Chronique bibliographique

Pierre Lerat, Vocabulaire du juriste débutant. Décrypter le langage juridique, Paris, Ellipses, 2007, 256 p., ISBN 978-2-7298-3389-3.[Notice]

  • Nicolas Desurmont

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  • Nicolas Desurmont
    Chercheur indépendant

À la différence du Lexique des termes juridiques, de Raymond Guillien et Jean Vincent, réédition d’un ouvrage qui a su s’intégrer dans le cursus des étudiants, le Vocabulaire du juriste débutant, du grammairien Pierre Lerat, constitue une première édition. Aussi croyons-nous pertinent de mentionner que le vocabulaire de Lerat n’est pas le fait d’un spécialiste du droit mais d’un simple vocabuliste passionné par le sujet. La construction des articles, bien qu’elle soit conforme à la technique lexicographique, n’en demeure pas moins plus axée sur les dimensions linguistiques du vocabulaire que sur ses dimensions encyclopédiques. Cela se vérifie, par exemple, dans la rubrique de la langue d’origine ou les repères chronologiques de la langue française (ancien français, classique, moderne, contemporain), mais aussi par la présence de la catégorie grammaticale, l’ajout de collocations et la présence de dérivés morpholexicaux. L’ouvrage rassemble une nomenclature de 2 000 mots qui permettra au juriste en formation ou au jeune juriste de comprendre les textes juridiques ou de rédiger un texte en droit présentant à cet égard le sens des mots au moyen de définitions simplifiées, des notes sur les formes et les usages, un mode d’emploi pour la construction grammaticale, etc. Dans cet ouvrage, certaines entrées surprennent. C’est le cas d’amovible. Cette entrée renvoie à inamovible, laquelle donne comme exemple un juge inamovible, c’est-à-dire qui ne peut être déplacé sans son acceptation. Quelle est la valeur terminologique de ce lexème ? Il s’agit pour nous d’un mot de la langue générale qui n’est pas d’emploi exclusif au droit ou comportant une fréquence d’emploi plus importante dans ce domaine. Par ailleurs, le concept d’anthropométrie concernant la reconnaissance physique et juridique des individus y est consigné. Des sigles parfois obscurs comme ASSEDIC, sont expliqués : Association d’emploi dans l’industrie et le commerce. L’ouvrage contient des mots devenus rares comme basoche, des mots jugés comme des anglicismes au Québec (cancellation) mais appartenant au fonds d’archaïsmes du français. À la lettre « C », le lecteur s’étonnera de trouver l’entrée correctionnel sans lire cassation. Certains syntagmes latins sont consignés, comme habeas corpus (droit à un jugement équitable), in solidum (pour la totalité), jus soli (droit fondé sur le lieu de naissance). La présence du lemme intelligence, critiquable dans un vocabulaire juridique, ne nous semble pas correspondre à l’usage réel dans la mesure où « les relations suspectes avec un pays étranger (trahison ou espionnage) » relèvent plus de l’activité d’espionnage que du concept intelligence qui est en fait celle du renseignement. En outre, l’espionnage n’est pas forcément affaire de trahison. Les activités de droit civil, de droit pénal, de droit international et de droit commercial sont particulièrement bien décrites par les principaux concepts. Le regard de Lerat, spécialiste du langage juridique et des langues de spécialités, est forcément beaucoup plus axé sur la syntagmatologie et plaira tout particulièrement aux étudiants soucieux de rédaction juridique de même qu’aux avocats cherchant une nomenclature exhaustive. Sans être un dictionnaire culturel, l’ouvrage de Lerat est orienté incontestablement vers la culture française.

Parties annexes