été conclu. Il ne faut pas écarter, a priori, la qualification d’un contrat d’adhésion au simple motif qu’il intervient entre deux personnes physiques ou, inversement, entre deux personnes morales, pas plus qu’il ne faut limiter le contrat d’adhésion aux seules situations monopolistiques ou quasi monopolistiques. Toutefois, nous sommes d’avis, avec d’autres[45], que l’inégalité des parties est à la base du contrat d’adhésion. C’est pourquoi nous ne pouvons souscrire à la position de la Cour d’appel qui rejette le critère de l’inégalité des parties afin d’opter pour un critère subjectif basé sur la volonté — ou le refus — d’une partie de se soumettre au jeu des négociations[46]. Ce critère subjectif, s’il peut dans certains cas être révélateur (par exemple, lorsque le représentant d’une des parties n’a aucun pouvoir de négociation), ne peut jouer seul dans tous les cas. Le refus de négocier doit en effet provenir, dans les circonstances, d’une position de dominance de cette partie et non simplement d’une volonté de sa part de ne contracter qu’à ses conditions.

Il demeure difficile de proposer une synthèse de la jurisprudence, nombreuse, sur le contrat d’adhésion, tant les tribunaux ont tendance à peu motiver leurs conclusions. Nous pouvons avancer cependant qu’ils interprètent plutôt largement ces critères. De plus, si le fardeau de preuve repose en principe sur celui qui prétend que le contrat est d’adhésion[47], il reste que les tribunaux considèrent d’emblée certains contrats comme des contrats d’adhésion, sous réserve d’une preuve contraire. C’est le cas des contrats d’assurance, de franchise ou de crédit-bail ou encore du contrat individuel de travail[48].

2.2.2 Le régime du contrat d’adhésion

Le régime du contrat d’adhésion reprend l’essentiel de celui du contrat de consommation du Code civil. C’est d’abord, à l’article 1432 C.c.Q., la codification de la jurisprudence développée en vertu de l’ancien code civil selon laquelle, en cas de doute, le contrat s’interprète en faveur de l’adhérent. Cette disposition, reconnaissant un rôle correcteur à l’interprétation, ne viendra qu’après que l’on aura épuisé toutes les autres règles interprétatives classiques, vouées à la recherche de l’intention commune.

Ce sont les articles 1435 à 1437 C.c.Q. qui constituent toutefois l’essentiel du régime. L’article 1435 C.c.Q. prévoit qu’en matière de contrat d’adhésion la clause externe au document contractuel est nulle si elle n’a pas été expressément portée à la connaissance de l’adhérent, à moins que le stipulant ne puisse prouver que l’adhérent en avait connaissance au moment de la formation du contrat. L’article 1436, quant à lui, pose la nullité de toute clause illisible ou incompréhensible pour une personne raisonnable si l’adhérent en subit un préjudice, à moins que le stipulant n’ait donné de l’information appropriée sur ces clauses. Cet article s’inspire, en étendant sa portée, de l’article 25 L.p.c., lequel exige que le contrat de consommation soumis à cette loi soit « clairement et lisiblement rédigé ». Tout comme l’article 25 L.p.c., l’article 1436 C.c.Q., pourtant fort porteur, ne fait pas l’objet d’une jurisprudence importante.

Cependant, c’est surtout l’article 1437 C.c.Q. sur les clauses abusives qui retient l’attention des tribunaux, d’autant que, par sa généralité, il va beaucoup plus loin que la Loi sur la protection du consommateur qui ne contient aucune disposition générale concernant les clauses abusives. L’article 1437 C.c.Q. définit la clause abusive comme celle qui « désavantage le consommateur ou l’adhérent d’une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l’encontre de la bonne foi ; est abusive notamment, la clause si éloignée des obligations essentielles qui découlent des règles gouvernant habituellement le contrat qu’elle dénature celui-ci ». Aucune liste indicative ou impérative ne suit cette définition, ce qui laisse aux tribunaux un large pouvoir d’appréciation. Si la jurisprudence est relativement nombreuse depuis l’adoption du Code civil, les tribunaux ont été plutôt sobres dans son application. Souvent les clauses condamnées aux termes de l’article 1437 C.c.Q. sont des clauses qui étaient déjà soumises à un contrôle des tribunaux sous l’empire de l’ancien Code, ou encore ce sont des clauses réglementées ailleurs dans le Code civil[49].

La Cour d’appel a reconnu que l’évaluation du caractère abusif d’une clause doit se faire en fonction du contrat dans son ensemble[50] et principalement lors de la formation du contrat pour éviter de confondre la clause abusive avec l’imprévision[51]. Toujours pour la Cour d’appel[52], l’évaluation du caractère abusif est en même temps objective (le terme « déraisonnable » est employé) et subjective (le terme « excessive » se réfère à la fois à un critère objectif et subjectif). Dans ce dernier aspect, tant les circonstances générales[53] que la situation particulière de l’adhérent pourront être prises en considération.

Un débat qui reste toutefois entier est celui du lien qui unit la notion de clause abusive à la notion de lésion. Certains sont d’avis que l’article 1437 C.c.Q. constitue une exception au principe de la non-sanction de la lésion entre majeurs[54]. Ces auteurs invoquent, entre autres, l’unité d’esprit des deux notions et le fait que l’article 1437 C.c.Q. ne pose aucune limite en précisant que « toute clause qui désavantage » peut être annulée ou réduite. L’argument est simple : la clause fixant les prestations des parties — dont le prix — est une clause, donc elle peut être sanctionnée aux termes de cet article. D’autres[55], invoquant essentiellement des arguments historiques et s’autorisant des origines européennes et du sens donné à cette notion, sont d’avis que l’article 1437 C.c.Q. ne peut porter que sur des clauses, importantes certes, mais périphériques par rapport au contrat. Pour eux, nul ne peut, par l’article 1437 C.c.Q., toucher à l’équilibre économique des prestations. Malgré que certains soutiennent que la Cour d’appel se serait récemment prononcée en faveur d’une interprétation large de l’article 1437 C.c.Q.[56], il nous semble que la jurisprudence n’a pas encore tranché définitivement le débat. Nous pouvons toutefois constater que, à l’exception de quelques décisions[57], les jugements rendus en vertu de l’article 1437 C.c.Q. portent sur des clauses accessoires du contrat et non sur l’équilibre des prestations.

La clause qui est qualifiée d’abusive par le tribunal peut, au choix de la victime, être annulée ou réduite. Si la clause est annulée, le contrat peut subsister, à moins qu’il ne « doive être considéré comme un tout indivisible » (art. 1438 C.c.Q.). Cette nullité est relative[58]. Quant à la réduction, les tribunaux ne se privent pas de l’utiliser lorsqu’elle est possible, par exemple dans la réduction d’une clause de défaut[59] ou d’un taux d’intérêt[60]. Les tribunaux réduisent alors la clause de manière significative en ramenant le contrat à un juste équilibre. Un tribunal s’est également autorisé de l’article 1437 C.c.Q. pour suspendre l’application d’une clause interdisant à la locataire d’avoir un animal domestique dans son appartement jusqu’à la fin d’une zoothérapie[61]. Bien que la suspension ne fasse pas partie explicitement des sanctions de l’article 1437 C.c.Q., elle peut être une manière efficace d’assurer un allègement de la clause contestée.

Le régime applicable au contrat d’adhésion reprend l’essentiel de celui du contrat de consommation du Code civil. L’utilité de sa reconnaissance apparaît donc surtout dans l’extension de cette protection à un plus grand nombre de contrats, car, si un contrat de consommation est généralement un contrat d’adhésion, l’inverse n’est pas vrai, le contrat d’adhésion pouvant éventuellement impliquer deux personnes morales. Le critère de protection se résume alors à l’existence d’un déséquilibre entre les parties et à la présence d’une vulnérabilité. Ce seul critère permet donc une plus grande souplesse dans la protection. À terme, il est possible de se demander s’il ne se profile pas en droit québécois un déplacement de la protection, aujourd’hui liée à la qualité d’une partie en tant que consommateur, vers une protection liée à la seule existence d’une vulnérabilité.

Conclusion

Le droit québécois de la consommation semble de nos jours à la croisée des chemins. Une réflexion s’est amorcée depuis quelques années sur l’éventuelle réforme de la loi de 1978, laquelle a pris un sérieux coup de vieux, tant du fait de l’évolution de la théorie générale du contrat que de la réforme du Code civil. Ainsi, le domaine d’application de la loi est artificiellement plus étroit, par le maintien de la vieille théorie de la commercialité, que celui du Code civil, basé sur la notion d’entreprise. Également, la partie générale de la loi, à l’exclusion de la reconnaissance de la lésion, est, à bien des égards, lacunaire devant ce qu’est devenu le droit commun. C’est le cas, par exemple, des dispositions sur les clauses illisibles, incompréhensibles et abusives, qui sont plus généreuses et englobantes dans le Code civil que dans la Loi sur la protection du consommateur. Enfin, la loi est désuète à l’égard de nouvelles réalités contractuelles, que cela soit des formes de crédit novatrices ou encore la réalité du commerce électronique, bien que sur ce point une timide réforme ait eu lieu en décembre 2006[62].

Si les observateurs s’entendent pour soutenir le besoin d’une réforme du droit des contrats du consommateur, la façon d’y parvenir suscite la controverse. Un mouvement naît actuellement pour revendiquer l’adoption d’un code de la consommation. Il réclame non pas une codification à droit constant, à l’image de celle qui a été retenue par la France en 1993[63], mais une réelle codification, comme celle que proposait le rapport Calais-Auloy en 1990[64]. Au soutien de cette proposition, on avance qu’un tel code permettrait de mettre de l’ordre dans le droit de la consommation qui est aujourd’hui éparpillé et éclaté. Il assurerait également une plus grande accessibilité au droit de la consommation, de même qu’il serait la reconnaissance que cette discipline n’est plus « un droit d’exception, marginal tant dans son contenu que dans sa forme[65] ». À l’inverse, nous avons récemment écrit qu’il était peut-être maintenant temps d’intégrer la protection du consommateur à l’intérieur du Code civil, solution rejetée en 1994, et d’étendre cette protection à l’ensemble des contractants vulnérables[66]. Il s’agirait en fait de compléter l’oeuvre que le Code civil a amorcée d’abord en instillant dans le droit commun plusieurs formes de protection de ces vulnérabilités à l’extérieur du seul consommateur mais aussi, et surtout, en forgeant un régime au contrat d’adhésion. Car, comme le faisait remarquer le professeur Larroumet[67], si le législateur entend protéger le consommateur, ce n’est pas en tant que consommateur, mais en raison de sa vulnérabilité, laquelle ne dépend pas uniquement de la qualité du sujet. La migration de la protection serait en quelque sorte l’aboutissement logique du droit de la consommation, puisque, comme certains l’ont relevé, le droit de la consommation est une réponse, dans un créneau plus limité, aux problèmes soulevés par le contrat d’adhésion et à l’impossibilité pour la doctrine et la jurisprudence de les pallier[68]. Ainsi, le débat de 1994 refait surface, mais, cette fois-ci, il s’agite non pas autour du Code civil, mais autour du droit de la consommation. N’est-ce pas déjà là une marque de reconnaissance ?